L’Encéphale, 2006 ;
32 :
536-41, cahier 2 Surveillance des traitements thymorégulateurs dans le trouble bipolaire
S 539
Sur le plan biologique, une surveillance de la fonction
hépatique doit être régulièrement effectuée. De façon arbi-
traire, on peut proposer une surveillance régulière de
1 mois après le début du traitement puis tous les 6 mois.
Un examen hématologique (NFS + plaquettes, temps de
saignement et bilan de coagulation, taux de prothrombine)
est recommandé à 15 jours après le début du traitement
et en fin de traitement. Si des chiffres anormaux sont
retrouvés, le fibrinogène et les facteurs de coagulation
seront dosés.
Chez la femme enceinte le valproate et ses métabolites
sont déconseillés au cours du premier trimestre de gros-
sesse.
• Associations médicamenteuses à prendre en compte
L’utilisation du valproate avec la lamotrigine doit se faire
de façon prudente en raison du risque augmenté de réac-
tions cutanées graves. Le valproate augmente les con-
centrations de lamotrigine, de la carbamazépine de phé-
nobarbital ou de primidone. Le millepertuis au contraire
diminuerait les concentrations du valproate.
Carbamazépine
• Surveillance des taux plasmatiques
L’efficacité de la carbamazépine est généralement
observée pour des concentrations plasmatiques obtenues
au bout d’une semaine de traitement comprises entre 4
et 12
µ
g/ml (soit 17 à 50 mcmol/l) et les réactions toxiques
surviennent pour des concentrations supérieures à
15
µ
g/ml. Ces concentrations plasmatiques doivent être
contrôlées tous les mois pendant environ 6 mois puis une
fois tous les 6 mois.
• Surveillance des effets indésirables
et des complications somatiques
L’apparition d’une fièvre, d’une angine ou d’un autre
processus infectieux doit conduire le médecin à contrôler
immédiatement la numération formule sanguine. La car-
bamazépine, composée d’une structure tricyclique sur le
plan biochimique, présente les mêmes contre-indications
que les imipraminiques : elle nécessite ainsi une sur-
veillance particulière en cas de glaucome, de rétention uri-
naire, de troubles du rythme et de la conduction cardiaque.
Une surveillance étroite est nécessaire en cas d’affection
hépatique ou rénale. Chez la femme enceinte, compte
tenu du risque tératogène, son usage est à éviter lorsque
l’état clinique le permet. Lorsque le traitement ne peut pas
être interrompu, une supplémentation en acide folique est
recommandée.
Les effets indésirables les plus fréquemment rencon-
trés avec la carbamazépine sont neurologiques (vertiges,
somnolence, fatigue, troubles de l’équilibre), gastro-intes-
tinaux (nausées vomissements), allergiques avec des
réactions cutanées de type urticaire et la leucopénie sur
le plan biologique. Les effets graves sur le plan hémato-
logique, hépatique, dermatologique, cardiovasculaire ou
les réactions d’hypersensibilité imposent l’arrêt du traite-
ment.
Les signes et symptômes de surdosage sont habituel-
lement neuromusculaires, cardiovasculaires (tachycar-
die, bradycardie, hypotension, troubles de la conduction
auriculo-ventriculaire) et respiratoires.
Un hémogramme et un bilan hépatique sont recomman-
dés une fois par semaine le premier mois et devant tout
signe clinique d’appel.
• Associations à prendre en compte
La carbamazépine peut avoir selon le type d’associa-
tion médicamenteuse des propriétés d’induction ou d’inhi-
bition enzymatique au niveau du métabolisme hépatique.
En tant qu’inducteur, il peut diminuer l’efficacité de cer-
tains antiviraux (saquinavir), d’antibiotiques (télithromy-
cine), d’antifongiques (voriconazole), d’antiparasitaires
de façon marquée (praziquantel) des contraceptifs oraux
(œstroprogestatifs et progestatifs), d’opiacés antalgiques
(tramadol), d’anticalciques, des antyarythmiques (classe
Ia), d’immunodépresseurs (ciclosporine, tacrolimus etc..),
des corticoïdes, des inhibiteurs de la protéase (amprena-
vir, atazanavir etc..), du midazolam (hypnotique et sédatif
de type benzodiazépine) (7).
D’autres produits entraînent l’augmentation des con-
centrations plasmatiques de carbamazépine : le dextro-
propoxyphène, les antibiotiques macrolides (l’érythromy-
cine, la josamycine), l’izoniazide, l’acétazolamide, la
cimétidine, la digoxine, le jus de pamplemousse. La rifam-
picine diminue l’efficacité de la carbamazépine.
Association aux psychotropes : l’association à la cloza-
pine accentue le risque de survenue d’effets hématologi-
ques graves. L’association au lithium entraîne un risque
accru de neurotoxicité. Le millepertuis diminue les con-
centrations plasmatiques de carbamazépine. Les inhibi-
teurs de la recapture de la sérotonine peuvent augmenter
les concentrations plasmatiques de carbamazépine de
même que la viloxazine et nécessitent une surveillance
clinique étroite en cas d’association. La carbamazépine
diminue les concentrations plasmatiques du clonazépam,
de l’halopéridol, de l’olanzapine, de la rispéridone, de la
méthadone.
Lamotrigine
• Surveillance des taux plasmatiques
Il n’existe pas avec la lamotrigine de concentrations
plasmatiques corrélées à l’efficacité thérapeutique de la
molécule. Il existe une grande variation interindividuelle
des concentrations plasmatiques à l’état d’équilibre.
• Surveillance des effets indésirables
et des complications somatiques
Le risque cutané est l’effet indésirable le plus fréquem-
ment rencontré (1/1000 chez l’adulte, autour de 1 % chez
l’enfant). Les éruptions cutanées surviennent dans les
8 premières semaines de traitement. La majorité de ces
éruptions sont bénignes et transitoires mais des toxider-
mies bulleuses (syndrome de Stevens-Jonhnson, syn-
drome de Lyell) ont été rapportées sous lamotrigine. Le