Sous-estimation du RAA par la clinique
Une étude coopérative récente menée par des cardiopédiatres français, cambodgiens et du
Mozambique montre que la prévalence des valvulopathies rhumatismales de l’enfant est
sous-estimée par la seule clinique, comparativement à l’échocardiographie.
Le diagnostic est porté par la seule clinique (confirmation écho) chez 8 des 3677 enfants (de
6 à 17 ans) examinés au Cambodge et 5 des 2170 examinés au Mozambique, ce qui
correspond à une prévalence de 2,2 et 2,3 cas pour 1000, respectivement.
Le dépistage échocardiographique identifie 79 cas parmi les Cambodgiens et 66 parmi les
enfants du Mozambique (prévalence de 21,5 et 30,4 cas pour 1000 respectivement). Dans la
majorité des cas, c’est la valve mitrale qui est atteinte (87,3% au Cambodge et 98,4% au
Mozambique). Ainsi, le seul dépistage clinique méconnait-il 9 fois sur 10 les enfants atteints,
qui échappent de ce fait à la prévention secondaire, requise en raison de leur risque de
récidive élevé.
La dimension épidémiologique de ce constat est d’autant plus importante que l’OMS
rapporte que 15,6 millions d’individus sont atteints de valvulopathies rhumatismales dans le
monde, avec 470 000 nouveaux cas de RAA rapportés et 223 000 décès liés à l’un ou
l’autre. L’accès à l’échocardiographie, facteur limitant du dépistage dans les populations
pauvres concernées, doit être favorisé.
Marijon E, Ou P, Celermajer DS et coll. N Engl J Med 2007, 357: 470-6.
Dans un autre travail, réalisé à Lahore (2ème ville du Pakistan par sa population), 24980
enfants âgés de 5 à 15 ans ont été examinés par deux cardiologues dans 70 écoles, et
transférés pour échographie cardiaque dans un centre hospitalier de référence si
l’auscultation n’était pas normale. Une anomalie cardiaque a été retrouvée chez 986 enfants
(3,9%) dont 546 valvulopathies rhumatismales et 440 cardiopathies congénitales.
La prévalence des valvulopathies rhumatismales, avec cette approche diagnostique
conventionnelle, est de 21,9 pour 1000 enfants, dont l’âge moyen est de 10,7 ans. Cette
prévalence élevée, quasiment identique avec un dépistage clinique à celle rapportée par
l’échographie cardiaque, souligne encore le caractère multifactoriel de l’affection et de ses
variations géographiques et au sein de populations différentes. L’atteinte valvulaire mitrale
prédomine là aussi, avec 22% d’insuffisance mitrale, 28% de sténose et 30% d’atteinte mixte
(maladie mitrale), pour 3,1% d’insuffisance aortique isolée et 4,9% d’IA associée à une
maladie mitrale.
La plupart des familles (92,5%) méconnaissaient le diagnostic avant l’étude, et seuls 2% des
enfants avaient une prophylaxie secondaire. Enfin, dans la majorité des cas, l’affection
atteint des enfants de milieux défavorisés. Une dénutrition est constatée dans 67% des cas.
Sadiq M, Islam K, Latif F, Rehman AU, Waheed A, Khan JS. Prevalence of rheumatic
heart disease in school children of urban Lahore. Heart 2009, 95: 353-67.