45 Fonctions de plusieurs variables : dérivés partielles, diérentielle. Fonctions composées. Fonctions de classe C 1. Exemples Les espaces vectoriels considérés sont réels, non réduits au vecteur nul et de dimension nie ou innie. Si E et F sont deux espaces vectoriels normés, on note Lc (E, F ) l'espace vectoriel des applications linéaires continues de E dans F, muni de la norme usuelle : ∥u (x)∥ = sup ∥u (x)∥ ∥x∥ x∈E\{0} ∥x∥=1 ∀u ∈ Lc (E, F ) , ∥u∥ = sup En toute rigueur, on devrait noter ∥·∥E la norme choisie sur E et ∥·∥F la norme choisie sur F. Mais, dans la mesure où il n'y a pas d'ambiguïté, on utilisera la même notation ∥·∥ pour les normes sur E et F. On rappelle que Lc (E, F ) est un espace de Banach si E et F le sont. Dans le cas où E et F sont de dimension nie, toute application linéaire de E dans F est continue, on a donc Lc (E, F ) = L (E, F ) . 45.1 Fonctions diérentiables Dénition 45.1 On dit qu'une fonction f dénie sur un ouvert non vide O de E et à valeurs dans F est diérentiable en a ∈ O s'il existe une application linéaire continue u ∈ Lc (E, F ) et un voisinage ouvert V de 0 dans E tels que : ∀h ∈ V, f (a + h) = f (a) + u (h) + o (∥h∥) (45.1) Dire que f est diérentiable en a, signie donc qu'il existe une application linéaire continue u ∈ Lc (E, F ) et une fonction ε dénie sur une boule ouverte B (0, η) de centre 0 et de rayon η > 0 telles que : lim ε (h) = 0 h→0 et : ∀h ∈ B (0, η) , f (a + h) = f (a) + u (h) + ∥h∥ ε (h) 1131 Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ... 1132 ce qui équivaut encore à : ∥f (a + h) − f (a) − u (h)∥ =0 h→0 ∥h∥ (45.2) lim Remarque 45.1 Le rayon η > 0 est choisi assez petit, de sorte que B (a, η) ⊂ O. Remarque 45.2 Si on remplace les normes sur E et F par des normes équivalentes, une fonction f diérentiable en a l'est toujours avec la même valeur pour la diérentielle. En eet, on a des encadrements du type : γ ∥f (a + h) − f (a) − u (h)∥ ∥f (a + h) − f (a) − u (h)∥′ β ∥f (a + h) − f (a) − u (h)∥ ≤ ≤ ′ δ ∥h∥ α ∥h∥ ∥h∥ où les réels α, β, γ, δ sont strictement positifs. En dimension nie, toutes les normes sont équivalentes et on peut alors utiliser n'importe quelle norme. Théorème 45.1 Soient O un ouvert non vide de E et f a ∈ O, elle est alors continue en ce point. : O → F. Si f est diérentiable en Démonstration. Résulte de : f (x) − f (a) = u (x − a) + ∥x − a∥ ε (x − a) → 0 x→a sachant que u est continue. Théorème 45.2 Soient O un ouvert non vide de E et f : O → F. Si f est diérentiable en a ∈ O, l'application linéaire continue dénie par (45.1) est alors uniquement déterminée. Démonstration. Supposons qu'il existe deux telles applications u, v dans Lc (E, F ) . De la dénition, on déduit que : ∥(v − u) (h)∥ =0 h→0 ∥h∥ lim donc, pour tout x ∈ E \ {0} , on a : 0 = lim t→0 ∥(v − u) (x)∥ ∥(v − u) (tx)∥ = ∥tx∥ ∥x∥ ce qui équivaut à (v − u) (x) = 0, soit à u (x) = v (x) . Cette dernière égalité étant réalisée aussi pour x = 0, on en déduit que u = v. Avec les hypothèses et notations du théorème précédent, on peut noter df (a) l'application linéaire continue de E dans F dénie par (45.1) et on dit que c'est la diérentielle de f en a. Remarque 45.3 Si E est un espace euclidien de dimension n ≥ 1 (ou de manière plus générale un espace de Hilbert) et F = R, pour f : O → R diérentiable en a ∈ O, df (a) est alors une forme linéaire continue sur E et il existe un unique vecteur gf (a) ∈ E tel que df (a) (x) = ⟨gf (a) | x⟩ pour tout x ∈ E. On dit que gf (a) est le vecteur gradient de f en a. Dans le cas où E = R, la notion de diérentiabilité coïncide avec celle de dérivabilité. Rappelons la dénition de cette notion. Fonctions diérentiables 1133 Dénition 45.2 Soient O un ouvert non vide de R et f : O → F. On dit que f est dérivable 1 en a ∈ O si la fonction τa : x 7→ (f (x) − f (a)) dénie sur O \ {a} admet une limite en x−a a. On note alors f ′ (a) cette limite. Théorème 45.3 Soient O un ouvert non vide de R et f : O → F. La fonction f est dérivable en a ∈ O si, et seulement si, elle est diérentiable en ce point. Dans ce cas, on a df (a) (h) = f ′ (a) h pour tout h ∈ R (et en particulier f ′ (a) = df (a) (1)). Démonstration. Si f est dérivable en a, on a alors pour tout x ∈ O \ {a} : f (x) = f (a) + (x − a) τa (x) = f (a) + (x − a) f ′ (a) + (x − a) (τa (x) − f ′ (a)) égalité encore valable en x = a si on pose τa (a) = f ′ (a) . Comme lim τa (x) = f ′ (a) , cela x→a s'écrit : f (x) = f (a) + (x − a) f ′ (a) + o (x − a) et signie que f est diérentiable en a de diérentielle : df (a) : h ∈ R 7→ f ′ (a) h (cette application est bien linéaire et continue). Réciproquement si f est diérentiable en a, on a pour x ∈ V \ {a} , où V est un voisinage ouvert de a dans O : f (x) = f (a) + df (a) (x − a) + o (x − a) donc : 1 1 (f (x) − f (a)) = df (a) (x − a) + o (1) x−a x−a = df (a) (1) + o (1) → df (a) (1) x→a ce qui signie que f est dérivable en a de dérivée df (a) (1) . Exercice 45.1 Soient O un ouvert non vide de E et f : O → F. Montrer que f est diérentiable en a ∈ O si, et seulement si, f est continue en a et il existe u ∈ L (E, F ) telle que f (a + h) = f (a) + u (h) + o (∥h∥) . Solution 45.1 Pour E, F de dimension nie, il n'y a rien à montrer. Pour la condition nécessaire c'est vu. Pour la réciproque, avec u (h) = f (a + h) − f (a) + o (∥h∥) et la continuité de f en a, on déduit que lim u (h) = 0, ce qui signie que l'application linéaire u est continue en 0, donc sur E. h→0 L'application f est donc diérentiable en a avec df (a) = u. Dénition 45.3 Soient O un ouvert non vide de E et f tiable sur O, si elle est diérentiable en tout point de O. : O → F. On dit que f est diéren- Si f : O → F est diérentiable sur O, l'application : df : O → Lc (E, F ) x 7→ df (x) est la diérentielle de f. Dans le cas où cette application df est continue (Lc (E, F ) est un espace normé), on dit que f est de classe C 1 sur O. Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ... 1134 Exemple 45.1 Une application constante tout x ∈ O. f : O → F est de classe C 1 avec df (x) = 0 pour Le résultat de l'exemple précédent peut être utilisé pour résoudre l'exercice 45.13. Exemple 45.2 Une application linéaire continue f : E → F est de classe C 1 sur E avec df (x) = f pour tout x ∈ E. En eet, pour x, h dans E, on a : f (x + h) = f (x) + f (h) = f (x) + f (h) + ∥h∥ ε (h) avec ε = 0 et f linéaire continue, donc df (x) = f. Pour E, F de dimension nie, une application linéaire est automatiquement continue, donc de classe C 1 sur E. Exercice 45.2 Soient n ≥ 2, E1 , · · · , En des espaces normés et E = n ∏ Ek normé par : k=1 ∀x = (x1 , · · · , xn ) ∈ E, ∥x∥ = max ∥xk ∥ 1≤k≤n Montrer que toute application n-linéaire continue f de E dans F est de classe C 1 sur E avec, pour tous x, h dans E : df (x) (h) = n ∑ f (x1 , · · · , xk−1 , hk , xk+1 , · · · , xn ) k=1 Solution 45.2 Pour x, h dans E, tenant compte de la n-linéarité de f, on a : f (x + h) = f (x1 + h1 , · · · , xn + hn ) n ∑ f (x1 , · · · , xk−1 , hk , xk+1 , · · · , xn ) + R (x, h) = f (x1 , · · · , xn ) + k=1 où R (x, h) est somme nie de vecteurs de la forme f (y1 , · · · , yn ) avec au moins deux indices j ̸= k tels que (yj , yk ) = (hj , hk ) . Comme f est n-linéaire continue, il existe une constante M ≥ 0 telle que : ∀y ∈ E, ∥f (y)∥ ≤ M n ∏ ∥yk ∥ k=1 Dans le cas où il existe au moins deux indices j ̸= k tels que (yj , yk ) = (hj , hk ) , on a : ∥f (y)∥ ≤ M ∥hk ∥ ∥hk ∥ n ∏ ∥yk ∥ ≤ M ∥h∥ i=1 i∈{j,k} / 2 n ∏ ∥yk ∥ i=1 i∈{j,k} / En conséquence, il existe une constante αx telle que pour ∥h∥ ≤ 1, on ait : ∥R (x, h)∥ ≤ αx ∥h∥2 On a donc : f (x + h) = f (x1 , · · · , xn ) + n ∑ f (x1 , · · · , xk−1 , hk , xk+1 , · · · , xn ) + ∥h∥ o (h) k=1 ce qui signie que f est diérentiable en x et nous donne la diérentielle. L'application n-linéaire f étant continue, il en est de même des applications linéaires h 7→ f (x1 , · · · , xk−1 , hk , xk+1 , · · · , xn ) , donc df (x) est linéaire continue. Fonctions diérentiables 1135 On déduit de l'exercice précédent que l'application : det : Mn (R) → R qui est n-linéaire (alternée) et continue est de classe C 1 sur Mn (R) avec : d (det) (X) (H) = n ∑ det (X1 , · · · , Xk−1 , Hk , Xk+1 , · · · , Xn ) k=1 en désignant pour toute matrice X ∈ Mn (R) par Xk sa colonne k (voir l'exercice 45.10 pour une autre expression de cette diérentielle). Exercice 45.3 Soit (E, ⟨· | ·⟩) un espace préhilbertien. Montrer que l'application f : x 7→ ∥x∥ = √ ⟨x | x⟩ est diérentiable sur E \ {0} avec, pour tout x ∈ E \ {0} et tout h ∈ E : df (x) (h) = ⟨x | h⟩ ∥x∥ Solution 45.3 Pour x, h dans E, on a : ∥x + h∥2 = ∥x∥2 + 2 ⟨x | h⟩ + ∥h∥2 soit : ∥x + h∥2 − ∥x∥2 = (∥x + h∥ − ∥x∥) (∥x + h∥ + ∥x∥) = 2 ⟨x | h⟩ + ∥h∥2 et pour x ̸= 0, ∥h∥ < ∥x∥ (de sorte que x + h ̸= 0), on a : 2 ⟨x | h⟩ ∥h∥2 ∥x + h∥ − ∥x∥ = + ∥x + h∥ + ∥x∥ ∥x + h∥ + ∥x∥ 2 ∥x∥ ⟨x | h⟩ ∥h∥2 = + ∥x∥ ∥x + h∥ + ∥x∥ ∥x + h∥ + ∥x∥ ce qui nous donne : ⟨x | h⟩ ⟨x | h⟩ ∥x + h∥ − ∥x∥ − = ∥x∥ ∥x∥ ( ) ∥h∥2 2 ∥x∥ −1 + ∥x + h∥ + ∥x∥ ∥x + h∥ + ∥x∥ ⟨x | h⟩ ∥x∥ − ∥x + h∥ ∥h∥2 = + ∥x∥ ∥x + h∥ + ∥x∥ ∥x + h∥ + ∥x∥ et en utilisant l'inégalité de Cauchy-Schwarz : |⟨x | h⟩| |∥x∥ − ∥x + h∥| ⟨x | h⟩ ∥h∥2 ∥x + h∥ − ∥x∥ − ≤ + ∥x∥ ∥x∥ ∥x + h∥ + ∥x∥ ∥x + h∥ + ∥x∥ ∥h∥2 |∥x∥ − ∥x + h∥| + ≤ ∥h∥ ∥x + h∥ + ∥x∥ ∥x + h∥ + ∥x∥ |∥x∥ − ∥x + h∥| + ∥h∥ ≤ ∥h∥ ∥x + h∥ + ∥x∥ Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ... 1136 On a donc : 1 ⟨x | h⟩ |∥x∥ − ∥x + h∥| + ∥h∥ → 0 ∥x + h∥ − ∥x∥ − ≤ h→0 ∥h∥ ∥x∥ ∥x + h∥ + ∥x∥ ce qui signie que f est diérentiable en x avec : df (x) : h 7→ Pour tout h ∈ E, on a : |df (x) (h)| = ⟨x | h⟩ ∥x∥ |⟨x | h⟩| ≤ ∥h∥ ∥x∥ donc la forme linéaire df (x) est bien continue avec ∥df (x)∥ ≤ 1. Et comme |df (x) (x)| = ∥x∥ , on déduit que ∥df (x)∥ = 1. En utilisation le théorème sur la diérentiabilité d'une composée de deux fonctions, on peut résoudre l'exercice précédent de façon plus simple (voir l'exercice ?? Exercice 45.4 Montrer qu'une norme n'est jamais diérentiable en 0. Solution 45.4 Soit alors : f : x 7→ ∥x∥ . Si f est diérentiable en 0, en notant u = df (0) , on a f (h) − f (0) − u (h) ∥h∥ − u (h) = lim =0 h→0 h→0 ∥h∥ ∥h∥ lim u (h) = 1. On ne peut donc avoir u = 0 et il existe x ∈ E tel que h→0 ∥h∥ ce qui revient à dire que lim ∥x∥ = 1 et u (x) ̸= 0. On a donc : t u (tx) = lim u (x) = 1 t→0 |t| t→0 ∥tx∥ lim t 1 = , ce qui est impossible. t→0 |t| u (x) soit lim Pour ce qui concerne les opérations sur les fonctions diérentiables [resp. de classe C 1 ] on a les résultats suivants. Théorème 45.4 Soient O un ouvert non vide de E et f, g deux fonctions de O dans F. Si ces fonctions sont diérentiables en a ∈ O, il en est alors de même de λf + g pour tout réel λ et on a : d (λf + g) (a) = λdf (a) + dg (a) Démonstration. Il existe deux fonctions ε1 , ε2 dénies sur une boule ouverte B (0, η) de centre 0 et de rayon η > 0 telle que : lim εk (h) = 0 (k = 1, 2) h→0 et : { ∀h ∈ B (0, η) , f (a + h) = f (a) + df (a) (h) + ∥h∥ ε1 (h) g (a + h) = g (a) + dg (a) (h) + ∥h∥ ε2 (h) Fonctions diérentiables 1137 ce qui nous donne, pour h ∈ B (0, η) : (λf + g) (a + h) = (λf + g) (a) + (λdf (a) + dg (a)) (h) + ∥h∥ ε (h) avec : ε (h) = λε1 (h) + ε2 (h) → 0 h→0 ce qui nous donne le résultat annoncé. Théorème 45.5 Soient O un ouvert non vide de E et f, g deux fonctions de O dans R (ou plus généralement dans une algèbre normée F ). Si ces fonctions sont diérentiables en a ∈ O, il en est alors de même de f · g et on a : ∀h ∈ E, d (f · g) (a) (h) = f (a) · dg (a) (h) + df (a) (h) · g (a) Démonstration. En utilisant les notations de la démonstration précédente, on a pour h ∈ B (0, η) : (f · g) (a + h) = f (a + h) · g (a + h) = (f (a) + df (a) (h) + ∥h∥ ε1 (h)) (g (a) + dg (a) (h) + ∥h∥ ε2 (h)) = (f · g) (a) + f (a) dg (a) (h) + df (a) (h) g (a) + ∥h∥ ε (h) avec : 1 df (a) (h) dg (a) (h) + df (a) (h) ε2 (h) ∥h∥ + ε1 (h) (g (a) + dg (a) (h) + ∥h∥ ε2 (h)) ε (h) = f (a) ε2 (h) + Les applications linéaires df (a) et dg (a) étant continues et F étant une algèbre normée, on a : ∥df (a) (h) dg (a) (h)∥ ≤ ∥df (a)∥ ∥dg (a)∥ ∥h∥2 = o (∥h∥) ce qui nous donne lim ε (h) = 0 et le résultat annoncé. h→0 On déduit des théorèmes précédents qu'une combinaison linéaire ou un produit (quand il a un sens) de fonctions de classe C 1 est de classe C 1 . Exemple 45.3 Si E est de dimension nie égale à n ≥ 1 et B = (ei )1≤i≤n est une base n ∑ de E, alors toute fonction qui associe à x = xi ei ∈ E une expression polynomiale réelle i=1 f (x1 , · · · , xn ) est de classe C 1 sur E puisque les projections dxi : x 7→ xi sont des applications linéaires continues. Exemple 45.4 L'expression du déterminant det (X) = ∑ ε (σ) σ∈Sn n ∏ xi,σ(i) nous montre que i=1 l'application det est de classe C 1 sur Mn (R) puisqu'elle est polynomiale. Théorème 45.6 Soient O un ouvert non vide de E, O′ un ouvert non vide de F, f : O → O′ , G un espace normé et g : O′ → G. Si f est diérentiable en a ∈ O et g diérentiable en b = f (a) ∈ O′ , la fonction g ◦ f est alors diérentiable en a avec : d (g ◦ f ) (a) = dg (f (a)) ◦ df (a) Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ... 1138 Démonstration. L'application linéaire dg (f (a)) ◦ df (a) est linéaire continue comme composée d'applications linéaires continues. Pour η > 0 assez petit et h, k dans B (0, η) , on a : f (a + h) = f (a) + df (a) (h) + ∥h∥ ε1 (h) g (b + k) = g (b) + dg (b) (k) + ∥k∥ ε2 (k) avec lim ε1 (h) = 0 et lim ε2 (k) = 0. h→0 k→0 Avec : ∥df (a) (h) + ∥h∥ ε1 (h)∥ ≤ ∥h∥ (∥df (a)∥ + ∥ε1 (h)∥) → 0 h→0 on déduit qu'il existe η1 ∈ ]0, η[ tel que : ∀h ∈ B (0, η1 ) , ∥df (a) (h) + ∥h∥ ε1 (h)∥ < η On a alors, pour tout h ∈ B (0, η1 ) : g ◦ f (a + h) = g (f (a) + df (a) (h) + ∥h∥ ε1 (h)) = g (b) + dg (b) (df (a) (h)) + ∥h∥ dg (b) (ε1 (h)) + ∥df (a) (h) + ∥h∥ ε1 (h)∥ ε2 (df (a) (h) + ∥h∥ ε1 (h)) = g (b) + dg (b) (df (a) (h)) + ∥h∥ ε3 (h) en posant ε3 (0) = 0 et pour h ∈ B (0, η1 ) \ {0} : ε3 (h) = dg (b) (ε1 (h)) + ∥df (a) (h) + ∥h∥ ε1 (h)∥ ε2 (df (a) (h) + ∥h∥ ε1 (h)) ∥h∥ On a : lim dg (b) (ε1 (h)) = 0 h→0 puisque dg (b) est continue et lim ε1 (h) = 0 : h→0 lim ε2 (df (a) (h) + ∥h∥ ε1 (h)) = 0 h→0 puisque df (a) est continue et lim ε2 (k) = 0 et : k→0 ∥df (a) (h) + ∥h∥ ε1 (h)∥ ≤ ∥h∥ (∥df (a)∥ + ∥ε1 (h)∥) Il en résulte que lim ε3 (h) = 0, ce qui nous donne le résultat annoncé. h→0 On peut écrire plus rapidement, en exploitant le fait que df (a) et dg (f (a)) sont linéaires continues : g ◦ f (a + h) = g (f (a) + df (a) (h) + o (∥h∥)) = g (f (a)) + dg (f (a)) (df (a) (h) + o (∥h∥)) + o (∥h∥) = g (f (a)) + dg (f (a)) (df (a) (h)) + o (∥h∥) Corollaire 45.1 Soient I un intervalle réel non réduit à un point, O un ouvert non vide de E, f : I → O et g : O → F. Si f est dérivable en a ∈ I et g diérentiable en b = f (a) , la fonction g ◦ f : I → F est alors dérivable en a avec : (g ◦ f )′ (a) = dg (f (a)) (f ′ (a)) Fonctions diérentiables 1139 Démonstration. Si f est dérivable en a, elle est alors diérentiable en ce point et pour g diérentiable en f (a) , la composée g ◦ f est diérentiable, donc dérivable en a, avec : (g ◦ f )′ (a) = d (g ◦ f ) (a) (1) = dg (f (a)) ◦ df (a) (1) = dg (f (a)) (df (a) (1)) = dg (f (a)) (f ′ (a)) Exercice 45.5 Soit (E, ⟨· | ·⟩) un espace préhilbertien. 1. Montrer que l'application g : x 7→ ∥x∥2 = ⟨x | x⟩ est diérentiable sur E \ {0} avec, pour tous x ∈ E \ {0} et tout h ∈ E : dg (x) (h) = 2 ⟨x | h⟩ 2. En déduire que l'application f : x 7→ ∥x∥ est diérentiable sur E \ {0} avec, pour tous x ∈ E \ {0} et tout h ∈ E : df (x) (h) = ⟨x | h⟩ ∥x∥ Solution 45.5 1. Pour x, h dans E, on a : ∥x + h∥2 = ∥x∥2 + 2 ⟨x | h⟩ + ∥h∥2 ce qui prouve que g est diérentiable sur E \ {0} avec, pour tout x ∈ E \ {0} et tout h∈E : √ dg (x) (h) = 2 ⟨x | h⟩ 2. Il en résulte que f = g est diérentiable sur E \ {0} comme composée f = φ ◦ g, où √ +,∗ φ : t ∈ R 7→ t et on a, pour tout x ∈ E \ {0} : df (x) = dφ (g (x)) ◦ dg (x) 1 avec dφ (t) = φ′ (t) = √ , donc, pour tout h ∈ E : 2 t 1 ⟨x | h⟩ df (x) (h) = √ dg (x) (h) = ∥x∥ 2 g (x) Le théorème de composition des applications diérentiables nous permet de montrer le résultat suivant pour F = Rn . Théorème 45.7 Soient O un ouvert non vide de E et f : x ∈ O 7→ f (x) = (f1 (x) , · · · , fn (x)) ∈ Rn . La fonction f est diérentiable en a ∈ O si, et seulement si, chaque fonction fi : O → R est diérentiable en a. Dans ce cas, on a : ∀h ∈ E, df (x) (h) = (df1 (x) , · · · , dfn (x)) Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ... 1140 45.2 Dérivée suivant un vecteur, dérivées partielles Soient E, F deux espaces normés, O un ouvert non vide de E et f : O → F. Étant donnés a ∈ O, v ∈ E \ {0} et η > 0 tel que B (a, η) = {x ∈ E | ∥x − a∥ < η} ⊂ O (O est ouvert), on leur associe la fonction : ] [ η η φa,v : t ∈ − , 7→ f (a + tv) ∥v∥ ∥v∥ ] [ η η (on a ∥(a + tv) − a∥ = |t| ∥v∥ < η pour t ∈ − , ). ∥v∥ ∥v∥ Dénition 45.4 On dit que f admet une dérivée partielle en a suivant la direction dénie par le vecteur v (ou suivant le vecteur v ), si la fonction φa,v est dérivable en 0. On note alors : 1 1 (φa,v (t) − φa,v (0)) = lim (f (a + tv) − f (a)) t→0 t t→0 t fv′ (a) = φ′a,v (0) = lim Théorème 45.8 Si f est diérentiable en a, elle admet alors une dérivée partielle en a suivant tout vecteur v ∈ E \ {0} et cette dérivée partielle est donnée par : fv′ (a) = df (a) (v) Démonstration. Pour t ∈ R∗ voisin de 0, on a : ( ) |t| f (a + tv) − f (a) = df (a) (tv) + ∥tv∥ ε (tv) = t df (a) (v) + ∥v∥ ε (tv) t |t| avec lim ε (tv) = 0, ce qui nous donne, compte tenu de = 1 : t→0 t lim t→0 1 (f (a + tv) − f (a)) = df (a) (v) t Remarque 45.4 La réciproque du théorème précédent est fausse. Une fonction peut admettre des dérivées partielles suivant toutes les directions sans être diérentiable ni même continue (alors que pour les fonctions d'une variable réelle, la dérivabilité entraîne la continuité). Exercice 45.6 Montrer que la fonction : f: R2 → R (x, y) xy 2 si (x, y) ̸= (0, 0) 7 → − x2 + y 2 0 si (x, y) = (0, 0) est continue en (0, 0) , admet une dérivée partielle suivant toute direction en (0, 0) et n'est pas diérentiable en ce point. Dérivée suivant un vecteur, dérivées partielles 1141 Solution 45.6 Pour (x, y) ̸= (0, 0) , on a |xy| ≤ |f (x, y)| ≤ |y| 2 x2 + y 2 et : 2 → 0 = f (0, 0) (x,y)→(0,0) donc f est continue en (0, 0) . Pour tout vecteur v = (α, β) dans R2 \ {(0, 0)} et tout réel t ∈ R∗ , on a : f (tα, tβ) − f (0, 0) αβ 2 = 2 t α + β2 αβ 2 . α2 + β 2 Si f était diérentiable en (0, 0) , on aurait fv′ (0, 0) = df (0, 0) (v) et l'application v 7→ fv′ (0, 0) = αβ 2 serait linéaire, ce qui n'est pas. Donc f n'est pas diérentiable en (0, 0) . α2 + β 2 donc f admet une dérivée partielle suivant v en (0, 0) donnée par fv′ (0, 0) = Exercice 45.7 Montrer que la fonction : f: R2 → R { (x, y) 7−→ e x (x2 + y 2 ) si x ̸= 0 0 si x = 0 y admet une dérivée partielle suivant toute direction en (0, 0) et n'est pas continue en ce point. Solution 45.7 Pour tout vecteur v = (α, β) dans R2 avec α ̸= 0 et tout réel t ∈ R∗ , on a : ) β ( f (tα, tβ) − f (0, 0) = te α α2 + β 2 → 0 t→0 t et pour tout vecteur v = (0, β) dans R2 avec β ̸= 0 et tout réel t ∈ R∗ , on a : f (0, tβ) − f (0, 0) =0 → 0 t→0 t La fonction f admet donc une dérivée partielle suivant toute direction en (0, 0) , cette dérivée étant nulle. Comme : (2 ) (2 ) 1 2 f t ,t = et t t +1 → +∞ t→0+ la fonction f n'est pas continue en (0, 0) . Dans le cas particulier où E = Rn , en désignant par (ei )1≤i≤n sa base canonique, les dérivées suivant les vecteurs de base ei , quand elles existent, sont appelées dérivées partielles. Précisément, on donne la dénition suivante. Dénition 45.5 Soient O un ouvert non vide de Rn , f : O → F, a un point dans O et i un entier compris entre 1 et n. On dit que f admet une dérivées partielle par rapport à la variable ∂f (a) xi si elle admet une dérivée partielle en a suivant le vecteur de base ei . On note alors ∂xi cette dérivée partielle. Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ... 1142 On a donc, en cas d'existence de la dérivée partielle : ∂f 1 (a) = fe′i (a) = lim (f (a + tei ) − f (a)) t→0 t ∂xi ce qui revient à dire que ∂f (a) est la dérivée en ai de la fonction : ∂xi xi 7→ f (a1 , · · · , ai−1 , xi , ai+1 , · · · , an ) qui est dénie sur un voisinage ouvert de ai (on xe les aj pour j ̸= i et on dérive par rapport à xi ). Si la dérivée partielle ∂f ∂f (x) est dénie en tout point de O, l'application : x ∈ O 7→ ∂xi ∂xi ∂f (x) est la i-ème dérivée partielle de f. ∂xi Théorème 45.9 Soient O un ouvert non vide de Rn , f : O → F et a un point dans O. Si f est diérentiable en a, elle admet alors des dérivées partielles en a par rapport à chacune des variables xi (1 ≤ i ≤ n) et on a : ∀h ∈ R , df (a) (h) = n n ∑ i=1 Démonstration. On a : hi ∂f (a) ∂xi ∂f (a) = fe′ i (a) = df (a) (ei ) ∂xi n ∑ et pour tout h = hi ei , on a : i=1 df (a) (h) = n ∑ hi df (a) (ei ) = i=1 n ∑ i=1 hi ∂f (a) ∂xi Dans le cas particulier où F = R, en notant (dxi )1≤i≤n la base duale de la base canonique (ei )1≤i≤n (dxi est la forme linéaire dénie sur R par dxi (x) = xi pour tout x = n n ∑ xk ek ), le k=1 théorème précédent se traduit par : n ∑ ∂f ∀h ∈ R , df (a) (h) = (a) dxi (h) ∂xi i=1 n ou encore par l'égalité : df (a) = n ∑ ∂f (a) dxi ∂x i i=1 dans le dual de Rn . Dénition 45.6 Soient O un ouvert non vide de Rn et f : O → R une fonction diérentiable. On dit qu'un point a ∈ O est régulier si df (a) ̸= 0 et on dit que c'est un point critique si df (a) = 0. Dérivée suivant un vecteur, dérivées partielles 1143 On a vu que si f est diérentiable sur un ouvert O de Rn , elle est alors continue et admet des dérivées partielles suivant toute direction en tout point de O, la réciproque étant fausse. Exercice 45.8 Montrer que la fonction : f : R2 (x, y) → 7−→ R { xy si (x, y) ̸= (0, 0) + y2 0 si (x, y) = (0, 0) x2 admet une dérivée partielle par rapport à x et y en (0, 0) et n'est pas diérentiable en ce point. Solution 45.8 Avec : f (x, 0) − f (0, 0) f (0, y) − f (0, 0) = =0 x y pour x ̸= 0 et y ̸= 0, on déduit que ∂f ∂f (0, 0) = (0, 0) = 0 et avec : ∂x ∂y f (x, λx) = λ λ → 2 1 + λ x→0 1 + λ2 pour tout réel λ, on déduit que f n'est pas continue en (0, 0) et en conséquence, elle n'est pas diérentiable en ce point. On a quand même le résultat important suivant. Théorème 45.10 Soient O un ouvert de Rn et f : O → F admettant des dérivées partielles par rapport à toutes les variables en tout point de O. Si ces dérivées partielles sont continues en un point a de O, f est alors diérentiable en a. Démonstration. On se place dans le cas d'une fonction de deux variables à valeurs réelles et on note (x, y) les variables. En supposant que ∂f ∂f , existent en tout point de O et qu'elles ∂x ∂y sont continues en (a, b) , il s'agit de montrer, en notant : h = x − a, k = y − b, p = que : ∂f ∂f (a, b) , q = (a, b) ∂x ∂y f (x, y) = f (a, b) + ph + qk + o (|h| + |k|) Pour ce faire on écrit que : f (x, y) − f (a, b) = f (x, y) − f (x, b) + f (x, b) − f (a, b) et en utilisant le théorème des accroissements nis, on a : ∂f (x, cx,y ) f (x, y) − f (x, b) = (y − b) ∂y f (x, b) − f (a, b) = (x − a) ∂f (d , b) x ∂x Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ... 1144 avec cx,y compris entre y et b et dx compris entre a et x, de sorte que : ( ) ∂f ∂f f (x, y) − f (a, b) − ph − qk = h (dx , b) − (a, b) ∂x ∂x ( ) ∂f ∂f +k (x, cx,y ) − (a, b) ∂y ∂y Avec la continuité des dérivées partielles en (a, b) , on déduit que pour tout réel ε > 0 il existe un ∂f réel η > 0 tel que les conditions |u − a| < η et |v − b| < η entraînent (u, v) − ∂f (a, b) < ε, ∂x ∂x ∂f ∂f ∂y (u, v) − ∂y (a, b) < ε. On déduit alors que pour |x − a| < η, |y − b| < η on a : |f (x, y) − f (a, b) − ph − qk| < (|h| + |k|) ε, c'est-à-dire le résultat souhaité. Remarque 45.5 Du théorème précédent, on déduit que si f admet des dérivées partielles sur O qui sont continues en a, alors f est continue en a. La seule existence des dérivées partielles n'entraîne par la continuité en a comme le montre l'exemple de la fonction dénie sur R2 par : { xy si (x, y) ̸= (0, 0) 2 x + y2 f (x, y) = 0 si (x, y) = (0, 0) Corollaire 45.2 Soient O un ouvert de Rn et f : O → F admettant des dérivées partielles par rapport à toutes les variables en tout point de O. La fonction f est de classe C 1 sur O si, ∂f et seulement si, toutes les dérivées partielles sont continues sur O. ∂xi Exercice 45.9 Soit φ ∈ C 1 (R, R) . 1. Montrer que l'application : f: R2 → R φ (y) − φ (x) si x ̸= y 7−→ y−x φ′ (x) si x = y (x, y) est continue. 2. Montrer que si φ est deux fois dérivable en a, la fonction f est alors diérentiable en (a, a) . Solution 45.9 1. Si φ ∈ C 1 (R, R) , on peut alors écrire, pour tous x, y dans R : ∫ y φ (y) − φ (x) = ∫ ′ φ (u) du = (y − x) x 1 φ′ (x + t (y − x)) dt 0 et pour x ̸= y, on a : φ (y) − φ (x) = f (x, y) = y−x ∫ 0 1 φ′ (x + t (y − x)) dt Dérivée suivant un vecteur, dérivées partielles 1145 ∫ Pour y = x, on a aussi f (x, x) = φ (x) = 1 ′ 0 φ′ (x) dt. On a donc : ∫ 1 ∀ (x, y) ∈ R , f (x, y) = 2 φ′ (x + t (y − x)) dt 0 La fonction (x, y, t) 7→ φ (x + t (y − x)) étant continue sur R2 × [0, 1] et l'intégration se faisant sur un segment, on en déduit que f est continue sur R2 . 2. Pour tout (h, k) ∈ R2 , on a : ′ ∫ 1 f (a + h, a + k) − f (a, a) = φ′ (a + h + t (k − h)) − φ′ (a) dt 0 Comme φ est dérivable en a, il existe une fonction δ : R → R telle que : ′ ∀z ∈ R, φ′ (z) − φ′ (a) = (z − a) (φ′′ (a) + δ (z)) et lim δ (z) = 0, ce qui nous donne pour tout t ∈ [0, 1] : z→a φ′ (a + h + t (k − h)) − φ′ (a) = (h + t (k − h)) (φ′′ (a) + δ (a + h + t (k − h))) et : ( ) ∫ 1 k−h f (a + h, a + k) − f (a, a) = φ (a) h + + (h + t (k − h)) δ (a + h + t (k − h)) dt 2 0 φ′′ (a) = (h + k) + R (h, k) 2 ′′ avec : ∫ |R (h, k)| = ((1 − t) h + tk) δ (a + h + t (k − h)) dt 0 ∫ 1 ≤ (|h| + |k|) |δ (a + (1 − t) h + tk)| dt 1 0 Comme lim δ (z) = 0, pour tout réel ε > 0, il existe un réel η > 0 tel que : z→a |u| < η ⇒ |δ (a + u)| < ε donc pour ∥(h, k)∥1 = |h| + |k| < η, on a : |(1 − t) h + tk| ≤ ∥(h, k)∥1 < η et : ∫ 1 |δ (a + (1 − t) h + tk)| dt ≤ ε 0 On a donc ainsi montré que : φ′′ (a) (h + k) + o (∥(h, k)∥1 ) 2 ce qui signie que f est diérentiable en (a, a) de diérentielle : f (a + h, a + k) − f (a, a) = φ′′ (a) φ′′ (a) h+ k df (a, h) : (h, k) 7→ 2 2 et en conséquence : ∂f ∂f φ′′ (a) (a, a) = (a, a) = ∂x ∂y 2 2 Dans le cas où φ ∈ C (R, R) , la fonction f est de classe C 1 sur R2 . Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ... 1146 Exercice 45.10 Soit f : X ∈ Mn (R) 7→ det (X) . Cette application étant polynomiale, elle est de classe C ∞ . Pour toute matrice X ∈ Mn (R) , on désigne par C (X) la comatrice de X. Montrer que, pour tous X, H dans Mn (R) , on a : ( ) ( ) df (X) (H) = Tr H · t C (X) = Tr t C (X) · H Solution 45.10 Comme f est de classe C ∞ sur Mn (R) , elle est diérentiable et : df (X) (H) = ∑ ∂f (X) hij x ij 1≤i,j≤n De l'identité X · t C (X) = det (X) In , en notant C (X) = ((cij (X)))1≤i,j≤n , on déduit que, pour tout i compris entre 1 et n, on a : f (X) = det (X) = n ∑ xik cik (X) k=1 et comme les cofacteurs d'indice (i, k) , cik (X) = (−1)i+k det (Xi,k ) , où Xik ∈ Mn−1 (R) est la matrice extraite de X en supprimant la ligne i et la colonne k ne dépendent pas de xij , on en déduit que : ∂f (X) = cij (X) xij et : df (X) (H) = ∑ cij (X) hij = i=1 1≤i,j≤n = ( n n ∑ ∑ i=1 ( ( n n ∑ ∑ hij ( ) cij (X) hij j=1 ) t C (X) ji ) = j=1 t n ∑ ( ) H · t C (X) ii i=1 ) ( ) = Tr H · C (X) = Tr t C (X) · H Dans le cas particulier où E est de dimension nie égale à n ≥ 1, B = (ej )1≤j≤n est une base de E, F est de dimension nie égale à m ≥ 1 et B′ = (e′i )1≤i≤m est une base de F, une fonction f qui associe à x = n ∑ xj ej ∈ O un vecteur f (x) = j=1 m ∑ fi (x) e′i est diérentiable en a ∈ O si, i=1 et seulement si, chaque fonction fi : O → R est diérentiable en a et on a pour tout vecteur h= n ∑ hj ej , on a alors : j=1 ( n ) m n m ∑ ∑ ∑ ∑ ∂fi ∂f ∂fi (a) = hj (a) e′i = (a) hj e′i df (a) (h) = hj ∂x ∂x ∂x j j j i=1 j=1 i=1 j=1 j=1 n ∑ La matrice de df (a) dans las bases B et B′ est donc : (( Jf (a) = )) ∂fi (a) ∈ Mm,n (R) 1≤i≤m ∂xj 1≤j≤n La matrice Jf (a) est la matrice jacobienne de f en a. Dérivée suivant un vecteur, dérivées partielles Pour m = 1, on a : ( Jf (a) = 1147 ) ∂f ∂f (a) , · · · , (a) ∂x1 ∂xn et on retrouve le vecteur gradient gf (a) = t Jf (a) . Dans la cas particulier où E = Rn , F = Rm et G = R, le théorème de composition des applications diérentiables (théorème 45.6) nous dit que : Jg◦f (a) = Jg (f (a)) Jf (a) (on utilise les bases canoniques), soit : ( ) ( ) (( )) ∂g ◦ f ∂g ◦ f ∂g ∂g ∂fi (a) , · · · , (a) = (f (a)) , · · · , (f (a)) (a) 1≤i≤m ∂x1 ∂xn ∂y1 ∂ym ∂xj 1≤j≤n ce qui équivaut à : ∑ ∂g ∂fi ∂g ◦ f (a) = (f (a)) (a) (1 ≤ j ≤ n) ∂xj ∂y ∂x i j i=1 m Exemple 45.5 Pour le passage en coordonnées polaires dans R2 , on utilise : f : O = ]0, +∞[ × ]0, 2π[ → R2 (r, θ) 7→ (r cos (θ) , r sin (θ)) et pour g : f (O) → R diérentiable, on dénit h : O → R par h (r, θ) = g (r cos (θ) , r sin (θ)) = g ◦ f (r, θ) et on a : ∂h ∂g ∂g (r, θ) = cos (θ) (r cos (θ) , r sin (θ)) + sin (θ) (r cos (θ) , r sin (θ)) ∂r ∂x ∂y ∂h ∂g ∂g (r, θ) = −r sin (θ) (r cos (θ) , r sin (θ)) + r cos (θ) (r cos (θ) , r sin (θ)) ∂θ ∂x ∂y ce qu'on écrit plus simplement : ∂h ∂g ∂g (r, θ) = cos (θ) (x, y) + sin (θ) (x, y) ∂r ∂x ∂y ∂h ∂g ∂g (r, θ) = −r sin (θ) (x, y) + r cos (θ) (x, y) ∂θ ∂x ∂y en posant (x, y) = (r cos (θ) , r sin (θ)) . Exemple 45.6 Sur R3 , on dispose du passage en coordonnées sphériques : (x, y, z) = (r cos (θ) sin (φ) , r sin (θ) sin (φ) , r cos (φ)) et en notant g (x, y, z) = h (r, θ, φ) , on a avec des hypothèses adaptées : ∂g ∂g ∂g ∂h (r, θ, φ) = cos (θ) sin (φ) (x, y, z) + sin (θ) sin (φ) (x, y, z) + cos (φ) (x, y, z) ∂r ∂x ∂y ∂z ∂h ∂g ∂g (r, θ, φ) = −r sin (θ) sin (φ) (x, y, z) + r cos (θ) sin (φ) (x, y, z) ∂θ ∂x ∂y ∂g ∂g ∂g ∂h (r, θ, φ) = r cos (θ) cos (φ) (x, y, z) + r sin (θ) cos (φ) (x, y, z) − r sin (φ) (x, y, z) ∂φ ∂x ∂y ∂z Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ... 1148 Pour n = m, la matrice jacobienne est carrée d'ordre n et son déterminant est le déterminant jacobien de f en a. Ce déterminant jacobien intervient dans la formule de changement de variable pour les intégrales multiples. Dénition 45.7 Soient O un ouvert non vide de E et O′ un ouvert non vide de F. Un C 1 diéomorphisme de O sur O′ est une application bijective φ : O → O′ qui est de classe C 1 sur O et telle que son inverse φ−1 soit aussi de classe C 1 sur O′ . Théorème 45.11 Soient O, O′ deux ouverts non vides de Rn et φ : O → O′ un C 1 -diéomorphisme. Si f : O′ → R est une fonction intégrable sur O′ telle que la fonction f ◦ φ |det (Jφ )| soit intégrable sur O, on a alors : ∫ ∫ f (y) dy = O′ O f (φ (x)) |det (Jφ (x))| dx Démonstration. Voir S. Lang, Analysis. 45.3 Diérentielles d'ordre supérieur Dénition 45.8 On dit qu'une fonction f dénie sur un ouvert non vide O de E et à valeurs dans F est deux fois diérentiable sur O si elle est diérentiable sur O et si df : O → Lc (E, F ) est diérentiable sur O. On note alors d2 f = d (df ) . Quand elle existe, d2 f (x) est une application linéaire continue de E dans Lc (E, F ) . Dénition 45.9 On dit qu'une fonction f dénie sur un ouvert non vide O de E et à valeurs dans F est de classe C 2 sur O si elle est deux fois diérentiable sur O et si d2 f est continue sur O. Par récurrence, on dénit les notions de fonctions p fois diérentiable [resp. de classe C p ] et de classe C ∞ sur O. Comme une fonction diérentiable est continue, on en déduit qu'une fonction p + 1 fois diérentiable sur O est de classe C p . Exemple 45.7 Une fonction constante sur E est de classe C ∞ . Exemple 45.8 Une application linéaire continue f ∈ Lc (E, F ) est de classe C ∞ sur E avec df (x) = f pour tout x ∈ E et d f (x) = 0 pour tout p ≥ 2 et tout x ∈ E puisque df est constante égale à f. p Exemple 45.9 Une fonction f : O → Rm est p fois diérentiable [resp. de classe C p ] sur O si, et seulement si, chaque fonction fi : O → R est p fois diérentiables [resp. de classe C p ] sur O. Exercice 45.11 Soient E1 , E2 des espaces normés et E = E1 × E2 normé par : ∀x = (x1 , x2 ) ∈ E, ∥x∥ = max (∥x1 ∥ , ∥x2 ∥) Montrer que toute application bilinéaire continue f de E dans F est de classe C ∞ sur E avec, pour tous x, h dans E : df (x) (h) = f (x1 , h2 ) + f (h1 , x2 ) d2 f (x) (h) = df (h) ∀p ≥ 3, dp f (x) (h) = 0 Diérentielles d'ordre supérieur 1149 Solution 45.11 On a déjà vu que f est diérentiable sur E avec : df (x) (h) = f (x1 , h2 ) + f (h1 , x2 ) L'application df : x ∈ E 7→ df (x) ∈ Lc (E, F ) est linéaire avec : ∥df (x) (h)∥ ≤ ∥f (x1 , h2 )∥ + ∥f (h1 , x2 )∥ ≤ ∥f ∥ (∥x1 ∥ ∥h2 ∥ + ∥h1 ∥ ∥x2 ∥) ≤ ∥f ∥ (∥x1 ∥ + ∥x2 ∥) ∥h∥ ≤ 2 ∥f ∥ ∥x∥ ∥h∥ donc ∥df (x)∥ ≤ 2 ∥f ∥ ∥x∥ et df est continue. Il en résulte que df est de classe C ∞ sur E avec d2 f (x) = df et dp f = 0 pour tout p ≥ 3. Des résultats relatifs aux opérations sur les fonctions diérentiables, on déduit le suivant. Théorème 45.12 Une combinaison linéaire, un produit (quand il a un sens), une composée d'applications p fois diérentiables [resp. de classe C p ] est p fois diérentiable [resp. de classe C p ]. Pour E = R , on a pour f diérentiable sur O, df (x) (h) = n n ∑ hi i=1 ∂f (x) pour tout x ∈ O et ∂xi tout h ∈ Rn et dire que f est deux fois diérentiable sur O équivaut à dire que chaque fonction ∂f : O → F est diérentiable sur O. Ces fonctions admettent donc des dérivées partielles qui ∂xi ( ) ∂f ∂ 2f ∂ sont les dérivées d'ordre 2 de f, à savoir les fonctions = pour 1 ≤ i, j ≤ n. ∂xj ∂xi ∂xj ∂xi Théorème 45.13 Soient O un ouvert de Rn et f : O → F. La fonction f est de classe C 2 sur O si, et seulement si, elle admet des dérivées partielles d'ordre 1 et 2 en tout point de O et ces dérivées partielles sont toutes continues sur O. Théorème 45.14 Soient O un ouvert de Rn et f x ∈ O et tout h, k dans R , on a : n d2 f (x) (h) (k) = : O → R deux fois diérentiable. Pour tout ∑ ∂2f (x) hi kj ∂xj ∂xi 1≤i,j≤n Démonstration. On rappelle que df : O → Lc (E, F ) . Pour tout x ∈ O et tout h ∈ Rn , on a : ∑ ∂ ∂ (df ) (x) = hi d (df ) (x) (h) = hi ∂xi ∂xi i=1 i=1 ( ) n n ∑ ∑ ∂ 2f = hi (x) dxj ∂x ∂x i j i=1 j=1 n ∑ et : n ( n ∑ ∂f j=1 ∂xj ) (x) dxj ( n ) ∑ ∂ 2f d2 f (x) (h) (k) = hi (x) kj ∂xi ∂xj i=1 j=1 n ∑ Avec les notations du théorème précédent, on peut remarquer que l'application (h, k) 7→ d f (x) (h) (k) est bilinéaire, mais a priori pas symétrique, dans la mesure où l'existence des 2 dérivées partielles d'ordre 2 n'assure pas l'égalité On notera d2 f (x) (h, k) pour d2 f (x) (h) (k) . ∂ 2f ∂2f (x) = (x) . ∂xi ∂xj ∂xj ∂xi Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ... 1150 Théorème 45.15 (Schwarz) Soient O un ouvert de Rn et f une fonction dénie sur O à ∂2f valeurs réelles, diérentiable sur O et admettant sur O des dérivées partielles , pour ∂xi ∂xj tous i, j compris entre 1 et n, continues en un point a de O. Pour tous i, j compris entre 1 et n, on a : ∂2f ∂ 2f (a) = (a) ∂x∂y ∂y∂x Démonstration. On se contente du cas n = 2. Pour h, k strictement positifs tels que [a, a + h] × [b, b + k] soit contenu dans O, on note : g (h, k) = f (a + h, b + k) − f (a + h, b) − f (a, b + k) + f (a, b) . En notant φ (x) = f (x, b + k) − f (x, b) , on a g (h, k) = φ (a + h) − φ (a) qui avec le théorème des accroissements nis s'écrit g (h, k) = hφ′ (a + θh) , soit : ( g (h, k) = h ) ∂f ∂f (a + θh, b + k) − (a + θh, b) , ∂x ∂x ce qui peut s'écrire en utilisant à nouveau le théorème des accroissements nis : g (h, k) = hk ∂2f (a + θh, b + θ′ k) . ∂y∂x En procédant de manière analogue avec la fonction ψ dénie par ψ (y) = f (a + h, y) − f (a, y) , on a : ( g (h, k) = ψ (b + k) − ψ (b) = k = hk ) ∂f ∂f (a + h, b + ηk) − (a, b + ηk) ∂y ∂y ∂ 2f (a + η ′ h, b + ηk) . ∂x∂y ∂2f ∂ 2f (a + θh, b + θ′ k) = (a + η ′ h, b + ηk) où les réels θ, θ′ , η, η ′ sont dans ∂y∂x ∂x∂y ]0, 1[ . En faisant tendre (h, k) vers (0, 0) et en utilisant la continuité des dérivées partielles ∂ 2f ∂ 2f d'ordre 2, en on déduit que (a, b) = (a, b) . ∂x∂y ∂y∂x xy (x2 − y 2 ) pour L'exemple de la fonction f dénie sur R2 par f (0, 0) = 0 et f (x, y) = x2 + y 2 (x, y) ̸= (0, 0) nous montre que le résultat précédent est faux si on en enlève l'hypothèse de continuité des dérivées partielles d'ordre 2 (voir l'exercice qui suit). Ce qui donne Plus nement, on a le résultat suivant. Théorème 45.16 (Schwarz) Soient O un ouvert de Rn et f : O → R. Si f admet une ∂ 2f ∂ 2f diérentielle d'ordre 2 en a ∈ O, on a alors (a) = (a) pour tous i, j compris ∂xi ∂xj ∂xj ∂xi entre 1 et n. Démonstration. Voir Cartan, pages 65 à 67. On déduit du théorème de Schwarz que si f : O ⊂Rn → R est deux fois diérentiable en a ∈ O, la forme bilinéaire d2 f (a) est alors symétrique. Diérentielles d'ordre supérieur 1151 Sa matrice est appelée matrice hessienne de f en a. Elle est donc dénie par : (( Hessf (a) = ∂ 2f (a) ∂xi ∂xj )) 1≤i,j≤n L'application h 7→ d f (a) (h) = d f (a) (h, h) est alors une forme quadratique sur Rn et son expression dans la base canonique est : 2 2 ∀h ∈ R , d f (a) (h) = n 2 n ∑ ∂ 2f (a) h2i 2 ∂xi i=1 ∑ ∂ 2f +2 (a) hi hj ∂xi ∂xj 1≤i<j≤n Exercice 45.12 On considère la fonction : f: R2 (x, y) → R xy (x2 − y 2 ) si (x, y) ̸= (0, 0) , 7−→ x2 + y 2 0 si (x, y) = (0, 0) . 1. Montrer que la fonction f est de classe C 1 sur R2 . ∂ 2f ∂ 2f (0, 0) et (0, 0) existent et les calculer. ∂x∂y ∂y∂x 3. La fonction f est-elle de classe C 2 sur R2 ? 2. Montrer que les dérivées partielles Solution 1. f est C ∞ sur R2 \ {(0, 0)} comme fonction rationnelle avec : ∂f x4 − y 4 + 4x2 y 2 (x, y) = y ∂x (x2 + y 2 )2 ∂f x4 − y 4 − 4x2 y 2 (x, y) = x ∂y (x2 + y 2 )2 On a : f (x, 0) − f (0, 0) =0⇒ x f (0, y) − f (0, 0) =0⇒ y ∂f (0, 0) = 0 ∂x ∂f (0, 0) = 0 ∂y En utilisant les coordonnées polaires, on a pour (x, y) ̸= (0, 0) : ∂f = ρ sin (θ) cos4 (θ) − sin4 (θ) + 4 cos2 (θ) sin2 (θ) ≤ 6ρ (x, y) ∂x ∂f = ρ cos (θ) cos4 (θ) − sin4 (θ) − 4 cos2 (θ) sin2 (θ) ≤ 6ρ (x, y) ∂y et la continuité en (0, 0) de 2. On a : ∂f ∂f et . ∂x ∂y ∂f ∂f (x, 0) − (0, 0) ∂ 2f ∂y ∂y =1⇒ (0, 0) = 1 x ∂x∂y ∂f ∂f f (0, y) − f (0, 0) ∂ 2f ∂x ∂x = −1 ⇒ (0, 0) = −1 y ∂y∂x Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ... 1152 3. Comme ∂ 2f ∂2f (0, 0) ̸= (0, 0) , f n'est pas de classe C 2 sur R2 . ∂x∂y ∂y∂x 45.4 Théorème et inégalité des accroissements nis Le théorème des accroissements nis pour les fonctions d'une variable réelle est supposé connu. Pour a, b dans E, le segment d'extrémités a, b est : [a, b] = {a + t (b − a) | 0 ≤ t ≤ 1} Théorème 45.17 Soit f une fonction à valeurs réelles dénie et diérentiable sur un ouvert O de E. Si a, b sont deux points distincts de O tels que le segment [a, b] soit contenu dans O, il existe alors un point c ∈ ]a, b[ tel que : f (b) − f (a) = df (c) (b − a) Démonstration. On se ramène au cas des fonctions d'une variable réelle en considérant la fonction g dénie sur [0, 1] par : g (t) = f (a + t (b − a)) Cette fonction est bien dénie sur [0, 1] du fait que [a, b] ⊂ O et elle continue sur cet intervalle, dérivable sur ]0, 1[ avec : g ′ (t) = df (a + t (b − a)) (b − a) On peut alors utiliser le théorème des accroissements nis pour les fonctions d'une variable réelle qui nous assure l'existence d'un réel θ dans ]0, 1[ tel que g (1) − g (0) = g ′ (θ) , ce qui s'écrit f (b) − f (a) = df (c) (b − a) avec c = a + θ (b − a) dans ]a, b[ . Remarque 45.6 Pour O convexe, l'hypothèse [a, b] ⊂ O est toujours vériée. Corollaire 45.3 Soit f une fonction à valeurs réelles dénie et diérentiable sur un ouvert O de Rn . Si a, b sont deux points distincts de O tels que le segment [a, b] soit contenu dans O, il existe alors un point c ∈ ]a, b[ tel que : n ∑ ∂f (c) (bk − ak ) f (b) − f (a) = ∂xk k=1 Démonstration. Résulte de : n ∑ ∂f (c) (bk − ak ) df (c) (b − a) = ∂x k k=1 Corollaire 45.4 Soient f une fonction à valeurs réelles dénie et diérentiable sur un ouvert O de E et a, b deux points distincts de O tels que le segment [a, b] soit contenu dans O. S'il existe une constante réelle λ > 0 telle que ∥df (x)∥ ≤ λ pour tout x ∈ ]a, b[ , on a alors : |f (b) − f (a)| ≤ λ ∥b − a∥ Théorème et inégalité des accroissements nis 1153 Corollaire 45.5 Soient O un ouvert de E, f : O → F diérentiable et a, b deux points distincts de O tels que le segment [a, b] soit contenu dans O. S'il existe une constante réelle λ > 0 telle que ∥df (x)∥ ≤ λ pour tout x ∈ [a, b] , on a alors : ∥f (b) − f (a)∥ ≤ λ ∥b − a∥ Démonstration. On considère la fonction g dénie sur [0, 1] par g (t) = f (a + t (b − a)) et on utilise le corollaire précédent. Théorème 45.18 Soient O un ouvert convexe de E et f : O → F diérentiable. La fonction f est lipschitzienne sur O si, et seulement si, sa diérentielle df est bornée sur O. Théorème 45.19 Soient O un ouvert connexe de E et f f est constante si, et seulement si, df = 0. : O → F diérentiable. La fonction Le théorème précédent est faux pour O non connexe. L'égalité des accroissements nis peut être utilisée pour justier la dénition de la tangente en un point régulier à une courbe d'un plan ane euclidien d'équation implicite f (x, y) = 0. On se donne une fonction f à valeurs réelles dénie, de classe C 1 sur un ouvert O du plan ane euclidien R2 et on désigne par Γ la courbe d'équation implicite f (x, y) = 0, soit : Γ = {(x, y) ∈ O | f (x, y) = 0} en supposant que Γ est non vide. Comme O est ouvert, pour tout point M0 ∈ Γ ⊂ O, il existe un réel η > 0 tel que la boule ouvert B (M0 , η) de centre M0 et de rayon η soit contenu dans O. Pour tout point M = (x, y) ∈ O ∩ Γ \ {M0 } , on a : ∂f ∂f (u, v) (x − x0 ) + (u, v) (y − y0 ) ∂x ∂y ∂f ∂f = (u, v) (x − x0 ) + (u, v) (y − y0 ) ∂x ∂y 0 = f (x, y) = f (x0 , y0 ) + où (u, v) est un point du segment ]M0 , M [ ⊂ B (M0 , η) ⊂ O. Cette égalité peut aussi se traduire par : x − x0 − ∂f (u, v) ∂y ∂f y−y (u, v) 0 ∂x −−−→ et nous dit (que le vecteur non nul ) M0 M qui dirige la corde (M0 , M ) est colinéaire au vec−→ ∂f ∂f (u, v) . Si le point M0 est régulier, on a alors df (x0 , y0 ) ̸= 0 et teur VM = − (u, v) , ∂y ∂x df (u, v) ̸= 0 pour tout (u, v) ∈ B (M0 , η) en choisissant η > 0 assez petit, puisque f est de −→ classe C 1 sur un ouvert O,de sorte que VM est un vecteur directeur de la corde (M0 , M ) . En utilisant encore la continuité des dérivées partielles, on a : ) ( ) ( −−→ ∂f ∂f ∂f ∂f (u, v) , (u, v) = − (x0 , y0 ) , (x0 , y0 ) = VM0 lim − (u,v)→(x0 ,y0 ) ∂y ∂x ∂y ∂x et donc pour tout réel ε > 0, on aura : −→ −−→ VM − VM0 < ε Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ... 1154 pour η > 0 assez petit. Ce dernier résultat peut se traduire en disant que la corde (M0 , M ) , −→ qui est la droite passant par M0 et dirigée par VM , tend vers la droite TM0 qui passe par M0 et −−→ est dirigée par VM0 . Une équation de cette droite est : x − x0 − ∂f (x0 , y0 ) ∂y ∂f y−y (x0 , y0 ) 0 ∂x ∂f ∂f = (x , y ) (x − x ) + (x0 , y0 ) (y − y0 ) = 0 0 0 0 ∂x ∂y Il est donc naturel de dire que TM0 est la tangente à Γ en M0 . De manière plus générale, on peut donner la dénition suivante. Dénition 45.10 Soient O un ouvert non vide de Rn , f une fonction de classe C 1 de O dans R et Γ l'hypersurface : Γ = {x ∈ O | f (x) = 0} en supposant que Γ est non vide. Si a ∈ Γ est un point régulier, l'hyperplan tangent à Γ en a est l'hyperplan ane Ha d'équation : n ∑ ∂f (a) (xk − ak ) = 0 ∂xk k=1 Avec les notations de la dénition qui précède, Ha est l'hyperplan ane qui passe par a et est orthogonal au vecteur gradient : ( gf (a) = ) ∂f ∂f (a) , · · · , (a) ̸= 0 ∂x1 ∂xn Exercice 45.13 En utilisant la dénition bi-focale des coniques à centres, montrer que si Γ est une ellipse [resp. une hyperbole] de foyers F, F ′ et M un point de Γ, alors M est régulier et la tangente à Γ en M est la bissectrice extérieure [resp. intérieure] issue de M du triangle M F F ′. Solution 45.12 Voir les théorèmes 25.18 et 25.19. 45.5 Formule de Taylor-Lagrange Si f est une fonction dénie sur un ouvert de Rn , à valeurs réelles et susamment dérivable, en utilisant les formules de Taylor pour la fonction d'une variable réelle φ : t 7→ f (a + th) , on déduit des formules de Taylor pour f au voisinage de a. Pour simplier, on s'intéresse d'abord aux fonctions de deux variables réelles. Théorème 45.20 (Taylor-Lagrange) Soient p un entier naturel non nul, O un ouvert non vide de R2 , f une fonction de classe C p de O dans R, A = (a, b) un point de O et M = (x, y) un point de O tel que le segment [AM ] d'extrémités A et M soit contenu dans O. Il existe alors un réel θ dans ]0, 1[ tel que : ∑ (x − a)i (y − b)j ∂ i+j f (a, b) f (x, y) = i!j! ∂xi ∂y j i+j≤p−1 ∑ (x − a)i (y − b)j ∂ p f + (a + θu, b + θv) . i!j! ∂xi ∂y j i+j=p Formule de Taylor-Lagrange 1155 Démonstration. On note u = x − a, v = y − b et on désigne par φ la fonction dénie sur [0, 1] par : φ (t) = f (a + tu, b + tv) . Cette fonction est de classe C p sur [0, 1] avec φ (0) = f (a, b) , φ (1) = f (x, y) , et on peut utiliser la formule de Taylor-Lagrange relative aux fonctions d'une variable pour écrire que : φ (1) = p−1 (k) ∑ φ (0) k=0 k! + φ(p) (θ) p! (45.3) où θ est un réel dans ]0, 1[ . En notant Mt = (a + tu, b + tv) , on vérie facilement par récurrence que les dérivées successives de la fonction φ sont données par : ∂f ∂f ′ φ (t) = ∂x (Mt ) u + ∂y (Mt ) v ∑ i ∂kf (k) φ (t) = Ck i j (Mt ) ui v j (2 ≤ k ≤ p) ∂x ∂y i+j=k On a donc : ∑ (k) φ (0) = k! ∂ k f (a, b) ui v j (0 ≤ k ≤ p − 1) i j i+j=k i!j! ∂x ∂y ∑ p! ∂ p f φ(p) (θ) = (Mθ ) ui v j i j i+j=p i!j! ∂x ∂y L'égalité (45.3) s'écrit alors : f (x, y) = p−1 ∑ k=0 ( ∑ 1 ∂kf (a, b) ui v j i j i!j! ∂x ∂y i+j=k ) + ∑ 1 ∂ pf (Mθ ) ui v j i j i!j! ∂x ∂y i+j=p ou encore : f (x, y) = + ∑ (x − a)i (y − b)j ∂ i+j f (a, b) i ∂y j i!j! ∂x i+j≤p−1 ∑ (x − a)i (y − b)j ∂ p f (a + θu, b + θv) i ∂y j i!j! ∂x i+j=p Comme dans le cas du théorème de Rolle, cette formule n'est plus valable pour les fonctions à valeurs dans Rq où q ≥ 2. En munissant R2 de la norme (x, y) 7→ ∥(x, y)∥ = max (|x| , |y|) (ou de n'importe quelle autre norme), le théorème précédent nous fournit un développement limité de f à l'ordre p au voisinage de (a, b) . Corollaire 45.6 (Taylor-Young) Avec les mêmes hypothèses que dans le théorème précédent, on désigne par B une boule ouverte centré en (a, b) et de rayon r > 0 contenue dans O. Il existe alors une fonction ε : B → R telle que lim ε (x, y) = 0 et pour tout (x, y) dans B on ait : (x,y)→(a,b) ∑ (x − a)i (y − b)j ∂ i+j f (a, b) + ∥(x − a, y − b)∥p ε (x, y) f (x, y) = i j i!j! ∂x ∂y i+j≤p Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ... 1156 Démonstration. En reprenant les notations utilisées dans la démonstration du théorème précédent, on écrit que : ( ) φ(p) (θ) = φ(p) (0) + φ(p) (θ) − φ(p) (0) avec : p ∑ (p) ∂ pf i ∂ f φ (θ) − φ(p) (0) ≤ Cp i j (Mθ ) − i j (A) |u|i |v|j ∂x ∂y ∂x ∂y i+j=p En remarquant que pour i, j entiers naturels tels que i + j = p, on a : |u|i |v|j ≤ ∥(u, v)∥i ∥(u, v)∥j = ∥(u, v)∥p on obtient : et en posant : p ∑ (p) ∂pf i ∂ f φ (θ) − φ(p) (0) ≤ ∥(u, v)∥p Cp i j (Mθ ) − i j (A) ∂x ∂y ∂x ∂y i+j=p (p) φ (θ) − φ(p) (0) pour (x, y) ̸= (a, b) ε (x, y) = ∥(u, v)∥p 0 pour (x, y) = (a, b) la continuité des dérivées partielles d'ordre p nous donne : lim ε (x, y) = 0 (x,y)→(a,b) et la formule de Taylor-Young. Cette formule est le plus souvent utilisée pour p = 2. En utilisant les notations de Monge : ∂f ∂f (a, b) , q = (a, b) p= ∂x ∂y ∂ 2f ∂ 2f ∂ 2f r= (a, b) , s = (a, b) , t = (a, b) ∂x2 ∂x∂y ∂y 2 on a pour f de classe C 2 au voisinage de (a, b) : f (x, y) = f (a, b) + pu + qv + ) ( ) 1( 2 ru + 2suv + tv 2 + o ∥(u, v)∥2 2 toujours avec u = x − a et v = y − b. Dans le cas des fonction de n variables de classe C 2 et à valeurs réelles, on a les résultats suivants. Théorème 45.21 (Taylor-Lagrange) Soient O un ouvert non vide de Rn , f une fonction de classe C 2 de O dans R, a un point de O et x un point de O tel que le segment [a, x] d'extrémités a et x soit contenu dans O. Il existe alors un réel θ dans ]0, 1[ tel que : ( ) 1 f (x) = f (a) + df (a) (h) + d2 f (a) (h) + o ∥h∥2 2 n ∑ ∂f 1 ∑ ∂ 2f = f (a) + (a) hi + (a + θh) hi hj ∂xi 2 1≤i,j≤n ∂xi ∂xj i=1 Formule de Taylor-Lagrange Théorème 45.22 (Taylor-Young) Soient 1157 O un ouvert de Rn , f une fonction de classe C 2 de O dans R et a un point de O. Pour h voisin de 0, on a : ( ) 1 f (a + h) = f (a) + df (a) (h) + d2 f (a) (h) + o ∥h∥2 2 n ∑ ( ) ∂f 1 ∑ ∂ 2f = f (a) + (a) hi + (a) hi hj + o ∥h∥2 ∂xi 2 1≤i,j≤n ∂xi ∂xj i=1 1158 Fonctions de plusieurs variables : diérentielle ...