risqUe fidUciaire : FIDRISK

publicité
risque fiduciaire : FIDRISK
Un service à la clientèle loyal et éthique
La persuasion clandestine
Robert Pouliot
Q
u’est-ce qui influence le plus les
investisseurs : les rendements de
performance ou la publicité ?
Faut-il combiner les deux pour attirer
davantage l’attention des investisseurs ?
Et lorsque deux fonds concurrents affi-
Deux principes directeurs de FidRisk
sur la déontologie commerciale
GOUVERNANCE FIDUCIAIRE - RISQUE STRUCTUREL
Principe G-11Processus de contrôle des flux
et des variations de capitaux.
Principe G-12Approche des systèmes
de reddition de compte, de marketing
et de pratiques de vente.
chent la même performance, le conseiller
a-t-il intérêt à favoriser le fonds qui jouit
de la plus forte publicité ?
La publicité a un effet considérable
sur les consommateurs et frise parfois
la persuasion clandestine. Une étude1
démontre que l’annonce publicitaire
peut expliquer des différences de 20 %
dans les souscriptions entre fonds de
même nature. À la suite des accords
de 1994, qui fixaient les conditions de
publicité sur les rendements entre l’industrie et la Securities and Exchange
Commission (SEC) de Washington,
les chercheurs ont recensé la publicité
dans deux publications, l’hebdomadaire
Barron’s et le mensuel Money Magazine, pour vérifier s’il y avait un écart
entre les résultats annoncés et le rendement des mêmes fonds un an plus
tard. Comme le montre le graphique
ci-contre, la valeur ajoutée constatée et
promue dans l’annonce s’inverse complètement douze mois plus tard, à la
manière du fameux test psychologique
des taches d’encre de Rorschach.
www.conseiller.ca
conseiller
20
Selon une autre recherche2 portant sur l’expérience suédoise de
50 000 messages publicitaires de
455 fonds communs diffusés entre
2000 et 2005, peu d’annonces contenaient des informations pertinentes
pour un investisseur rationnel (par
exemple le ratio de dépenses ou la
mesure de risque), même si elles pouvaient inciter beaucoup d’investisseurs
à choisir des fonds à frais et à risques
plus élevés.
En d’autres termes, la publicité
offre peu de valeur utile aux investisseurs, comme l’illustre plusieurs
recherches menées aux États-Unis3.
De nombreuses publicités montrent
des lingots d’or lorsque les marchés
montent et des symboles de sécurité
lorsque ceux-ci déclinent. Un trio
de chercheurs de Harvard a mis en
lumière le phénomène de « persuasion clandestine » dans la publicité
de fonds collectifs, révélant comment
l’utilité de l’information est remplacée par la convenance psychologique
d’informations nettement moins utiles, mais mieux reçues émotivement
par les consommateurs.
La publicité a un effet direct sur les
apports de capitaux. Plus les actifs d’un
fonds gonflent au-delà d’un certain
niveau (plus d’un milliard de dollars
au Canada), plus il devient difficile de
continuer à mettre en œuvre la même
stratégie de placements. Les rendements ont alors tendance à décliner,
surtout lorsque la croissance de ces
fonds est très rapide (plus de 15 % par
année). En effet, une étude privée réalisée par FidRisk à partir de l’univers
de MorneauSobeco indique que les
fonds de plus d’un milliard de dollars
ne se classent jamais dans le 5e centile
dans six catégories d’actifs échelonnées sur 5 ans et sur 10 ans (actions
Sirènes de publicité : deux réalités sur les rendements
16 %
14 %
12 %
Surperformance en %
10 %
Valeur ajoutée
par rapport :
avant
Publicité faite sur les résultats
de 294 fonds dans Barron’s et
Money Magazine en 1994
aux fonds équivalents
à l’indice S&P/500
8 %
à l’Alpha de Jensen
6 %
à l’Alpha sur 4 facteurs
4 %
2 %
0 %
-2 %
0 %
-5 %
-10 %
après
-20 %
Source : « Truth in Mutual Fund
Advertising : Evidence on Future
Performance Flow ». Graphiques de
Leon Beukes, Hewitt, 2003.
Résultats des portefeuilles un an après le mois
suivant la parution des annonces. Presque
toute la valeur ajoutée avait disparu !
canadiennes, américaines, internationales, globales, balancées et obligations), qu’ils se classent seulement à
deux reprises dans le premier quartile
et arrivent quatre fois premiers avec
leur moyenne.
Communication des
rendements
Autrement dit, la communication des
rendements de portefeuille et la promotion qui les entoure prêtent souvent à
confusion et peuvent suggérer aux investisseurs que la performance persistera.
Pour éviter en effet la manipulation clandestine, les règles publicitaires contraignent généralement les promoteurs de
fonds à des informations de type objectif
comme les résultats de performance, ce
qui tend à entretenir le mirage de la persistance des rendements. Non seulement
cette persistance est peu démontrable
au-delà de six à huit trimestres (et
encore), comme le démontre une abondante recherche universitaire internationale5, mais l’aptitude des gestionnaires à
éclipser les indices de marché est encore
plus difficile à déterminer.
C’est en garantissant des pratiques
supérieures que les organisations peu-
vent apparier leur performance à celle
du marché sur un horizon moyen de
cycle de quatre à cinq ans. Selon Standard & Poor’s (S&P), très peu de gestionnaires, dont la performance
dépasse la médiane, réussissent au
cours des cinq années suivantes à
maintenir le même niveau de rendement. C’était le cas, en 2007, d’à peine
13,2 % des gestionnaires de grandes
capitalisations, de 9,9 % des gestionnaires de capitalisations moyennes et
de 10 % des gestionnaires de petites
capitalisations. La plupart des fonds du
premier quartile affichaient auparavant des classements de second et troisième quartiles, au point où S&P croit
inutile de rechercher des fonds qui se
classent parmi le premier quartile.
Contrairement à la croyance populaire,
les gestionnaires actifs ne surpassent
pas plus les marchés en période de
baisse. S&P Index Services révélait
en 2008 que 38,9 % des fonds d’actions
canadiennes avaient battu le S&P/TSX
entre août 2000 et décembre 2002. En
grandes capitalisations, 34,4 % des
fonds avaient fait mieux et en petites
capitalisations, 30 % seulement.
septembre 2009
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1
2
3
4
5
« Truth in Mutual Fund Advertising: Evidence
on Future Performance and Fund Flows » par
Prem C. Jain, et Joanna Shuang Wu.
« Advertising and Portfolio Choice » par Henrik
Cronqvist.
« Advertising and Mutual Funds: From
Families to Individual Funds » par Steven T.
Gallaher, Ron Kaniel, Duke University et
Laura T. Starks, « Persuasion in Finance » par
Sendhil Mullainathan, et Andrei Shleifer. Les
deux universitaires de Harvard ont également
réalisé, avec Joshua Schwartzstein, une étude
complémentaire importante sur le phénomène
de persuasion intitulée « Coarse Thinking and
Perrsuasion ».
« Does Mutual Fund Advertising Practice
Conform to Financial Theories of the
Information Needed for Investment
Decisions? » par Bruce A. Huhmann et
Nalinaksha Bhattacharyya, University of
Alaska Anchorage.
« Performance persistence for Mutuel Funds:
Academic Evidence » par Hossein Kazemi,
Thomas Schneeweis et Dulari Pancholi.
Cette chronique est la quatrième d’une série consacrée aux
25 principes directeurs préconisés
par FidRisk, un programme communautaire de caisse de retraites,
de fondations et de regroupements
de conseillers, qui vise à promouvoir
de meilleures pratiques fiduciales
en gestion de portefeuille.
Pour plus d’information :
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