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P
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LÉVY
ET
COLL
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sommeil (SAS) [1]. En l’absence des facteurs de risque classiquement associés
au SAS (obésité, anomalie morphologique crânio-faciale), il a été suggéré qu’un
dysfonctionnement pharyngé en rapport avec une neuropathie pharyngée, elle-
même s’intégrant dans la neuropathie héréditaire, pourrait expliquer l’association
des deux pathologies. Par extension, il est légitime de penser qu’une telle asso-
ciation puisse exister dans le cadre des neuropathies non héréditaires, notamment
celles associées au diabète. En effet, plusieurs auteurs ont rapporté l’existence de
syndrome d’apnées du sommeil chez des sujets diabétiques, essentiellement lors-
que ceux-ci souffraient d’une neuropathie autonome [2-4]. Les troubles respira-
toires étaient corrélés avec la durée du diabète et la qualité du contrôle glycémique
[5]. Par contre, une relation causale entre le diabète et la survenue des apnées du
sommeil n’a jamais été démontrée. Le dysfonctionnement des muscles dilatateurs
du pharynx est un des éléments impliqués dans la physiopathologie du SAS de
type obstructif [6]. Ce dysfonctionnement est secondaire à une altération de l’arc
réflexe dilatateur qui permet de stabiliser les voies aériennes supérieures lors de
la dépression inspiratoire. Il pourrait être à l’origine de l’augmentation de la
compliance pharyngée et du collapsus des voies aériennes survenant au cours du
sommeil chez les sujets apnéiques [7]. Nous faisons donc l’hypothèse qu’un dys-
fonctionnement pharyngé pourrait expliquer la survenue d’apnées du sommeil
chez les sujets diabétiques. En effet, bien qu’elles soient rares, des atteintes des
nerfs crâniens associées à un dysfonctionnement laryngé et/ou pharyngé ont été
rapportées chez des sujets diabétiques, notamment lorsque la glycémie était mal
contrôlée [8-11]. Il est cependant légitime de penser que le dysfonctionnement
pharyngé soit plus fréquent mais asymptomatique, et qu’il s’exprime essentielle-
ment au cours du sommeil par l’apparition d’apnées. Il apparaît donc primordial
d’explorer le pharynx chez les patients diabétiques, a fortiori si ceux-ci souffrent
d’une neuropathie périphérique. Peu de moyens sont actuellement disponibles et
ils sont par ailleurs difficiles à mettre en œuvre. Nous avons récemment développé
une technique qui permet d’évaluer de manière simple et reproductible la sensi-
bilité du pharynx, sans induire d’effet indésirable notamment à type de réflexe
nauséeux.
Les apnées du sommeil sont associées à une majoration de la morbidité et de la
mortalité cardio-vasculaire et à une insulino-résistance [12, 13]. Par conséquent,
l’existence d’apnées chez les sujets diabétiques pourrait contribuer à majorer les
complications cardio-vasculaires associées au diabète et rendre plus difficile
l’équilibration de la glycémie, ce qui justifie une prise en charge thérapeutique.
L
ES
ÉLÉMENTS
CONDUISANT
À
LA
SUSPICION
DIAGNOSTIQUE
La forte prévalence du SAS nécessite une bonne connaissance clinique de cette
maladie pour au moins 2 raisons :
– suspecter cliniquement le diagnostic ;
– identifier les éléments cliniques qui interviennent dans l’appréciation de la
gravité du SAS, imposant une prise en charge thérapeutique rapide.
Le diagnostic du SAS repose sur une présomption clinique. Il peut utiliser
une première étape de détection par des moyens simplifiés (oxymétrie, sons
trachéaux, etc.). Il doit reposer sur une polygraphie complète. Cependant,
l’appréciation de la gravité repose pour l’instant sur un faisceau d’arguments :
des critères polygraphiques [index d’apnées + hypopnées (IAH), importance
des désaturations associées, importance de l’hypersomnie et des troubles
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