Actualités Intérêt du dosage du BNP pour exclure le diagnostic d

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NewsMTCardio5
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Intérêt du dosage du BNP pour exclure le diagnostic
d’insuffisance cardiaque congestive
Méthodes
Une recherche Medline et EMBASE,
Cochrane et MEDION pour les publications rapportées entre 1990 et 2004
a été effectuée. Les études comparant la
performance du dosage du BNP chez
des patients asymptomatiques ou chez
des patients suspects d’ICC aiguë avec
des données cliniques et morphologiques ont été retenues. Chaque fois que
cela était possible, les données sources
ont été réclamées auprès des auteurs des
publications originales. Les études ne
rapportant pas les taux de vrais positifs,
de faux-positifs, de vrais-négatifs et de
faux-négatifs ont été exclues, de même
que les études ne s’intéressant qu’aux
patients ayant une dysfonction diastolique ventriculaire gauche ou utilisant
le BNP comme marqueur pronostique.
Les auteurs ont calculé en utilisant les
formules habituelles, la sensibilité, la
spécificité, les rapports de vraisemblance ainsi que les erreurs standard.
Les résultats individuels ainsi que les
éventuelles hétérogénéités entre études
ont été déterminés ; des courbes ROC
(Receiver Operating Characteristisc) ont
été construites. Le BNP étant un test utilisé principalement pour éliminer le diagnostic d’insuffisance cardiaque, les
auteurs se sont particulièrement intéressés au rapport de vraisemblance pour
un test négatif. Au plan méthodologique,
une méta-régression a été effectuée pour
évaluer le rapport de vraisemblance
négatif, en prenant en considération les
variables suivantes : type de tests, âge
moyen, proportion d’hommes, présence
des symptômes de l’insuffisance cardiaque, type d’environnement de prise
en charge et année de publication. Les
résultats ont été présentés en sensibilité,
spécificité, rapport de vraisemblance
négatif, courbes ROC avec les intervalles
de confiance à 95 %.
Résultats
Les critères stricts de sélection utilisés
dans cette méta-analyse ont permis de
retenir 19 études, dont 10 avaient un
dessin prospectif, 8 ont inclus des
patients consécutifs, et 11 ont rapporté
une interprétation “ aveugle ” des tests.
Parmi les études retenues, 13 utilisaient
la méthode de dosage RIA, 6 la méthode
ELISA dont une étude avec dosage du
NT-pro-BNP et non du BNP. Les études
considérées utilisaient la fraction d’éjection ventriculaire gauche échographique
(seuil 30 à 50 %) ou par angiographie
isotopique (seuil 35 à 40 %) comme
méthode de référence. Huit études ont
inclus une combinaison de données cliniques et échographiques. L’analyse a
Actualités
Question évaluée par l’étude
L’insuffisance cardiaque congestive (ICC)
constitue un problème majeur de santé
publique. Son incidence et sa prévalence augmentent de façon très significative avec le vieillissement de la population, et l’insuffisance cardiaque est la
première cause d’hospitalisation chez
les patients âgés de plus de 65 ans. Le
pronostic global de cette affection s’est
amélioré [1, 2]. Le diagnostic d’une dyspnée dans un contexte d’urgence n’est
pas toujours simple, en particulier en
cas de comorbidité, situation particulièrement fréquente chez les sujets âgés.
Le dosage du peptide natriurétique de
type B (BNP), neuro-hormone sécrétée
par les myocytes ventriculaires en cas
d’expansion volémique ou de surcharge
de pression a été proposé depuis
quelques années pour éliminer le diagnostic d’ICC en urgence, et la diffusion
de la méthode a été rendue possible par
l’utilisation des méthodes de dosage
“ instantané ”. La méta-analyse a comparé les méthodes de dosage (ELISA versus RIA) pour déterminer la performance
diagnostique du dosage du BNP dans le
diagnostic d’insuffisance cardiaque.
1,0
0,8
Sensibilité
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017.
Titre original et référence : Battaglia M, Pewsner D, Juni P, et al. Accuracy of B-type natriuretic peptide tests to exclude congestive heart failure. Arch Intern Med
2006 ; 166 : 1073-80.
0,6
0,4
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SROC pour RIA
SROC pour ELISA
0,0
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0,2
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1 - Spécificité
mt cardio, vol. 2, n° 5, septembre-octobre 2006
0,8
1,0
Figure 1.
Courbes ROC
(Receiver
Operating
Characteristisc) et
courbes ROC
synthétiques
(SROC) construites
pour éliminer le
diagnostic
d’insuffisance
cardiaque, en
comparant les deux
approches ELISA
(enzymes-linked
immunosorbent
assay) et la
technique radioimmunologique
(RIA).
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Actualités
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porté sur 9 093 patients, dont 20 % présentaient une insuffisance cardiaque
confirmée ; à noter que 5 des études
incluses dans cette méta-analyse
étaient sponsorisées par l’industrie.
Caractéristiques des populations. Une
certaine hétérogénéité des études est
apparente. Ainsi, la proportion de
patients avec insuffisance cardiaque
variait selon les études de 2 à 72 %, le
nombre de sujets inclus variait de 66 à
3177 et la proportion de sexe masculin entre 35 et 95 %. De même, une
certaine hétérogénéité était notée pour
les valeurs seuils de BNP utilisées, les
valeurs extrêmes étant de 170 et 300,
5 études n’ont pas précisé la valeur
seuil utilisée.
Performance diagnostique du dosage
de BNP. La sensibilité médiane était de
87 % (68-98 %). La spécificité médiane
était de 72 % (19-98 %). Le rapport de
vraisemblance négatif était de 0,18, (IC
95 % 0,13-0,23) ; il était plus faible
lorsque l’étude utilisait un test ELISA
(0,12, IC 95 % 0,09-0,16) que lorsqu’il
s’agissait d’un test radio-immunologique RIA (0,23, IC 95 % 0,16-0,32).
La différence observée n’était probablement pas un effet de chance (test d’interaction p = 0,009). La construction
des courbes ROC confirmait la différence de performance entre les types
de tests. Les autres variables utilisées
dans l’analyse par méta-régression
n’étaient pas associées de façon
notable avec le rapport de vraisemblance négatif, à l’exception des symptômes et du type de test. Ainsi, la présence de symptômes était associée avec
un rapport de vraisemblance moindre
(p = 0,07) ; cependant, l’association
était franchement atténuée, et devenait
non significative (p = 0,62) lorsque le
type de test était inclus dans le modèle.
Pour une probabilité pré-test de 20 %,
représentative de patients ayant une
suspicion d’insuffisance cardiaque en
ambulatoire, un test négatif utilisant la
méthode ELISA aboutirait à une pro-
babilité post-test de 2,9 % ; un test
radio-immunologique (RIA) négatif
aboutirait à une probabilité post-test
de 5,4 %. Les limites de l’étude tiennent à la méthodologie statistique
complexe et l’impossibilité de comparer directement les deux tests, qui
n’ont jamais été utilisés dans la
même étude, au sein d’une même
population.
Résultat essentiel. L’utilisation d’un
dosage du BNP pour éliminer le diagnostic d’ICC en ambulatoire est faisable, avec une supériorité pour le test
ELISA, au prix cependant d’un surcoût
par rapport au dosage radio-immunologique.
Commentaires
Cette méta-analyse confirme donc que
le dosage de BNP chez les patients
ambulatoires présentant une dyspnée
permet d’éliminer avec une bonne précision diagnostique l’insuffisance cardiaque congestive. Cette revue générale et méta-analyse peut être
comparée à celle publiée il y a 2 ans
par Doust [3]. Certes, la présente métaanalyse diffère de celle de Doust par
l’exclusion de 6 études, incluses dans
la méta-analyse de Doust. De plus, la
méta-analyse plus récente de Battaglia
lui a permis d’ajouter 5 études, dont
certaines données non publiées. Doust
avait proposé comme valeurs seuils de
BNP 15 pmoL/L permettant d’obtenir
une bonne sensibilité pour exclure le
diagnostic d’insuffisance cardiaque.
De plus, dans le travail de Doust [3],
la performance diagnostique du BNP
était supérieure lorsqu’elle était comparée aux données cliniques et non à
la fraction d’éjection ventriculaire
gauche, cet auteur suggérait que le BNP
pouvait être utilisé pour détecter les
insuffisances cardiaques à fraction
d’éjection ventriculaire gauche
conservée. Aucune de ces deux
méta-analyses ne peut trancher entre
approches biologique et morpholo-
mt cardio, vol. 2, n° 5, septembre-octobre 2006
gique devant une dyspnée, faisant suspecter une insuffisance cardiaque.
Certes, un dosage négatif dans une
population suspecte de diagnostic d’insuffisance cardiaque peut éviter la réalisation d’une échocardiographie Doppler. Cependant, cet examen apporte
un nombre important d’informations
complémentaires, concernant l’étiologie, la tolérance et le retentissement d’une éventuelle cardiopathie sous-jacente qui font de cette
approche une méthode incontournable
de diagnostic et du suivi de l’insuffisance
cardiaque. Ces deux auteurs suggèrent
qu’une échocardiographie pourrait être
inutile lorsque le taux de BNP est faible,
mais on sait que celui-ci peut être
influencé par de nombreux paramètres
(en particulier le poids) et que son taux
est réduit par de nombreuses classes de
médicaments (en particulier les bêtabloquants).
Conclusion
Cette méta-analyse confirme que le
dosage de BNP, quelle que soit la
méthode utilisée a une excellente valeur
prédictive négative : un taux normal permet d’éliminer avec une bonne sécurité
ce diagnostic, à condition que le patient
ne présente pas de cardiopathie sous
jacente ou de traitement cardiovasculaire au long cours.
Catherine Meuleman
Références
1. Bhatia RS, Tu JV, Lee DS, et al. Outcome
of heart failure with preserved ejection fraction in a population-based study. N Engl J
Med 2006 ; 355 : 260-9.
2. Owan TE, Hodge DO, Herges RM, Jacobsen SJ, Roger VL, Redfield MM. Trends in prevalence and outcome of heart failure with
preserved ejection fraction. N Engl J Med
2006 ; 355 : 251-9.
3. Doust JA, Glasziou PP, Pietrzak E, Dobson
AJ. A systematic review of the diagnostic
accuracy of natriuretic peptides for heart failure. Arch Intern Med 2004 ; 164 : 1978-84.
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