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© 2003 – Presses de l’Université du Québec
Édifice Le Delta I, 2875, boul. Laurier, bureau 450, Sainte-Foy, Québec G1V 2M2 • Tél. : (418) 657-4399 – www.puq.uquebec.ca
Tiré de :
Économie et Solidarités
, vol. 34, no 1, Marguerite Mendell et Benoît Lévesque,
responsables
Ce livre aborde les effets du financement étatique sur les
organismes communautaires en analysant le cas parti-
culier du Fonds de lutte en Gaspésie et dans certains quartiers
de Montréal. Plus spécifiquement, l’équipe de recherche répond
aux trois questions suivantes: «Quels changements ont
connus les organismes appuyés par le Fonds de lutte contre
la pauvreté? Quels mécanismes expliquent ces changements?
En quoi le Fonds de lutte contre la pauvreté a-t-il constitué un
événement marquant dans la trajectoire de ces organismes?»
(p. 147-149).
Le premier chapitre présente le cadre conceptuel de la
recherche qui privilégie la perspective de l’institutionnalisme
selon laquelle «les changements dans les organismes résultent
d’une dynamique interactive complexe entre les contraintes
structurelles et les effets plus ou moins prévisibles des actions
menées par les acteurs» (p. 11). Les auteurs dégagent deux
grandes composantes de cette perspective: la composante
institutionnelle et la composante organisationnelle. La pre-
mière concerne la structure du pouvoir, le système politique,
les règles juridiques et les coutumes particulières guidant les
rapports entre les acteurs. Pour sa part, la composante organi-
sationnelle concerne les moyens mis en œuvre par l’organisme
pour atteindre ses objectifs.
Ensuite, les auteurs nous présentent l’opérationna-
lisation de ces composantes pour enchaîner avec le deuxième
chapitre qui est consacré à la méthodologie et aux deux phases
de la recherche: l’identification et la description. À partir de
l’analyse de 15 entrevues semi-dirigées, la phase d’identifica-
tion a permis aux auteurs d’enrichir le cadre conceptuel ainsi
que les catégories du questionnaire élaboré pour la phase de
description.
Compte
rendu
LES EFFETS DU FINANCEMENT ÉTATIQUE
SUR LES ORGANISMES COMMUNAUTAIRES :
LE CAS DU FONDS DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ
Yvan COMEAU, Daniel TURCOTTE, André BEAUDOIN,
Jean-Pierrre VIILLENEUVE, Marie J. BOUCHARD,
Benoît LÉVESQUE, Sylvie RONDON
et Marguerite MENDELL (2002)
Sillery, Québec, Éditions Sylvain Harvey
225 pages, ISBN 2-921703-40-8
ERNESTO MOLINA
Sociologue,
chargé de cours
et professionnel
de recherche
Université de
Sherbrooke
Ernesto.Molina
@USherbrooke.ca
180 Économie et Solidarités, volume 34, numéro 1, 2003
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Les données ainsi recueillies servent à mesurer les changements qu’ont
connus les organismes à la suite de leur financement par le Fonds. Ces données
feront l’objet d’analyses descriptives, d’analyses de variance et de mesures d’asso-
ciation dans deux situations de comparaison: la première compare la situation
des organismes avant le début des projets financés par le Fonds à leur situation
après la fin de ces projets. La deuxième situation compare le profil des orga-
nismes avant le financement du projet et durant la période en cours. Le tout
est complété par des données qualitatives issues des entrevues semi-dirigées.
Le chapitre 3 traite des caractéristiques des organismes et des projets
financés par le Fonds ainsi que des changements dans les services offerts et les
populations desservies par les organismes à la suite de la réalisation des projets.
Quoique les populations ciblées par les projets soient sensiblement les mêmes
que celles desservies par les organismes, les auteurs constatent que les projets
financés par le Fonds ont entraîné des changements dans la nature des services
offerts. Ainsi, « les différentes formes de regroupement, la sensibilisation aux
droits, le logement et la réadaptation ont pris davantage d’importance dans les
organismes et le soutien dans la communauté s’est étendu» (p. 58).
Le chapitre 4 porte sur les variables choisies pour l’analyse de la compo-
sante institutionnelle : la mission, le membership, les instances décisionnelles,
le contrat de travail et les réseaux. Les auteurs montrent qu’à cet égard les chan-
gements sont peu nombreux et que l’association entre ceux-ci et la présence du
Fonds semble plutôt marginale.
Le chapitre 5 révèle que, contrairement aux changements institutionnels,
les changements organisationnels ont été relativement nombreux en ce qui a
trait aux trois variables choisies: la coordination, les ressources humaines et les
ressources financières. Bien qu’elle n’autorise pas à attribuer directement ces
changements au financement du Fonds de lutte, l’analyse statistique permet aux
auteurs d’affirmer que les organismes dont une forte part du budget provient
du Fonds connaissent des changements particuliers. Par exemple, les sommes
consacrées à la formation des ressources humaines ont considérablement
augmenté (hausse de 16,5%) au cours de la période de référence de même que
le nombre de salariés formés (augmentation de 60,5%).
Le chapitre 6 expose les stratégies des organismes et leurs effets sur les
dimensions institutionnelles et organisationnelles. À ce sujet, les auteurs affir-
ment, par exemple, que les stratégies des organismes à l’égard des difficultés
de financement ont peu d’influence sur les changements institutionnels alors
qu’au contraire les capacités stratégiques des personnes en poste de coordination
ont des effets prépondérants sur les changements organisationnels.
La conclusion reprend les questions de recherche, synthétise les résultats
de l’étude et les reporte au cadre théorique. Les auteurs mentionnent que quatre
mécanismes sont susceptibles d’expliquer les changements qu’ont connus les
Économie et Solidarités, volume 34, numéro 1, 2003 181
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organismes appuyés par le Fonds. Le premier concerne les mouvements sociaux
et leur ancrage territorial; le deuxième, le degré d’institutionnalisation des
organismes; le troisième, la capacité des acteurs à conduire des actions collec-
tives ; le dernier mécanisme concerne le lien qui unit les usagers à l’activité
particulière de l’organisme. En ce qui a trait aux mécanismes d’explication des
changements, les auteurs remarquent que le territoire est étroitement lié aux
caractéristiques institutionnelles et organisationnelles des organismes même s’il
intervient peu dans les changements.
Pour la troisième question de recherche, les auteurs sont d’avis que le
caractère peu normé du Fonds de lutte contre la pauvreté ainsi que son carac-
tère temporaire peuvent expliquer le peu d’effets qu’a ce Fonds sur la dimen-
sion institutionnelle des organismes appuyés. Les auteurs avancent en outre une
troisième raison qui demeure cependant à l’état d’hypothèse: « tout se passe
comme si l’introduction d’une nouvelle activité pouvait changer la mission
d’organismes et que divers mécanismes feraient en sorte que des changements
organisationnels peuvent induire des changements institutionnels» (p. 149).
Le Fonds incite davantage à des changements organisationnels et «il a pu
constituer un tremplin pour accéder à de nouvelles ressources. Il a permis dans
certains cas d’accroître les immobilisations et a incité des organismes à ouvrir
un nouveau poste» (p. 150).
Tout au long de l’ouvrage, les auteurs restent fidèles à la volonté de rendre
observables et mesurables les effets du Fonds sur les organismes qu’il appuie.
Dans cette perspective, une explicitation détaillée de la problématique et de la
méthodologie de la recherche, comme celle que nous livrent les auteurs dans
les deux premiers chapitres, permet au lecteur de se faire une idée de la
confiance qu’il peut accorder aux résultats de la recherche. Elle montre aussi la
rigueur méthodologique dont les auteurs font preuve dans l’analyse des
données. Toutefois, sans nécessairement constituer le prix à payer pour cette
rigueur, la présentation des résultats dans les chapitres qui suivent souffre d’une
certaine « monotonie statistique », laquelle n’est pas complètement brisée par
la synthèse et la discussion des résultats à la fin de chacun des chapitres.
Enfin, cet ouvrage apporte une contribution intéressante à l’analyse de
la relation établie entre l’État et les organismes communautaires par l’entremise
du financement public et permet aux organismes d’envisager, à cet égard, des
stratégies nouvelles pour conserver leur spécificité et leur identité.
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