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IRFAM, Développer le mainstreaming de la diversité, partie : « Enjeux et perspectives »,
Liège, IRFAM, 2009, 43 809 caractères.
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Mainstreaming de la diversité
Enjeux et perspectives
Les discriminations, les inégalités sociales et l’éducation à la diversité
Les textes internationaux (Nations-Unies et UE) posent les bases des enjeux en matière de
gestion des diversités : flux migratoires, genres, nérations, handicaps… sont au cœur des
recommandations et des injonctions faites aux Etats de lutter contre toutes les formes de
discrimination.
En ce qui nous concerne, le vocabulaire de la diversité s’est d’abord développé dans le cadre
européen (Crutzen D., 2003), en partie sous l’impulsion de modes de pensée anglo-saxons.
Depuis peu, ce vocabulaire semble avoir passé la barre de l’Etat fédéral, des Régions et
progressivement des Communes qui doivent développer un PLAN DIVERSITE.
La Région Wallonne en réponse aux besoins sur le terrain mais aussi dans un effort de
convergence européenne, s’engage sur le terrain de l’anti-discrimination. Reste à mesurer
quelle place l’éducation à la diversité peut y trouver.
Si de nombreuses initiatives existent sur le terrain, la culture dominante est encore très loin de
prendre en compte l’essentiel des défis à relever en la matière. Même si les outils législatifs
sont en place, les réalités de terrain exigent plus que jamais méthodes et outils concrets pour
gérer les diversités, éduquer à la diversité, déconstruire les préjugés et les stéréotypes. Ce
travail, nous sommes bien placés pour le savoir, est une tâche de longue haleine.
Il n’est donc pas inutile de s’informer sur l’évolution des mentalités en la matière et sur les
signes positifs qui indiquent la progressive prise en compte de cette dimension dans les
politiques publiques, voire même dans les entreprises.
A chacun donc de se situer dans ce que nous allons appeler le mainstreaming de la
diversité
La Commission Européenne au cœur du programme EQUAL définit le principe clé du
"mainstreaming" comme « l'intégration et l'incorporation des idées et approches nouvelles
dans les politiques et les pratiques. »1.
« Le mainstreaming est un processus qui vise la généralisation des pratiques innovantes
dans les politiques et les pratiques d’emploi, de formation professionnelle et de lutte
contre les discriminations. »
1 Définition extraite de « Travailler en réseau pour l’inclusion », document cadre de la Commission européenne
pour le programme Equal de juin 2002.
Institut de Recherche,
Formation et Action
sur les Migrations
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Ce recueil analytique s’inscrit donc dans un processus qui vise à transférer des
pratiques innovantes en matière de gestion des diversités ethno-socio-culturelles.
Néanmoins, une première démarche de clarification s’impose. Afin de ne pas tout mettre dans
tout, il faut distinguer au moins trois dimensions dans la gestion des diversités :
LA LUTTE CONTRE LES
DISCRIMINATIONS
lutte contre les préjudices subis
à compétences égales
en raison d’a priori défavorables, de
stéréotypes ou de préjugés
LA COMPENSATION DES
INEGALITES ETHNO-SOCIO-
CULTURELLES
compensation des préjudices subis
en raison d’un déficit de compétences
ou d’un non accès aux codes et normes
dominants
L’EDUCATION A LA DIVERSITE
nécessaire apprentissage de
compétences transversales d’adaptation
aux contextes multiculturels
qui s’adresse à tous les publics et à tous les âges
pour gérer les défis de la diversi
La lutte contre les discriminations consiste à identifier les mécanismes qui font que, à
compétences égales ou à potentiel égal, telle ou telle catégorie de personne subit un préjudice
moral, social, professionnel…
Dans le domaine professionnel, par exemple, les discriminations directes sont celles
dont il est question lorsque les membres d’un groupe cible, à compétence équivalente,
ont des possibilités d’emploi inégales, des revenus moins élevés, des perspectives
d’avancement limitées ou sont proportionnellement moins nombreux ou absents de
certains emplois. La loi belge contre les discriminations du 17 février 2003 définit
qu’il y a discrimination directe si une différence de traitement qui manque de
justification objective et raisonnable est directement fondée sur le sexe, une prétendue
race, la couleur de peau, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique, l’orientation
sexuelle, l’état civil, la naissance, la fortune, l’âge, la conviction religieuse ou
philosophique, l’état de santé actuel ou futur, un handicap ou une caractéristique
physique.
Les discriminations indirectes se produisent lorsqu’une disposition, un critère ou une
pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner un désavantage particulier
pour des personnes d’une religion ou d’une conviction philosophique donnée, d’un
handicap, d’un âge ou d’une orientation sexuelle donnés, par rapport à d’autres
personnes. Elles ne sont ni explicites, ni volontaires, ni même conscientes ou
intentionnelles ; elles relèvent le plus souvent d’un système de gestion fondé sur un
certain nombre de présupposés, le plus souvent implicites, quant aux divers groupes et
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comprenant un ensemble de pratiques et de coutumes qui perpétuent une situation
d’inégalité à l’égard des groupes cibles.
Les travaux du Bureau International du Travail en 1998, ainsi que ceux d’AMADIEU
en France ont, par exemple, largement démontré l’importance du phénomène dans le
monde du travail, à travers la technique du testing : le même CV est présenté en
modifiant le nom de famille, le sexe, l’âge, la photo… La discrimination à l’embauche
apparaît clairement. Le constat est simple : on a tendance à engager et à faire
confiance à des gens qui nous ressemblent.
L’Observatoire des discriminations a été créé en novembre 2003. Il rassemble une dizaine de chercheurs
et mène des études qui psentent plusieurs originalités : d’une part, toutes les formes de discriminations
sont abordées (genre, origine, apparence physique, âge, handicap, etc.). D’autre part, sont utilisées des
méthodes d’enquêtes diversifiées et parfois inédites en France comme le testing. L’approche
pluridisciplinaire (gestion, sociologie, droit) et fait le choix de la diffusion des travaux pour contribuer à
l’évolution des préjugés et des comportements. L’Observatoire prend le parti de traiter de questions
parfois négligées ou tabous (quel lien entre diversité, mixité et performance, par exemple ?).
En ce qui concerne le testing sur CV, étude publiée en mai 2004, l’ampleur des discriminations (pour les
emplois de commerciaux concernés par le testing) est confirmée. Un candidat handicapé (bien que la
nature de son handicap soit ignorée de l’employeur) obtient 15 fois moins de réponses positives que le
candidat de référence. Un candidat maghrébin reçoit 5 fois moins de réponses positives. Un candidat de
50 ans est nettement écarté de l’embauche (près de 4 fois moins de réponses). Pour la première fois en
France, on a testé l’effet du lieu de résidence (un mauvais quartier) et d’un visage disgracieux. Il y a bien,
dans ces deux cas, discrimination même si elle est de moindre ampleur (environ 2 fois moins de réponses
positives).
Outre les discriminations individuelles, qui peuvent se produire pour n’importe qui
dans un contexte défavorable, quatre catégories de discrimination se retrouvent le plus
souvent dans les études menées : le genre et l’orientation sexuelle ; l’âge, le
handicap et la catégorie la plus « sensible » et donc la plus difficile à traiter dans
nos modèles culturels dominants – l’origine ethno-socio-culturelle.
L’Etat fédéral a lancé une campagne diversite.be et un label qui sera décerné, à titre
expérimental, à une série d’entreprises privées ou publiques qui accepteront d’élaborer
d’ici mars 2007 un PLAN DIVERSITE. Celui-ci porte sur quatre critères : le genre,
l’origine ethnique ou culturelle, le handicap et l’âge. En Région bruxelloise, une
Charte Diversité existe depuis un an et demi et en Flandres, 235 entreprises sont
reconnues comme ayant développé un plan diversité. En Région wallonne, une Charte
est en préparation, ainsi qu’un label management de la diversité, à partir duquel un
prix sera décerné pour mettre en valeur les initiatives remarquables en la matière :
l’objectif est repris dans le plan Marshall.
Les actions visent à la fois la main d’œuvre (recrutement, salaires, types d’emploi,
organisation du travail…), les clients ou usagers (bâtiments accessibles, amélioration
de la mobilité, diversification des goûts, des attentes, des comportements, des modèles
familiaux, des valeurs et des normes…) et les produits ou services (cfr. IKEA qui
lance ses équipements pour personnes en chaise roulante, écoles d’architecture qui
sensibilisent leurs étudiants…).
La motivation est à la fois réglementaire (injonctions internationales et européennes,
lois et décrets), sociale (responsabilité sociale et développement durable, lutte contre
les discriminations, contingence nécessitant de refléter la population) et économique
(mieux satisfaire une clientèle de plus en plus diversifiée, meilleure valorisation des
compétences, créativité et innovation, image de marque…).
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Les gouvernances locales, les organismes publics et le monde associatif sont
concernés au même titre que les entreprises privées.
La lutte contre les inégalités sociales se situe à un autre niveau d’intervention. Il ne s’agit
pas tant de mettre en place des dispositions légales et réglementaires pour garantir l’égalité de
traitement des compétences et des ressources de chacun, il s’agit de prendre en compte les
inégalités qui résultent de l’historique des personnes et des groupes sociaux. La question n’est
plus de convaincre un employeur que, à compétence égale, il a tout intérêt à diversifier ses
profils de recrutement, il s’agit de prendre en compte les déficits de compétences ou les
inadaptations de ceux qui sont exclus de l’accès aux normes et codes dominants pour proposer
des mécanismes de compensation ou de réparation.
Ce travail d’insertion s’appuie sur l’identification des handicaps et des ressources
des groupes sociaux concernés. Il développe des pistes d’action d’habilitation, à ne pas
confondre avec les aspects légaux et éthiques de la non-discrimination.
L’égalité des chances passe donc aussi par une discrimination dite positive des
moyens à mettre en œuvre pour compenser les inégalités historiques entre les groupes
sociaux.
La dimension éducative est évidemment prégnante. Elle nécessite un important travail
sur soi, sur les cultures professionnelles et sur les codes et normes des systèmes
éducatifs, culturels, sociaux et économiques. L’effet Pygmalion bien connu démontre,
par exemple, que les attentes positives d’un enseignant en faveur de tel groupe
d’élèves influence positivement non seulement les résultats d’évaluation et les notes,
mais jusqu’au QI des intéressés. Nous avons tendance à rechercher les éléments qui
confirment nos attentes, l’essentiel se jouant dans l’inconscient et le non-verbal d’où
l’importance de travailler sur nos implicites culturels.
Rosenthal a découvert l'effet Pygmalion en réalisant l'expérience suivante : après avoir constitué
deux échantillons de rats totalement au hasard, il informe un groupe de six étudiants que le
groupe 1 comprend 6 rats sélectionnés d'une manière extrêmement sévère. On doit donc
s'attendre à des résultats exceptionnels de la part de ces animaux. Il signale ensuite à six autres
étudiants que le groupe des 6 rats n° 2 n'a rien d'exceptionnel et que, pour des causes
génétiques, il est fort probable que ces rats auront du mal à trouver leur chemin dans le
labyrinthe. Les résultats confirment très largement les prédictions fantaisistes : certains rats du
groupe 2 ne quittent même pas la ligne de départ. Après analyse, il s'avère que les étudiants
qui croyaient que leurs rats étaient particulièrement intelligents, leur ont manifesté de la
sympathie, de la chaleur, de l'amitié ; inversement, les étudiants qui croyaient que leurs rats
étaient stupides, ne les ont pas entourés d'autant d'affection. L'expérience est ensuite tentée avec
des enfants, à Oak School aux États-Unis, par Rosenthal et Jacobson (1968), en jouant sur les
attentes favorables des maîtres.
L’éducation à la diversité, quant à elle, consiste à prendre en compte l’ensemble de ces
éléments pour leur donner un sens et permettre le développement de compétences
transversales d’adaptation.
Elle porte sur l’identification des stéréotypes, préjugés et discriminations à l’œuvre
dans nos représentations et nos comportements. Elle porte aussi et surtout sur les zones
sensibles que ce travail met en évidence, sur la manière dont se construisent nos
identités et nos sentiments d’appartenance, sur la façon dont nous nous sentons
menacés par certaines différences. La notion de menace est ici centrale, car il est
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