Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIV - n° 6 - juin 2010
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Mise au point
autres indications ont également été évoquées, telles
que le dosage de l’estriol non conjugué comme mar-
queur prédictif d’accouchement prématuré (9). Dans
ces diérentes indications, les études restent limitées
et ne permettent pas d’établir des valeurs seuils utili-
sables en pratique quotidienne. En ce qui concerne
le cortisol salivaire, la situation est diérente puisque
de nombreuses études ont mis en évidence l’intérêt
de son dosage en pratique clinique, notamment dans
l’exploration du syndrome de Cushing.
Cortisol salivaire
✓
Intérêt dans le diagnostic et le suivi du syndrome
de Cushing : le dosage du cortisol salivaire à minuit est
maintenant clairement admis comme faisant partie
des examens de première intention pour le diagnostic
positif du syndrome de Cushing au même titre que le
dosage du cortisol libre urinaire des 24 heures (CLU) et
le test de freination minute (dosage du cortisol sanguin
et/ou salivaire) [10, 11]. Certains auteurs le considèrent
même comme le premier examen à eectuer avant le
CLU et le test de freination minute étant donné ses
excellentes sensibilité et spécicité, supérieures à 90 %
(12, 13). La valeur seuil de cortisol salivaire proposée
par H. Ra est de 4,3 nmol/l (prélèvement à 23 heures),
valeur donnée à titre indicatif puisqu’elle varie de façon
importante d’une étude à l’autre et en fonction de la
technique utilisée (14). Le dosage de cortisol salivaire
eectué au coucher permet ainsi d’objectiver une sécré-
tion nocturne inappropriée, témoin d’une abolition au
moins partielle du rythme nycthéméral, signe souvent
inaugural du syndrome de Cushing. Le dosage du cor-
tisol salivaire présente plusieurs avantages par rapport
au dosage sanguin. D’une part, la facilité de recueil sali-
vaire permet un prélèvement au domicile du patient, ce
qui est dicile pour un prélèvement sanguin à minuit,
et ce recueil totalement indolore ne génère pas “l’an-
goisse de l’aiguille” ressentie par certains patients. Ce
prélèvement permet ainsi de s’aranchir de tout stress
lié à une hospitalisation et au prélèvement sanguin.
D’autre part, le cortisol salivaire représente la fraction
libre du cortisol sanguin, cortisol biologiquement actif
contrairement au cortisol sanguin habituellement dosé
qui est le cortisol total (cortisol lié à la transcortine ou
Cortisol Binding Globulin, CBG [80 à 90 %] + cortisol lié à
l’albumine [5 à 10 %] + cortisol libre [5 à 10 %]). Seules
des techniques très spécialisées, telles que la spectro-
métrie de masse ou des techniques immunologiques
après dialyse à l’équilibre, permettent un dosage spé-
cique de la fraction libre circulante. Pour appréhender
la fraction libre du cortisol sanguin, l’alternative est un
calcul (équation de Coolens) reposant sur le dosage du
cortisol sanguin total et de la CBG. Ce calcul qui tient
compte de la constante d’anité de la CBG pour le
cortisol est donc pris en défaut en cas (certes excep-
tionnel) d’anomalie qualitative de la CBG mais éga-
lement en présence d’une anomalie quantitative de
l’albumine (cas beaucoup plus fréquent). Toutefois, le
dosage de la CBG n’est pas un dosage courant. Enn,
la dernière approche est le dosage du cortisol dans un
uide biologique où seul le cortisol libre est ltré, ce
qui est le cas pour les urines et la salive. Le dosage du
cortisol libre urinaire est tributaire du recueil exact de
la diurèse des 24 heures et peut être pris en défaut si
le syndrome de Cushing ne se manifeste que par une
augmentation modérée de la cortisolémie (le dosage
global sur les 24 heures restant alors dans les limites
de la normale). Une étude eectuée chez 11 patients
présentant un syndrome de Cushing modéré montrait
que le CLU n’était augmenté que chez 4 des 11 patients
et que cette augmentation était très modérée (inférieure
à deux fois la limite supérieure de la normale). Chez ces
mêmes patients, le cortisol salivaire était augmenté
dans environ 60 % des cas mais la répétition des pré-
lèvements (2 à 16 par patient) a permis d’objectiver
une augmentation du cortisol salivaire sur au moins
deux dosages chez tous les patients (15). En revanche,
le cortisol salivaire à minuit n’est pas un bon index dia-
gnostique de l’hypercortisolisme infraclinique satel-
lite des adénomes corticosurrénaliens (16, 17). Enn,
étant donné la facilité d’obtention des prélèvements
itératifs à domicile, le dosage salivaire du cortisol est
également particulièrement adapté à la recherche d’un
syndrome de Cushing cyclique (dont les cycles peuvent
être espacés de plusieurs mois), ainsi qu’au suivi post-
thérapeutique du syndrome de Cushing.
✓
Intérêt potentiel dans le diagnostic de l’insusance
surrénalienne : quelques études ont été menées sur
l’intérêt potentiel du dosage du cortisol salivaire dans
l’exploration d’une insusance surrénalienne (18-21).
Bien que ces études soient diérentes en termes de
population étudiée, de dose de Synacthène
®
(tétra-
cosactide) injectée et de technique de dosage utilisée,
certains points sont convergents. En eet, le pic de cor-
tisol salivaire est retrouvé entre la 90
e
et la 120
e
minute
après une injection de 250 µg de Synacthène
®
, pic
retardé d’environ une demi-heure par rapport au cor-
tisol sanguin (20). Ce retard ne serait pas uniquement
lié au temps nécessaire au cortisol pour passer du sang
vers la salive (ce qui prend quelques minutes), mais
également aux modications de l’équilibre entre cor-
tisol libre et cortisol lié à la CBG. Lorsque la dose de
Synacthène
®
est plus faible (25 µg i.m. ou 1 µg i.v.),
le pic de cortisol salivaire se situerait entre la 30e et la