2009 - Université Paris VI
Master 1 : Introduction au calcul stochastique pour la finance (MM054)
TD 3 et 4 : Processus à temps discret et Martingales
1. Questions basiques sur les filtrations 1. Une union de tribus est-elle toujours une
tribu ?
2. Soit (Fn)une filtration (suite croissante de tribus) d’un ensemble .nNFnest-elle
toujours une tribu ?
3. Que dire d’une martingale (resp. d’une sous-martingale, d’une sur-martingale) par
rapport à une filtration constante (i.e. telle que Fn=F0pour tout n) ? Que dire d’un
temps d’arrêt par rapport à une filtration constante ?
Solution : 1. Non, si Ω = {1,2,3}, alors F={∅,,{1},{2,3}},G={∅,,{1,2},{3}}
sont des tribus, mais pas FGcar {2}={2,3}∩{1,2}/FG.
2. Non, si l’on prend Ω = [0,1[, et pour tout n,Fn=σ([(i1)/2n, i/2n[ ; i= 1,· · · ,2n),
alors nNFnest l’ensemble des unions finies d’intervalles du type [(i1)/2n, i/2n[, avec
n0,i= 1,· · · ,2n. Cet ensemble n’est pas une tribu, sinon, il serait égal à la tribu
qu’il engendre, et la tribu qu’il engendre est l’ensemble des boréliens de , par densité
des nombres dyiadiques dans .
3. C’est une suite p.s. constante (resp. p.s. croissante, décroissante) d’éléments de
L1mesurables par rapport à cette tribu. Un temps d’arrêt par rapport à une filtration
constante est une v.a. à valeurs dans ¯
Nmesurable par rapport à cette tribu.
2. Conditionnement et indépendance 1. Soient Xet Ydeux variables aléatoires
indépendantes de lois de Bernoulli de paramètres p, q ]0,1[. On pose Z={X+Y=0}et
G=σ(Z). Calculer E(X| G)et E(Y| G).
2. Ces deux variables aléatoires sont-elles indépendantes ?
3. Soient Z, T des variables aléatoires définies sur un même espace de probabilité
(Ω,A, P )à valeurs dans des espaces mesurables quelconques (Ω0,A0),(Ω00,A00)telles que
pour toute sous-tribu Bde A, pour toutes fonctions numériques mesurables bornées
f, g définies respectivement sur (Ω0,A0),(Ω00,A00),E(f(Z)|B)et E(g(T)|B)sont indé-
pendantes. Montrer que Zou Test p.s. constante.
Solution : 1. Les ensembles {Z= 0}et {Z= 1}forment une partition de qui
engendre G. Ainsi,
E(X|G) = E(X|Z= 0) {Z=0}+E(X|Z= 1) {Z=1}.
Sur {Z= 0},X= 0 p.s et donc E(X|Z= 0) = 0. De plus,
E(X|Z= 1) = P(X= 1)
P(X+Y1)
=P(X= 1)
1P(X+Y= 0)
=p
1(1 p)(1 q)=p
p+qpq .
1
Ainsi,
E(X|G) = p
p+qpq {Z1}.
Les rôles de Xet Yétant symétriques,
E(Y|G) = q
p+qpq {Z=1}.
2. Les variables aléatoires E(X|G)et E(Y|G)sont donc proportionnelles p.s et non
constantes, elles ne sont donc pas indépendantes.
3. Supposons que ni Z, ni Tne soient p.s. constantes. Alors il existe les ensembles
mesurables A, B des espaces d’arrivée respectifs de Z, T tels que X:= 1A(Z), Y := 1B(T)
soient des v.a. de loi de Bernouilli de paramètres p, q ]0,1[.Xet Ysont indépendantes
(par hypothèse en conditionnant avec la tribu A). Par ce qui précède, l’hypothèse est mise
en défaut.
3. Rappels : Martingales et sur-martingales.
On se place sur une espace de probabilité (Ω,F,P)muni de la filtration F= (Fn)n0.
1. Soit YL1. On définit le processus X= (Xn)n0par Xn=E(Y| Fn). Montrer
que Xest une F-martingale.
2. Soit (Xn)une sous-martingale et une fonction convexe croissante ϕ:R7→ Rtelle
que pour tout n,ϕ(Xn)L1. Montrer que (ϕ(Xn))n0est une sous-martingale pour F.
3. Soit (Xn)une sous-martingale et KR. Montrer que (XnK)n0est une sous-
martingale pour F.
4. On suppose que YL1est FNmesurable et on définit Z= (Zn)nNpar ZN=Y
et Zn=ξnE[Zn+1 | Fn]pour nN1ξ= (ξn)n0est Fadapté et borné. Montrer
que Zest une sur-martingale.
5. Soit (Xn)une martingale et H= (Hn)n0un processus F-prévisible borné. On
définit V= (Vn)n0par Vn=Pn
k=1 Hk(XkXk1)pour n0. Montrer que Vest une
martingale pour F.
6. Montrer qu’un processus prévisible intégrable est une martingale ssi il est p.s.
constant.
7. Soit (Xn)une martingale L2et telle que Xn+1 Xnest indépendant de Fnpour
tout n0. Montrer que W= (Wn)n0défini par Wn= (XnE[Xn])2Var(Xn)pour
n0est une martingale.
Solution : 1. C’est simplement une application de la transitivité de l’espérance condi-
tionnelle : si B ⊂ A sont des tribus, alors pour tout XL1,E(X|B) = E(E(X|A)|B).
2. On a, pour tout n,
E(ϕ(Xn+1)|Fn)ϕ(E(Xn+1|Fn)) ϕ(Xn)
car ϕest convexe et croissante et (Xn)une sous-martingale.
3. C’est une application de la question précédente pour ϕ(x) = xK.
4. a) Znest clairement adapté et on montre par récurrence décroissante que Zn, su-
premum de deux fonctions intégrables, est intégrable.
b) Pour tout n,ZnE[Zn+1 | Fn].
2
5. Tout d’abord, comme somme de produit de v.a. Fn-mes, Vnest Fn-mes. Ensuite,
Vnest clairement L1car les Hksont bornés et les Xksont L1. Enfin,
E(Vn+1|Fn) = Vn+E(Hn+1(Xn+1 Xn)|Fn) = Vn+Hn+1E(Xn+1 Xn|Fn) = Vn.
6. Tout processus p.s. constant est une martingale et réciproquement, si H= (Hn)n0
un processus F-prévisible et une F-martingale, on a pour tout n, p.s.
Hn=E(Hn+1|Fn) = Hn+1.
7. Posons Yn=XnE[Xn]. Ce processus satisfait les mêmes hypothèses que Xn
en étant en plus centré, et l’exercice revient à montrer que Zn:= Y2
nE(Y2
n)est une
martingale. Notons que l’on a alors E(Yn+1Yn) = E(Y2
n)(commencer par conditionner par
Fn). Par ailleurs, par indépendance, on a E((Yn+1 Yn)2|Fn) = E((Yn+1 Yn)2).Il en
résulte, en écrivant
Zn+1Zn=Y2
n+1Y2
nE(Y2
n+1)+E(Y2
n)=(Yn+1Yn)2+2Yn+1Yn2Y2
nE(Y2
n+1)+E(Y2
n),
que l’on a E(Zn+1 Zn|Fn)=0.
4. Une application du théorème d’arrêt.
On considère une suite Xn=
n
X
i=1
ξi, avec (ξi)i1v.a.i.i.d. de loi 1
2(δ1+δ1). On introduit
la filtration Fn=σ(ξ1, . . . , ξn). Soit a < 0< b entiers. On définit Ta,b = inf{n1 ; Xn=
aou b}.
1. Que peut-on dire de (Xn)et de Ta,b ?
2. Montrer que Ta,b est presque sûrement fini (on pourra considérer, pour pN,
l’événement Ap={ξp(ba)+1 =· · · =ξp(ba)+(ba)= 1}).
3. Donner la loi de XTa,b .
Solution : 1. Les ξiétant indépendants et centrés, Xnest une martingale par rapport
à la filtration Fn.Ta,b est un temps d’arrêt.
2. Les événements Apsont indépendants, de probabilité >0, donc on est presque sûr
que l’un d’entre eux se produira. Mais pour tout p, sur Ap,Ta,b p(ba) + (ba). Donc
Ta,b est presque sûrement fini.
3. Appliquons le théorème d’arrêt : on sait que pour tout nN,E(XTa,bn) = E(X0) =
0. Par convergence dominée, en faisant tendre nvers l’infini, par convergence dominée
(car pour tout n,aXTa,bnb), on obtient, comme Ta,b est presque sûrement fini :
E(XTa,b ) = 0, soit
aP (XTa,b =a) + bP (XTa,b =b) = 0,
ce qui permet de conclure, avec
P(XTa,b =a) + P(XTa,b =b) = 1.
5. Martingales exponentielles.
On reprend l’exercice précédent et on définit le processus Z= (Zn)n0par Zn=eXn
pour n0.
3
1. Montrer que Zest une sous-martingale pour F.
2. Trouver un processus F-prévisible B= (Bn)n0issu de 1en 0tel que U= (Un)n0
défini par Un=BnZnpour chaque n0soit une martingale.
3. Donner E[Zn]pour tout n0.
Solution : 1. Il suffit de remarquer que exp est croissante et convexe.
2. On a Xn+1 =Xn+n, donc
E(Zn+1|Fn) = ZnE(en+1 |Fn) = Zncosh(1)
par indépendance. Donc Bn= cosh(1)nconvient.
3. E(Un)est constante égale à un, donc E(Zn) = 1/Bn.
6. Jeu de pile ou face et temps d’arrêts.
On considère deux joueurs qui jouent à pile ou face. Le joueur 1 donne (resp. reçoit) 1
euro si face apparaît (resp. si pile apparaît). Le jeu est répété plusieurs fois. On modélise
le jeux comme suit. Soit X= (Xn)n1une suite de variables aléatoires i.i.d. de loi de
Bernouilli B(1/2) définie sur un espace de probabilité (Ω,F,P). L’évènement {Xn= 1}
signifie que pile est apparu au n-eme tirage. On définit la suite Y= (Yn)n0par Yn=
Pn
i=1(2Xi1) pour n0. Le processus Ycorrespond à la richesse du joueur 1 après
les différents tirages. Après chaque tirage, les joueurs connaissent la valeur obtenue aux
tirages précédents, leur information peut donc être modélisée par la filtration F= (Fn)n0
Fn=σ(Xk, k n).
1. Ecrire la dynamique de Y(i.e. la relation entre Yn+1 et Yn) et montrer que c’est une
martingale pour F.
2. Le joueur 1 décide d’arrêter de jouer si il a déjà gagné 100 euros où si le nombre
de tirages atteint NNet le joueur 2 est disposé à continuer à jouer jusqu’à ce que le
joueur 1 s’arrête : le jeux s’arrête au temps τ:= inf{n0 : Yn= 100} ∧ N. Montrer
que τest un F-temps d’arrêt, i.e. que {τn} ∈ Fnpour tout n0.
3. Quelle est, avec cette stratégie, l’espérance de gain du joueur 1 ?
4. Y a-t-il une stratégie qui donne au joueur 1 une espérance un gain strictement
positive en un temps borné ? Autrement dit, existe-t-il une v.a. σà valeur dans N, bornée,
telle que pour tout n,{σ=n}∈Fnet telle que E(Yσ)>0?
5. Soit MNet κ= inf{n0|Yn=M}.κest-elle bornée p.s. ?
Solution : 1. Les v.a. X0
i:= 2Xi1sont indépendantes et centrées, la tribu engendrée
par X0
1, . . . , X0
nest Fn, donc Ynest une F-martingale.
2. Pour tout n,{τn}= Ω ∈ Fnsi nNet {τn}={Y1100} ∪ · · · ∪ {Yn
100}∈Fn.
3. L’espérance de gain du joueur 1 si le jeu s’arrête en τest E(Yτ). Or on sait (théorème
d’arrêt) que (Zn:= Ynτ)nest une martingale. De plus, τ=τN. Donc
E(Yτ) = E(ZN) = E(Z0)=0.
4. Une telle v.a. σest un temps d’arrêt, donc (Hn:= Ynσ)nest une martingale, et si
Kentier est tel que σKp.s., alors, Yσ=HKp.s., donc E(Yσ) = E(HK) = E(H0)=0.
Donc il n’existe pas de telle stratégie.
5. Par la question précédente, la réponse est non.
4
7. Doubling strategies. On considère un jeu répété avec tirages indépendants et même
probabilité de succès que d’échec à chaque tirage. A chaque coup, on mise un montant x,
que l’on remporte si on gagne et que l’on paye si on perd. Un joueur, partant de fortune
initiale nulle, suit la stratégie suivante. Il joue 1au premier tour et si sa dette est de
Dau nème tirage, il mise un montant 2Dau tirage suivant (somme qu’il finance par
emprunt) et s’arrête de jouer la première fois qu’il gagne. On suppose que les emprunts
sont sans intérêt. On pourra faire comme si les tirages continuent après que le joueur aie
arrêté de jouer, mais sa fortune n’évolue plus.
1. Modéliser le jeu en introduisant un espace de probabilité muni d’une filtration
adéquate. Donner l’espérance de la fortune du joueur après le n-ème tirage.
2. Montrer que le joueur gagne en un nombre de coups fini avec probabilité 1. Ce
nombre est-il presque sûrement borné ?
Solution : 1. Introduisons une suite (Xi)de vaiid valant ±1avec probas 1/2,1/2
représentant les tirages successifs (1 = succès, 1 = échec). Soit τ= min{i/Xi= 1}.
Alors la fortune du joueur au temps nest (Znτ), où Z0= 0,Z1=X1et pour tout n1,
Zn+1 =(3Znsi Xn+1 =1,
Znsinon.
Il faut donc calculer E(Znτ). Pour ce faire, on va montrer que (Zn)est une martingale
par rapport à la filtration Fn:= σ(X1, . . . , Xn). Le processus est clairement a dapté,
|Zn| ≤ 3ndonc on a intégrabilité, et l’égalité de martingale peut se monter en écrivant
n1, Zn+1 =Zn(1 2Xn+1)
ou
n1, Zn+1 =h(Zn, Xn+1)
avec h(z, x) = 3zsi x < 0et zsi x0.
On en déduit, comme τest un temps d’arrêt, que E(Znτ) = E(Z0)=0.
2. La probabilité que le joueur perde aux coups 1,2, . . . , n vaut 2n. Ces événement
sont imbriques les uns dans les autres, donc la probabilité que le joueur perde tout le
temps est la limite de cette probabilité, soit 0. Ainsi, le joueur gagne en un nombre de
coups fini (égal à τ) avec probabilité 1.τn’est pas presque sûrement borné : sinon, on
aurait E(Zτ) = E(Z0) = 0, ce qui est absurde car Zτ>0. On peut aussi dire que pour
tout n, la proba que τsoit supérieur à nest 2n>0.
8. Une réciproque du théorème d’arrêt. Soit (Xn)n0un processus sur un espace de
probabilité filtré (Ω,F,(Fn)n0,P)intégrable et adapté. Montrer que, si l’on a E(Xτ) =
E(X0)pour tout temps d’arrêt borné τ, alors (Xn)n0est une martingale.
Solution :
On remarque que E(Xn) = E(X0)pour tout n0. De plus, pour n0, et Aun
ensemble Fn-mesurable, on considère
τ=nA+ (n+ 1) Ac.
Pour tout 0kn1,{τk}=;{τn}=A; et pour tout kn+1,{τk}= Ω.
Donc, τest un temps d’arrêt et il est borné. Donc
E(Xτ) = E(Xn A) + E(Xn+1 Ac) = E(Xn+1)
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