70 ans de la Sécu : le nouveau sens de la solidarité

La Gazette Santé-Social • septembre 2015 15
DOSSIER
Christelle Destombes et Émilie Lay
70 ans de la Sécu:
le nouveau sens de la solidarité
La Sécurité sociale (Sécu) a été créée à la fi n de la Seconde Guerre mondiale pour édifi er « un ordre social
nouveau » (1). Mais face au vieillissement de la population, à l’évolution de nos structures sociales et de nos
territoires, aux nouveaux besoins de confort ou de prévention, la Sécu craque et pas seulement fi nancièrement.
Quels principes mettre en œuvre pour refonder un système qui s’avère inapte à résorber les inégalités de santé
et joue de moins en moins son rôle d’amortisseur de crise? Les solutions inventées sur les territoires (recours aux
nouvelles technologies, mutuelles communales) préfi gurent-elles de nouvelles formes de solidarité ou modifi ent-
elles notre contrat social?
ANALYSE DES BESOINS
70 ans de la Sécu:
le nouveau sens
de la solidarité
P. 15
INITIATIVE
Pour l’accès aux soins
pour tous, d es villes
se font mutuelles
P. 18
INITIATIVE
Les Landes misent
sur le numérique
P. 19
POINTS DE VUE
L’impossible refonte
de la Sécurité
sociale?
P. 20
VU D’AILLEURS
La Finlande
expérimente
le minimum vital
P. 22
C
hômage de masse, crise et défi cits publics
récurrents, vieillissement de la popula-
tion, nouvelles pathologies – certaines
liées à l’augmentation de l’espérance de vie –,
départs à la retraite des baby-boomers, inversion
de la pyramide des âges, etc. Notre situation n’a
rien à voir avec l’après-Guerre. Pour s’adapter au
XXIe siècle, les propositions ne manquent pas et
à droite comme à gauche, chacun se targue de
refonder un système à bout de souffl e. Et qui,
en dépit des dix-neuf plans de redressement
des comptes de l’assurance maladie entre 1975
et 1995 et des réformes des retraites de 1993,
2003, 2008, 2010 et 2012, est toujours défi citaire.
La Sécurité sociale est composée de 366 orga-
nismes (dont 101 CAF, 101 CPAM, 22 Urssaf,
16 Carsat) de droit privé avec une mission de
service public. S’y côtoient une multitude de
régimes (salariés, agriculteurs, fonctionnaires,
mineurs, etc.), aux mécanismes de fi nancement
complexes. En cette année de commémoration
des 70 ans de la Sécu (2), la ministre de la Santé
Marisol Touraine a annoncé une réfl exion sur la
création d’un « régime maladie universel » afi n
de simplifi er « radicalement » la couverture des
soins pour tous : « tout le monde dans notre pays
a droit à une couverture, (mais) il est parfois com-
>>
© DWIGHT ESCHLIMAN / GETTY
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16 septembre 2015 • La Gazette Santé-Social
DOSSIER
pliqué de faire valoir ses droits », après un démé-
nagement, une période de chômage, etc. D’ores et
déjà, la sécurité étudiante a été adossée au régime
général. Alors que la Sécu est historiquement
attachée au statut de travailleur, celui d’assuré
dépendant d’une caisse unique s’adapte mieux
à notre époque du travail précaire et des CDD.
Des salaires à la TVA sociale
L’autre chantier concerne le fi nancement. À
l’origine quasi totalement assuré par les salaires
(cotisations sociales), il pioche de plus en plus
du côté de l’impôt, en particulier avec la contri-
bution sociale généralisée (CSG) créée en 1991.
Frédéric Bizard, économiste de la santé, y est
favorable : « Une montée en puissance de la
CSG, compensée par une baisse des cotisations
santé […] renforcerait l’équilibre financier
de l’assurance maladie et serait favorable à
l’emploi. Elle serait socialement juste en met-
tant davantage à contribution les seniors aisés
qui sont plus gros consommateurs de soins et
plus faibles contributeurs que les actifs » (3).
D’autres préfèrent l’idée d’une TVA sociale. Une
étude macroéconomique réalisée par la chaire
Transition démographique-transition écono-
mique de la Caisse des dépôts indique (4) : « la
(mesure) la plus effi cace est l’instauration d’une
TVA sociale et la moins effi cace la hausse de la
CSG, et cela en intégrant leurs effets respectifs
sur la compétitivité de l’économie française ».
En attendant de trancher, le gouvernement a
demandé au Haut Conseil du fi nancement de
la protection sociale un rapport sur « la lisibilité
des prélèvements et l’architecture fi nancière des
régimes sociaux ». Rendu public en juillet (5), il
préconise des mesures techniques pour clarifi er
et faciliter les règles et procédures, réduire les
coûts de gestion dans l’objectif « d’une plus
grande transparence et d’une meilleure lisi-
bilité du prélèvement social au service d’une
adhésion renforcée des citoyens à ce dernier ».
Assurer la santé plutôt que la maladie
« En 1945, la Sécurité sociale remboursait
plus d’indemnités journalières que de médi-
caments », souligne Frédéric Pierru, chercheur
en sciences sociales et politiques. « Pour réno-
ver l’assurance maladie, il faudrait assurer la
santé plutôt que la maladie : être ambitieux en
termes de prévention et promotion de la santé,
plutôt que d’indemniser les malades. » Certes,
l’assurance maladie s’est positionnée comme
un acteur de prévention avec Sophia, le service
d’accompagnement des patients diabétiques.
Mais alors qu’un des enjeux majeurs consiste à
freiner la progression des maladies chroniques
ou de la dépendance, la prévention reste le
parent pauvre. Passer de la notion de « dépenses
sociales » à celles « d’investissement social » est
pourtant une nécessité selon Frédéric Bizard :
« On ne dépense plus uniquement pour réparer,
guérir, assister mais pour prévenir, accompagner
et former à la gestion du risque ». Car le patient
du
XXIe
siècle est responsable de son état de
santé et un acteur à part entière. Les textes l’ont
consacré (loi de 2002 sur les droits des patients),
il gère les « restes à charge » (les soins de ville
476,6
MILLIARDS
D’EUROS
C’est le poste dépenses
de prestations
sociales mentionné
dans le projet de loi
de fi nancement de la
Sécurité sociale 2015,
soit 1,5 fois le budget
de l’État. Les recettes
devraient atteindre
466,2 Mds d’euros.
ÉVOLUTION DU DÉFICIT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE (EN MILLIARDS D’EUROS)
>>
-35
Déficit réél
Prévisions de déficit
-30
-25
-20
-15
-10
-5
02003
-11,3 -12,6 -13,6
-10,2 -10 -8,9 -9,3 -8 -9,4-8,9
-23,5
-8,6
-28
-30,6
-20,9 -21,4
-17,4
-13,9
-16,5*
* Prévisions au 25 septembre
-11,5* -13
-11,2
-3,9
2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
Source : PLFSS - 26/09/2013
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La Gazette Santé-Social • septembre 2015 17
DOSSIER
sont remboursés à 55 %), reste à mettre en place
une réelle démocratie sanitaire… L’Observa-
toire de la régionalisation du système de santé
créé en 2011 par Olivier Mariotte, président de
l’agence conseil Nile (6), préconise « d’informer
et sensibiliser le grand public aux conseils de
vie sociale, de transformer les conférences régio-
nales de la santé et de l’autonomie en instance
« force de propositions » et de permettre une
capacité d’adaptation des territoires de santé ».
Donner des moyens aux acteurs
de terrain
Depuis les lois de décentralisation de 1983
et 2003, des pans entiers de l’action sociale ont
été délégués aux départements, avec notam-
ment la gestion du revenu minimum d’insertion
en 2004. À tel point qu’en 2011, ils prennent
en charge 86,9 % des dépenses sociales des
collectivités locales… Côté santé, la loi HPST de
2009 ambitionnait de réduire les inégalités ter-
ritoriales de santé, d’assurer un meilleur accès
aux soins en répartissant l’offre. Mais là encore,
c’est l’État qui gère, via les agences régionales de
santé, à qui le PLFSS 2015 confi e de nouvelles
missions. En Suède, les autorités locales sont
responsables devant la loi de la fourniture des
soins de santé aux personnes résidant sur leur
territoire. En Allemagne, l’organisation fédérale
confère un pouvoir aux länder en matière hospi-
talière. Donner de vrais moyens aux acteurs sur
le terrain est une piste, « alors que la région est
supposée être l’unité géographique et politique
centrale de l’organisation et de l’effi cience du
système de santé… », souligne Olivier Mariotte.
« La conscience de la solidarité […] n’existe
pas spontanément, il importe de la créer et de
l’entretenir par un effort d’éducation, condition
fondamentale de la poursuite et de l’expansion
de l’institution dans les années qui viennent »,
écrivait Pierre Laroque. Or, force est de constater
que les assurés ne se sont pas emparés de la Sécu.
D’aucuns prônent le retour en force des parte-
naires sociaux dans la gouvernance du système,
qui appartient désormais aux experts et à l’admi-
nistration. Car si les Français restent très attachés
à leur système protecteur, ils commencent à le
trouver trop coûteux. Surtout, ils sont nombreux
à penser que la protection sociale ne devrait
bénéfi cier qu’aux cotisants (7). Pour « continuer
à faire vivre ce cœur battant de notre République
sociale » (8), il est temps d’expliquer à nouveau
le sens de la solidarité.
Christelle Destombes
(1) Pierre Laroque, «Le plan français de Sécurité sociale », in
« Revue française du travail », n° 1, avril 1946.
(2) http://communication-securite-sociale.fr/
(3) «Pourquoi et comment réinventer notre sécurité sociale pour
la sauver? », http://www.huffingtonpost.fr/frederic-bizard
(4) « Financement de la protection sociale - Équilibre financier –
Fiscalisation », Lionel Ragot, http://www.institut-montparnasse.fr/
financer-la-protection-sociale-n2-equilibre-financier-fiscalisation-2/
(5) «Rapport sur la lisibilité des prélèvements et l’architecture
financière des régimes sociaux », Haut conseil du financement de
la protection sociale, juillet 2015, http://www.securite-sociale.fr/
IMG/pdf/rapport_sur_la_lisibilite_des_prelevements_et_l_archi-
tecture_financiere_des_regimes_sociaux.pdf
(6) http://observatoire-regionalisation.fr/
(7) Baromètre Drees en juin 2015, http://www.drees.sante.gouv.
fr/le-barometre-d-opinion-de-la-drees,11136.html
(8) Marisol Touraine à l’occasion du lancement des 70 ans de la
Sécurité sociale.
« Il est institué une organisation
de la Sécurité sociale destinée à
garantir les travailleurs et leurs
familles contre les risques de toute
nature susceptibles de réduire ou de
supprimer leurs capacités de gain,
à couvrir les charges de maternité
ou les charges de famille qu’ils
supportent ». Universalité, unité,
uniformité, sont les trois ambitions
à l’œuvre. Une seconde ordonnance
est prise le 9 octobre relative aux
prestations. Article 1er de l’ordon-
nance portant organisation de la
Sécurité sociale du 4 octobre 1945.
LA DÉFINITION LE POINT DE VUE
Patrick Doutreligne, président de l’Uniopss
En 1945, les caisses de l’État sont vides, les dif-
cultés économiques sont majeures et pourtant
le système social de protection se met en place.
Cette protection a participé à la croissance, au ni-
veau économique et social. C’est un choix de so-
ciété, de solidarité et d’universalité. Cette inven-
tion extraordinaire a certes besoin de se moderniser et de s’adapter,
mais son sens reste entier. Aujourd’hui, c’est la guerre économique, la
problématique est celle de la redistribution des richesses: quelle so-
ciété voulons-nous? Un système de protection universaliste, solidaire
où tout le monde contribue ou un système assurantiel comme l’ont
développé les États-Unis? L’erreur serait de défendre un système à
bout de sou e, mais pour réinventer un système dynamique pour
les 50 ans à venir, il faut arrêter de nous plaindre et trouver des solu-
tions: soyons moins plaintifs, et plus créatifs.
© FONDATION ABBÉ PIERRE
REPÈRES
« Allons enfants…
de la Sécu »,
publication de l’Institut
Montparnasse, juin 2015.
« La Sécurité sociale,
une institution de la
démocratie »,
Colette Bec,
Gallimard, 2014.
« Refonder le modèle
social français?
Pourquoi?
Comment? »,
Frédéric Bizard, institut
Thomas More, 2013.
« Refonder le système
de protection sociale.
Pour une nouvelle
génération de droits
sociaux »,
de Bernard Gazier,
Bruno Palier et Hélène
Périvier, Les Presses de
Sciences Po, 2014.
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18 septembre 2015 • La Gazette Santé-Social
COMPLÉMENTAIRE SANTÉ
Pour l’accès aux soins pour tous,
d es villes se font mutuelles
Face aux baisses de remboursements, certaines villes n’hésitent plus à proposer elles-mêmes
une mutuelle. À Drancy en Seine-Saint-Denis, les élus y trouvent leur compte.
P
lus de 3 millions de Français sont sans
complémentaire santé, selon des chiffres
de la Mutualité française. Or, le risque
de renoncer aux soins est multiplié par deux
en l’absence de complémentaire et ce n’est pas
l’accord national interprofessionnel du 11 jan-
vier 2013 – qui prévoit la généralisation de la
complémentaire à tous les salariés du privé au
1
er
janvier 2016 – qui va améliorer la situation.
Quid des salariés à temps partiel, des retraités,
des chômeurs, des artisans ?
Solution mutualisée
À Drancy, la municipalité dirigée par Jean-
Christophe Lagarde (député-maire, UDI) est
devenue partenaire de l’association Actiom (lire
Repères) et de son dispositif « Ma commune,
ma santé ». L’objectif : permettre aux Drancéens
de bénéficier des avantages d’une mutuelle
collective, avec des tarifs attractifs et négociés.
« C’est une solution de santé mutualisée, qui
laisse le libre choix entre trois mutuelles et
deux ou trois niveaux de garantie (économie,
sécurité, confort) de façon à pouvoir s’adapter
aux besoins de l’adhérent. Nous proposons
également une aide à l’acquisition d’une com-
plémentaire santé, dans une démarche d’action
sociale », précise Émilie Garat, chargée de com-
munication à Actiom.
Actiom a négocié avec les trois mutuelles par-
tenaires (Miel Mutuelle, Pavillon Prévoyance et
Smatis) que les tarifs soient fi gés sur deux ans.
L’une d’entre elles permet d’individualiser coti-
sations et remboursements : si dans la famille,
une seule personne a des problèmes de vue,
elle peut seule choisir de cotiser pour les frais
optiques. Pour bénéfi cier du dispositif, aucun
questionnaire médical, même si les cotisations
varient en fonction de l’âge, la seule condition
est de résider à Drancy. La ville ne joue qu’un
rôle de relais, en mettant l’association en relation
avec les habitants : trois réunions publiques ont
été organisées afi n de présenter le dispositif à
environ 800 personnes et des permanences sont
organisées dans différentes structures (point
d’accès droit, CCAS) pour que les administrés
épluchent les pourcentages des remboursements
à l’aune de leurs besoins, avec un représentant
d’Actiom. Fin juillet, 170 personnes avaient
eu un entretien avec un conseiller, 145 choisi
d’adhérer à l’une des trois mutuelles proposées.
Parmi elles, 48 n’avaient pas de mutuelle. 9 igno-
raient l’existence de l’ACS.
L’union fait la force
Le dispositif « Ma commune ma santé » offre
aux municipalités une solution clé en main :
« Nous partons du principe que l’union fait la
force. Nous sommes en position de négocier
face aux mutuelles au niveau national, des
offres intéressantes, avec des garanties adap-
tées. À Drancy, pour l’instant, la satisfaction
règne : « les mutuelles gagnent des clients, qui
y trouvent leur compte en payant moins de
cotisations pour une meilleure couverture »,
assure Jean-Christophe Lagarde.
Christelle Destombes
REPÈRES
• Actiom
(actions de mutualisation
pour l’amélioration du
pouvoir d’achat de ses
adhérents) est une
association loi 1901 créée
par trois courtiers
indépendants du réseau
Sofraco en mai 2014.
Dans un souci d’action
sociale, ils ont créé le
dispositif « Ma commune
ma santé », pour offrir
aux villes des contrats
santé mutualisés.
En un an, 337
communes ont adhéré
à cette solution, de
Coutras (8200 hab.) à
Drancy (68000 hab.) en
passant par Bayonne
(45000 hab.).
• Contact:
Actiom, http://www.
macommunemasante.
org/
DOSSIER
DR
Jean-Christophe Lagarde, député-maire de Drancy (UDI)
« Nous visons notamment les
personnes stigmatisées par les modèles
de l’assurance complémentaire »
« Nous avions commencé à travailler sur l’accès aux mu-
tuelles pour notre personnel communal (1300 agents).
Faire un appel d’o res groupé permettait d’obtenir de meilleurs tarifs
et de meilleures conditions de remboursements pour nos agents. Nous
avons donc réfl échi au fait d’étendre le dispositif à toute la population,
pour qu’elle bénéfi cie de l’e et groupe, notamment les personnes stig-
matisées par les modèles de l’assurance complémentaire, les personnes
âgées, les jeunes. Nous l’avons fait dans un but d’action sociale, parce
que Drancy est une ville populaire et qu’une partie importante de la po-
pulation – celle qui n’a pas été visée par le tiers payant de Mme Touraine–
a les plus grandes di cultés d’accès aux complémentaires santé. Nous
avons aussi des personnes illettrées, primo-arrivantes qui ne gèrent pas
les démarches administratives. Au CCAS, désormais quand on identifi e
des di cultés nancières, une absence de couverture santé, nous avons
un dispositif à proposer. »
•GSS121.indb 18•GSS121.indb 18 09/09/15 11:3109/09/15 11:31
La Gazette Santé-Social • septembre 2015 19
DOSSIER
Liées en partie au vieillissement, les mala-
dies chroniques touchent 20 % de la
population, selon l’Institut de veille sani-
taire. Avec pour corollaire une multiplication
des besoins de santé et sociaux de longue durée.
Alors que le « virage ambulatoire » est un pilier
du projet de loi « Santé », le maintien à domicile
des personnes dépendantes reste un défi dans
les territoires ruraux, désertés par les médecins
et les services publics.
Pléiade de services
L’agence régionale de santé (ARS) d’Aquitaine
a donc noué, en 2015, un partenariat avec
le conseil départemental et les collectivités
locales des Landes, dans le cadre de l’appel
à projets national « Territoire de soins numé-
rique » (TSN). Baptisé « XL ENS », le TSN aqui-
tain s’articule autour d’un interlocuteur unique
et pluri-professionnel, la cellule de soutien
territoriale, appuyé par une pléiade de services
numériques. D’abord expérimenté dans le nord
et l’est des Landes, le dispositif concernera
potentiellement 15 000 malades, soit environ
7 % des habitants. « Dans ce territoire très rural,
la population est plus âgée que la moyenne de
l’Aquitaine, avec un habitat isolé et dispersé »,
souligne Francis Lacoste, directeur du service
Solidarité des Landes.
Mise en place au printemps, la cellule de sou-
tien territoriale « Santé Landes » assurera la
coordination complète des prises en charge.
« Nous orienterons les professionnels de santé,
du secteur social et médicosocial, ainsi que les
patients et les aidants vers les services adap-
tés et les dispositifs d’aide sociale », explique
Mylène Lefèbvre, assistante sociale de « Santé
Landes ».
Cette centralisation devrait favoriser une
équité sur le territoire. « Cela évitera aux per-
sonnes les plus éloignées des allers-retours
incessants, parfois inutiles, dans les grandes
villes pour rencontrer un travailleur social. »
« Santé Landes » n’a jusque-là élaboré que
des procédures types. « Tout démarre en sep-
tembre », annonce Marie-Noëlle Billebot, direc-
trice du projet à l’ARS.
Plateforme d’outils
La véritable innovation d’« XL ENS » est la
plateforme d’outils numériques. Développée
par Capgemini/Orange, elle doit se déployer
progressivement à partir de 2016. Outre le
bouquet de services de « Santé Landes », les pro-
fessionnels disposeront d’un navigateur pour
accéder aux dossiers des personnes. Un autre
outil sera destiné aux patients et aux aidants.
Face à la quantité croissante de dossiers, « le
numérique est devenu absolument nécessaire.
Cela représente un gain de temps à tous les
niveaux : nous pourrons contacter le médecin
traitant, puis transmettre les informations au
conseil départemental plus rapidement pour la
mise en place d’un plan d’aide », illustre Mylène
Lefèbvre. Cependant, ce dispositif, s’il est mal
équilibré, peut occasionner une charge impor-
tante pour les conseils départementaux. « Le
maintien à domicile sollicite beaucoup le volet
social. Il y a un risque fi nancier pour nous »,
met en garde Francis Lacoste. Émilie Lay
Le maintien à domicile des personnes dépendantes est devenu di cile en milieu rural. LARS
et les collectivités locales des Landes s’appuient sur les nouvelles technologies pour favoriser
l’égalité d’accès aux soins.
MAINTIEN À DOMICILE
Les Landes misent sur le numérique
REPÈRES
Lancé dans le cadre des
investissements d’avenir,
le programme national
« Territoire de soins
numérique » (TSN)
est doté de 80 millions
d’euros. Il vise à
expérimenter, dans des
zones rurales ou
urbaines, des services et
technologies innovants
en matière d’e-santé.
Financement TSN
aquitain:
10 millions d’euros,
contact: marie-noelle.
Les dépenses d’aide
sociale pour l’APA
des Landes ont cru
de 5,6 millions d’euros
entre 2010 et 2014
(conseil départemental).
DOSSIER
© KARINE HAZARD
Mylène Lefèbvre, assistante sociale de la cellule de soutien
territoriale « Santé Landes »
« Nous nous assurons que tous
les droits du patient sont ouverts »
« Il arrive que des personnes de plus en plus dépen-
dantes n’aient pas sollicité de plan d’APA (allocation
personnalisée d’autonomie). Outre la prestation fi nan-
cière, celui-ci peut prévoir l’intervention d’une auxiliaire de vie ou encore
le portage des repas. Faute de mise en place su samment précoce de
ces services, la situation de la personne peut se trouver dégradée. Dans
le cadre de la cellule de soutien territoriale « Santé Landes », nous nous
assurerons que tous les droits des patients sont ouverts, notamment en
cas de changement de situation. Si ce n’est pas le cas, nous pourrons
informer le patient – ou son aidant – de ses droits à l’APA ou à la CMU-C
(couverture maladie universelle complémentaire), et l’orienter vers les
structures adéquates. Dans l’idéal, cela devrait permettre de lutter contre
le non-recours, fréquent. En e et, les professionnels de santé mécon-
naissent souvent certains dispositifs. Or, les patients, hospitalisés ou non,
ne rencontrent pas systématiquement les travailleurs sociaux.»
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