Les Entretiens du Palais Royal
LE CONTROLE DES CONCENTRATIONS
la « position dominante », qui est le critère de fond utilisé
jusqu'à présent, et celui de la « diminution substantielle de la
concurrence », utilisé par d'autres systèmes juridictionnels, ont
produit des résultats largement convergents. Le règlement de
1989 se fondait sur la notion de « position dominante », selon
laquelle une ou plusieurs entreprises sont réputées détenir une
telle position dominante si elles possèdent le pouvoir
économique d'influencer les paramètres de la concurrence, en
particulier les prix, la production, la qualité de la production, la
distribution, l'innovation, et de restreindre sensiblement la
concurrence. Ce critère considère comme crucial de savoir s'il
subsiste une concurrence suffisante après la concentration
pour que les consommateurs disposent d'un choix suffisant.
Selon l'interprétation qu'en ont donnée la Commission et les
juridictions européennes au fil des années, cette notion
recouvre également les situations de duopole (voir les
décisions de la Cour dans les affaires Kali et Salz/MdK et
Gencor/Lonrho), ainsi que les situations de « position
dominante collective » ou oligopoles (Airtours/First Choice). Le
présent règlement intègre cette interprétation et le critère
englobe maintenant tous les effets anticoncurrentiels sur les
marchés oligopolistiques où l'entreprise issue de la
concentration ne serait pas dominante au sens strict du terme.
Le champ d'application du présent règlement est élargi aux
situations de duopole et d'oligopole pouvant donner lieu à des
problèmes de concurrence (voir Lignes directrices sur
l'appréciation des « concentrations horizontales », ou
concentrations entre concurrents).
Champ d'application
Le règlement s'applique à toutes les « concentrations » de
« dimension communautaire ». Une « concentration » est
réputée réalisée lorsqu'un changement durable du contrôle
résulte :
de la fusion de deux ou plusieurs entreprises ou parties
d'entreprises antérieurement indépendantes ;
de l'acquisition directe ou indirecte, par une ou plusieurs
personnes (détenant déjà le contrôle d'une entreprise au moins)
ou par plusieurs entreprises qui acquièrent le contrôle d'une ou
de plusieurs autres entreprises.
Les opérations de concentration multiples, subordonnées l'une
à l'autre ou étroitement liées, sont considérées constituer une
seule concentration.
Une concentration acquiert une « dimension communautaire » :
lorsque le chiffre d'affaires total réalisé sur le plan mondial
par l'ensemble des entreprises concernées représente un
montant supérieur à 5 milliards d'euros ;
lorsque le chiffre d'affaires total réalisé individuellement dans
l'UE par au moins deux des entreprises concernées représente
un montant supérieur à 250 millions d'euros, à moins que
chacune des entreprises concernées réalise plus des deux tiers
de son chiffre d'affaires total dans l'UE à l'intérieur d'un seul et
même État membre.
Si les seuils précités ne sont pas atteints, il s'agit néanmoins
d'une concentration de dimension communautaire, si :
le chiffre d'affaires total réalisé sur le plan mondial par
l'ensemble des entreprises concernées représente un montant
supérieur à 2,5 milliards d'euros ;
dans chacun d'au moins trois États membres, le chiffre
d'affaires total réalisé par toutes les entreprises concernées est
supérieur à 100 millions d'euros ;
dans chacun d'au moins trois États membres, le chiffre
d'affaires total réalisé individuellement par au moins deux
entreprises concernées est supérieur à 25 millions d'euros ;
le chiffre d'affaires total réalisé individuellement dans l'UE par
au moins deux des entreprises concernées représente un
montant supérieur à 100 millions d'euros, à moins que chacune
des entreprises concernées réalise plus de deux tiers de son
chiffre d'affaires total dans l'UE à l' intérieur d'un seul et même
État membre.
Bien que le plus pratique, le chiffre d'affaires n'est pas le seul
critère pour identifier les concentrations de dimension
européenne. Un autre critère, appelé critère du « type 3+ »,
prévoit une compétence communautaire exclusive de la
Commission lorsque tous les États membres ou au moins trois
d'entre eux formulent une demande de renvoi à la Commission.
Dans une Union européenne élargie à 27 États membres, le
renforcement du principe du guichet unique, tel que celui mis
en place par le présent règlement à travers la nouvelle
procédure de pré-notification, présente l'avantage non
négligeable de simplifier la procédure et réduire les cas de
notifications multiples.
Il existe également d'autres critères que celui du chiffre
d'affaires et celui du « type 3+ » : ils accompagnent maintenant
le nouveau critère de renvoi aux autorités compétentes des
États membres. Un État membre peut maintenant informer la
Commission du fait qu'une conce
« dimension communautaire », affecte ou menace d'affecter de
manière significative la concurrence effective dans un marché
spécifique à l'intérieur d'un État membre (pour plus
d'information sur la procédure du renvoi, voir infra). Ce système
de renvoi aux autorités nationales de la concurrence n'entend
pas affaiblir le principe du « guichet unique », mais vise à
permettre un examen de la concentration au niveau le mieux
placé pour en apprécier les effets potentiels.
L'objectif de cet examen est de vérifier la compatibilité d'une
concentration de dimension européenne avec le marché
commun, c'est-à-dire savoir si la concentration crée ou renforce
une position dominante entravant de manière significative une
concurrence effective sur le marché.
Procédure de notification : les entreprises et les personnes
concernées
Suivant la règle générale, les concentrations de dimension
communautaire doivent être notifiées à la Commission avant
leur réalisation et après la conclusion de l'accord, l'offre
publique d'achat ou d'échange ou l'acquisition d'une
participation de contrôle. Toutefois, le présent règlement,
cherchant à rationaliser les délais de la notification des projets
de concentrations à la Commission, permet la notification avant
la conclusion d'un accord contraignant et supprime l'obligation
de notifier les opérations dans un délai d'une semaine suivant
la conclusion de l'accord. Ceci permet non seulement
d'assouplir le système mais également de faciliter la
coordination des enquêtes en matière de concentrations avec
les autres systèmes juridictionnels.
Dans ce but de coordination avec les autorités nationales
compétentes, le présent règlement introduit la possibilité pour
les personnes ou les entreprises concernées d'informer la
Commission, au moyen d'un mémoire motivé, avant la
présentation de la notification. Cette procédure, dite de pré-
notification, donne la possibilité aux parties de démontrer à la
Commission que la concentration proposée, bien
qu'aboutissant à une concentration de dimension
transfrontalière, affecte la concurrence sur le marché d'un État
membre. Si, dans un délai de quinze jours ouvrables suivant la
réception du mémoire, l'État membre visé dans le mémoire
motivé n'exprime pas son désaccord sur la demande de renvoi
de l'affaire, la Commission a vingt-cinq jours ouvrables à
compter de la réception du mémoire motivé pour renvoyer tout
ou partie de l'affaire aux autorités compétentes de cet État
membre en vue de l'application du droit national de la
concurrence de cet État.
La même procédure s'applique lorsqu'une personne ou une
entreprise désire attirer l'attention de la Commission sur les
effets transfrontaliers qu'une concentration, qui n'a pas de
dimension communautaire, pourrait avoir au niveau européen.
Dans ce cas, la demande est réputée acceptée, si, dans le