aspects epidemiologiques, cliniques et evolutifs de

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ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES, CLINIQUES ET
EVOLUTIFS DE 89 CAS DE
MALADIE MITRALE RHUMATISMALE
S. TOURE*, M.D. BALDE*, A. CONDE*, B.M. TOURE**, M. FOFANA*
RESUME
SUMMARY
Les auteurs rapportent les résultats d’une étude rétrospective sur la maladie mitrale rhumatismale (MMR) à
partir de 89 dossiers de patients hospitalisés du 1er
janvier 1981 au 31 décembre 1988 dans le service de
Cardiologie du CHU Ignace Deen de Conakry.
La série comportait 46 hommes (51,69 %) et 43 femmes
(48,31 %). L’âge moyen des patients était de 28 ans avec
des extrêmes à 15 et 45 ans.
La MMR occupe le premier rang tant des affections cardiaques rhumatismales en général (44,06 %) que des
formes anatomo-cliniques à localisation mitrale en particulier (61,80 %). Pendant la période d’étude la morbidité a varié en dents de scie.
Plus de la moitié des malades (77,53 %) ont moins de 40
ans. Le plus jeune âge y paierait y lourd tribut : 48 cas
de 15-24 ans (53,73 %). La majorité des cas (78,64 %)
proviennent des couches socio-économiques défavorisées.
L’ i n s u ffisance cardiaque est la complication la plus
fréquente (76,80 %). La majorité des patients sont
améliorés par le traitement médical. L’évolution à long
terme reste très aléatoire.
Le traitement médical d’entretien au long cours est difficilement assuré par les malades. Le handicap majeur
demeure l’absence de possibilité de cure chirurgicale
dans notre pays.
La mortalité hospitalière est estimée à 9%.
Dans ce domaine comme dans bien d’autres la solution
la meilleure et la plus économique demeure la prophylaxie antirhumatismale. Cette action préventive requiert
un effort raisonné et soutenu en matière de santé publique et d’éducation sanitaire.
The authors bring back a result of retrospective study
on the rheumatic mitral disease (RMD) from 89 documents of admitted patients from january 1, 1981 to
december 31, 1988 in the Cardiology Department of
University Hospital Ignace Deen in Conakry (Guinea).
The line constited of 46 men (51,69 %) and 43 women
(48,31 %). The average age was 28 years with the
extrem at 15 and 45 years.
The RMD takes the read in cardiac rheumatic infection
in general (44,06 %) than the forms of clinical anatomy
with mitral location (61,80 %).
During the period of study the morbidity varied in
tooth ans saw . More than half of patients (77,53 %) are
less than 40 years, with 48 cases of 15-24 years
(53,75 %). The majority of cases (78,64 %) arise from
the unfavorable socio-economic group.
Cardiac failure is the most frequent complication
(78,80 %). The majority of patients are improved by
medical treatment. Long term development remains
very remote.
The medical treatment administration at long course is
hardly assured by the patients. The major handicap is
the absence of the chirurgical cure in our country.
The hospital mortality is estimated at 9 %.
In this domain like many others, the best solution and
the more economic one lies the prophylaxy of the
rheumatic fever. This preventive strategy demands a
reasonable effort and support through public health
and sanitary education.
Mots-clés : Valvulopathie, maladie mitrale, insuffisance
cardiaque, prophylaxie anti-rhumatismale.
INTRODUCTION
Les lésions valvulaires cardiaques, séquelles du rhumatisme articulaire aigu (RAA) représentent actuellement,
dans la plupart des pays en voie de développement, une
des premières affections des enfants et des adultes jeunes
(1, 2, 3). Ces lésions frappent toutes les valves cardiaques
*Service de Cardiologie, CHU Ignace Deen, BP 585 Conakry (R. Guinée).
** Centre Informatique, Université de Conakry, BP 1147, Conakry (R.
Guinée).
Médecine d'Afrique Noire : 1998, 45 (5)
S. TOURE, M.D. BALDE, A. CONDE, B.M. TOURE, M. FOFANA
319
et réalisent deux grands types anatomo-cliniques : la sténose et l’insuffisance orificielles.
reprise rhumatismale était suspectée (première crise, rechute, rhumatisme cardiaque évolutif).
Au niveau mitral, sténose et insuffisance peuvent être souvent associées, à des degrés divers ; cette association pose
alors le problème de la prédominance de l’un ou l’autre des
deux types morphologiques : sténose mitrale serrée avec
petite fuite d’accompagnement, réalisant une cardiopathie
assez voisine de la sténose et ne différant guère d’une
insuffisance (4).
La classification de l’insuffisance cardiaque a été faite conformément au schéma de la New-York Heart Association
(NYHA).
La maladie mitrale est définie par l’association à part à peu
près égale de sténose et de fuite mitrale (5). Des associations de maladies mitrales avec des lésions valvulaires
aortiques et tricuspidiennes, réalisant le tableau d’une polyvalvulopathie mitro-aorto-tricuspidienne ont été aussi
rapportés (4, 5, 6).
La grande fréquence de la MM rhumatismale (MMR), les
écueils observés couramment dans le diagnostic, son évolution naturelle imprévisible, aboutissant à l’insuffisance
cardiaque et les troubles du rythme associés d’une part et
d’autre part l’impossibilité actuelle d’un traitement chirurgical en Guinée confèrent à cette affection un caractère
préoccupant.
Notre propos a pour objet de dégager les principaux aspects
épidémiologiques, cliniques et évolutifs de la MMR dans
notre service à Conakry.
Durant la période d’étude, 1057 malades ont été hospitalisés pour une pathologie cardio-vasculaire. On y dénombrait 202 cas de valvulopathies rhumatismales (VR) dont
89 cas de MMR.
MATERIEL ET METHODE DE TRAVAIL
Le travail a concerné une série rétrospective de patients
hospitalisés consécutivement pour MMR, durant la période
allant du 1er janvier 1981 au 31 décembre 1988 inclusivement. La série se composait de 89 malades dont 46 hommes (51,69 %) et 43 femmes (48,31 %).
Tous les malades ont bénéficié d’un dossier individuel de
suivi hospitalier dans lequel étaient répertoriés les renseignements suivants : âge du malade, sexe, profession, examen physique cardio-vasculaire, respiratoire et général, les
résultats du bilan complémentaire systématique (ECG,
radiographie thoracique de face, glycémie, hémogramme,
urée et créatinine sérique).
L’échocardiogramme a été réalisé chez 11 malades dans le
cadre d’un bilan préopératoire et 5 malades ont bénéficié
d’un traitement chirurgical dans des centres plus spécialisés. Le dosage des ASLO était fait toutes les fois qu’une
Médecine d'Afrique Noire : 1998, 45 (5)
RESULTATS
1. Aspects épidémiologiques
Tableau 1 : Place de la maladie mitrale par rapport
aux valvulopathies rhumatismales de 1981 à 1988
Valvulopathies
Cas
%
Maladie mitrale
Rétrécissement mitral
Insuffisance mitrale
Insuffisance aortique
Rétrécissement aortique
Maladie aortique
PVMA*
PVMAT**
89
33
22
18
10
8
21
1
44,06
16,33
10,89
8,91
4,95
3,96
10,4
0,5
Total
202
100
*PVMA : PolyValvulopathies Mitro-Aortiques
** PVMAT : PolyValvulopathies Mitro-Aortiques Tricuspidienne
Tableau 2 : Répartition des cas selon l’âge et le sexe
Age (ans)
Cas
%
15-24
48
53,93
25-34
21
23,6
35-44
15
16,85
45-54
5
5,62
Total
89
100
ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES…
320
Tableau 3 : Evolution des cas de maladie mitrale et de valvulopathies rhumatismales de 1981 à 1989
Années
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
VR
20
31
22
16
21
28
27
37
MMR
10
14
12
13
9
11
9
11
Ainsi, la MMR représentait 8,42 % des hospitalisations
totales cardiologiques et 44,06 % des VR. La MMR était
également la première cause de morbidité valvulaire du
service.
L’âge des malades variait de 15 à 45 ans avec une moyenne
à 28 ans. Cette moyenne était de 38 ans pour les hommes et
35 ans pour les femmes. Plus de la moitié des cas (69
malades sur 89, soit 77,53 %) ont un âge compris entre 15
et 34 ans. Chez 5,62 %, l’âge était supérieur ou égal à
35 ans.
L’atteinte était relativement plus marquée chez les hommes
(51,69 %) que chez les femmes (48,31 %). Mais la
différence n’était apparemment pas significative.
Les patients provenaient des zones urbaines et suburbaines
et toutes les catégories socio-professionnelles étaient représentées.
Le niveau socio-économique était bas chez 78,64 % des
patients (70 malades sur 89), il était moyen chez 12,38 %
(11 malades sur 89) et élevé chez 8,98 % (8 patients sur
89).
L’évolution des cas de MMR se fait en dents de scie de
1981 à 1988. Une baisse numérique relative des cas a été
observée en 1985, comparativement aux cas totaux des cas
de VR qui étaient croissants.
Ce déclin relatif des cas de MMR n’a pas trouvé d’explication.
Graphique 1 : Evolution comparée des cas de maladie mitrale et de cardiopathies rhumatismales de 1981 à 1988
40
Cas
MMR
Série1
30
VR
Série2
20
10
0
1981
1982
1983
1984
1985
La MMR avait été observée chez 81 patients. Ceux-ci se
répartissaient en 43 femmes et 38 hommes. Le reste des cas
était des associations polyvalvulaires dont 7 cas associés à
une insuffisance aortique (mitro-aortique) et un cas
d’atteinte mitro-aorto-tricuspidienne.
La maladie mitrale est retrouvée dans les fratries dans 5 %
de nos cas.
1986
1987
1988
Années
2. Classification clinique
L’insuffisance cardiaque dominait le tableau clinique de
nos patients. Plus de la moitié des cas (76 malades du 89)
avaient été admis aux stades III et IV de la NYHA.
L’orthopnée ou la dyspnée permanente, l’œdème pulmonaire, les œdèmes des membres, l’ascite et dans certains cas
l’anasarque étaient les éléments du tableau dans lequel les
patients avaient été admis dans le service.
Médecine d'Afrique Noire : 1998, 45 (5)
S. TOURE, M.D. BALDE, A. CONDE, B.M. TOURE, M. FOFANA
321
3. Complications
arthralgies, fébricules. La forme de polyarthrite migratrice
typique avec fièvre avait été décrite chez un malade de
15 ans, de sexe masculin.
Tableau 4 : Complications
Complications
Cas
%
Insuffisance cardiaque
Troubles du rythme
Embolie cérébrale
Embolie pulmonaire
Endocardite d’Osler
Oedème aigu pulmonaire
76
35
3
2
2
2
85,39
23,59
3,37
2,94
2,94
2,94
Elles comprenaient :
L’insuffisance cardiaque : elle avait été observée chez
85,39 % des malades (76 malades sur 89). C’est dans ce
tableau clinique que ces patients avaient été admis dans le
service. Selon la classification de la NYHA, 59 patients
appartenaient à la classe III et 17 patient à la classe IV.
L’œdème aigu du poumon : 2 cas, un homme âgé de 38
ans et une femme de 31 ans.
Les troubles du rythme cardiaque (TRC) : chez 23,59 %
des cas (35 malades sur 89) avait été mis en évidence un
TRC. Il s’agissait de l’arythmie complète par fibrillation
auriculaire (27 malades, soit 77,14 % des cas de TRC), du
flutter auriculaire (8 cas, soit 22,86 % des TRC). Les
extrasystoles auriculaires et ventriculaires étaient fréquentes. Celles-ci étaient soit monomorphes soit polymorphes,
simples ou complexes ; des cas de bigéminisme, de
trigéminisme avaient été également diagnostiqués chez nos
patients.
Les accidents vasculaires cérébraux avec hémiplégie
gauche et aphasie ont été observés chez 3 patients, deux
hommes et une femme âgés de 27, 38 et 41 ans.
L’embolie pulmonaire avec hémoptysie a été observée
chez 2 patients, deux hommes âgés respectivement de 18 et
21 ans.
L’endocardite d’Osler a été décrite dans deux cas.
Les rechute rhumatismales sont très fréquentes. Elles sont
généralement liées à l’abandon de la prophylaxie antirhumatismale par les malades. Elles associent poly-
Médecine d'Afrique Noire : 1998, 45 (5)
Les troubles cataméniaux (aménorrhées, oligoménorrhées)
sont aussi fréquents. Il en est de même des accidents gravido-cardiaques. Ces derniers ont été observés pendant le
dernier trimestre de la grossesse, au cours du travail (6 cas).
5. Evolution
Le traitement de la MMR a été dans la majorité des cas un
traitement médical, c’est-à-dire celui de l’insuffisance cardiaque et des autres complications. Cinq patients ont bénéficié d’un remplacement valvulaire mitral à l’étranger.
Le traitement de l’insuffisance cardiaque était composé
d’une association de digitalique (digoxine 0,25 mg) et de
diurétiques (furosémide), de vasodilatateur (Risordan® et
Molsidomine). En outre, 18 patients avaient reçu un inhibiteur de l’enzyme de conversion (Lopril® ou Rénitec®).
L’arythmie complète par fibrillation auriculaire a été
soumise au traitement digitalique.
Les rechutes rhumatismales ont été traitées essentiellement
par l’Aspégic® et la pénicilline. Dans les cas particuliers de
polyarthralgies typiques, les corticoïdes étaient associés à
la pénicilline.
Des cas d’allergie à l’Extencilline dont deux très graves ont
été observés.
La durée moyenne de séjour des malades était de 16 jours,
avec des extrêmes de 10 et 28 jours. A la sortie de l’hôpital
presque tous les patients en insuffisance cardiaque étaient
améliorés par le traitement médical.
Il y a eu 8 décès (9 % des cas), 18 malades ont été
réhospitalisés pour syndrome œdémato-ascitique, suite à un
abandon du traitement.
COMMENTAIRES
Les cardiopathies valvulaires rhumatismales constituent un
groupe nosologique de grande importance en milieu
cardiologique africain. Elles sont dominées par les atteintes
ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES…
mitrales parmi lesquelles une place importante revient à la
maladie mitrale (6).
Dans notre étude la maladie mitrale occupe le premier rang
des affections valvulaires rhumatismales en général
(44,06 %) et des atteintes mitrales en particulier (61,80 %).
Ces données rejoignent celles de FOFANA et coll. (43,47 %
et 67,60 %) ; elles sont inférieures à celles de CONDE
(48,70 % et 81,89 %) et d’ATTOUMANE (54 % et 76,72 %)
et elles sont supérieures au taux de 26 % de maladie mitrale
observée à Bamako (4, 6, 7, 8).
Ailleurs dans le monde, la maladie mitrale rhumatismale et
la sténose mitrale occupent dans les services de médecine
privée 40,7 % des consultations ; dans les services hospitaliers publics, le pourcentage est plus important avec 71 %
des cas (10).
Dans notre série la fréquence diminue quand l’âge des
patients augmente, jusqu’à 40 ans. Le maximum d’atteintes
est observé dans la tranche de 15-34 ans, en faveur de l’étiologie rhumatismale. L’âge de prédilection est de 15 à 28 (68
%) pour BALDE, de 15 à 34 ans (71,57 %) pour CONDE ; et
de 10 à 30 ans (75,25 %) pour FOFANA et coll (6, 4, 7).
Dans les régions où l’endémicité et la gravité du rhumatisme articulaire aigu sont caractéristiques, des maladies
mitrales sévères, d’évolution galopante et rapidement mortelle, sont observées dès l’enfance avant l’âge de 10 ans (4,
8, 11, 12).
Le taux est faible pour l’Europe et les Etats-Unis où on
note 17 % pour les 6-17 ans, à cause du recul du rhumatisme articulaire aigu (RAA) (cité in 4).
322
identiques (4, 8).
Le faible niveau-socio-économique se retrouve chez la
majorité des patients de notre série, ce qui est moins surprenant car la promiscuité, les mauvaises conditions d’hygiène seraient des facteurs prédisposants. Le milieu social
le plus atteint est de loin celui des indigents (7, 8).
Des facteurs génétiques sont souvent évoqués devant la fréquence à laquelle sont observées les cardiopathies rhumatismales dans les fratries. Selon GUERIN (14) ces
facteurs feraient que certains sujets réagiraient de façon
inhabituelle à une banale infection rhinopharyngée aboutissant à la crise de RAA ; cependant il est difficile de faire la
part des facteurs génétiques et des facteurs socio-économiques, dont on a démontré le rôle considérable dans la survenue du RAA (14).
Le tableau clinique ne présente aucune originalité, la
séquence angine de gorge-polyarthralgie se retrouve chez
environ 60-70 % des cas. Ce taux est identique à celui de
GLOVER ; tandis qu’il est de 22 fois sur 26 cas contrôlés
par JOLY, c’est-à-dire dans une proportion qui serait plus
élevée que dans les sténoses pures (4, 8, 13, 14). L’association d’une insuffisance mitrale organique et d’un rétrécissement mitral prédomine sur les cas d’insuffisance et de
rétrécissement mitraux purs (4).
BERTRAND, CONDE puis FOFANA et coll. recommandent d’observer une prudence dans l’interprétation des
antécédents douloureux ostéo-articulaires dans un contexte
où drépanocytose, paludisme, arboviroses sont des pathologies courantes (1, 4, 8).
Une légère prédominance féminine est observée dans notre
série (51,69 %), elle n’est apparemment pas significative.
Chez CONDE, les hommes (60,47 %) sont significativement plus atteints que les femmes (39,53 %) (4), tandis que
chez BALDE le taux est relativement identique pour les
deux sexes (50,01 % pour les hommes et 49,09 % pour les
femmes) (6). Selon LABORDE et CORMIER la maladie
mitrale se distingue des sténoses pures à la fois à l’absence
de prédominance du sexe féminin et une plus grande fréquence d’antécédents définis de RAA (5).
Les complications de la MMR sont celles de toute valvulopathie mitrale. Celles observées chez nos patients sont
également rapportées dans la littérature (4, 8). Elles sont
plus en rapport avec la sténose que l’insuffisance mitrale.
L’insuffisance cardiaque majeure traduit les importants
dégâts myocardiques des malades hospitalisés, le caractère
mutilant des lésions valvulaires (8) ; à ces facteurs s’ajoutent dans notre contexte le bas niveau socio-économique de
nos populations et le poids encore important de la médecine
traditionnelle (1, 4, 8).
Le rôle du sexe est controversé. Actuellement, il est plutôt
admis que la sténose serait plus fréquente chez la fille,
l’insuffisance mitrale chez le garçon et la maladie mitrale
frapperait les deux sexes dans des proportions à peu près
L’ i n s u ffisance cardiaque est la complication la plus fréquemment observée : 76,80 % de nos cas, 85,5 % chez
SERME, 78 % chez DIALLO et TOURE, 84 % chez
CONDE, 80 % chez ATTOUMANE (4, 8, 9, 15).
Médecine d'Afrique Noire : 1998, 45 (5)
S. TOURE, M.D. BALDE, A. CONDE, B.M. TOURE, M. FOFANA
323
D’après SLAMA (cité in 8), la fibrillation auriculaire
représente le trouble rythmique le plus fréquemment observé au cours des valvulopathies mitrales ; son apparition
pose d’ailleurs un problème pronostique important. Dans
notre étude sa fréquence est de 77,14 % des cas de trouble
du rythme observés, plus élevée que les 13 à 56 % de la
littérature (4, 7, 13). Il en est de même des extrasystoles.
D’autres complications sont habituelles comme l’embolie
cérébrale, la greffe oslérienne, les accidents cataméniaux et
gravido-cardiaques. Les rechutes rhumatismales sont en
rapport avec l’abandon de la prophylaxie antirhumatismale
par les malades. Des cas de réaction allergique à la pénicilline dont deux extrêmement graves ont été également
observés chez nos patients.
Ces complications imposent la même attitude thérapeutique que celle rapportée par les auteurs.
D’habitude le traitement médical améliore nettement
l’insuffisance cardiaque. Mais il ne s’agit certainement là
que d’une efficacité bien limitée car elle ne corrige pas
l’obstacle mécanique responsable de la valvulopathie,
cependant elle peut bien trouver son importance en attendant une correction chirurgicale. Cinq de nos patients ont
été opérés en Suisse, Hongrie, Roumanie.
La mortalité est élevée avec 8 décès (8,9 %) contre 5 décès
dans la série de CONDE (4). L’évolution immédiate à
l’hôpital est en général favorable, celle lointaine est très
aléatoire ; des décès à domicile sont souvent rapportés par
les parents (4, 8).
L’antibiothérapie à la benzathine-pénicilline constitue le
traitement prophylactique idéal ; il doit être renforcé par
les examens réguliers dentaires et ORL ainsi que par une
asepsie farouche en cas de chirurgie (8).
La prophylaxie doit être logiquement poursuivie toute la
vie même lorsque l’atteinte cardiaque est légère. C’est le
gage d’une meilleure santé pour les jeunes populations.
CONCLUSION
Les problèmes posés par la maladie mitrale rhumatismale
sont ceux de toutes les cardiopathies valvulaires en général, c’est-à-dire essentiellement prophylactiques. La prophylaxie antirhumatismale est le seul traitement qui permet
d’atténuer la morbidité et la mortalité de la MMR. Il s’agit
entre autres d’une pénicillinothérapie bien précoce dans les
angines et l’intégration de la lutte dans le programme des
soins de santé primaire à l’échelle individuelle et communautaire.
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