L’Encéphale (2009) 35, 269—280 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP PSYCHOGÉRIATRIE Dépression et personnes âgées Depression and the elderly T. Gallarda a,b,∗, H. Lôo a,b a Inserm, U 894-7, physiopathologie des maladies psychiatriques, Paris, France Service hospitalo-universitaire, hôpital Sainte-Anne, faculté de médecine Paris Descartes, université Paris Descartes, 7, rue Cabanis, 75674 Paris cedex 14, France b Reçu le 12 juin 2008 ; accepté le 2 octobre 2008 Disponible sur Internet le 5 juin 2009 MOTS CLÉS Dépression ; Âge avancé ; Pluridisciplinarité ; Comorbidités ; Troubles cognitifs ; Maladie d’Alzheimer ; Antidépresseurs ; Psychothérapie ; Modèles de soins ∗ Résumé « Dépression » et « âge avancé » sont souvent associés chez nos contemporains. « Dépression » est alors entendu dans le sens de « désespoir existentiel » et non celui de « maladie dépressive » : sont amalgamés l’éprouvé du tragique de l’existence et une condition pathologique. Des tableaux dépressifs dont le caractère pathologique ne fait aucun doute sont fréquents chez la personne âgée mais les frontières entre normal et pathologique deviennent plus imprécises en deçà d’un certain seuil symptomatique, en présence d’évolutions chroniques et dans les situations de comorbidités. L’outil nosographique, malgré ses limites, s’avère précieux. Les études épidémiologiques incluant les comorbidités de l’épisode dépressif avec des troubles cognitifs et/ou des affections somatiques permettent de meilleures estimations des taux de prévalence des symptômes et des troubles dépressifs au sein des populations âgées. La formule, « la dépression est la dépression à tout âge », recèle une part de vérité à condition de prendre en compte les multiples facteurs qui modifient l’expression symptomatique de la dépression avec l’avance en âge. Le facteur le plus documenté est la comorbidité de la dépression avec des affections somatiques, présente chez la majorité des plus de 80 ans. D’autres facteurs, psychologiques ou socioculturels, sont également à l’œuvre mais leur influence a été moins étudiée. La baisse des performances cognitives observée au cours des troubles dépressifs n’est pas l’apanage des personnes âgées mais elle est indéniablement plus marquée dans cette population. Poser un diagnostic précoce de maladie d’Alzheimer ou, au contraire, éliminer ce diagnostic chez un patient déprimé rapportant un affaiblissement cognitif constitue une étape essentielle de la prise en charge. Avec le bilan neuropsychologique et l’imagerie cérébrale, nécessaires au diagnostic, s’impose aussi la nécessité d’une évaluation pluridisciplinaire, neuropsychogériatrique. La prise en charge d’un état dépressif gériatrique emprunte à différentes approches de soins incluant les soins somatiques, les médicaments psychotropes, les techniques de stimulation cérébrale et la psychothérapie mais aussi l’accompagnement médicosocial. La Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (T. Gallarda). 0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2009. doi:10.1016/j.encep.2008.10.013 270 T. Gallarda, H. Lôo coordination des soins incombe au médecin généraliste, au cœur du dispositif. Mais cette mission théorique peut s’avérer impossible pour la gestion des cas complexes. De ce constat est née la réflexion sur des modalités d’adaptation du modèle anglo-saxon des « soins en collaboration » dans notre pays : la coordination des différentes interventions thérapeutiques par un gestionnaire du soin offrirait une efficacité supérieure à celle des modalités habituelles de soins. © L’Encéphale, Paris, 2009. KEYWORDS Depression; Advanced age; Pluridisciplinarity; Comorbidities; Cognitive disorders; Alzheimer’s disease; Antidepressants; Psychotherapy; Care models Summary ‘‘Depression’’ and ‘‘old age’’ are often associated among our contemporaries. In this case, ‘‘depression’’ is understood to be ‘‘existential despair’’ and not a ‘‘depressive disease’’: an amalgam is made of the tragedy of the patient’s existence and a pathological condition. Clinical pictures of depression, the pathological nature of which is obvious, are frequent in the elderly; however, the line between normal and pathological becomes less clear above a certain symptomatic threshold, in the presence of chronic evolutions and in situations of comorbidity. The nosographical tool, in spite of its limits, is precious. Epidemiological studies that include the comorbidities of the depressive episode with cognitive and/or somatic affections permit better estimations of the prevalence of the symptoms and the depressive problems among elderly populations. The formula ‘‘depression is depression at whatever age’’ harbours a certain truth if one takes into account the multiple factors that modify the symptomatic expression of depression in later life. The most documented factor is the comorbidity of depression with somatic affections that is present in the majority of those aged over 80. Other psychological or sociocultural factors are also apparent, but their influence has been studied less. The decline in cognitive performance observed during depression is not exclusive to the elderly but is undeniably more marked in this population. Making an early diagnosis of Alzheimer’s disease or, conversely, eliminating this diagnosis in a depressed patient complaining of diminished cognition is an essential step in the subsequent management. Together with the neuropsychological assessment and brain imaging, required for diagnosis, a neuropsychogeriatric pluridisciplinary assessment is obviously required. The management of geriatric depression is based on various approaches that include somatic care, psychotropic drugs, brain stimulation techniques and psychotherapy, but also requires medicosocial care. The coordination of care is incumbent on the general practitioner in the heart of the plan. However, this theoretical mission may appear impossible for the management of complex cases. Based on this, reflections on were initiated on the modalities of adapting the Anglo-Saxon ‘‘collaborative care’’ to France: coordination of the various therapeutic interventions by a care manager would offer greater efficacy than that of the usual care modalities. © L’Encéphale, Paris, 2009. « Dépression » et « âge avancé » sont souvent associés chez nos contemporains. Depuis Burton, dans son « Anatomie de la mélancolie », « After seventy years, all is trouble and sorrow », la littérature classique a fourni pléthore de citations sur ce thème. « Dépression » est alors entendu dans le sens « désespoir existentiel » et non « maladie dépressive ». Sont amalgamés l’éprouvé du tragique de l’existence et une condition pathologique qui relève de la médecine. Cet amalgame trouve ses racines dans des sociétés occidentales où les valeurs de la jeunesse sont à ce point sacralisées que « vieillir jeune » est érigé en objectif. Les médecins somaticiens ont adhéré à ces postulats négatifs liés au vieillissement avancé. Les psychiatres eux-mêmes ont longtemps déserté le champ des affections mentales du vieillissement. Dans son abord de la maladie dépressive, le médecin doit éviter l’indifférenciation entre ce qu’il perçoit comme une condition existentielle, « être devenu un vieillard » et les symptômes d’un état pathologique, « souffrir d’un état dépressif ». Cette indifférenciation pourrait, en effet, déboucher sur deux impasses : l’abstention thérapeutique dans des états dépressifs sévères, ou la médicalisation et le risque de prescription en excès face à des plaintes ou des modifications comportementales, en dehors de tout processus pathologique [13,19]. Le normal et le pathologique : l’éclairage nosographique La dépression de la personne âgée questionne particulièrement les frontières du normal et du pathologique. Des tableaux dépressifs dont la nature pathologique ne fait aucun doute sont fréquents au cours de la deuxième partie de la vie, d’intensité mélancolique, parfois avec des caractéristiques catatoniques ou délirantes. Ils bénéficient d’une prise en charge thérapeutique codifiée. Mais les états dépressifs d’expression symptomatique atténuée sont plus nombreux à cet âge. Le diagnostic de ces états dépressifs est plus difficile, leur évolution et leur thérapeutique moins consensuelles. Pour certains, ils pourraient constituer les prémices des troubles dépressifs majeurs, soulignant l’importance de leur identification dans une optique préventive. Les frontières entre normal et pathologique deviennent plus imprécises en deçà d’un certain seuil Dépression et personnes âgées symptomatique (dépressions subsyndromiques, dysthymies, dépressions mineures), en présence d’évolutions chroniques ou dans les situations de comorbidités. Contrairement aux troubles dépressifs à la symptomatologie bruyante, ces situations relèvent de la compétence des médecins de soins primaires ou de médecine somatique hospitalière [24]. L’épisode dépressif L’outil nosographique, malgré ses limites, s’avère précieux. Les auteurs de la classification internationale des maladies (CIM 10e version) comme ceux du manuel diagnostique et statistique « des troubles mentaux » (DSM) ont identifié neuf symptômes cardinaux dans leur définition de l’épisode dépressif (« épisode dépressif majeur »). Ces critères diagnostiques requièrent la présence minimale de cinq d’entre eux, parmi lesquels obligatoirement l’humeur dépressive ou la perte d’intérêt ou de plaisir [3,29]. L’épisode dépressif organique Le diagnostic d’épisode dépressif organique est posé uniquement lorsqu’il existe une présomption de causalité directe entre une affection cérébrale ou une autre affection physique et un trouble associant une modification de l’humeur à une altération globale du niveau d’activité [29]. Le trouble de l’humeur doit survenir à la suite du facteur organique présumé et ne pas constituer une réaction émotionnelle du patient à la présence du trouble cérébral organique. Les auteurs du DSMIV offrent la possibilité de coder l’existence d’une humeur dépressive prédominante dans les critères diagnostiques de la démence vasculaire [3]. Le trouble dysthymique Le trouble dysthymique est défini par l’association d’une humeur dépressive chronique, pendant au moins deux ans et d’au moins trois symptômes au sein d’une liste. La comorbidité avec une situation médicale chronique est fréquente. Le trouble de l’adaptation avec humeur dépressive Le trouble de l’adaptation avec humeur dépressive désigne un état de détresse et de perturbation émotionnelle qui survient dans le mois suivant une période d’adaptation à un changement existentiel ou à un événement stressant et ne persiste guère au-delà de six mois. La dépression mineure L’entité « dépression mineure » n’est pas individualisée par les auteurs de la CIM 10. À un âge avancé, dépression majeure et dépression mineure partagent des facteurs de risque, la dépression mineure étant elle-même un facteur de risque de dépression majeure [20]. Leur retentissement fonctionnel est souvent équivalent [27]. 271 La dépression subsyndromique L’utilisation du terme « dépression subsyndromique » est associée à un certain flou : elle peut renvoyer à des situations où le nombre de symptômes dépressifs est insuffisant pour remplir les critères de définition des troubles dépressifs (trouble dépressif majeur ou dysthymique) ou être synonyme de dépression mineure. Malgré ces limites liées à une utilisation imprécise, cette notion rencontre une réelle pertinence clinique en pratique gérontopsychiatrique. L’apport de l’épidémiologie Différentes études épidémiologiques en population générale ont mis en évidence une large prévalence des « symptômes » dépressifs sur celle des « épisodes dépressifs », à tous les âges de la vie. Ce constat prévaut particulièrement auprès des populations âgées : dans cette tranche d’âge, l’estimation du taux de prévalence des épisodes dépressifs majeurs caractérisés selon les critères DSM apparaît même inférieur à celui observé chez l’adulte d’âge moyen. Parmi les plus classiques, l’étude Epidemiologic Catchment Area (ECA) souligne le contraste entre des taux de prévalence des symptômes dépressifs estimés à 10 % contre des taux d’épisode dépressif majeur entre 1 et 1,5 % chez la personne âgée. Ces données épidémiologiques contrecarrent l’intuition médicale d’une élévation avec l’âge des symptômes comme des troubles dépressifs. Depuis, d’autres travaux épidémiologiques ont nuancé ces résultats en utilisant des méthodes d’évaluation diagnostique plus adaptées aux populations âgées. Ils incluent en effet les situations de comorbidité de l’épisode dépressif avec des troubles cognitifs ou des affections somatiques [8]. L’étude Euro-DEP, à partir de la notion de « dépression cliniquement significative », rapporte ainsi des taux de prévalence de symptômes (8,6 et 14,1 %) et de troubles dépressifs (entre 1 et 4 %) sensiblement plus élevés [9]. Certains indicateurs épidémiologiques définis dans des groupes de populations spécifiques sont alarmants : en institution hospitalière, 20 % en moyenne des sujets âgés seraient déprimés ; en institution pour personnes âgées, la prévalence de la dépression est régulièrement estimée au triple de celle de la population générale [6]. La perte d’autonomie qu’elle soit liée à un handicap physique ou au déclin intellectuel et l’isolement affectif sont puissamment dépressogènes et causes d’institutionnalisation. Il existe une croyance commune selon laquelle l’avance en âge est elle-même facteur d’une incidence accrue de la dépression. En fait, c’est la comorbidité somatique (fréquemment associée au facteur âge) et non l’âge en soi qui accroît le nombre de nouveaux cas de dépression. Un sujet âgé ou très âgé qui serait indemne d’affection somatique n’est pas plus exposé à souffrir de dépression qu’un sujet d’âge moyen [23]. Phénoménologie des dépressions gériatriques Les dépressions observées avec l’avance en âge présententelles des profils symptomatiques ou évolutifs spécifiques ? Trouvent-elles leurs causes dans des facteurs étiopathogéniques distincts ? Relèvent-elles d’autres approches 272 thérapeutiques ? Autant de questions qui justifieraient l’individualisation d’une catégorie diagnostique « dépression de l’âge avancé » [14]. Une réponse négative fait consensus dans la littérature internationale, résumée dans la formule : « depression is depression at any age » (la dépression est identique à tous les âges). Pourtant, la pratique clinique, le choix des stratégies et l’analyse des réponses thérapeutiques questionnent cette affirmation. Certaines expressions symptomatiques apparaissent surreprésentées avec l’avance en âge. Les plaintes somatiques incluant l’hypochondrie, les symptômes mélancoliques et psychotiques, les déréglements psychomoteurs (ralentissement ou agitation, voire symptômes catatoniques) ou du rythme nycthéméral et les symptômes portant sur l’efficience cognitive sont les plus fréquemment observés [24]. L’analyse des symptômes dépressifs observés auprès de personnes âgées de l’étude EURO-Dep (14 pays) a conduit à un regroupement en deux facteurs principaux, un facteur « souffrance affective » (affective suffering) et un facteur ayant trait à la motivation (facteur motivationnel). Le premier comprend l’humeur dépressive, l’envie permanente de pleurer, le désir de mort, le second, le désintérêt, les troubles de la concentration et la difficulté à éprouver du plaisir [9]. La formule « la dépression est la dépression à tout âge » recèle une part de vérité à condition de prendre en compte les multiples facteurs qui modifient l’expression symptomatique de la dépression avec l’avance en âge. Certains facteurs contribuent à masquer les symptômes cardinaux de la dépression, d’autres au contraire en accroissent l’intensité. Le facteur le plus documenté est la comorbidité de la dépression avec des affections somatiques, présente chez la majorité des personnes âgées de plus de 80 ans. D’autres facteurs, psychologiques ou socioculturels, sont également à l’œuvre mais leur influence est moins étudiée. Le chevauchement symptomatique entre le trouble dépressif et une affection physique comorbide est une des situations les plus communes. Face à une anorexie sévère, par exemple, ou en présence de troubles cognitifs patents, le clinicien est engagé à éliminer une origine somatique avant de poser un diagnostic d’épisode dépressif majeur. Cette démarche étiologique bute fréquemment sur la complexité des situations cliniques. Elle explique partiellement la variabilité des taux de prévalence de la dépression en fonction des études. Baldwin donne l’exemple d’un patient qui présente un épisode dépressif dans le contexte d’une polyarthrite rhumatoïde. Dans cette situation, trois critères de l’épisode dépressif majeur (EDM), la fatigue, l’insomnie et la perte d’appétit peuvent être causés aussi bien par la dépression que par l’affection inflammatoire. L’interrogatoire du patient doit être orienté afin d’attribuer le symptôme à son affection causale. Ainsi, des douleurs inflammatoires chroniques prédominantes en fin de nuit rendent compte vraisemblablement de l’insomnie matinale plus que le processus dépressif. La formulation des questions est tout aussi importante dans cet objectif. Interroger une personne âgée à mobilité réduite ou intolérante à l’exercice physique sur une sensation de perte d’énergie a moins de signification que lui demander si elle se sent fatiguée en permanence, même lorsqu’elle est au repos [6]. T. Gallarda, H. Lôo Lorsque le patient y consent, l’entretien avec un membre de l’entourage est essentiel. Il permet l’anamnèse d’épisodes dépressifs antérieurs, parfois très anciens qui orientent vers un diagnostic de trouble dépressif récurrent devant des tableaux atypiques. Il favorise surtout la mise en évidence d’une rupture marquée du fonctionnement du patient par rapport à son fonctionnement antérieur. Une dégradation brutale du fonctionnement, en quelques jours ou semaines, en l’absence d’accident somatique concomitant, oriente vers une origine dépressive et incite à la recherche de symptômes actuels ou antérieurs de dépression. Les difficultés diagnostiques sont liées à des modifications de l’expression symptomatique La forme algique Cinquante pourcent des dépressions de l’adulte pourraient revêtir une forme algique en médecine générale [21]. En l’absence d’antécédent ou de signe d’appel d’une affection somatique, une origine fonctionnelle sera facilement évoquée. Chez la personne âgée, une douleur sous toutes ses formes, peut constituer également un symptôme d’appel majeur, parfois isolé, de la dépression. Mais, l’origine dépressive du symptôme est plus difficile à affirmer que chez le sujet jeune car les causes d’algies liées à des affections somatiques sont multiples avec l’avance en âge [24]. Les formes pseudodémentielles Les formes « pseudodémentielles » des dépressions gériatriques ont été à la source d’une littérature considérable depuis leur description par Kiloh, dans les années soixante. Elles reflètent l’importance des rapports entre la démence et la dépression. Par cette appellation, le père de la « dépression masquée » faisait référence à des syndromes démentiels d’installation brutale, en quelques semaines, sans étiologie organique évidente, curables par les antidépresseurs ou une cure d’électroconvulsivothérapie. Outre la valeur de la séquence symptomatique, dépression, puis troubles cognitifs, l’intensité de la plainte et de l’angoisse, la sévérité de la régression (par exemple, l’installation d’une incontinence mixte) et du handicap, la dramatisation ou des réponses stéréotypées « je ne sais pas » permettraient d’orienter le diagnostic. L’obtention d’une réversibilité totale des symptômes démentiels, psychocomportementaux comme cognitifs, par le traitement antidépresseur était au cœur de la définition princeps. Elle a été battue en brêche par les premières études longitudinales : dans leur majorité, ces tableaux n’ont de « pseudodémentiel » que leur appellation. Quel que soit le degré d’amélioration, parfois spectaculaire, obtenu par les antidépresseurs, la plupart évoluent en effet vers des syndromes démentiels plus caractéristiques, dans un délai qui varie avec l’étiologie de la démence (maladie d’Alzheimer, démence vasculaire ou frontotemporale. . .) mais aussi les comorbidités somatiques (facteurs cérébrovasculaires) et psychiques (troubles de la personnalité) [7,24,25]. Dépression et personnes âgées Les syndromes de désinvestissement Les syndromes de « désinvestissement » empruntent aussi à cette triade symptomatique. Leur caractère dépressif s’avére souvent plus difficile à identifier. Ils mettent généralement en scène des personnes très âgées, au-delà de 85 ans, qui refusent de s’alimenter et maigrissent, alertant leur entourage, familial ou institutionnel. Ces personnes s’enferment dans un isolement croissant et refusent de recevoir une aide médicale ou s’y soumettent passivement. En institution, ce peuvent être des patients qui dirigent systématiquement leur visage vers le mur. Parmi ces derniers, certains sont exclusivement déprimés et bénéficieront nettement d’une thérapeutique antidépressive, d’autres souffrent d’affections médicales en attente d’être diagnostiquées, en particulier néoplasiques, d’autres présentent une affection dégénérative cérébrale [23]. Les troubles des conduites et du comportement Moins rapportés dans la littérature, mais néanmoins fréquents en institution, certains troubles des conduites et du comportement ont possible valeur d’équivalents dépressifs. Les cris et les comportements auto- ou hétéroagressifs, une incontinence sans cause médicale et atypique dans sa présentation (lorsque l’élimination incontrôlée s’effectue systématiquement dans des lieux autres que les toilettes, ce qui est inhabituel dans la démence) en sont des exemples. Tous les gestes autoagressifs, même en apparence sans gravité, doivent être considérés avec la plus grande attention [6]. Les symptômes anxieux Comme le souligne Post, des symptômes anxieux sont rencontrés aux cours de toutes les dépressions, des plus légères aux plus sévères (« at all levels of severity of depression, anxiety is a common accompanying symptom ») [31]. En masquant l’épisode dépressif, ces symptômes anxieux égarent vers des prescriptions chroniques de tranquillisants aux effets particulièrement délétères chez l’âgé. Ils augmentent le risque suicidaire et celui d’une évolution chronique. De même, l’installation brutale d’autres symptômes anxieux « d’allure névrotique », phobiques, obsessionnels-compulsifs ou de manifestations d’allure conversive chez une personne âgée qui en était indemne auparavant peut constituer un indicateur de dépression [24,11] (Tableau 1). Troubles cognitifs et dépressions de la personne âgée Peut-on identifier un profil neuropsychologique caractéristique de la dépression ? La baisse des performances cognitives observée au cours des troubles dépressifs n’est pas l’apanage des personnes âgées mais elle est indéniablement plus marquée dans cette population. Avec l’avance en âge, toute perception de déclin cognitif suggère le spectre de la dégénérescence cérébrale, voire d’une maladie d’Alzheimer. Poser un diagnostic pré- 273 Tableau 1 Présentations du trouble dépressif chez la personne âgée (d’après [6]). Chevauchement des symptômes somatiques de la dépression et de ceux d’une affection physique (en présence d’une comorbidité entre une affection physique et un épisode dépressif) Moindre verbalisation d’un sentiment de tristesse Somatisations ou plaintes somatiques dont l’intensité apparaît disproportionnée Syndromes douloureux inexpliqués Symptômes d’allure névrotique d’installation récente sans antécédent de ce type Geste auto-agressif (incluant les gestes ne présentant pas de caractère de gravité au sens médical) Syndrome dyséxécutif de la dépression, syndrome démentiel de la dépression, pseudodémence dépressive Dépression évoluant dans le contexte d’une démence diagnostiquée Comportements perturbateurs (refus alimentaires, incontinence avec urination et défécation dans la plupart des lieux à l’exclusion des toilettes, cris, comportements agressifs) Accentuation des traits de la personnalité prémorbide (notamment histrionique et paranoïaque) Installation tardive d’une dépendance à l’alcool Plainte envahissante autour d’une solitude qui était jusqu’à alors parfaitement assumée (pouvant s’accompagner d’une demande de placement inattendue en institution) coce de maladie d’Alzheimer ou, au contraire, éliminer ce diagnostic chez un patient déprimé rapportant un affaiblissement cognitif constitue une étape essentielle de la prise en charge. L’hétérogénéité des troubles dépressifs rencontrée auprès de personnes âgées alliée à l’existence de comorbidités (par exemple, cérébrovasculaires ou de troubles de la personnalité) peuvent accroître la difficulté de leur reconnaissance [24]. Au bilan neuropsychologique et à l’imagerie cérébrale nécessaires au diagnostic s’impose aussi la nécessité d’une évaluation pluridisciplinaire, neuropsychogériatrique [13]. L’évaluation neuropsychologique permet schématiquement de différencier un profil d’atteinte mnésique « hippocampique », évocateur d’une maladie d’Alzheimer débutante d’un profil « cortico-sous-corticofrontal » observé chez les patients présentant un trouble de l’humeur ou d’autres démences dégénératives. Dans une atteinte d’allure hippocampique, le mécanisme cérébral d’enregistrement de l’information est atteint alors que dans une atteinte d’allure cortico-sous-corticofrontale c’est le processus permettant la récupération de l’information préalablement enregistrée qui se révèle défaillant. Ainsi, un indiçage (sémantique, phonologique, visuel. . .) permet à un patient déprimé d’améliorer, voire, de normaliser ses performances à une épreuve de rappel de mots alors qu’elle ne sera d’aucune aide chez la maladie Alzheimer [18]. L’imagerie, par résonance magnétique nucléaire ou tomodensitométrie confirme le diagnostic de la maladie d’Alzheimer en mettant en évidence une atrophie hippocampique marquée concordante avec l’atteinte mnésique ou oriente vers d’autres diagnostics selon que l’atrophie 274 T. Gallarda, H. Lôo prédomine sur les lobes frontaux ou qu’il existe des stigmates d’infarctus cérébraux [24]. Quels sont les principes généraux de la thérapeutique ? Quelle est l’évolution prévisible des troubles cognitifs ? Approches multimodales et pluridisciplinarité Chez une personne âgée, la prise en charge d’un état dépressif emprunte à différentes approches de soins et nécessite systématiquement la pluridisciplinarité. Les principales approches incluent les soins somatiques, les médicaments psychotropes, les techniques de stimulation cérébrale (électroconvulsivothérapie et stimulation magnétique transcrânienne répétée) et la psychothérapie mais aussi l’accompagnement médico-social. Dans notre pays, la coordination des soins incombe au médecin généraliste qui est au cœur du dispositif. Mais cette mission théorique peut s’avérer impossible pour la gestion des cas complexes. La réflexion sur une adaptation du modèle anglo-saxon des « soins en collaboration » (collaborative care) est née de ce constat. Dans ces modèles, un gestionnaire du soin (care manager) est chargé de la coordination des différentes interventions thérapeutiques, par exemple, entre le médecin généraliste et les différents spécialistes, pour une meilleure efficacité (Tableau 2). Comparativement aux modalités habituelles de soins, les résultats apparaissent prometteurs : après une année, sur 1800 patients déprimés âgés de l’étude Impact (dont 17 % répondaient au critères d’EDM, 30 % à ceux de trouble dysthymique et 53 % aux deux), 45 % des patients ayant bénéficié d’un programme de soins collaboratifs ont vu décroître leur niveau symptomatique initial de 50 % contre seulement 19 % pour ceux traités selon les modalités habituelles [26,37]. La mise en évidence de déficits cognitifs chez un patient déprimé âgé soulève différentes questions : ces troubles vont-ils régresser ou persister a minima après la rémission symptomatique ? S’accompagneront-ils d’un impact délétère sur la réponse thérapeutique ? Contribuerontils à une élévation du risque de démence ultérieure (comme le suggèrent certaines études épidémiologiques) ? Des troubles attentionnels et un ralentissement du traitement de l’information persisteraient chez un tiers des patients en rémission [6]. La présence d’un syndrome dyséxécutif marqué pourrait être associé à une altération de la réponse thérapeutique [4]. Enfin, une majorité d’études de suivi ont permis d’identifier la dépression comme un facteur de risque de détérioration cognitive [35]. La prise en charge thérapeutique L’évaluation initiale permet de dessiner avec précision les contours de la prise en charge L’évaluation initiale est un temps essentiel de la prise en charge. Au cours de la prise de contact, le praticien doit avoir pour objectifs : une reconstitution minutieuse de l’histoire clinique, un examen approfondi de l’état mental à la recherche d’indices de sévérité (symptômes psychotiques, idéations suicidaires) et l’identification de facteurs de résistance et d’éventuelles causes organiques de la dépression. Lorsque le patient présente des troubles cognitifs, la participation de l’accompagnant au recueil anamnestique est indispensable. L’évaluation de l’état mental peut théoriquement s’appuyer sur la passation d’instruments standardisés. La plupart d’entre eux n’ont pas encore été validés en langue française et leurs utilisations s’inscrivent généralement dans une perspective de recherche. La passation du Mini Mental State Examination (MMSE) [12], de la batterie rapide d’évaluation frontale (Bref) [10] ou de la batterie cognitive courte (B2C) [34] permet une approche globale du statut cognitif. L’examen clinique est orienté par la mise en évidence de symptômes d’appel neurologiques (chutes, céphalées, syndrome extrapyramidal spontané ou iatrogénique, symptômes neurovégétatifs. . .) et/ou la présence de comorbidités. Des examens de laboratoire sont recommandés comprenant une NFS complète, un bilan de la fonction rénale, hépatique et thyroïdienne, une calcémie et un dosage des taux plasmatiques des folates et de la vitamine B12. Des sérologies infectieuses (syphilis, VIH, hépatites A, B, C) seront pratiquées en fonction du contexte clinique. L’imagerie cérébrale (IRM cérébrale ou tomodensitométrie) n’est pas indiquée en première intention mais sera effectuée en présence de troubles cognitifs et/ou d’une résistance aux antidépresseurs soulevant l’hypothèse d’une intrication de la dépression à un processus démentiel, dégénératif ou vasculaire [23]. Les phases et les modalités du traitement Les stratégies thérapeutiques de l’épisode dépressif majeur du sujet âgé ne sont pas différentes de celles de l’adulte d’âge moyen. Dans la majorité des cas, un traitement antidépresseur est associé à un accompagnement psychologique pendant une durée variable selon qu’il s’agit d’un premier épisode ou d’un épisode récurrent. Certaines formes cliniques peuvent guider vers d’autres choix thérapeutiques. La cure d’électroconvulsivothérapie est indiquée en première intention devant certains tableaux Tableau 2 Quelles sont les situations justifiant un avis psychiatrique ? La présence de troubles cognitifs marqués accroît la difficulté du diagnostic de dépression : il existe une doute diagnostique sur l’éventualité d’une démence associée L’épisode dépressif présente des indices cliniques de sévérité Association à des symptômes psychotiques Présence d’idées suicidaires Comportements mettant en péril la santé physique (anorexie sévère, voire refus alimentaire et/ou hydrique, interruption de thérapeutiques médicales. . .) La stratégie thérapeutique habituelle doit être modulée en raison de comorbidités somatiques multiples élevant le risque iatrogénique Deux séquences thérapeutiques d’antidépresseurs bien conduites se sont soldées par un échec Dépression et personnes âgées mélancoliques (avec symptômes psychotiques ou catatoniques, s’accompagnant de refus alimentaires, d’un risque suicidaire majeur. . .) ou d’intolérance aux psychotropes [23]. Les épisodes dépressifs d’intensité légère pourraient bénéficier d’un simple accompagnement psychologique mais la préférence de nombreux médecins continue de s’orienter vers un traitement psychotrope, souvent par manque de lisibilité des filières d’accès aux soins psychothérapiques dans notre pays. Les principaux objectifs et les moyens de la prise en charge sont décrits dans le Tableau 3. Le traitement de l’épisode dépressif se décompose en trois phases : le traitement d’attaque, le traitement de consolidation et le traitement de maintenance. 275 Tableau 3 Quels sont les objectifs de la prise en charge de la dépression et les moyens d’y parvenir ? (d’après [6]). Objectifs Modalités Réduction du risque suicidaire ou des conséquences délétères des attitudes de désinvestissement de soi et d’autrui Rémission des symptômes dépressifs Évaluation initiale et régulière du risque Consultation rapide d’un spécialiste en cas d’urgence Aider le patient à retrouver un fonctionnement optimal le plus rapidement possible Mettre en place des aides pour les activités de la vie quotidienne Favoriser l’accès aux services sociaux et/ou aux organismes susceptibles de mettre en place un dispositif d’aide Traiter les comorbidités somatiques Diminuer le handicap lié à une altération des fonctions sensorielles, à une diminution de la mobilité ou aux symptômes d’une maladie chronique Faire une synthèse des spécialités médicamenteuses prescrites et en interrompre certaines lorsque leur indication est contestable Informer le patient sur la nécessité de poursuivre le traitement antidépresseur après la guérison et sur les symptômes indicateurs d’une rechute dépressive Traitement de consolidation Traitement de maintenance (ou de prévention des récidives) Le traitement d’attaque L’objectif du traitement d’attaque doit être une rémission symptomatique complète, définie par la disparition de l’ensemble des symptômes de la dépression. Cette phase dure de deux à trois mois. Une rémission partielle, avec persistance de symptômes résiduels élève le risque d’une rechute précoce. La recommandation classique qui préconise d’initier le traitement à une faible posologie et d’augmenter les doses avec prudence (start slow, go slow) s’applique moins aux prescriptions d’antidépresseurs de nouvelle génération (Inhibiteur spécifique de recapture de la sérotonine [ISRS], inhibiteur de recapture de la sérotonine et de la noradrénaline [IRSNA]. . .). En l’absence d’insuffisance rénale ou hépatique, ces molécules peuvent être prescrites d’emblée à posologie efficace. La notion selon laquelle le délai d’obtention de la rémission symptomatique serait plus long chez les déprimés âgés que chez les déprimés d’âge moyen concerne majoritairement les antidépresseurs nécessitant une titration posologique (Tableau 4). Traiter le patient dans sa globalité (en incluant le traitement des affections somatiques) La phase de consolidation La phase de consolidation a pour but de réduire le risque de réapparition de symptômes dépressifs au décours du traitement. Sa durée est comprise entre quatre à six mois après la rémission des symptômes dépressifs. La phase de maintenance Enfin, l’objectif de la phase de maintenance est de prévenir la survenue de nouveaux épisodes dépressifs. Le traitement préventif des récidives (ou des récurrences) est particulièrement indiqué chez les patients ayant présenté au moins trois épisodes dépressifs majeurs au cours des quatre dernières années : si ceux-ci ont été rapprochés ou sévères (notamment risque suicidaire, caractéristiques psychotiques et incapacité fonctionnelle) ou lorsque existent des symptômes résiduels, des pathologies associées, des antécédents familiaux de dépression. [2]. Le questionnement sur l’indication d’une phase de maintenance revêt une importance particulière dans la dépression du sujet âgé en raison de l’augmentation du taux de récurrences et de suicide, de la fréquence des comorbidités et du handicap fonctionnel qui la caractérisent [15,33]. Prévention de la rechute et de la récidive Instauration d’un traitement adéquat (antidépresseur et/ou psychothérapie) Délivrer au patient et à son entourage une information claire et précise sur les symptômes de la dépression, son traitement et son évolution Comment améliorer l’adhésion au traitement ? Une information claire sur les symptômes de la dépression, les principes généraux du traitement et l’évolution de la maladie est essentielle. L’enjeu est d’obtenir une bonne adhésion au traitement tout au long de la maladie dans une population où la multiplicité des prescriptions et 276 Tableau 4 T. Gallarda, H. Lôo Stratégies de traitement en aigu (d’après [6]). Après quatre semaines de traitement En l’absence de réponse (< 30 % de réduction symptomatique sur une échelle de dépression) Augmenter la dose jusqu’à la posologie optimale recommandée Changer d’antidépresseur (au cas où la posologie optimale recommandée a été atteinte) En cas de réponse partielle Poursuivre le traitement et en réévaluer l’efficacité après deux à quatre semaines. À l’issue des huit semaines de traitement, en cas d’amélioration supplémentaire minime Potentialiser le traitement antidépresseur avec un médicament ou une intervention psychologique Envisager une association d’antidépresseurs À tous les stades, envisager l’électro-convulsivothérapie l’existence éventuelle de troubles de mémoire concourent à élever le risque de l’inobservance. L’instauration du traitement est l’un des moments les plus délicats car elle influe sur l’ensemble de la prise en charge. Le soutien de l’accompagnant peut être extrêmement utile mais une prescription gagnera à être différée à une prochaine consultation si elle suscite une crainte excessive des effets secondaires, une perplexité ou un rejet, par exemple, chez des patients qui ne reconnaissent pas être déprimés. L’information devra être répétée aux autres phases du traitement. Lorsqu’une rémission symptomatique complète a été obtenue, elle doit prévenir le mouvement naturel qui consiste pour le patient à interrompre son traitement ; il faut l’inciter au contraire à le poursuivre pendant toute la durée nécessaire à la consolidation. L’impact délétère d’épisodes dépressifs récurrents est tel chez une personne âgée que l’information sur la nécessité d’une prévention durable des récidives dépressives apparaît plus impérative [15]. Les traitements antidépresseurs Dans la tranche d’âge 80—94 ans, plus d’un français sur dix a une prescription d’antidépresseurs. À l’inverse, la consommation d’antidépresseurs à une dose efficace et pour une durée suffisante est rarement réalisée. On observe donc une dérive soit par excès, soit par défaut [19]. Quelle est l’efficacité globale des antidépresseurs dans le traitement de la dépression de la personne âgée ? Cette question a alimenté un vif débat [22]. L’intérêt des antidépresseurs lors de la dépression de la personne âgée semble faire l’objet d’un consensus international. Des méta-analyses d’essais comparatifs randomisés (ECR) comparant des antidépresseurs à un placebo ont montré que les antidépresseurs étaient efficaces dans le traitement de la dépression de la personne âgée. Néanmoins, la différence d’efficacité entre certains antidépresseurs et le placebo apparaît faible dans certaines études, voire non significative au plan statistique. Cela concerne en particulier les ECR dont les patients ont des moyennes d’âge de 75 à 80 ans chez lesquels les antidépresseurs n’apparaissent pas supérieurs au placebo [2]. Les modifications pharmacocinétiques et pharmacodynamiques observées avec l’avance en âge et la polymédication, courante dans cette population (qui élève la probabilité d’interactions médicamenteuses), figurent parmi les principaux facteurs de variabilité interindividuelle de la réponse thérapeutique aux antidépresseurs. Les données provenant des méta-analyses montrent qu’il n’y a pas de différences significatives entre les différentes classes d’antidépresseurs. L’interprétation de ces méta-analyses doit toutefois être prudente en raison de l’hétérogéneité des données collectées et de la faible taille des effectifs. Sauf, cas particuliers, les inhibiteurs spécifiques de recapture de la sérotonine (5 HT) (ISRS), les inhibiteurs de recapture de la 5 HT et de la noradrénaline (NA) (IRSNA) et les antidépresseurs de la classe « autres antidépresseurs » sont prescrits en première intention en raison de leur meilleure tolérance et de leur faible risque d’interactions médicamenteuses [2]. Le rapport efficacité/tolérance guide le choix thérapeutique La survenue d’effets secondaires est la principale cause d’inobservance d’un traitement antidépresseur chez les patients âgés. La prescription des imipraminiques a diminué en raison des effets secondaires anticholinergiques périphériques (risque d’iléus paralytique, de rétention urinaire et de glaucome aigu, sécheresse buccale) et centraux (confusion mentale), du risque d’arythmie cardiaque (justifiant la pratique d’un ECG) et de la léthalité lors d’une ingestion volontaire. Les principaux effets secondaires des antidépresseurs utilisés dans la dépression gériatrique sont décrits dans le Tableau 5. Quelle est l’efficacité des antidépresseurs dans le traitement des dépressions comorbides avec des affections neurologiques ? La prise en charge des symptômes dépressifs compliquant le cours évolutif de la maladie d’Alzheimer ou des démences apparentées, de la maladie de Parkinson ou d’une maladie cérébrovasculaire constitue un enjeu thérapeutique majeur mais demeure mal codifiée. Les symptômes anxiodépressifs accentuent à des degrés divers les différentes composantes du déficit démentiel, cognitif et neurologique, favorisent la perte d’autonomie et concourent à la baisse de la qualité de vie. Dans la maladie d’Alzheimer à tous ses stades évolutifs, les ISRS ou la tianeptine sont souvent prescrits en première intention. Aucun consensus n’a cependant été établi pour l’utilisation de ces produits dans cette indication qui apparaît essentiellement guidée par des arguments de bonne tolérance [5]. Aux cours des phases les plus évoluées de la maladie, lorsque la dépression revêt une expression esssentiellement comportementale (retrait, clinophilie, abattement ou au contraire, hostilité, agressivité physique et verbale, agitation), les ISRS auraient des effets symptomatiques intéressants [19]. Dépression et personnes âgées 277 Tableau 5 Mécanismes d’action, effets secondaires et posologies des principaux antidépresseurs utilisés en France dans le traitement de la dépression de la personne âgée. Antidépresseur Mode d’action principal Effets secondaires les plus fréquents Posologie initiale (mg) Posologie quotidienne moyenne (mg) Citalopram 5 HT 20 20—40 Escitalopram Sertraline Fluoxétine 5 HT 5 HT 5 HT 5 50 20 10 50—150 20 Paroxétine 5 HT 20 20 Fluvoxamine 5 HT Moclobémide IMAO Venlafaxine NA 5 HT Minalcipran NA 5 HT Duloxétine Mirtazapine Miansérine Tianeptine NA 5 HT Blocage alpha-2 Antagoniste sélectif des récepteurs 5 HT2 et 5 HT3 Alpha-2 5 HT++ Nausées et vomissements, dyspepsie, douleurs abdominales, diarrhée, céphalées, effets sur la libido Identiques à ceux du citalopram Identiques à ceux du citalopram Identiques à ceux du citalopram mais insomnie et agitation sont plus fréquemment observées Identiques à ceux du citalopram mais somnolence et effets anticholinergiques ont été rapportés Identiques à ceux du citalopram mais les nausées sont plus fréquemment rapportées Troubles du sommeil, nausées, agitation Nausées, insomnie, vertiges, sécheresse buccale, somnolence, élévation et diminution de la pression artérielle Nausées, insomnie, vertiges, sécheresse buccale, somnolence, élévation et diminution de la pression artérielle Nausées, insomnie, vertiges Augmentation de l’appétit, prise de poids, somnolence, céphalées Amitriptyline 5 HT++ NA+ Clomipramine 5 HT++ NA+ Imipramine NA++ 5 HT+ Somnolence Gastralgies, insomnie ou somnolence Somnolence, effets anticholinergiques, hypotension orthostatique, tachycardie/arrythmie Identiques à ceux de l’amitripyline mais moindre somnolence Identiques à ceux de l’amitriptyline mais moindre somnolence Les dépressions post-AVC (DPA) retentissent sur le pronostic fonctionnel, cet effet apparaissant réversible chez les patients traités. La survenue d’une DPA peut altérer la qualité de vie des patients et de leur entourage. L’intérêt de traitements antidépresseurs, en prévention et dans le traitement précoce de la DPA n’a pas été démontré jusqu’à présent. Néanmoins, les arguments en faveur de leur utilisation s’accumulent. Le bénéfice des antidépresseurs dans cette indication pourrait porter aussi sur le handicap, les activités quotidiennes, les fonctions cognitives et de façon plus globale, l’espérance de vie [17]. 50—100 300 75 100 100—200 300—400 150 100—200 30 30 60 30 30 25 30—90 25 25—50 75—100 75—100 25 75—100 Les symptômes dépressifs sont tout aussi fréquents chez les malades parkinsoniens et retentissement amplement sur le handicap fonctionnel et la qualité de vie du patient et de son entourage familial. Traitements psychologiques En théorie, la plupart des modalités psychothérapiques utilisées chez l’adulte pourraient trouver une application dans la prise en charge des personnes âgées déprimées. Ces principales modalités sont : 278 • • • • • la la la la la T. Gallarda, H. Lôo thérapie cognitivocomportementale (TCC) ; psychothérapie interpersonnelle (TIP) ; thérapie de résolution de problèmes ; psychothérapie psychodynamique ; thérapie familiale. Dans la pratique, les psychothérapeutes prenant en charge des personnes âgées sont assez rares. De même, il est peu fréquent qu’une personne âgée demande d’ellemême à entreprendre une psychothérapie [32]. Pourtant, nombreuses parmi elles pourraient bénéficier d’une psychothérapie, seule, dans les dépressions légères, ou en association aux antidépresseurs dans les autres formes. De nombreux préjugés persistent sur la place des psychothérapies dans le traitement des troubles psychiques observés au cours du vieillissement. La plupart sont héritée d’une époque révolue où, en France, psychothérapie signifiait exclusivement psychanalyse. S. Freud (48 ans) écrivait à propos du traitement psychanalytique : « Autour de la cinquantaine, la plasticité des processus mentaux sur lesquels agit la psychothérapie est en règle diminuée ; de plus la masse des matériaux à prendre en considération prolongerait le traitement de manière indéfinie » (On psychotherapy, Hogarth Press, London, 1924) [23]. Durant des décennies, le postulat selon lequel les sujets âgés auraient perdu la capacité ou la motivation au changement et résisteraient au soin psychothérapique a pu prévaloir. Des générations se sont résignées à la souffrance psychique comme l’effet inéluctable du vieillissement et de la perspective de la fin de vie. « Aujourd’hui encore, nous avons tous pu entendre une personne âgée répondre à quelqu’un qui lui proposait de l’aide : à mon âge, ça n’en vaut pas la peine ! ». Mais parfois, « ça n’en vaut pas la peine » veut dire : « je n’en vaux pas la peine », transcrivant une réaction dépressive [31]. Les soignants doivent réviser leur position d’absence d’indication de la psychothérapie au cours des états dépressifs du vieillissement. Les travaux ayant comparé les différentes psychothérapies concernent essentiellement les thérapies brèves (TCC, thérapie interpersonnelle) et ne permettent pas de conclure à la supériorité de l’une ou l’autre chez l’adulte jeune comme chez l’âgé [30]. Les psychothérapies d’inspiration psychodynamique se prêtent difficilement à une évaluation contrôlée. En fait, le succès thérapeutique apparaîtrait moins fonction de la modalité thérapeutique que de la capacité du thérapeute à établir un lien stable et une relation empathique avec son patient [23]. D’autres considérations ne peuvent être éludées : ainsi, la prise en compte d’éventuels déficits sensoriels, en particulier auditifs, d’une diminution possible de la vitesse du traitement de l’information ou encore d’une baisse de la mobilité entravant la possibilité de déplacements réguliers vers le lieu de soins. Un bilan ORL aboutit dans certains cas à l’indication d’un appareillage auditif. Certains patients pourront recevoir des soins à domicile. Des systèmes d’assistance téléphonique ont pu démontrer leur utilité dans la lutte contre les méfaits de l’isolement. La Tableau 6 Principales indications des traitements psychologiques chez la personne âgée (d’après [38]). Préférence du patient (alternative au traitement médicamenteux dans les dépressions légères à modérées) Potentialisation de l’effet d’un traitement antidépresseur Éviter l’utilisation de médicaments aux effets potentiellement délétères, par exemple dans certains troubles psychocomportementaux de la maladie d’Alzheimer et des démences apparentées Prise en charge de la détresse psychique des aidants familiaux Diminuer le poids des problèmes psychologiques émergeant avec l’âge, accepter plus facilement le vieillissement, aider à la résolution des problèmes nés au sein d’une famille confrontée à la maladie d’un des leurs bibliothérapie commence aussi à s’imposer dans les mentalités des soignants français. Enfin, l’opportunité d’ajuster la technique psychothérapique aux déficits cognitifs, par exemple, à l’altération des fonctions exécutives, reste débattue [4] (Tableau 6). Thérapies d’inspiration psychanalytique Le fonctionnement psychique d’une personne âgée n’est pas fondamentalement différent de celui d’une personne plus jeune. D’une façon générale, la technique utilisée par le thérapeute reste la même quel que soit l’âge du patient adulte [32]. Comme l’écrit Le Gouès, « la vie affective est superbement intemporelle » [11]. Dans l’indication d’une psychothérapie d’inspiration psychanalytique, un facteur important va être la qualité des investissements objectaux du patient. La notion du temps prend une connotation particulière : l’acuité de la perception de sa finitude par le patient sous-tend sa motivation à modifier son fonctionnement pour le temps qui lui reste à vivre [11,23]. Les questionnements identitaires et le désir de donner du sens à son existence au travers d’un travail de réminiscence biographique sont d’autres moteurs puissants d’une demande [16]. À tous les âges, les séances de psychothérapie sont souvent vécues par les patients comme des moments privilégiés. Les sujets âgés, voire très âgés, au-delà de 85 ans, n’échappent pas à cette règle. Thérapies cognitivocomportementales et thérapies de résolution de problèmes Les thérapies cognitives ont fait la preuve de leur efficacité chez le déprimé d’âge moyen dans les dépressions d’intensité légère à modérée comme l’atteste désormais un important corpus de données [28]. Dans les 20 dernières années, un certain nombre d’essais ont été menés chez le sujet âgé mais ils souffrent d’importantes limitations méthodologiques. Une seule étude, répondant aux prérequis méthodologiques du National Institute for Health and Clinical Excellence (NICE), n’a pas mis en évidence de différence d’efficacité au seuil statistique entre la TCC et les antidépresseurs (ATD) [36]. Des techniques comportementales avec un objectif de stimulation pourraient avoir un Dépression et personnes âgées 279 intérêt dans le soulagement de la perte d’initiative motrice et psychique fréquemment observée dans les dépressions tardives avec composante cérébrovasculaire. La technique de l’activation comportementale (behavioural activation), par exemple, consiste à aider le patient dans la programmation d’un certain nombre d’activités répertoriées dans un « journal de bord ». d’un(e) assistant(e) social(e) permet d’évaluer avec précision le niveau de ressources et d’envisager les possibilités d’aide les plus appropriées. Lorsque le degré de perte d’autonomie et de handicap est difficile à quantifier avec précision (et le niveau d’aides requises), l’inclusion dans un programme de soins en hospitalisation de jour peut s’avérer utile. La thérapie de résolution de problèmes Références La thérapie de résolution de problèmes s’inscrit dans « l’ici et le maintenant ». C’est une approche centrée sur les difficultés qui sont rencontrées dans le présent. L’objectif est d’aider le patient à recouvrir une plus grande maîtrise sur les problèmes identifiés avec l’aide du thérapeute [4]. Thérapies conjugales et familiales Les symptômes dépressifs d’une personne âgée peuvent être mal compris, mal interprétés et donc mal tolérés par l’entourage familial. C’est notamment le cas des formes hostiles, caractérielles, voire persécutives des dépressions gériatriques. L’isolement et le rejet du patient par les siens génèrent un vécu mutuel d’incompréhension et d’incommunicabilité qui accentue encore le processus dépressif. À l’inverse, certains vieillards déprimés sont surprotégés, parfois infantilisés, maintenus dans une dépendance extrême par leur entourage, en particulier leur conjoint. Ces deux modalités de réaction peuvent faire conflit. Dans ces situations de crise, l’opportunité d’interventions ponctuelles auprès de la famille ne fait pas de doute mais les indications de prises en charge familiales structurées sont plus rares : situations de maltraitance, opposition au maintien de l’autonomie de la personne âgée et décisions contestables d’installation au sein d’une institution, parents âgés débordés par la prise en charge d’enfants présentant eux-mêmes un état de dépendance. Les interventions médicosociales L’influence des facteurs sociaux est souvent méconnue dans la genèse et la chronicisation des troubles dépressifs de la personne âgée [1]. Pourtant, des conditions précaires d’habitation (par exemple, dans des zones urbaines à niveau élevé de délinquance), un bas niveau socioéconomique et des difficultés d’accès aux soins médicaux apparaissent comme des facteurs déterminants de la dépression. Ces facteurs interagissent entre eux dans une synergie négative : situation de pauvreté et installation dans des quartiers où l’exposition à la délinquance et la criminalité est élevée et l’offre de soins médicaux spécialisés moins répandue. L’évolution vers la guérison d’un état dépressif pourra aussi advenir par une modification substantielle de l’environnement, en accompagnant le patient dans une installation plus adaptée à sa vulnérabilité ou dans une institution. La prudence reste néanmoins de mise dans les phases aiguës de la dépression où le regard pessimiste que porte le patient sur sa situation existentielle entrave toute possibilité de décision rationnelle et l’expose à des risques de regrets amers après l’amélioration. Un bilan réalisé auprès [1] Arean PA, Reynolds CF. The impact of psychosocial factors on late-life depression. Biol Psychiatry 2005;58:277—82. [2] Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). 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