Ch3: Champs de vecteurs - IMJ-PRG

publicité
Chapitre 3
Champs de vecteurs
3.1
Sections du fibré tangent
Définition 3.1.1. Un champs de vecteurs de classe C k sur une variété de classe C k+1
est une section de classe C k du fibré tangent, c’est à dire une application de classe C k ,
ξ : M → T (M ), telle que : ∀a ξ(a) ∈ Ta (M ).
Il y a toujours au moins un champ de vecteurs : la section nulle. L’existence d’un
champ de vecteur qui ne s’annulle pas est un problème intéressant non trivial.
Un difféomorphisme de classe C k+1 , f : M → N , transporte les champs de vecteurs
de classe C k . Etant donné un champ de vecteur ξ : M → T (M ), le champ de vecteurs
correspondant, appelé image directe est défini pour b = f (a) par :
(f∗ ξ)(b) = (Ta (f ) ◦ ξ)(a) = Ta (f ).ξ(a) .
Etant donné une variété M de classe C k+1 , l’espace Γk (T M ) des champs de vecteurs
de classe C k sur M est un module sur l’algèbre C k (M ) des fonctions de classe C k sur
M . La correspondance précédente est compatible avec cette structure de module : étant
donné une fonction ψ ∈ C k (N ), on a
(ψ · f∗ ξ) (b) = f∗ ((ψ ◦ f ) · ξ) (a) .
3.2
Champs de vecteurs et dérivation
Définition 3.2.1. Etant donnée une variété M de classe C k+1 , et un champ de vecteur
ξ ∈ Γk (T M ), la dérivée de Lie associée à ξ est l’application θξ : C k+1 (M ) → C k (M )
définie par :
θξ (f )(x) = Tx (f ) · ξ(x) .
12
Proposition 3.2.2. La dérivée de Lie est R-linéaire et satisfait la formule de Leibniz :
θξ (f g) = θξ (f )g + f θξ (g) .
Définition 3.2.3. a) On appelle dérivation sur une algèbre A toute application
D : A → A, qui est R-linéaire et satisfait la règle de Leibniz.
b) On appelle dérivation sur une sous-algèbre algèbre A d’une algèbre B, toute application D : A → B, qui est R-linéaire et satisfait la règle de Leibniz.
Proposition 3.2.4. Les dérivations sur une algèbre A, ou plus généralement sur une
sous-algèbre algèbre A d’une algèbre B, forment un espace vectoriel.
On utilisera les notations Der(A) et Der(A, B) pour ces espaces vectoriels. La dérivée
de Lie θξ : C k+1 (M ) → C k (M ) est une dérivation.
Théorème 3.2.5. Etant donnée une variété M de classe C ∞ , alors la dérivée de Lie θ
définit un isomorphisme entre l’espace des champs de vecteurs de classe C ∞ : Γ∞ (T M ),
et l’espace des dérivations Der(C ∞ (M )).
3.3
Restrictions aux ouverts
La restriction des champs de vecteurs aux ouverts vérifie les deux propriétés suivantes :
Localité. Soit U un recouvrement ouvert d’un variété de classe C k+1 , M . Si un champ
de vecteur ξ ∈ Γk (M ) est tel que toutes ses restrictions ξ|U sont nulles, alors ξ
est nul.
Recollement. Soient U un recouvrement ouvert d’un variété de classe C k+1 , M , et
ξU ∈ Γk (T U ) des champs de vecteurs compatibles (qui coı̈ncident sur toutes
les intersections U ∩ U ′ ), alors il existe un unique champ de vecteur global ξ ∈
Γk (T M ) dont les restrictions aux ouverts U sont les ξU .
Il en est de même des dérivations.
Proposition 3.3.1 (Localité). Soit U un recouvrement ouvert d’un variété de classe
C k+1 , M . Si une dérivation D ∈ Der(C k+1 (M ), C k (M )) est telle que toutes ses restrictions D|U , U ∈ U,U ∈ U , sont nulles, alors D est nulle.
Proposition 3.3.2 (Recollement). Soient U un recouvrement ouvert d’un variété de
classe C k+1 , M , et DU ∈ Der(C k+1 (U ), C k (U )), U ∈ U , des dérivations locales compatibles (qui coı̈ncident sur toutes les intersections U ∩ U ′ ), alors il existe une unique
dérivation globale D ∈ Der(C k+1 (M ), C k (M )) dont les restrictions aux ouverts U sont
les DU .
13
Si U est un ouvert euclidien (U ⊂ Rm ), alors l’espace des champs de vecteurs de
classe C k s’identifie aux applications de classe C k de U dans Rm . Il en résulte que
Γk (T U ) est un module libre de rang m sur l’espace des fonctions de classe C k : C k (U ),
avec une base canonique donnée par les champs de vecteurs constants correspondants
aux vecteurs de bases. Les dérivations associées à cette base sont les dérivations partielles
∂
. Ces dérivations partielles sont linéairement indépendantes.
∂xi
Lemme 3.3.3. Si une dérivation D ∈ Der(C k+1 (U ), C k (U )) est nulle sur les fonctions
coordonnées, alors elle est nulle sur C k+2 (U ) ⊂ C k+1 (U ).
Pour la preuve, par localité on peut se restreindre au cas d’un ouvert convexe. On
utilise alors le lemme suivant.
Lemme 3.3.4. Soit U un ouvert convexe de Rm . Si f : U → R est de classe C k+2 , alors
pour a dans U , il existe des fonctions de classe C k+1 αi : U → R, 1 ≤ i ≤ m, telles
que :
∀x ∈ U , f (x) = f (a) +
m
X
αi (x)(x − ai ) .
i=1
Exercice 3.3.5. Démontrer le lemme ci-dessus en justifiant avec soin la classe de
dérivabilité.
Corollaire 3.3.6. Pour U ouvert de Rm , la dérivation
θ : Γ∞ (T U ) → Der(C ∞ (U ))
est bijective.
La preuve générale du théorème 3.2.5 en résulte.
14
3.4
Crochet de Lie des champs de vecteurs
Le crochet de deux dérivations sur l’algèbre A : D1 ∈ Der(A), D2 ∈ Der(A), est
définie par
[D1 , D2 ] = D1 ◦ D2 − D2 ◦ D1 .
Proposition 3.4.1. Le crochet de deux dérivations est une dérivation.
Définition 3.4.2. Etant donnée une variété lisse M , le crochet de Lie de deux champs
de vecteurs η, ξ est le champ dont la dérivation associée est le crochet [θη , θξ ] :
θ[η,ξ] = [θη , θξ ] .
On identifiera champs de vecteurs et dérivations : sur un ouvert de Rm , la dérivation
partielle ∂x∂ i note ainsi le champ de vecteur constant égal au i-ième vecteur de base.
Proposition 3.4.3 (Calcul local). Si η et ξ sont les champs de vecteurs définis sur une
ouvert U de Rn par :
m
m
X
X
∂
∂
ai
η=
bi
, ξ=
,
∂xi
i=1
i=1 ∂xi
alors leur crochet de Lie est :
[η, ξ] =
m
X
i,j=1
3.5
∂bj
∂aj
ai
− bi
∂xi
∂xi
Ç
å
∂
.
∂xj
Courbes intégrales et flot
Dans cette section variétés, fonctions et champs de vecteurs sont lisses.
Définition 3.5.1. Soit M une variété, et ξ un champ de vecteur. Une courbe intégrale
de ξ est un chemin défini sur un intervalle ouvert, γ : I → M , dont le vecteur vitesse
est égal au vecteur du champ :
∀t ∈ I , Tt (γ).1 = ξ(γ(t)) .
Le problème s’exprime localement par une équation différentielle y ′ = f (y).
Proposition 3.5.2. a) Pour tout x ∈ M , il existe une courbe intégrale locale
γx : (] − ǫ, ǫ[, 0) → (M, x) .
b) Deux solutions locales avec même point initial sont égales sur l’intersection de leur
intervalle de définition.
c) Pour chaque point x, il existe une unique solution maximale γxmax : (Ix , 0) → (M, x).
15
Proposition 3.5.3 (Invariance par translation). Si t 7→ γ(t) est une courbe intégrale
définie sur l’intervalle I, alors t 7→ γ(s + t) est une courbe intégrale définie sur −s + I.
Définition 3.5.4. Un flot (lisse) global sur M est une application (lisse)
u: R×M → M
(t, x) 7→ u(t, x) = ut (x)
telle que : u0 = IdM , et ∀s, t ∈ R , us+t = us ◦ ut .
Définition 3.5.5. Le champ des vecteurs vitesses du flot u est :
∂u ξ(x) = T(0,x) (u)(1, 0) =
.
∂t (0,x)
On l’appelle le flot infinitésimal de u.
Remarque 3.5.6. Les courbes intégrales du flot global u sont les chemins t 7→ u(t, x),
définis sur R pour tout x.
Définition 3.5.7. Un domaine de flot sur M est un ouvert D ⊂ R × M tel que pour
tout x, Dx = {(t, x) ∈ D} est un intervalle (ouvert) qui contient 0.
Définition 3.5.8. Un flot sur M est une application définie sur un domaine de flot
u:
D → M
(t, x) 7→ u(t, x) = ut (x)
telle que : u0 = IdM , et ∀s ∈ Dx , ∀t ∈ (−s + Dx ) us+t us ◦ ut .
Comme précédemment un flot définit un champ de vecteur appelé flot infinitésimal.
Théorème 3.5.9 (Théorème fondamental des flots). Soit ξ un champ de vecteur sur
la variété M , alors il existe un unique flot maximal, u : D → M , dont ξ est le flot
infinitésimal :
pour tout x ∈ M , la courbe intégrale maximale d’origine x est t 7→ u(t, x).
Corollaire 3.5.10 (Redressement des champs de vecteurs). Si ξ est un champ de vecteur
sur M qui est non nul en x, alors il existe une carte locale en x, φ : (Ux , x) → (V, 0)
telle que : φ∗ (ξ) = ∂x∂ 1 .
Définition 3.5.11. Un champ de vecteur ξ sur M est complet si et seulement si son
flot est global.
Lemme 3.5.12 (Lemme du temps uniforme). Si ξ est un champ de vecteur sur M dont
le domaine de flot D contient un produit ] − ǫ, ǫ[×M , alors ξ est complet.
Proposition 3.5.13. Un champ de vecteur à support compact est complet.
Corollaire 3.5.14. Sur une variété compacte, tous les flots sont complets.
Exercice 3.5.15. Démontrer que si N ⊂ M est une sous-variété compacte lisse transversale à un champ de vecteur ξ, i.e. ∀x ∈ N , ξ(x) ∈
/ Tx N , alors le plongement de N dans
M s’étend en un plongement de ] − 1, 1[×N → M .
16
Téléchargement