Neuropsychiatrie
de
l’enfance
et
de
l’adolescence
(2016)
64,
395—401
Disponible
en
ligne
sur
ScienceDirect
www.sciencedirect.com
MISE
AU
POINT
Apports
de
la
génétique
au
diagnostic
des
troubles
du
spectre
autistique
Genetic
approaches
in
autism
spectrum
disorders
C.
Demilya,,
M.
Assoulineb,
N.
Boddaertc,
G.
Barciad,
C.
Besmonde,
A.
Poissona,
D.
Sanlavillef,
A.
Munnichg
aCentre
de
dépistage
et
de
prises
en
charge
des
troubles
psychiatriques
d’origine
génétique,
centre
de
neuroscience
cognitive,
UMR
5229,
CNRS
et
université
Claude-Bernard
Lyon
1,
centre
hospitalier
le
Vinatier,
69677
Bron
cedex,
France
bAssociation
l’Élan
Retrouvé,
75009
Paris,
France
cInserm
U1000,
service
de
radiologie
pédiatrique,
institut
Imagine,
hôpital
Necker—Enfants-Malades,
université
Paris-Descartes,
75014
Paris,
France
dDépartement
de
neurologie
pédiatrique,
centre
de
référence
épilepsies
rares,
hôpital
Necker—Enfants-Malades,
75014
Paris,
France
eLaboratoire
de
génétique
translationnelle,
Inserm
UMR-1163,
institut
Imagine,
75014
Paris,
France
fLaboratoire
de
cytogénétique,
centre
de
recherche
en
neurosciences
de
Lyon,
centre
de
référence
des
anomalies
du
développement,
Inserm
U1028,
UMR
CNRS
5292,
université
Claude-Bernard
Lyon
1,
69000
Lyon,
France
gInserm
UMR-1163,
institut
Imagine,
hôpital
Necker—Enfants-Malades,
université
Paris-Descartes-Sorbonne,
75014
Paris,
France
MOTS
CLÉS
Troubles
spectre
autistique
;
Déficience
intellectuelle
;
Phénotype
comportemental
;
Génétique
;
Syndromes
microdélétionnels
;
CGH
Array
;
Panel
de
gènes
;
Résumé
La
génétique
des
troubles
du
spectre
autistique
(TSA)
a
longtemps
été
limitée
à
une
approche
relevant
purement
de
la
recherche
et
peu
de
cliniciens
en
percevaient
l’intérêt
concret
pour
leurs
patients.
L’arrivée
des
nouvelles
techniques
moléculaires
a
révolutionné
la
génétique
des
TSA
et
cette
approche
fait
aujourd’hui
partie
de
la
pratique
clinique
courante.
En
effet,
il
est
désormais
possible
de
poser
un
diagnostic
étiologique
et
de
proposer
dans
de
nombreux
cas
un
conseil
génétique
singulier
pour
une
famille.
Le
travail
de
lien
mené
depuis
les
années
1990
entre
le
service
de
génétique
de
l’hôpital
Necker
à
Paris
et
l’association
l’Élan
Retrouvé
a
permis
de
déployer
un
vaste
programme
de
diagnostic
étiologique
des
TSA
compre-
nant
trois
niveaux
d’approche
:
standard
(recherche
des
anomalies
de
l’X
et
caryotype
de
haute
résolution
ou
CGH
Array),
avancé
(puces
de
reséquenc¸age
ou
panel
de
gènes)
et
de
recherche
(exome).
La
combinaison
de
ces
trois
approches
permet
de
poser
un
diagnostic
étiologique
dans
35
à
40
%
des
TSA,
la
plupart
des
remaniements
retrouvés
étant
de
novo,
c’est-à-dire
non
Auteur
correspondant.
Adresses
e-mail
:
caroline.demily@ch-le-vinatier.fr,
(C.
Demily).
http://dx.doi.org/10.1016/j.neurenf.2016.07.002
0222-9617/©
2016
Elsevier
Masson
SAS.
Tous
droits
r´
eserv´
es.
396
C.
Demily
et
al.
Exome
;
Mutations
de
novo
hérités
des
parents.
Il
n’est
donc
pas
exclu
de
penser
qu’un
jour,
chaque
enfant
bénéficiera
d’un
diagnostic
et
recevra
un
traitement
médicamenteux
personnalisé.
Le
fait
de
poser
un
diagnostic
permet
de
comprendre
les
symptômes
présentés
par
l’enfant
mais
s’avère
aussi
souvent
un
immense
soulagement
pour
les
familles.
©
2016
Elsevier
Masson
SAS.
Tous
droits
r´
eserv´
es.
KEYWORDS
Autism
spectrum
disorders;
Intellectual
deficiency;
Behavioral
phenotype;
Genetics;
Microdeletional
syndromes;
CGH
Array;
Gene
panel;
Exome
sequencing;
De
novo
mutations
Abstract
The
genetics
of
autism
spectrum
disorders
(ASD)
has
long
been
limited
to
a
research
approach
and
few
clinicians
perceived
the
concrete
interest
for
their
patients.
The
arrival
of
new
molecular
techniques
has
revolutionized
genetics
of
ASD
and
this
approach
is
now
part
of
routine
clinical
practice.
Indeed,
it
is
now
possible
to
determine
an
etiologic
diagnosis
and
in
many
cases
to
offer
a
unique
genetic
counseling
for
families.
The
work
conducted
since
the
1990s
between
the
genetics
department
of
Necker
Hospital
in
Paris
and
the
association
‘‘l’Élan
Retrouvé’’
helped
deploy
a
broad
ASD
etiologic
diagnosis
program.
This
program
includes
three
levels
of
approach:
standard
(searching
abnormalities
of
the
X
chromosome
and
high
resolution
karyotype
CGH
Array),
advanced
(gene
panel
testing)
and
research
(exome
sequencing).
The
combination
of
these
three
approaches
helps
to
diagnose
a
rare
genetic
disease
in
35
to
40%
of
ASD.
The
majority
of
the
found
mutations
or
rearrangements
occurs
de
novo
and
is
not
inherited
from
the
parents.
It
is
not
excluded
that
one
day,
every
child
will
receive
a
diagnosis
and
a
personalized
treatment.
Having
a
diagnosis
leads
to
understand
the
symptoms
presented
by
the
child.
It
is
also
a
huge
relief
for
families.
©
2016
Elsevier
Masson
SAS.
All
rights
reserved.
Introduction
Les
troubles
du
spectre
autistique
(TSA)
sont
associés
à
une
altération
du
fonctionnement
cognitif
comprenant
:
des
troubles
des
interactions
sociales
;
des
troubles
de
la
communication
;
des
comportements
stéréotypés
et
des
intérêts
restreints.
Cette
triade,
décrite
par
Lorna
Wing
[1],
s’observe
dans
la
petite
enfance
parfois
après
une
phase
de
développe-
ment
normal
(on
parle
alors
de
régression).
Les
premières
descriptions
cliniques
des
TSA
remontent
aux
années
1940.
Leo
Kanner
en
1943
[2]
aux
États
Unis
et
Hans
Asperger
[3]
en
1944
en
Autriche
ont
fourni
les
premières
descriptions
de
l’incapacité
innée
de
construire
des
liens
affectifs
avec
autrui.
Les
études
épidémiologiques
menées
dans
les
TSA
révèlent
une
prévalence
de
1
%
de
la
population
générale
[4]
avec
une
atteinte
préférentielle
des
garc¸ons
(sex-ratio
de
4/1,
de
6/1
pour
le
syndrome
d’Asperger).
Cette
pré-
valence
a
fortement
augmenté
ces
dernières
années
alors
qu’une
distinction
claire
est
faite
entre
les
symptômes
qui
rentrent
dans
le
cadre
des
TSA
et
ceux
qui
relèvent
de
la
déficience
intellectuelle
[5].
Des
critères
diagnostiques
moins
restrictifs,
l’augmentation
de
l’âge
parental,
des
facteurs
environnementaux
tels
que
la
prise
de
certains
traitements
durant
la
grossesse
ou
les
conséquences
de
la
pollution
pourraient
être
des
facteurs
explicatifs
de
l’augmentation
du
nombre
de
personnes
atteintes
[6].
En
pratique
pédopsychiatrique,
le
diagnostic
de
TSA
est
basé
sur
un
entretien
avec
les
parents
:
l’ADI-R
(Autism
Diagnostic
Interview-Revised,
[7])
et
sur
une
évaluation
de
l’enfant,
l’ADOS
basée
sur
des
jeux
impliquant
la
réciprocité
afin
de
juger
de
la
qualité
des
relations
interpersonnelles
(Autism
Diagnosis
Observation
Schedule,
[8]).
La
génétique
de
l’autisme
a
longtemps
été
limitée
à
une
approche
relevant
purement
de
la
recherche
et
peu
de
cliniciens
en
percevaient
l’intérêt
concret
pour
leurs
patients.
En
effet,
la
plupart
des
données
portaient
sur
de
vastes
cohortes
et
ne
mettaient
en
évidence
qu’un
fac-
teur
de
risque
statistique,
peu
interprétable
pour
un
enfant
donné.
L’arrivée
des
nouvelles
techniques
moléculaires
a
révolutionné
la
génétique
de
l’autisme
et
cette
approche
fait
aujourd’hui
partie
de
la
pratique
clinique
courante.
En
effet,
il
est
désormais
possible
de
poser
un
diagnostic
étio-
logique
et
de
proposer
dans
de
nombreux
cas
un
conseil
génétique
singulier
pour
une
famille.
Les
TSA
:
une
composante
génétique
majeure
Les
études
de
familles,
de
jumeaux
et
d’adoption
ont
fourni
de
très
nombreuses
données
concernant
l’épidémiologie
génétique
des
TSA
qui
pourraient
être
considérées
comme
l’une
des
pathologies
neurodéveloppementales
les
plus
influencées
par
des
facteurs
génétiques.
Le
risque
de
présenter
la
maladie
pour
un
apparenté
du
premier
degré
est
5
fois
supérieur
à
celui
de
la
popula-
tion
générale
[9].
Le
risque
est
également
majoré
en
cas
de
consanguinité,
ce
qui
est
un
argument
en
faveur
de
formes
autosomiques
récessives
de
la
pathologie.
Le
taux
Apports
de
la
génétique
au
diagnostic
des
troubles
du
spectre
autistique
397
de
concordance
pour
la
maladie
atteint
80—90
%
chez
les
jumeaux
monozygotes
mais
est
de
20
%
chez
les
jumeaux
dizygotes
[10].
Il
est
intéressant
de
constater
que
la
concor-
dance
entre
les
jumeaux
monozygotes
n’est
pas
de
100
%
(il
est
également
observé
le
même
phénomène
dans
la
schizophrénie).
Le
phénotype
«
autisme
»
résulte
donc
pro-
bablement
d’un
système
d’expression
complexe
incluant
des
facteurs
génétiques,
épigénétiques,
environnementaux
et/ou
stochastiques
(c’est-à-dire
résultant
de
combinaisons
aléatoires).
Les
TSA
pourraient
ainsi
correspondre
dans
certains
cas
à
une
maladie
à
hérédité
complexe.
Ce
modèle
cor-
respond
à
celui
d’autres
pathologies
comme
le
diabète
ou
l’hypertension.
C’est-à-dire
qu’un
même
gène
de
sus-
ceptibilité
peut
avoir
des
effets
multiples
(pléiotropie)
et
certaines
interactions
géniques
peuvent
être
additives
(chaque
gène
intervient
dans
la
maladie),
ou
au
contraire
épistatiques
(un
gène
n’intervient
dans
l’expression
de
la
maladie
qu’à
la
condition
qu’un
autre
gène
soit
déjà
inter-
venu
au
préalable).
Les
mutations
présumées
causales
de
la
maladie
sont
donc
très
variables
:
en
taille,
en
fré-
quence
et
en
manifestations
phénotypiques.
Ces
mutations
ont
un
caractère
de
novo,
c’est-à-dire
qu’elles
résultent
d’anomalies
durant
la
gamétogenèse
et
ne
sont
pas
héritées
des
parents.
La
Haute
Autorité
de
santé
a
publié
en
2010
des
recom-
mandations
sur
la
conduite
à
tenir
médicale
face
à
un
tableau
de
TSA.
Un
examen
neuropédiatrique
complet
doit
être
systématique,
associé
à
un
examen
visuel,
auditif
et
métabolique.
Il
est
également
important
qu’une
consulta-
tion
soit
organisée
auprès
d’un
généticien
avec
la
réalisation
d’un
caryotype
de
haute
résolution.
Le
travail
de
lien
mené
depuis
les
années
1990
entre
le
service
de
génétique
de
l’hôpital
Necker
à
Paris
et
l’association
l’Élan
Retrouvé
montre
l’intérêt
de
cette
approche.
Un
vaste
programme
de
diagnostic
étiologique
des
TSA
a
pu
être
déployé
sur
les
différents
hôpitaux
de
jour
de
l’association.
L’originalité
de
ce
partenariat
réside
tout
d’abord
en
l’organisation
de
consultation
de
génétique
sur
site.
C’est
en
effet
le
généticien
qui
vient
à
la
rencontre
de
l’enfant
et
de
sa
famille
dans
son
milieu
habituel.
Dans
un
premier
temps
de
la
rencontre,
la
démarche
est
expliquée
à
la
famille.
L’enfant
est
ensuite
examiné
soigneusement
au
plan
pédiatrique
général
et
neuropédiatrique.
La
réalisation
d’examens
complémentaires
est
rarement
une
urgence
dans
ce
cas
et
la
plupart
des
prélèvements
peuvent
être
différés
et
réalisés
au
rythme
du
souhait
de
l’enfant
et
de
sa
famille.
Un
troisième
temps
de
cette
approche
est
la
restitution
des
résultats.
La
rencontre
d’un
généticien
dans
le
contexte
d’un
hôpi-
tal
de
jour
de
pédopsychiatrie
a
pour
objectif
de
répondre
à
4
questions
:
s’agit-il
d’une
forme
isolée
ou
syndromique
de
TSA
?
s’agit-il
d’une
forme
familiale
ou
sporadique
?
s’agit-il
d’une
forme
déficitaire
ou
non
?
s’agit-il
d’un
syndrome
génétique
connu
?
Pour
pouvoir
répondre,
trois
niveaux
d’approche
sont
proposés
:
standard,
avancé
et
de
recherche.
L’approche
standard
et
systématique
comprend,
outre
les
investiga-
tions
génétiques,
la
réalisation
d’une
IRM
encéphalique
et
d’un
EEG
avec
rythme
veille/sommeil.
La
réalisation
d’IRM
systématiques
chez
les
enfants
porteurs
d’un
autisme
a
révélé
des
anomalies
morphologiques
fréquentes
[ano-
malies
du
lobe
temporal
:
34
%
(pour
revue
:
[11]),
de
la
substance
blanche
:
25
%
et
dilatation
des
espaces
de
Virchow-Robins
:
7
%],
avec
possiblement
l’existence
d’un
effet
genre
[12].
Un
bilan
métabolique
doit
être
systéma-
tiquement
proposé
bien
que
celui-ci
ait
le
plus
souvent
une
faible
rentabilité.
Cependant,
le
fait
de
poser
un
diagnostic
de
maladie
héréditaire
du
métabolisme
révolutionne
parfois
le
pronostic,
notamment
lorsqu’un
traitement
étiologique
est
disponible,
par
exemple
dans
les
syndromes
de
déficit
en
créatine
ou
dans
les
troubles
du
cycle
de
l’urée.
Approche
standard
:
recherche
des
anomalies
de
l’X
et
recherche
des
variations
du
nombre
de
copies
ou
CNV
(copy
number
variations)
par
le
caryotype
moléculaire
de
haute
résolution
(CGH
Array)
Recherche
des
anomalies
liées
à
l’X
En
raison
de
la
prédominance
masculine
des
TSA,
le
chro-
mosome
X
a
très
tôt
fait
l’objet
d’attentions
particulières
dans
la
démarche
diagnostique.
Le
syndrome
de
l’X
fragile
(causé
par
l’expansion
de
la
répétition
CGG
en
amont
du
gène
FMR1
Fragile
mental
X
retardation
1
et
en
aval
de
son
promoteur
sur
le
chro-
mosome
X,
la
prémutation
étant
héritée
de
la
mère)
et
le
syndrome
de
Rett
ont
été
les
premières
affections
monogé-
niques
associées
aux
TSA.
Le
syndrome
de
Rett
(prévalence
de
1/10
000),
il
se
caractérise
de
manière
quasi
pathognomonique
par
la
dispa-
rition
(entre
6
et
30
mois)
des
mouvements
coordonnés
de
la
main
avec
apparition
de
mouvements
stéréotypés
(bat-
tements,
claquements,
torsion,
tapotements,
automatisme
des
mains
à
la
bouche.
.
.).
Les
troubles
de
la
commu-
nication
et
le
retrait
social
apparaissent
dans
la
petite
enfance
avec
une
altération
importante
du
langage
mais
des
phénotypes
plus
atténués
ont
été
décrits.
Ce
syn-
drome
atteint
préférentiellement
les
femmes
puisque
les
formes
masculines
sont
le
plus
souvent
très
sévères
avec
un
polyhandicap
qui
aboutit
souvent
au
décès
précoce
de
l’enfant.
Des
mutations
du
gène
MECP2
(methyl-CpG
binding
protein
2
situé
sur
le
bras
long
du
chromo-
some
X)
sont
impliquées
dans
la
survenue
du
syndrome
mais
aussi
de
certaines
formes
de
déficience
intellectuelle,
d’encéphalopathies
ou
de
syndrome
d’Angelman
atypique
[13].
Recherche
des
variations
du
nombre
de
copies
Les
formes
syndromiques
de
TSA
peuvent
aussi
être
liées
à
la
présence
d’une
variation
du
nombre
de
copies
de
l’ADN
(CNV
pour
copy
number
variation)
pénétrant,
et/ou
au
dysfonctionnement
d’un
gène
donné.
Les
CNV
sont
des
remaniements
génétiques
rares
(moins
de
1
%),
398
C.
Demily
et
al.
qui
correspondent
à
des
délétions
ou
des
duplications
de
taille
variable,
le
plus
souvent
non
visibles
sur
un
caryotype
standard.
Ces
variations
intéressent
un
nombre
variable
de
gènes
en
fonction
de
leur
taille.
La
forte
homologie
de
séquence
des
répétitions
segmentaires
peut
en
effet
provoquer
des
recombinaisons
homologues
non
alléliques
à
l’origine
de
délétions
et
de
duplications
récurrentes.
La
CGH
Array
(également
appelée
caryotype
moléculaire
ou
analyse
chromosomique
sur
puce
à
ADN
ou
encore
hybri-
dation
génomique
comparative)
qui
permet
l’étude
des
CNV
(dont
la
taille
peut
être
très
petite
en
fonction
de
la
réso-
lution
de
la
puce)
a
constitué
un
premier
pas
vers
une
mise
en
évidence
plus
fine
des
mécanismes
génétiques
res-
ponsables
des
TSA
et
correspond
à
une
étape
standard
de
recherche
diagnostique.
La
CGH
array
repose
sur
une
tech-
nique
d’hybridation
génomique
comparative.
Des
séquences
génomiques
(ADN)
du
patient
et
d’un
témoin
sont
marquées
par
un
fluochrome
:
ces
fragments
sont
appelés
«
sondes
».
L’ADN
du
patient
est
généralement
marqué
par
un
fluoro-
chrome
émettant
dans
le
rouge.
L’ADN
du
témoin
est
quant
à
lui
marqué
par
un
fluorochrome
émettant
dans
le
vert.
Ces
fragments
d’ADN
rouge
et
vert
sont
co-hybridés
en
compétition
sur
des
lames
de
verres
sur
lesquels
sont
dépo-
sées
des
fragments
d’ADN
correspondantes
à
des
régions
du
génome.
Un
rapport
d’intensité
de
fluorescence
est
cal-
culé
pour
chaque
région
du
génome
testé.
Un
traitement
statistique
des
données
est
ensuite
réalisé
grâce
à
des
logi-
ciels
dédiés.
Le
ratio
d’intensité
des
deux
fluorochromes
au
niveau
d’une
région
génomique
donnée
aura
une
valeur
théorique
proche
de
1
(2
copies
pour
le
patient
en
rouge
et
2
copies
pour
le
témoin
en
vert
:
2/2
=
1).
En
cas
de
délé-
tion
(perte
d’une
copie),
ce
rapport
théorique
sera
de
0,5
(1
copie
chez
le
patients
versus
deux
chez
le
témoin)
et
de
1,5
en
cas
de
duplication
(1
copie
de
plus
:
3
copies
chez
le
patient
versus
2
copies
chez
le
témoin).
Les
résultats
sont
donnés
sous
forme
graphique
un
«
point
»
correspond
à
la
valeur
du
ratio
d’intensité
de
fluorescence
au
niveau
d’une
région
du
génome.
L’ensemble
des
«
points
»
est
positionné
le
long
d’un
idéogramme
représentant
un
chromosome.
En
France,
le
réseau
AChro-Puce
permet
de
fédérer
chaque
plateau
technique
avec
CGH
Array,
d’avoir
accès
à
la
biblio-
graphie
concernant
les
puces
à
ADN
et
à
diverses
ressources
et
documents
utiles
(http://www.renapa.univ-montp1.fr).
Nous
sommes
tous
porteurs
de
CNV
[14].
Les
CNVs
sont
classés
à
l’aide
des
bases
de
données
internationales
en
CNV
pathogène,
CNV
polymorphe
(fréquent
dans
la
population
et
sans
conséquence
phénotypique)
et
CNV
de
signification
inconnue
dans
l’état
actuel
des
connaissances
(on
parle
alors
de
VOUS).
C’est
dans
ce
dernier
cas
qu’il
est
néces-
saire
de
rechercher
ce
CNV
chez
l’un
des
parents
afin
de
savoir
si
il
est
hérité
ou
de
survenue
de
novo
afin
de
don-
ner
des
arguments
supplémentaires
pour
conclure
quant
à
sa
pathogénicité,
le
caractère
de
novo
étant
en
faveur
de
la
pathogénicité
du
CNV.
Les
stratégies
d’étude
des
CNV
ont
révélé
qu’une
large
délétion
ou
duplication
rare
mais
très
pénétrante
pouvait
entraîner
un
autisme
syndromique
dans
25—30
%
des
cas,
ce
taux
correspond
donc
à
la
rentabilité
diagnostique
de
l’approche
standard.
La
présentation
clinique
est
alors
sou-
vent
atypique,
associée
à
des
éléments
dysmorphologiques
et/ou
une
déficience
intellectuelle.
À
titre
d’exemple,
la
microdélétion
22q11.2
est
le
syn-
drome
microdélétionnel
le
plus
fréquent
dans
la
population
générale
:
1/4000
naissances
[15].
Il
s’agit
d’une
affection
polymalformative
associant
de
manière
variable
:
une
cardiopathie
congénitale
du
type
conotroncale,
une
dys-
morphie
faciale,
des
troubles
cognitifs
hétérogènes
allant
parfois
jusque
la
déficience
intellectuelle,
une
hypoplasie
du
thymus
et
des
parathyroïdes,
une
fente
palatine
ou
une
insuffisance
vélaire.
La
microdélétion
22q11.2
est
associée
dans
11
%
des
cas
aux
TSA
[16].
D’autres
microremaniements
sont
associés
aux
TSA,
comme
le
syndrome
de
Williams
(12
%
de
TSA),
le
syn-
drome
de
Smith
Magenis
(15
%),
le
syndrome
de
Prader
Willi
et
le
syndrome
d’Angelman
(qui
sont
des
anomalies
de
l’empreinte
génomique
parentale),
la
délétion
15q13.3,
la
délétion
22q13
(région
chromosomique
qui
contient
le
gène
SHANK3),
la
microduplication
2q23.1
ou
la
microdélétion
5q14.3.
Cette
liste
n’est
bien
sûr
pas
exaustive
et
la
généra-
lisation
du
caryotype
moléculaire
dans
le
bilan
standard
de
l’autisme
permet
de
découvrir
de
très
nombreux
rema-
niements
impliqués
dans
l’étiologie
des
TSA
(20
%
des
cas
environ).
Approche
avancée
:
panels
de
reséquenc¸age
ciblés
Lorsque
l’étude
par
CGH
Array
ne
révèle
pas
de
CNV
patho-
gène,
il
est
nécessaire
de
pousser
plus
loin
les
investigations
en
proposant
la
recherche
de
formes
monogéniques
de
TSA.
Ces
formes
monogéniques
sont
des
diagnostics
difficiles
à
poser
:
de
part
leur
rareté
[17],
du
plateau
technique
nécessaire
pour
ces
diagnostics
et
en
raison
du
manque
de
caractérisation
cliniques
de
ces
syndromes
[18].
La
plupart
des
gènes
associés
aux
TSA
sont
impliqués
dans
les
circuits
neuronaux,
en
particulier
au
niveau
synaptique.
C’est
ainsi
que
les
gènes
stabilisateurs
de
la
synapse,
comme
la
famille
des
neurexines,
des
neuroligines
et
les
gènes
SHANK
ont
été
les
premiers
à
être
associés
au
phénotype
«
autisme
»
[19].
Le
service
de
génétique
clinique
du
centre
hospitalier
Necker—Enfants-Malades
en
lien
avec
l’IHU
IMAGINE
pro-
pose
aujourd’hui
dans
les
TSA
et
la
DI
en
diagnostic
courant,
une
approche
de
type
étude
simultanée
à
haut
débit
de
gènes
sur
puces
de
reséquenc¸age
dédiée
(IDFix),
d’autres
CLAD
(Centre
labellisés
anomalies
du
développement)
en
France
proposent
également
ce
type
d’approche,
comme
à
Strasbourg
par
exemple.
Ces
examens
sont
uniquement
prescrits
par
les
généticiens
à
l’heure
actuelle.
Deux
cent
cinquante-trois
gènes
sont
actuellement
ciblés
par
IDFix
(315
transcripts)
pour
une
rentabilité
diagnostique
d’environ
20
%
lorsque
la
CGH
Array
est
normale.
Le
projet
DHOS-PNMR2
piloté
par
l’IHU
IMAGINE
a
per-
mis
de
déterminer
une
dizaine
de
gènes
préférentiellement
impliqués
dans
les
formes
monogéniques
de
TSA
ou
de
DI,
qui
sont
les
suivants
:
ARID1B,
SCN2A,
ANKRD11,
SATB2,
SYN-
GAP1,
DYRK1,
GRIN2A,
GRIN2B,
SHANK3,
NLGN3-4.
Outre
le
gène
SHANK3
qui
a
fait
l’objet
de
très
nom-
breuses
études
dans
l’autisme
[20]
notamment
pour
son
rôle
dans
la
formation
et
la
maintenance
synaptique,
le
gène
ANKRD11
(ankyrin
repeat
domain
11)
illustre
bien
l’intérêt
Apports
de
la
génétique
au
diagnostic
des
troubles
du
spectre
autistique
399
de
cette
nouvelle
approche.
Le
syndrome
KBG
(OMIM
148050),
causé
par
des
mutations
de
ANKRD11
ou
une
délé-
tion
de
la
région
16q24.3,
est
un
syndrome
rare
caractérisé
par
un
aspect
morphologique
cranio-facial
particulier
:
visage
ovale,
hypertélorisme,
pointe
du
nez
bulleuse,
phil-
trum
long,
macrodontie
des
incisives.
Il
associe
également
des
malformations
du
squelette
et
des
mains
ainsi
qu’une
petite
taille.
Les
anomalies
neurodéveloppementales
asso-
ciées
sont
essentiellement
une
déficience
intellectuelle,
des
symptômes
autistiques
ainsi
qu’une
comitialité
[21].
Cependant,
la
fréquence
de
ce
syndrome
pourrait
être
largement
sous-estimée
en
raison
de
la
fréquence
des
phénotypes
intermédiaires
qui
associent
parfois
des
formes
purement
cognitives
ou
autistiques
et
de
l’absence
de
la
recherche
spécifique
de
remaniements
de
ANKRD11
dans
les
TSA.
La
question
des
phénotypes
intermédiaires
illustre
bien
la
nécessité
de
développer
dans
l’étiologie
génétique
des
TSA
une
approche
biologique
assez
systématisée
car
cette
démarche
ne
peut
reposer
sur
un
seul
examen
clinique,
aussi
fin
soit-il.
En
effet,
la
grande
variabilité
de
l’expression
phénotypique
d’un
même
remaniement
et
la
richesse
des
points
d’appel
possibles
rendent
la
démarche
clinique
sou-
vent
insuffisante.
D’autres
gènes
sont
également
des
pistes
prometteuses.
Des
mutations
du
gène
GRIN2A
ont
été
associées
récemment
à
un
syndrome
très
spécifique
associant
une
épilepsie
à
des
troubles
du
langage
[22].
Dans
ces
tableaux
très
particu-
liers
d’encéphalopathie,
les
troubles
cognitifs
spécifiques
restent
à
préciser.
Tarabeux
et
al.
[23]
ont
identifié
les
pre-
miers
une
mutation
de
novo
de
GRIN2B
chez
un
patient
porteur
d’un
TSA,
d’autres
mutations
ont
été
décrites
depuis.
Le
gène
SYNGAP1
code
pour
une
protéine
expri-
mée
de
manière
sélective
au
niveau
cérébral,
constitutive
des
récepteurs
NMDA.
Les
souris
KO
pour
SYNGAP1
décèdent
rapidement
après
la
naissance,
soulignant
le
rôle
essentiel
de
la
protéine
dans
le
développement
précoce.
Les
souris
porteuses
de
mutations
de
SYNGAP1
présentent
des
troubles
de
la
plasticité
synaptique
ainsi
que
des
troubles
des
apprentissages.
L’approche
par
les
puces
de
reséquenc¸age
ciblées
sur
des
gènes
candidats
permet
plus
largement
de
contourner
cer-
taines
difficultés
posées
par
les
recherches
globales
sur
le
génome,
notamment
la
CGH
Array
(«
accidental
findings
»
c’est-à-dire
trouver
ce
que
l’on
ne
cherche
pas.
.
.,
VOUS.
.
.).
Cette
approche
permet
également
d’envisager
une
corréla-
tion
génotype/phénotype
beaucoup
plus
fine,
notamment
grâce
à
la
collaboration
entre
pédopsychiatres,
neuropsy-
chologues,
neuropédiatres,
radiologues
et
généticiens.
La
recherche
:
séquenc¸age
d’exome
ou
Next
Generation
Sequencing
(NGS)
Il
est
aujourd’hui
possible
de
proposer
dans
le
cadre
de
la
recherche
(c’est-à-dire
non
pris
en
charge
dans
le
cadre
de
l’assurance
maladie),
la
technique
de
Next
Generation
Sequencing
(NGS)
pour
le
diagnostic
étiologique
d’un
TSA.
Plus
d’une
décennie
après
le
premier
séquenc¸age
complet
du
génome
humain,
l’utilisation
des
techniques
de
NGS
est
une
véritable
révolution
pour
l’étude
de
la
génétique
humaine,
permettant
la
séquence
de
l’exome
(c’est-à-dire
de
l’ensemble
des
exons
qui
codent
pour
des
protéines)
qui
constitue
1
%
du
génome
entier
[24].
Cette
approche
requiert
seulement
quelques
micro-
grammes
d’ADN
qui
peuvent
être
obtenus
à
partir
de
quelques
millilitres
de
sang
périphérique.
L’ADN
extrait
est
ensuite
fractionné,
amplifié
par
une
procédure
enzymatique
et
soumis
à
la
procédure
de
séquenc¸age
selon
la
méthode
de
Sanger
à
l’intérieur
d’un
automate
microfluidique
qui
peut
gérer
jusqu’à
96
échantillons
différents.
Les
données
de
séquences
générées
à
partir
de
ces
frag-
ments
(environ
5
Giga
octets)
sont
transmises
en
temps
réel
à
un
serveur
comportant
un
algorithme
dont
le
rôle
sera
de
reconstruire
le
génome
soumis
à
cette
procédure
en
regrou-
pant
les
séquences
qui
se
recouvrent
partiellement
jusqu’à
ce
que
toutes
les
séquences
générées
aient
été
organisées
de
manière
cohérentes.
Celles-ci
sont
alors
accessibles
au
biologiste
généticien
via
une
interface
dédiée
qui
permet
de
mettre
en
évidence
des
variants
de
séquence
d’ADN
en
fonction
du
mode
de
transmission
de
la
maladie
(récessif
homozygote
ou
hétéro-
zygote,
dominant,
lié
à
l’X
ou
de
novo).
Le
nombre
de
variants
mis
en
évidence
doit
être
pon-
déré
en
fonction
de
leurs
fréquences
dans
les
populations
concernées
et
en
fonction
de
l’aspect
potentiellement
délé-
tère
du
type
de
variant
qui
peut
être
une
substitution
d’une
base
pour
une
autre,
une
insertion
ou
une
délétion.
Les
conséquences
peuvent
consister
en
un
changement
d’acide
aminé
au
niveau
de
la
protéine,
à
la
perte
ou
au
gain
d’un
exon
au
niveau
du
gène
et
donc
à
une
perte
ou
un
ajout
d’acides
aminés,
ou
encore
à
une
terminaison
prématurée
de
la
séquence
protéique
produisant
ainsi
une
molécule
non
fonctionnelle.
Cette
dernière
étape
est
facilitée
par
l’utilisation
d’algorithmes
de
prédiction
de
l’aspect
délétère
d’un
variant.
Cependant,
il
absolument
nécessaire
de
relativiser
ces
prédictions
car
deux
algorithmes
indépendants
peuvent
générer
des
résultats
contradictoires.
La
décision
de
considérer
un
variant
donné
pour
son
implication
dans
une
maladie
génétique
appartient
donc
en
final
au
généticien
qui
pourra
également
s’appuyer
sur
des
travaux
portant
sur
la
protéine
concernée
précédemment
effectués
et
sur
la
bibliographie
scientifique
au
sens
le
plus
large
possible.
Cette
approche
d’analyse
exomique,
maintenant
très
fiable,
a
permis
d’identifier
en
quelques
années
un
très
grand
nombre
de
gènes
impliqués
dans
toutes
sortes
de
pathologies
génétiques.
Dans
le
cas
des
TSA,
de
grandes
cohortes
ont
pu
être
analysées
et
générées
de
nombreux
résultats
en
des
temps
très
courts
[25—27].
La
prochaine
étape,
déjà
utilisée
par
certains
labora-
toires,
consistera
à
séquencer
la
totalité
du
génome
et
non
plus
seulement
les
parties
codantes.
Les
défis
sont
ici
de
taille
car
il
faut
mettre
au
point
et
améliorer
des
outils
bioinformatiques
permettant
de
manipuler
une
masse
de
données
cent
fois
supérieure,
de
considérer
des
variants
qui
sont
hors
des
régions
codantes
(les
introns
et
les
régions
intergéniques),
et
surtout
de
pouvoir
établir
une
relation
fonctionnelle
entre
un
variant
nucléotidique
situé
à
plusieurs
mégabases
d’un
gène
cible,
voire
sur
un
autre
chromosome.
À
terme,
l’avenir
de
la
génétique
se
situe
donc
dans
la
résolution
des
interactions
à
distance
et
la
1 / 7 100%