Exerçant une dictature policière il aurait privilégié la lutte contre les communistes sur la
défense des intérêts du peuple face à l’agression japonaise à partir de septembre 1931. […]
Le Guomindang ne s’est pas toujours appuyé unilatéralement sur la bourgeoisie : s’il se
montra en 1927 protecteur de ses intérêts face au syndicalisme ouvrier révolutionnaire et aux
communistes, il accabla de taxes, de contributions forcées voire de spoliations les industriels.
La guerre contre le Japon le contraignit à se réfugier au Sichuan, province enclavée à
l’économie peu développée : là, dépourvu de base populaire, le Guomindang, aspiré par les
forces conservatrices du monde rural, accentua sa transformation en une construction
bureaucratique et militarisée qui pratiquait la terreur contre ses opposants politiques avec
l’aide de la police politique de Dai Li.
Le bilan de la « décennie de Nankin » 1927-1937, période durant laquelle le nouveau régime
contrôla la riche région du bas Yangzi, est, quant à lui, revu à la hausse. Malgré des guerres
civiles récurrentes jusqu’en 1934, le gouvernement nationaliste jeta les bases d’une
planification d’État capable de satisfaire partiellement les besoins de l’industrie de guerre,
tandis que l’amélioration des transports routiers et ferroviaires permit un début d’intégration
économique.
La « décennie de Nankin » a également vu s’épanouir la civilisation urbaine dans la Chine
côtière, notamment à Shanghai. Le Guomindang toléra l’affirmation timide d’une société
civile d’entrepreneurs et de technocrates. Contrairement à ce qui fut souvent écrit, la situation
dans les campagnes, où vivaient misérablement les trois quarts des travailleurs chinois, ne
s’est pas aggravée par rapport à la fin du siècle précédent. Certes les révoltes contre les taxes
et la conscription alimentèrent la révolution menée par les communistes. Mais le pacte que ces
derniers passèrent alors avec les paysans consista à mettre en œuvre la politique de réduction
de la rente foncière que le Guomindang avait décidée. Enfin on doit rappeler que c’est à
l’époque du Guomindang que la Chine recouvra son autonomie douanière, mit fin aux «
traités inégaux » imposés lors des guerres de l’opium avec le recouvrement des « concessions
étrangères » et devint un des quatre grands en 1945.
Source : A. Roux, le retour du Guomindang, L’histoire n° 365, p. 21-22
Document 2 : la difficile unification de la Chine sous la République
En 1925-1927 éclate une révolution « 1 bis » : elle permet au Parti nationaliste ou
Guomindang*, fondé par Sun Yat-sen en 1912, de conquérir le pouvoir en 1928. C'est le
nationalisme qui, dans ce mouvement encore, a été déterminant. Mais le Guomindang n'est
parvenu à ses fins qu'en s'entendant avec les communistes contre les seigneurs de la guerre.
Également soucieux de moderniser le pays, ces frères ennemis se sont un temps entendus
contre les tenants de la tradition : un « front uni » encouragé par les Soviétiques dès 1922.
L'alliance est brève ; les nationalistes ne tardent pas à se retourner contre les communistes : le
12 avril 1927, c'est le « coup de Shanghai », le massacre des communistes.
Avec ce coup de force de 1927, nous avons toutefois moins affaire à une révolution qu'à
l'unification du pays, accomplie, après la mort de Sun Yat-sen en 1925, par un général
victorieux, Chiang Kai-shek, aux dépens des seigneurs de la guerre rivaux. Cependant, cette
unification est incomplète, voire de pure forme : en théorie ralliés au nouveau régime, les
principaux seigneurs de la guerre maintiennent leur autonomie. Menacée de surcroît par les
communistes, qui n'ont aucune raison de pardonner la trahison de Chiang et qui se lancent
dans la rébellion, l'unité nationale ne peut être que précaire - de fait, elle ne sera vraiment
rétablie qu'en 1949. Face à un Guomindang incapable d'imposer sa loi, c'est la révolution
communiste qui va l'emporter.
Source : L. Bianco, comment la Chine est devenue communiste, L’Histoire n° 300, p. 76
Questions :
1. Quelle est la situation de la Chine lorsque le Guomindang arrive au pouvoir en 1927 ?