ARTICLE DE REVUE Progrès en Urologie (2002), 12, 205-212
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Mécanismes de tolérance immunitaire locale dans les cancers du rein
Jean-Jacques PATARD (1), Françoise BOUET (2), Nathalie RIOUX-LECLERCQ (3), Bernard LOBEL(1),
Véronique CATROS-QUEMENER(2), François GUILLÉ (1)
(1) Service d’Urologie, (2) Service de génétique et de biologie cellulaire, (3) Service d’Anatomo-pathologie,
CHU Pontchaillou, Rennes, France
Le scénario idéal pour un rejet tumoral efficace est la
reconnaissance à la surface de la cellule tumorale d’un
ou de plusieurs antigènes spécifiques présentés aux
lymphocytes T cytotoxiques par les molécules de clas-
se I du complexe majeur d’histo-compatibilité. Cette
reconnaissance est aidée par des molécules d’adhésion
et de co-stimulation et permet une cascade immunolo-
gique mettant en œuvre des cellules facilitatrices et la
libération de cytokines amplifiant la réponse cyto-
toxique. Cette cascade cytotoxique devrait théorique-
ment conduire à la destruction tumorale. Cependant
l’absence ou la déficience d’ un ou de plusieurs de ces
acteurs peut conduire à un état d’anergie lymphocytai-
re et de tolérance vis à vis de la tumeur. Même s’il est
bien établi que les tumeurs rénales sont immunogé-
niques notamment par certaines réponses à l’immuno-
thérapie, par la présence au sein de la tumeur de lym-
phocytes T cytotoxiques, beaucoup d’arguments sug-
gèrent que les tumeurs rénales ont la capacité d’échap-
per au contrôle immunitaire. A chaque étape de la
machinerie du rejet anti-tumoral des mécanismes peu-
vent se mettre en place permettant à la cellule tumora-
le de résister à la destruction immune. Tous ces méca-
nismes sont potentiellement importants à connaître car
ils pourraient permettre de mieux caractériser les
Manuscrit reçu : décembre 2001, accepté : mars 2002.
Adresse pour correspondance : Dr.J . J . Patard, Service dUrologie, CHU
Pontchaillou, rue Henri Le Guillou, 35033 Rennes.
RESUME
De nombreux arguments suggèrent que les tumeurs du rein sont immunogéniques.
Cependant les cellules immunitaires présentes autour ou au sein de la tumeur ne sont
pas capables d’induire un rejet de celle ci et les résultats de l’immunothérapie dans
le cancer du rein métastatique quels que soient les protocoles utilisés restent déce-
vants. L’objectif de ce travail a été de revoir les principaux mécanismes par lesquels
une tumeur du rein peut échapper à la destruction immune.
Ces mécanismes peuvent concerner : les antigènes tumoraux, les molécules qui les
présentent à la surface cellulaire ou des déficiences dans la machinerie cellulaire qui
conduit à leur préparation. Les déficiences peuvent concerner également les com-
munications intercellulaires, notamment des molécules d’adhésion et de co-stimula-
tion. Les cellules immunitaires présentes peuvent elle aussi être déficientes : il peut
s’agir de déficits quantitatifs ou qualitatifs, d’anomalies du récepteur T, de défaut de
fabrication de cytokines et cela peut aussi bien concerner les cellules effectrices que
les cellules présentatrices d’antigènes. Un très puissant mécanisme immuno-suppres-
seur est aussi la capacité qu’à la cellule tumorale de libérer des substances anergi-
santes c’est à dire qui paralysent le système immunitaire. Il s’agit de cytokines et
plus particulièrement du TGF-β. Cette anergie peut également être médiée par des
contacts intercellulaires entre tumeur et lymphocytes par notamment le système Fas.
Ces mécanismes sont utiles à étudier à plusieurs titres : 1/Compréhension des méca-
nismes d’anergie de manière à découvrir de nouvelles cibles thérapeutiques ou à
court-circuiter ces mécanismes in vitro 2/ Définir un " phénotype immunitaire " de
la tumeur qui devrait être évalué comme marqueur pronostic à la fois pour la survie
après chirurgie radicale dans les tumeurs localisées mais aussi comme critère pro-
nostique de la réponse à l’immunothérapie dans les formes métastatiques.
Mots clés : Rein, cancer, immunothérapie, antigène tumoral.
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tumeurs sur le plan immunologique, de définir un véri-
table profil immunitaire de chaque tumeur et à partir de
là définir de nouveaux paramètres pronostiques. Tous
ces mécanismes sont également cruciaux à connaître
afin d’améliorer les protocoles d’immunothérapie.
LES ANTIGENES DE REJET DES TUMEURS
Le concept d’antigène de rejet tumoral a été popularisé
par le groupe de T Boon qui le premier a décrit un gène
codant pour un tel antigène. Ce gène codait pour une
protéine dont un peptide était présenté aux lympho-
cytes T cytotoxiques par les molécules HLA de classe
I. Ce gène fut nommé MAGE pour "melanoma anti-
gen" [68]. De ce concept naissait l’espoir de pouvoir
générer des peptides immunogéniques spécifiques des
tumeurs et permettant une véritable vaccination anti-
tumorale.
Depuis lors d’autres antigènes tumoraux ont été
décrits. Ils sont codés par quatre classes principales de
gènes. La première classe est représentée par des gènes
qui sont silencieux dans les tissus normaux et activés
dans les tumeurs. Ils appartiennent aux familles
MAGE, BAGE, GAGE, LAGE et sont exprimés dans
des tumeurs de différents types, incluant mélanome,
cancer du sein, tumeurs ORL et de vessie [6, 66, 41,
47] Une seconde catégorie est celle des antigènes de
d i fférentiation comme tyrosinase, Melan-A/Mart-1,
gp100, et gp75 [10, 17, 19, 69]. Une troisième catégo-
rie est constituée par des mutations sporadiques de
gènes ubiquitaires comme MUM-1, cyclin-dependant
kinase 4, B catenin et HLA-A2 [18, 70, 53]. Enfin il
existe des antigènes dérivés de gènes qui sont sur-
exprimés dans les tumeurs comme HER-2/neu et
PRAME [22, 29]. On sait également que des produits
de mutations de gènes comme p53 ou Ras peuvent
générer des réactions immunes cytotoxiques [28, 72].
Des antigènes appartenant à ces quatre groupes ont
également été décrits dans l’adénocarcinome rénal. Le
plus caractéristique est codé par le gène RAGE qui est
silencieux dans les tissus normaux mais exprimé seu-
lement dans un nombre restreint de tumeurs [24]. Le
second groupe résulte de mutations des gènes HLA-
A2 ou hsp70-2 [8, 23]. Le troisième groupe est fait de
gènes codant pour des antigènes de différentiation
comme RU-1 et –2 [67, 43]. Il existe aussi pour les
tumeurs du rein des gènes sur-exprimés dans la tumeur
comme Her2-neu [11, 59]. Cependant il est très impor-
tant de noter qu’à ce jour aucun antigène équivalent à
MAGE, c’est à dire spécifiquement exprimé dans un
grand nombre de tumeurs et qui pourrait être le sup-
port d’une immunothérapie spécifique n’a été décrit.
Cela pose le problème de quels antigènes sont recon-
nus par les cellules immunocompétentes locales et
dans quel contexte. Ceci impose bien sûr de mieux
caractériser les lymphocytes T locaux afin de définir
leurs cibles et de les rendre éventuellement plus cyto-
toxiques.
LA MACHINERIE DE PRESENTATION
ANTIGENIQUE
Le transit, la préparation et la présentation des immu-
no-peptides intracellulaires aux molécules de classe I
du CMH (complexe majeur d’histocompatibilité) est
faite de 3 étapes. Tous d’abord les proteines intra-cel-
lulaires sont dégradées en peptides par les enzymes du
proasome et par d’autres proases cytosoliques
(PA28 a and b). Le protéasome est un complexe consti-
tué de protéases multi-catalytiques que l’on trouve
dans le noyau et le cytoplasme des cellules eucaryotes.
L’expression de certaines sous-unités du protéasome,
nommées immuno-protéasomes comme LMP2 , LMP7
et LMP10 (Low molecular weight proteins) peut être
modulée par des cytokines comme l’IFN-γ(Interféron-
gamma). Ensuite des peptides sont transportés par des
molécules spécialisées : Transporter associated with
antigen processing (TAP) du cytosol au réticulum
endoplasmique, puis les peptides sont assemblés aux
molécules de classe I. Le complexe formé par les molé-
cules de classe I, la β2 micro-globuline et le peptide est
alors transporté à travers le reticulum de Golgi vers la
surface cellulaire pour être présenté aux lymphocytes T
cytotoxiques CD8+ [58].
La perte ou la diminution d’expression des molécules
de classe I du CMH a été fréquemment notée à la sur-
face des cellules tumorales de différentes origines [16]
mais toute anomalie dans l’apprêtement antigénique
peut entraîner un défaut de présentation de l’antigène à
la surface cellulaire. Ainsi BRASANAC a montré sur une
série de cancers du rein qu’un défaut d’expression des
molécules de classe I était associé à un phénotype
histo-pathologique plus agressif. Les tumeurs ayant
perdu leurs molécules de classe I correspondaient à des
stades et des grades élevés [9]. SELIGER a aussi montré
que l’expression des molécules de classe I, TAP et
LMP était fortement réduite dans les lignées tumorales
rénales comparées aux cellules normales [55]. De plus,
in vitro on observait une forte instabilité des molécules
présentatrices de surface en rapport avec des anomalies
de la machinerie intra-cellulaire [56]. Cependant si les
cellules tumorales étaient transfectées avec le gène
codant pour la molécule TAP, il en résultait une plus
forte expression des molécules de classe I [57]. Des
déficiences de la machinerie de préparation intra-cellu-
laire de la présentation antigénique ont donc été identi-
fiées pour les molécules LMP2, LMP7, TAP1, TAP2 et
HLA de classe I [58]
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FAS (CD95), FASL (CD95-L) ET APOPTOSE
Le système Fas, FasL est un des procédés principaux de
lyse qu’utilisent les lymphocytes T cytotoxiques. CD95
et CD95L sont des protéines trans-membranaires de la
famille TNF (Tumor Necrosis Factor). L’engagement
de Fas par FasL entraîne une cascade d’évènements
intra-cellulaires conduisant à la mort cellulaire pro-
grammée (apoptose).
Les cellules tumorales au regard du système Fas, FasL
ont potentiellement deux façons d’échapper au contrô-
le immunitaire : la résistance à Fas ou la "contre-
attaque Fas". A la différence des cellules normales, les
cellules tumorales en effet sont souvent résistantes à
l’apoptose médiée par Fas. Cela pourrait être le fait
d’une sous régulation de Fas, de la libération de Fas
solubles ou encore d’anomalies dans la cascade du
signal de transduction. Les cellules tumorales ont aussi
un avantage supplémentaire qui est un mécanisme de
«contre-attaque tumorale» par le système Fas condui-
sant à la destruction des TIL (Tumor Infiltrating
Lymphocytes) et des cellules NK (Natural Killer) par
apoptose (44). Ces deux concepts ont été vérifiés pour
les tumeurs du rein. GERHARZ en utilisant des anticorps
anti-CD95 agonistes induisait une faible augmentation
d’apoptose chez seulement 9 des 30 tumeurs du rein
testées malgré une bonne expression du récepteur
CD95. Les auteurs en déduisaient que la machinerie
nécessaire pour l’apoptose médiée par Fas était présen-
te mais inactive dans la plupart des tumeurs rénales
[25]. KI M dans une étude immuno-histochimique
concernant 51 tumeurs rénales a montré que FasL était
détecté dans 98% des cas alors que Fas l’était dans
74,5%. Le "profil Fas" le plus fréquent était une forte
expression de FasL et une faible expression de Fas
(70,6% des cas). Aucune corrélation n’était notée avec
le stade et le grade [34]. De la même façon, d’autres
auteurs ont noté une sur-expression tumorale de la
molécule FasL comparée au rein sain alors que l’ex-
pression de Fas était variable ou faible [45, 48]. L’étude
de CARDI est complémentaire de ces données puisqu’il
a détecté une augmentation significative de Fas sur les
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Figure 1. Les principaux mécanismes locaux qui permettent à une tumeur d’échapper à la destruction immunitaire concernent
(1) la cellule tumorale (défaut de préparation et de présentation antigénique, résistance à l’apoptose, libération de substances
immuno-suppressive) (2) les interactions cellulaires (défaut de molécules d’adhésion et de co-stimulation) (3) la cellule T cyto -
toxique (anomalie du récepteur T, diminution de la libération de cytokines, augmentation de l’apoptose) (4) les cellules dendri -
tiques (diminution du recrutement, altération de la présentation antigénique).
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TIL comparée aux lymphocytes périphériques et à des
lymphocytes de volontaires sains [13]. De la même
manière UZZO a montré que FasL dans les tumeurs du
rein était fonctionnel, que Fas était exprimé par les
lymphocytes T tumoraux et que des marquages in situ
pouvaient mettre en évidence des phénomènes d’apop-
tose parmi les lymphocytes T tumoraux [65]. Toutes
ces dones confirment l’idée que la balance
Fas(CD95)/Fas(CD95)L et le micro environnement
tumoral jouent un rôle important dans la modulation de
la réponse T anti-tumorale (activation ou apoptose)
LES TIL(S) ET AUTRES CELLULES
IMMUNOCOMPÉTENTES
TIL
Les lymphocytes infiltrant les tumeurs (TIL) activés in
vitro ont constitué un espoir dans le traitement des formes
tastatiques de cancer du rein [4] mais ces résultats res-
tent cevants et des progrès sont à faire dans laliora-
tion et la modulation de la cytotoxicité de ces lympho-
cytes. Ceci s’explique sans doute comme nous lavons
vu par des fauts de l’environnement immunitaire
mais aussi potentiellement par des défaillances de ces
TIL(s) eux même. Ainsi il a été établi que les TIL avaient
un taux de prolifération réduit me s’ils étaient
capables de produire de l’IL-2 (Interleukin-2) et possé-
daient le récepteur à l’IL-2, sugrant quil existait une
perte de signalisation intracellulaire cessaire à la proli-
fération et non aux autres aspects de la réponse à la sti-
mulation antigénique [1]. Labsence d’expression du
ne du récepteur à la transferrine (TfR) serait un des
canismes possibles conduisant à ce défaut de prolifé-
ration [38]. Les canismes de lyse des TIL pourraient
également être altérés par différents mécanismes dont
des défauts de production de cytokines [64], une perte
d’expression de granzyme B [39]. Lexpression de Fas
sur les TIL, déjà cie, favorisant la mise en apoptose de
ces populations cellulaires est également un canisme
d’ " anergie " lymphocytaire vis à vis de la tumeur [13,
65]. Des anomalies du récepteur T (TCR) comme la perte
de la chaîne zêta ont été propos comme canismes
d’immunosupression locale [61] mais n’ont pas é
confires par d’autres équipes [12]. Enfin des troubles
de la mobilité des TIL dans le micro-environnement
tumoral ont é montrés [51].
Les cellules dendritiques
Les cellules dendritiques sont les cellules présenta-
trices d’antigène par excellence et elles possèdent en
principe toute la machinerie nécessaire pour présenter
de manière adéquate l’antigène tumoral à la cellule T,
ce pourquoi, la cellule tumorale on l’a vu est souvent
déficiente. Cependant dans les tumeurs du rein comme
dans d’autres modèles on a établi des anomalies de
cette population cellulaire. MOREL a ainsi pu montrer
que l’immuno-protéasome des cellules dendritiques
d’une tumeur du rein n’était pas capable de traiter cer-
tains immuno-peptides notamment des antigènes de
différentiation [43]. D’autres mécanismes ont été mis
en évidence expliquant un déficit de présentation anti-
génique par ces cellules spécialisées: sous représenta-
tion et perte de fonctionnalité in situ [63], défaut de
molécules de surface indispensable à l’interaction avec
la cellule T comme CD80 et CD86 [15], libération par
la tumeur de facteurs solubles inhibant le développe-
ment des cellules dendritiques [7, 33].
MOLECULES D’ADHESION ET DE
CO-STIMULATION
Une réponse immunitaire cellulaire dirigée contre
une tumeur nécessite un antigène, une cellule présen-
tatrice équipée d’une machinerie de présentation eff i-
cace, une cellule effectrice avec son récepteur spéci-
fique mais en l’absence de molécules dadhésion et
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Tableau I. Résumé des principaux mécanismes d’échappement des tumeurs rénales à la destruction immune.
Mécanisme défaillant Référence
Présentation antigénique
Préparation et transport intra-cellulaire TAP, LMP 55-58
Molécules de surface HLA C1 I et II, B2 microglobuline 9
Cellules effectrices
CD8 Prolifération, production d’IL2, 1, 38, 61, 64
mobilité, Récepteur T
Cellules dendritiques Déficit, Anergie par cytokine 7, 33, 43, 63
Communications intercellulaires ICA-1, CD40, Fas-Fas-L, CD80-CD86 13, 15, 20, 27, 35, 65
Médiateurs solubles IL-6, IL-10, TGF-B 14, 32, 36, 37, 40, 46, 49
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surtout de co-stimulation il peut s
en suivre un état
d ’ a n e rgie. La mocule dadhésion ICAM-1
(Intercellular Adhesion Molecule-1) intervient dans
la re-circulation des leucocytes et potentiellement
dans linfiltration des lymphocytes sur le site tumo-
ral. Ainsi, des études ont montré que l’expression de
ICAM-1 et de VCAM-1 (Vascular Cell Adhesion
Molecule-1) dans les tumeurs du rein était corrée
avec linfiltration de cellules immuno-compétentes
et la différentiation tumorale [27] et que les mo-
cules de cette famille pouvaient avoir une valeur pro-
nostique dans les tumeurs du rein [20]. Il a é mon-
tré par ailleurs que ICAM-1 pouvait être sous régulée
sur les cellules endothéliales des tumeurs du rein et
que cette sous régulation était sous le contrôle de fac-
teurs pro-angiogéniques dont on sait limportance
dans les tumeurs du rein [26, 52].
Une autre molécule dont il a été démontré récemment
l’importance dans la réponse T et qui est aussi liée à
l’angiogénèse est la molécule CD40. Elle est fortement
exprimée par les cellules endothéliales des tumeurs du
rein alors qu’elle n’est pas exprimée par le rein sain
(35). Il n’existe pas encore de travaux mettant cette
molécule en corrélation avec les caractéristiques de la
tumeur, le pronostic et l’activité des cellules immuno-
compétentes locales.
Les cellules tumorales rénales nexpriment pas à
l’état basal les mocules de co-stimulation B7-1 et
B7-2 (CD80 et CD86) pourtant indispensables à une
réponse cytotoxique T spécifique. Il a dailleurs é
imaginé de transférer les gènes codant pour ces
molécules dans les cellules tumorales afin de les
rendre plus immunogéniques [3, 31, 50]. Dans le
tissu tumoral rénal ce sont les cellules présentatrices
dantigènes et en particulier les cellules dendritiques
qui sont équipées de ces mocules. Ainsi S
C H WA A B
a pu montrer en étudiant 70 tumeurs rénales une sous
expression de B7-2 sur les cellules dendridiques
assoce à une diminution des TIL CD8+ [54]. Des
régulations plus complexes peuvent également exis-
ter au sein de la tumeur expliquant létat d’immuno-
supression locale dans certains cas. En effet il a é
établi que les TIL eux même pouvaient exprimer non
seulement CD28 qui est le ligand de B7-1 mais aussi
B7-1 lui-même [62].
CYTOKINES ET CHEMOKINES
Les cellules tumorales peuvent produire des substances
ayant des capacités immunosupressives. En ce qui
concerne les tumeurs du rein, les candidats pour une telle
immuno-suppression locale sont le TGF-β
( Transforming Growth Factor-β) et des cytokines
comme l’IL-6 (Interleukin-6) et l IL-10 (Interleukin-
10).
Le TGF- βinhibe la prolifération, induit la différentia-
tion et favorise l’apoptose de la cellule normale. Dans
la cellule tumorale, de nombreux composants de la
signalisation du TGF-βsont mutés rendant les cellules
résistantes au TGF-β. Ces cellules tumorales résis-
tantes au TGF-β, prolifèrent de façon non régulée et
augmentent leur production de TGF-β. TGF-βest sour-
ce d’immuno-suppression des cellules immunitaires
locales, d’angiogénèse et d’augmentation du caractère
invasif de la tumeur [5]. Ce point des relations entre
contrôle immunitaire local et angiogénèse est particu-
lièrement important. Ainsi, la mutation la plus fréquen-
te observée dans 90 à 95% des adénocarcinomes du
rein est la mutation VHL [73] et les cibles de la protéi-
ne VHL sont précisément platelet-derived growth fac-
tor-b, TGF-αet TGF-β1 [2]. Il a été confirmé que les
lignées tumorales de rein exprimaient fréquemment
TGF-β1 et que cette cytokine était présente dans les
surnageants de culture [49]. Il a été montré in vitro que
cette production de cytokines était capable de moduler
la réponse T [36]. Il a aussi été établi que TGF-β1 était
élevé dans le sérum de patients atteints de cancer du
rein [32, 71]. Il n’existe cependant pas d’études mettant
en relation le niveau d’expression de TGF-βavec le
stade, le grade et le pronostic de cette tumeur.
Les cellules tumorales rénales sont également capables
de sécréter de l’IL-6 [14, 37] et de l’IL-10 [36, 40, 46].
Les lymphocytes de ces patients sont aussi capables de
produire ces cytokines après stimulation par la tumeur
[21, 30]. Les mécanismes possibles d’immunosupres-
sion médiés par l’IL-6 et l’IL-10 sont à la fois la modu-
lation de la réponse T [36, 60], mais aussi l’inhibition
des cellules dendritiques [42, 33].
CONCLUSION
Les mécanismes de rejet des tumeurs peuvent être alté-
rés à de nombreux points de la chaîne qui va de la pré-
paration du peptide immunogénique dans la cellule à
l’activation de la réponse T, en passant par l’activation
des cellules facilitatrices de la réponse et la libération
de facteurs solubles.
Il semble inressant pour une tumeur rénale donnée
de faire un état des lieux de l’engagement de tous ces
médiateurs du rejet tumoral, de les mettre en relation
entre eux et de les corréler au typage histologique de
la tumeur et au devenir des patients. Pour certains de
ces médiateurs une valeur pronostique et un lien au
stade et au grade a pu parfois être montré mais aucu-
ne étude n’a analy ces éments dans leur diversité
à la fois pour montrer leur valeur pronostique mais
aussi leurs liens entre eux. Il pourrait sen suivre
l’élaboration de véritables critères immunologiques
pronostiques.
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