SYNDROME D`APNÉES DU SOMMEIL : IMPACT DU TRAITEMENT

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SYNDROME D’APNÉES DU SOMMEIL :
IMPACT DU TRAITEMENT
par
P. LÉVY*, J.-L. PÉPIN* et M. DEMATTEIS*
INTRODUCTION
La survenue de plus de cinq apnées ou dix apnées + hypopnées par heure de sommeil (Index Apnées Hypopnées, IAH) et l’existence de symptômes nocturnes (le
ronflement essentiellement) et diurnes (la somnolence diurne excessive, en particulier) définissent le syndrome d’apnées du sommeil (SAS). Il s’agit aujourd’hui d’un
problème reconnu de Santé Publique tant par sa fréquence que par les morbidités
neuropsychiques et cardio-vasculaires qui lui sont attribuées. La morbidité neuropsychique (somnolence diurne excessive, troubles cognitifs…) est facilement imputable au SAOS, essentiellement du fait des modifications drastiques observées sous
l’effet du traitement de référence que constitue la pression positive continue (PPC).
Cette relation « causale » est également bien établie maintenant pour ce qui
concerne l’hypertension artérielle.
CONNAISSANCES ACTUELLES ET PERSPECTIVES
Définitions
Une apnée correspond à une interruption de la respiration de plus de 10 secondes.
Celle-ci peut être obstructive avec poursuite des mouvements respiratoires, centrale avec une interruption complète des mouvements thoraciques et abdominaux,
ou mixte (centrale puis obstructive). L’interruption de la respiration peut être
incomplète, correspondant à une diminution de la ventilation ≥ 50 % ou comprise
entre 30 et 50 %, mais associée à un micro-éveil ou à une désaturation en oxygène
de plus de 3 %, définissant une hypopnée. Dans l’immense majorité des cas, les
* Secteur Sommeil et Respiration, CHU de Grenoble, France.
FLAMMARION MÉDECINE-SCIENCES
— JOURNÉES DE DIABÉTOLOGIE 2002
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apnées ou hypopnées obstructives sont prédominantes, correspondant à un collapsus complet ou incomplet du pharynx survenant au cours du sommeil.
Épidémiologie
La prévalence du syndrome d’apnées du sommeil chez les sujets d’âge moyen
peut être estimée à au moins 2 % chez les femmes et 4 % chez les hommes, ces
pourcentages correspondant au nombre de sujets présentant à la fois des apnées et
des symptômes diurnes et pouvant de ce fait justifier d’une prise en charge thérapeutique spécifique. Si l’on extrapole ce pourcentage à la population française, on
obtient un chiffre d’au moins 400 000 sujets porteurs d’un SAS significatif.
Facteurs de risque
Parmi les facteurs de risque identifiés, l’obésité a un rôle manifeste. La prévalence de l’obésité aux États-Unis ou en Australie étant d’environ 14 % alors qu’elle
est évaluée aux alentours de 8 à 9 % en Europe, on pourrait s’attendre à des chiffres
plus faibles de prévalence du SAS. Ce n’est pas ce qui est constaté. En fait, il
existe plusieurs autres facteurs de risque : l’âge, le sexe masculin et l’existence
d’une anomalie anatomique pharyngée. De ce point de vue, la présence d’une anomalie anatomique, touchant les parties molles pharyngées ou le squelette facial, a
une signification très différente selon l’âge et le niveau pondéral : c’est un élément
très prédictif du SAS chez les sujets jeunes et maigres.
Physiopathologie
SURVENUE
DU COLLAPSUS PHARYNGÉ
Le collapsus du pharynx survient en regard du voile du palais et en arrière de
la base de langue. Au cours de l’inspiration, la perméabilité du pharynx est normalement maintenue par la contraction des muscles dilatateurs du pharynx dont
l’activité phasique précède l’activation inspiratoire du diaphragme. Le collapsus
va survenir lors d’un déséquilibre entre la force générée par la contraction de ces
muscles dilatateurs et la pression négative inspiratoire qui tend à fermer le pharynx.
Plusieurs facteurs interviennent pour favoriser le collapsus :
– le rétrécissement permanent du calibre du pharynx ;
– les modifications des propriétés de la paroi pharyngée : augmentation de la
compliance rendant le pharynx plus facilement collabable chez les patients apnéiques ;
– la perte d’efficacité des muscles dilatateurs du pharynx ; la perte d’efficacité
des muscles dilatateurs du pharynx pourrait être liée à la réduction de l’efficacité
de contraction ou à un retard de contraction par rapport au diaphragme. D’autre
part, l’activité électrique du génioglosse, en réponse à la réduction de calibre et à
l’augmentation de résistance des voies aériennes supérieures (VAS), est plus élevée à l’éveil chez les patients apnéiques que chez les sujets contrôles. Cependant,
l’une des hypothèses plus récentes est qu’il puisse exister une perte du réflexe
protecteur du pharynx, c’est-à-dire une diminution de la sensibilité de détection
des modifications de pression au niveau des récepteurs pharyngés. Les anomalies
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de sensibilité pharyngée vont dans ce sens et ceci conforte les arguments en faveur
d’une véritable neuropathie pharyngée ;
– au cours du sommeil, il existe une diminution nette de l’activité du génioglosse
chez les patients apnéiques concourrant de ce fait, au collapsus des VAS. Cette baisse
du tonus musculaire peut s’expliquer par une réduction de l’activité de certains neurones médullaires à destinée pharyngée et a pour effet une augmentation des résistances inspiratoires et expiratoires. La terminaison de l’événement respiratoire quel
qu’il soit ne peut survenir qu’à l’occasion d’une augmentation de l’activité de ces
muscles dilatateurs du pharynx qui est associée à la survenue d’un micro-éveil.
CONSÉQUENCES
DU COLLAPSUS PHARYNGÉ
De nombreuses modifications cardio-vasculaires aiguës, reliées aux apnées et
aux hypopnées, surviennent au cours du sommeil chez les patients porteurs d’un
syndrome d’apnées du sommeil (SAS).
Les mécanismes qui conduisent à une élévation permanente de la pression artérielle restent en partie inconnus. Il est aujourd’hui accepté qu’il existe :
– une élévation diurne du tonus adrénergique chez certains apnéiques ;
– une diminution de la vasodilatation NO-dépendante ;
– une augmentation de la réactivité vasculaire à l’hypoxie et de la réponse à
l’angiotensine II ;
– une baisse de la sensibilité du baroréflexe.
Par ailleurs, des modifications endothéliales surviennent précocement en
réponse à la séquence hypoxie-réoxygénation et pourraient contribuer à la morbidité cardio-vasculaire (afflux de cytokines pro-inflammatoires, modifications du
métabolisme lipidique, diminution de la production de NO).
Le rôle de l’hypoxémie nocturne semble prédominant pour la genèse d’une
HTA, en tout cas lors de l’utilisation de modèles animaux. Chez l’homme, il existe
également des arguments pour un rôle majeur de l’hypoxémie nocturne.
Les autres conséquences cardiovasculaires sont moins bien démontrées. Il existe
bien une augmentation du risque associé concernant l’insuffisance coronaire
[risque relatif (RR) associé aux apnée de l’ordre de 2,5] et les accidents vasculaires
cérébraux (RR = 4). Mais le lien de causalité est moins bien établi. Il est probable
pour l’insuffisance coronaire, plus difficile à établir pour l’AVC. Quoi qu’il en
soit, le syndrome d’apnées constitue un facteur de risque indépendant pour ces
deux pathologies également.
Quelles sont les conséquences métaboliques du SAOS ? Il existe des mécanismes physiopathologiques communs à l’insulino-résistance et à l’hypoxie. Nous
avions retrouvé par exemple une résistance à l’ischémie du nerf périphérique chez
des sujets SAOS porteurs d’une hypoxémie nocturne importante. Ce phénomène
probablement adaptatif est commun à certains sujets diabétiques, aux insuffisants
respiratoires chroniques graves et à ces patients. La réversibilité qui était obtenue
sous l’effet de quelques semaines de traitement par pression positive continue est
à rapprocher de l’effet de l’oxygène chez l’IRC ou de la normalisation de l’équilibre glycémique chez le diabétique.
IMPORTANCE
DANS LE CADRE DU DIABÈTE ET DE L’INSULINO-RÉSISTANCE
Nous avons récemment montré dans une famille l’association systématique
entre neuropathie héréditaire de Charcot-Marie-Tooth et syndrome d’apnées du
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sommeil (SAS) [1]. En l’absence des facteurs de risque classiquement associés
au SAS (obésité, anomalie morphologique crânio-faciale), il a été suggéré qu’un
dysfonctionnement pharyngé en rapport avec une neuropathie pharyngée, ellemême s’intégrant dans la neuropathie héréditaire, pourrait expliquer l’association
des deux pathologies. Par extension, il est légitime de penser qu’une telle association puisse exister dans le cadre des neuropathies non héréditaires, notamment
celles associées au diabète. En effet, plusieurs auteurs ont rapporté l’existence de
syndrome d’apnées du sommeil chez des sujets diabétiques, essentiellement lorsque ceux-ci souffraient d’une neuropathie autonome [2-4]. Les troubles respiratoires étaient corrélés avec la durée du diabète et la qualité du contrôle glycémique
[5]. Par contre, une relation causale entre le diabète et la survenue des apnées du
sommeil n’a jamais été démontrée. Le dysfonctionnement des muscles dilatateurs
du pharynx est un des éléments impliqués dans la physiopathologie du SAS de
type obstructif [6]. Ce dysfonctionnement est secondaire à une altération de l’arc
réflexe dilatateur qui permet de stabiliser les voies aériennes supérieures lors de
la dépression inspiratoire. Il pourrait être à l’origine de l’augmentation de la
compliance pharyngée et du collapsus des voies aériennes survenant au cours du
sommeil chez les sujets apnéiques [7]. Nous faisons donc l’hypothèse qu’un dysfonctionnement pharyngé pourrait expliquer la survenue d’apnées du sommeil
chez les sujets diabétiques. En effet, bien qu’elles soient rares, des atteintes des
nerfs crâniens associées à un dysfonctionnement laryngé et/ou pharyngé ont été
rapportées chez des sujets diabétiques, notamment lorsque la glycémie était mal
contrôlée [8-11]. Il est cependant légitime de penser que le dysfonctionnement
pharyngé soit plus fréquent mais asymptomatique, et qu’il s’exprime essentiellement au cours du sommeil par l’apparition d’apnées. Il apparaît donc primordial
d’explorer le pharynx chez les patients diabétiques, a fortiori si ceux-ci souffrent
d’une neuropathie périphérique. Peu de moyens sont actuellement disponibles et
ils sont par ailleurs difficiles à mettre en œuvre. Nous avons récemment développé
une technique qui permet d’évaluer de manière simple et reproductible la sensibilité du pharynx, sans induire d’effet indésirable notamment à type de réflexe
nauséeux.
Les apnées du sommeil sont associées à une majoration de la morbidité et de la
mortalité cardio-vasculaire et à une insulino-résistance [12, 13]. Par conséquent,
l’existence d’apnées chez les sujets diabétiques pourrait contribuer à majorer les
complications cardio-vasculaires associées au diabète et rendre plus difficile
l’équilibration de la glycémie, ce qui justifie une prise en charge thérapeutique.
LES
ÉLÉMENTS CONDUISANT À LA SUSPICION DIAGNOSTIQUE
La forte prévalence du SAS nécessite une bonne connaissance clinique de cette
maladie pour au moins 2 raisons :
– suspecter cliniquement le diagnostic ;
– identifier les éléments cliniques qui interviennent dans l’appréciation de la
gravité du SAS, imposant une prise en charge thérapeutique rapide.
Le diagnostic du SAS repose sur une présomption clinique. Il peut utiliser
une première étape de détection par des moyens simplifiés (oxymétrie, sons
trachéaux, etc.). Il doit reposer sur une polygraphie complète. Cependant,
l’appréciation de la gravité repose pour l’instant sur un faisceau d’arguments :
des critères polygraphiques [index d’apnées + hypopnées (IAH), importance
des désaturations associées, importance de l’hypersomnie et des troubles
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neuropsychiques associés], des critères paracliniques (anomalies de l’hématose
permanentes, hypertension artérielle difficile à contrôler, etc.) et des critères
anamnestiques (pathologie cardiovasculaire ou cérébrovasculaire associée,
accidents de la voie publique et du travail, troubles de la vie relationnelle ou
sociale rapportés à une hypersomnie diurne).
LES
SYMPTÔMES ET LES SIGNES D’EXAMENS MAJEURS
Le ronflement
Il existe chez pratiquement tous les apnéiques. Il est sonore, constitue une
plainte fréquente du conjoint et un motif de consultation. Il est produit par la vibration du voile du palais et des parties molles pharyngées. Cette vibration a une
fréquence en moyenne de 80 Hz, pouvant atteindre une amplitude de 80-100 dB,
voire plus. Ce ronflement est fréquemment ancien, influencé par la position corporelle (généralement accru en décubitus dorsal), dépendant pour un individu
donné de son niveau de poids, aggravé en général par l’alcool même à faibles
doses ou les produits anesthésiques, myorelaxants, sédatifs ou neuroleptiques par
réduction de l’activité des muscles dilatateurs du pharynx. Les reprises bruyantes
de la respiration après une apnée correspondent à la réapparition du ronflement du
fait de la reprise de la ventilation après plusieurs efforts inspiratoires contre l’obstacle pharyngé, les résistances des VAS restant élevées. Ces épisodes d' arrêts respiratoires nocturnes et de reprises ventilatoires sont fréquemment repérés par
l’entourage et assez anxiogènes.
L’hypersomnolence diurne
C’est le symptôme cardinal du diagnostic. L’hypersomnie est parfois évidente
à l’interrogatoire, gênant l’activité professionnelle, la vie relationnelle, la conduite
automobile. Elle est parfois plus discrète et peut n’être perçue que secondairement
après la mise en place du traitement. En fait, l’adaptation à l’hypersomnie peut
être considérable, d’autant qu’elle est d’installation progressive sur des années.
Toute hypersomnie n’est pas un SAS. Parmi les diagnostics fréquents ou importants à connaître, on peut citer : les mouvements périodiques au cours du sommeil,
le syndrome de haute résistance, l’hygiène de sommeil, certaines formes de dépression, et plus rarement l’hypersomnie idiopathique.
L’obésité et l’augmentation du tour de cou
L’obésité est retrouvée [IMC (poids/taille2) > 30 kg/m2] dans environ 50 % des
cas. Près de 50 % des sujets n’ont pas de surcharge pondérale marquée, témoignant
en cela de l’importance de la dysfonction de la commande neuromusculaire des
VAS et des éventuelles anomalies squelettiques maxillo-faciales. Cependant,
l’augmentation du tour de cou très fréquente chez ces sujets et la valeur prédictive
de cette mesure pour suspecter un SAS montrent qu’il existe une répartition
particulière des graisses (obésité androïde, facio-tronculaire).
Les symptômes et les signes d’examen moins spécifiques
La nycthurie liée à des modifications de l’élimination d’eau et de sel la nuit du
fait de la sécrétion d’atrial natriuretic peptide, réversible dès la 1re nuit de traitement.
Les céphalées matinales, la dépression, les troubles de la mémoire, la baisse de
la libido et l’impuissance partielle.
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L’examen de la cavité buccale et du squelette maxillo-facial : élargissement et
allongement de la luette, cavité pharyngée rétrécie, amygdales augmentées de
volume, base de langue élargie, anomalies mandibulaires ou bimaxillaires, perte
de l’articulé dentaire. Ces anomalies ne préjugent en rien de la sévérité des
anomalies respiratoires au cours du sommeil. Elles sont simplement des facteurs
prédisposants.
TRAITEMENT DU SYNDROME D’APNÉES DU SOMMEIL
Le traitement du SAS a pour objectif de supprimer les événements respiratoires
anormaux mais également de restaurer une structure de sommeil normale. La capacité des différentes thérapeutiques à réduire la morbidité cardiovasculaire est en
cours d’évaluation et des résultats prometteurs viennent d’être publiés concernant
la pression artérielle. L’une des motivations majeures pour le traitement est de
supprimer la somnolence diurne excessive et ses conséquences et d’améliorer la
qualité de vie.
Traitements instrumentaux
PRESSION
POSITIVE CONTINUE PAR VOIE NASALE
(PPC)
L’appareillage se compose d’un générateur de débit d’air, d’un système de
tuyaux à basse résistance, d’un dispositif pour régler la pression d’air et d’un
masque qui s’adapte au nez du patient.
L’application d’une PPC dans les VAS empêche le collapsus du pharynx pendant le temps inspiratoire et expiratoire. La PPC agit donc comme une attelle pneumatique pharyngée et provoque une augmentation de la surface de section
pharyngée. Dans la plupart des cas, le traitement doit être poursuivi pendant des
années et tout arrêt, même de courte durée, se solde par une récidive du SAS.
La PPC par voie nasale est presque constamment efficace mais est contraignante
pour les patients et coûteuse pour la société. De ce fait, il est logique de s’interroger sur l’observance de cette thérapeutique. La place des pressions positives
auto-pilotées (auto-PPC), qui ajustent en permanence le niveau de pression selon
les événements retrouvés au cours de la nuit, reste également à préciser.
OBSERVANCE
DU TRAITEMENT PAR PRESSION POSITIVE CONTINUE
Les études initiales où l’observance était appréciée de manière subjective par
l’interrogatoire des patients ou par des relevés successifs des compteurs horaires
présents sur l’appareillage rapportaient une utilisation régulière de la PPC chez
65 à 80 % des patients. En Europe et en France en particulier, les mesures de
compliance effective (temps passé à la pression effective de traitement) ont
confirmé la bonne observance à la thérapeutique, liée au bénéfice clinique ressenti
mais aussi aux efforts d’éducation et de suivi dans les premières semaines de
traitement en particulier. Néanmoins, 15 % environ des sujets ne pourront pas
s’adapter à un tel traitement.
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Trois types essentiels d’effets secondaires de la PPC sont rapportés chez 40 à
60 % des patients. Le bruit lié à l’appareillage et les phénomènes d’intolérance
locale au masque sont des plaintes fréquentes qui peuvent être améliorées par une
bonne prise en charge médico-technique.
AUTRES
TRAITEMENTS MÉDICAUX
Amaigrissement du patient obèse
La normalisation du poids corporel est un objectif primordial quel que soit le
plan de traitement. Si l’amaigrissement peut suffire pour un SAOS modéré, dans
les autres cas il reste un traitement d’appoint en complément d’une autre thérapeutique [14].
Éviction de l’alcool
L’alcool favorise l’apparition d’apnées chez le sujet ronfleur et aggrave un
SAOS préexistant en augmentant la fréquence et la sévérité des apnées [15].
Éviction des hypnotiques et des sédatifs
Certains médicaments comme le diazépam pourraient entraîner une dépression
sélective des muscles dilatateurs du pharynx. Probablement est-ce aussi le cas des
autres benzodiazépines et d’autres médicaments sédatifs.
Oxygénothérapie nocturne
L’oxygénothérapie isolée n’a pas fait la preuve de son intérêt pour le traitement
des apnées obstructives [16].
Agents pharmacologiques
L’apport des produits pharmacologiques reste très limité. On retiendra l’intérêt
de la protryptilline (apnées nombreuses pendant le sommeil paradoxal), de l’acétazolamide (apnées induites par l’altitude ou une insuffisance cardiaque gauche),
et de la médroxyprogestérone (patients obèses présentant un syndrome d’hypoventilation alvéolaire). Ces produits vont concerner essentiellement des patients
présentant un SAS modéré [17].
Orthèses de propulsion mandibulaire
La pression positive continue [18] représente le traitement de première intention
du SAOS car il est le seul à être presque constamment efficace, non invasif bien
que contraignant, et, en fait, le seul pour lequel des données objectives d’efficacité
contre placebo existent [19, 20]. De plus, plusieurs études ont montré une amélioration importante de la qualité de vie au cours du traitement, même au cours du
SAOS modéré [21].
L’une des motivations pour suggérer des alternatives à la PPC est liée aux
chiffres très bas d’observance rapportés par quelques études nord-américaines
en 1993 et 1994 [22, 23]. Cependant, ces chiffres d’observance n’ont pas été confirmés en Europe et singulièrement en France [24]. Il est cependant établi qu’il
existe des effets secondaires chez la grande majorité des patients, essentiellement
au niveau nasal [25]. De plus, même si le traitement est effectif du fait du bénéfice
clinique perçu, il n’en reste pas moins un traitement lourd à mettre en œuvre au
long cours chez des sujets jeunes.
Au cours du SAOS sévère, l’alternative logique, chez des sujets jeunes en particulier, est une solution chirurgicale. L’uvulo-palato-pharyngoplastie (UPPP) ne
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constitue pas un traitement du SAOS sévère [26, 27]. Seule une chirurgie maxillofaciale peut être envisagée, la chirurgie bi-maxillaire étant associée à des taux de
succès de près de 80 % [27, 28]. Il s’agit cependant d’une chirurgie lourde en terme
de morbidité associée. La stimulation du nerf hypoglosse reste une technique très
expérimentale dont la faisabilité reste à établir. Enfin, même s’il ne s’agit pas d’un
traitement de première intention dans le SAOS sévère, la mise en place d’une prothèse de propulsion mandibulaire peut être tentée en cas d’impossibilité ou d’échec
des traitements habituels.
Au cours du SAOS modéré ou du syndrome de haute résistance, la PPC, même
si elle est le traitement de recours, n’est pas le traitement de première intention.
L’alternative la plus intéressante est, ici, la mise en place d’une prothèse de propulsion ou d’avancement mandibulaire (PAM) [29]. Les études comparant l’efficacité de la PPC et des PAM tendent à montrer une efficacité moindre à la fois
sur l’index apnées et hypopnées (IAH) et sur la fragmentation du sommeil [30,
31] mais une préférence des patients pour les PAM. L’observance à moyen et long
terme reste à établir. De plus, il existe des contre-indications à la mise en place
d’une prothèse au niveau de l’articulation temporo-mandibulaire et surtout aux
niveaux dentaires et parodontaux. Dans notre expérience (données non publiées),
40 % des patients sont contre-indiqués d’emblée. La chirurgie peut également être
envisagée. La chirurgie maxillo-faciale peut paraître lourde dans le contexte. La
chirurgie des parties molles (UPPP), dont l’efficacité au long cours reste discutée,
nécessite une absence d’implication du pharynx rétro-basilingual, une absence de
surcharge pondérale et des précautions péri- et post-opératoires [26, 27]. L’utilisation de la radiofréquence reste à évaluer dans ce contexte [32]. Enfin, alors que
jusqu’à présent le traitement pharmacologique était assez décevant, des médicaments modifiant la structure du sommeil et l’activité des muscles des voies aériennes supérieures sont en cours d’évaluation.
En conclusion, il semble que plusieurs alternatives sont ou vont être disponibles, en particulier pour le SAOS modéré. Ces différentes alternatives devront
être complètement évaluées notamment concernant l’observance et les résultats
au long cours. Elles pourraient le cas échéant être associées ou alternées.
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