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La redécouverte de l’espace, de son économie et des liens sociaux
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Tiré de: La logique sociale du développement territorial, Frank Moulaert et Jacques Nussbaumer,
ISBN 978-2-7605-1373-0 • D1373N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
exogène au modèle (Amable et Guellec, 1992 ; Guellec et Ralle, 2001). La
croissance à long terme ne dépend donc que de deux facteurs exogènes.
Sachant que la productivité marginale du capital est décroissante, la crois-
sance de la production n’est possible que grâce à l’évolution de la force
de travail. Cette dernière relève de l’évolution démographique, mais aussi
de la capacité à produire (Guellec et Ralle, 2001). La croissance du capital
ne peut venir que d’une meilleure capacité à combiner les facteurs de
production. Or, cela implique une fonction de production qui intègre l’évolu-
tion de la technologie, ce qui n’est pas couvert par le modèle de Solow.
Ainsi, pour intégrer l’évolution du système économique, les modèles
néoclassiques considèrent que le progrès technique permet d’améliorer la
capacité de production de la force de travail (hypothèse de neutralité du
progrès technique), ce qui a le même effet que la croissance démogra phique.
Les facteurs infl uençant la croissance étant exogènes au modèle, il existerait
un taux de croissance de long terme qui refl éterait une croissance « natu-
relle ». Par rapport aux modèles keynésiens, les résultats de Solow sont
donc très optimistes. La croissance à long terme est assurée par le progrès
technique exogène et les modèles spatiaux, qui intègrent le commerce
international ou interrégional, concluent à une possible convergence des
taux de croissance des espaces économiques (Bennaghmouch, 1997). Ainsi,
deux économies similaires du point de vue de leur structure (technologie,
taux d’épargne, etc.) vont voir à long terme leurs taux de croissance conver-
ger. Notons également que dans le cadre d’un modèle néoclassique, l’ajus-
tement par le marché se fait instantanément. En conséquence, l’équilibre
sur le marché du travail est atteint (hypothèse de plein-emploi !) grâce à
la fl exibilité des salaires. Du point de vue spatial, les conditions de la
concurrence pure et parfaite ont tendance à disperser les activités écono-
miques dans l’espace de façon relativement homogène. Sur ce point, les
modèles néoclassiques de la croissance étaient déjà largement contredits
par l’analyse spatiale de la localisation qui, en distinguant les secteurs de
production, montrait l’importance de la concurrence imparfaite et de la
concentration spatiale des activités (p. ex., Lösch, 1954 ; Hotelling, 1929).
Cette succincte présentation du modèle traditionnel d’explication de
la croissance permet de comprendre plusieurs choses. D’abord, elle met
en lumière combien l’existence d’une économie en sous-emploi (chômage
de masse) est perçue au début des années 1970 comme une anomalie
provenant d’une mauvaise politique économique et non du système éco-
nomique lui-même, considéré comme autorégulateur par définition.
Ensuite, et surtout, elle montre combien d’emblée le progrès technique est
un élément-clé de la croissance, mettant donc en lumière l’importance
vitale de l’innovation – sous ses différentes formes – pour la dynamique
des économies.