LITHIASES RENALES : DES MECANISMES AU TRAITEMENTS Dr. Marie Courbebaisse, Pr. Olivier Traxer, Service de Néphrologie et Dialyses, Pr. Ronco Service d’Urologie, Pr. Haab Hôpital Tenon, Paris Journée mondiale du rein, Académie de Médecine, 12 mars 2009 UN PEU D’HISTOIRE… Calculi 4ième millénaire av JC QUELQUES CHIFFRES • • • Prévalence : 10-12% Incidence : 30/100.000 h/an 21 000 nouveaux cas/an • • • 100 adultes/ 1 enfant Sexe-Ratio : 2H / 1F Pays développés • • • Prédominance OxCa Récidive : 50% à 5 ans Taille moyenne : 9 mm • • • CNA : 125 000/an 1 à 2% des urgences 65-70% expulsion spontanée • • • Nb LEC : 45 000 en 2006 Nb URS : 20 000 en 2006 Nb NLPC : 2500 en 2006 • • Coelio ? Chirurgie à ciel ouvert ??? COLIQUE NEPHRETIQUE CONFERENCE DE CONSENSUS Prise en charge des CN dans les SAU Marseille-23/04/1999 • • • 1-2% des entrées aux urgences 80 % des CNA : Calcul CNA compliquée : 6% • • Couple ASP-Echographie Réno-Vésicale TDM sans injection : référence ? • • • Ttt initial : antalgique (AINS +/- morphi.) Place des alpha-bloquants (+) Place des anti-calciques ? • • LEC en urgence URS en urgence : semi-rigide +/- souple PHYSIOPATHOLOGIE CONCENTRATION = QUANTITE PRECURSEURS/VOLUME URINAIRE ↑ QUANTITE PRECURSEURS : Ca+Oxalate ou phosphate/acide urique/cystine - Augmentation des entrées • ↑ Apports : oxalates, calcium, purines, médicaments • ↑ absorption digestive : calcium, oxalates • ↑ Résorption osseuse : libération de calcium - ↓ réabsorption rénale : calcium, phosphate, cystine - ↑ production endogène : oxalates (hyperoxalurie Iaire, vitamine C), purines ↓ VOLUME URINAIRE IMPORTANT POUR TOUS LES TYPES DE CALCULS Rôle du pH urinaire : pH alcalin ↑ solubilité acide urique et cystine ↓ solubilité phosphate de calcium Hypercalciurie : # 40% des lithiases calciques ↓ inhibiteurs de la cristallisation : hypocitraturie +++ Infections urinaires Malformations urinaires → Stase urinaire corps étranger urinaire PHYSIOPATHOLOGIE Anatomic predisposition Maladie de Cacchi-Ricci hyperparathyroïdie+++ hyperthyroïdie D’après Orson W Moe, The Lancet, 2006 PHYSIOPATHOLOGIE : PLAQUE DE RANDALL Surface du rein – Les plaques se forment dans la membrane basale de la partie profonde des anses de Henlé, puis s’étendent vers l’épithélium papillaire. – Une fois au contact de l’urine sursaturée, les dépôts PCa servent de support à la formation de calculs OxCa. – La surface des plaques est proportionnelle à la calciurie et inversement proportionnelle au volume urinaire (Kuo Néphron = Unité fonctionnelle du rein (# 1 million/rein) RL,Kidney Int, 2003). Anse de Henlé Zone profonde du rein Épithélium papillaire Bushinsky DA, J Clin Invest, 2003 Evan AP, J Clin Invest, 2003 Evan A, Kidney Int, 2006 LITHIASES MONOGENIQUES Hyperoxaluries primaires AGT (AR, HOPI) GRHPR (AR, HOPII) Erreurs innées du métabolisme des purines Déficit HGPRT (X, Lesch-Nyhan) Hyperactivité PRPPS (X) Déficit APRT (AR, 2,8-dihydroxyadéninurie) Déficit XDH (AR, xanthinurie héréditaire) Sang Néphron Acidoses tubulaires distales H+ATPase, s/u B1 (AR, + surdité) H+ATPase, s/u 4 (AR, +/- surdité) AE1 (AD, pas de surdité) rBAT, B0+AT (AR, CYSTINURIE) CLC-5 (X, Dent) OCRL (X, Lowe) NaPi-IIc (AR, HHRH) NaPi-IIa NHERF-1 URAT1 (AR, hypo-uricémie idiopathique familiale) Hypercalciurie+hypomagnésémie NKCC2 (AR, Bartter I) ROMK (AR, Bartter II) PCLN-1 (AR, FHHNC) CaSR (AD, d'hypocalcémie familiale avec hypercalciurie) Lithiases monogéniques : 1,6% chez l’adulte et 9,6% chez l’enfant LITHIASE, FDR CARDIOVASCULAIRES ET PATHOLOGIE OSSEUSE • Lien entre lithiases calciques et hypertension artérielle - Antécédent de lithiase : risque de développer HTA multiplié par 1,3 - Apports de sel : ↑ calciurie/ FdR HTA - Altérations du tissu rénal ? Lithiase calcique+Hypercalciurie : Risque accru de déminéralisation osseuse et de fractures Incidence cumulée de fractures vertébrales, % Lien entre lithiases uriques syndrome métabolique (obésité et diabète type 2) -Lithiase urique : 63% obèses vs 11% non obèses 36% D2 vs 11% non D2 Obésité et Diabète : ↓ pHu (FdR de lithiase urique) lithiasiques non lithiasiques années Melton, Kidney Int, 1998 Obligado S, Am J of Hypertension, 2008 BILAN Prise en charge multidisciplinaire • Interrogatoire +++ : - chronologie et activité de l’histoire lithiasique - style de vie, enquête alimentaire, traitements - antécédents médicaux et chirurgicaux, antécédents familiaux • Imagerie • Bilan biologique - simple dès le premier épisode lithiasique - exploration fonctionnelle complète (lithiase récidivante, multiple, bilatérale, familiale, sujet jeune) • INTERET +++ DE L’ANALYSE DU CALCUL : MORPHOLOGIQUE ET PAR SPECTROPHOTOMETRIE INFRA-ROUGE Pas de place pour l’analyse chimique DE LA CRISTALLURIE (urines du matin conservées à T°C ambiante, regardée s au microscope) ANALYSE MORPHOLOGIQUE Exemple :Lithiases oxalo-calciques - Un seul type chimique - Plusieurs maladies Type IIa weddellite = hypercalciurie Type Ic whewellite => hyperoxalurie primaire (maladie génétique) Type Ia whewellite = hyperoxalurie Médicament (indinavir) cystine CRISTALLURIE - DIAGNOSTIC - ACTIVITE LITHIASIQUE Dihydroxy-2,8-adénine APPORTS CALCIQUES (lithiase calcique) Ne pas réduire les apports calciques +++ Besoins quotidiens en calcium : 1 gramme/j (pas moins, pas plus) • Risque de lithiase divisé par 2 si apports Ca ≥ 1g vs < 0,6 g (Etudes épidémiologiques de Curhan) 1) Réduction des apports calciques → Stimulation de la parathormone → résorption osseuse donc risque de déminéralisation osseuse → maintien d’une calcémie nle (régulée+++) Dans la lumière du tube digestif, le calcium se lie à l’oxalate alimentaire et inhibe l’absorption digestive de l’oxalate 2) absorption digestive d’oxalates (%) • Apports calciques mg/jour Von Unruh GE, JASN,2004 APPORTS EN OXALATES (lithiase oxalo-calciques) Réduire les aliments riches en oxalates +++ • • • Apports alimentaires variables+++ : 100 et 1000 mg/j → Oxalate U dérivé de l’oxalate alimentaire : 10 à 50 % Absorption digestive d’oxalates variable+++ – du contenu du bol alimentaire en calcium, en acides gras, en magnésium, en fibres… – du contenu microbien de l’intestin Métabolisme endogène +++ : apport de vitamine C : ↑ oxalate U (de façon + importante chez les lithiasique) (Traxer O, J Urol, 2003) Boisson Cacao, Thé, Vin blanc Légumes Epinards, Rhubarbe, oseille, asperges, céleri Fruits Groseille, framboise, figues Divers CHOCOLAT NOIR, Foie, Cacahuètes APPORTS EN SEL/PROTEINES/FRUITS ET LEGUMES • • • • • • • • Apports en sel : 6 à 7 g/j, PAS PLUS Régime hypersodé: ↑ risque de lithiase (Curhan G, Ann Inter Med, 1997) ↓ réabsorption tubulaire du Ca + 6g NaCl/j → + 1mmol Cau/j chez non lithiasique + 2 mmol Cau/j chez lithiasique ↓ réabsorption tubulaire de cystine Apports protidiques : 1g/kg/j, PAS PLUS Apport protidique élevé : ↑ risque de lithiase (Curhan NEJM, 1993) Lithiase calcique : protides → ↑de la charge acide → libération du Ca osseux Lithiase urique : ↓ apports purines (abats, gibiers, fruits de mer, thon, anchois, sardines, légumes secs) • Cystinurie : ↓ apports méthionine (blancs d’œufs, gruyére / parmesan, morue séchée, viande de cheval) Régime libre 400g fruits + 300g légumes/jour p Volume urinaire ml/j 1231 2024 <.001 Citraturie mmol/j 1.17 1.97 <.001 pH urinaire 5.84 6.19 <.001 CaP RS 1.05 0.97 NS CaOx RS 10.17 4.96 <.001 Meschi T, Kidney Int, 2004 Etude prospective randomisée 120 hommes Lithiases oxalo-calciques récidivantes hypercalciuriques régime pauvre en calcium (0,4 g/j) Régime normal en Ca (1,2 g/j) pauvre en sel et en protéines Récidives = 23/60 Récidives = 12/60 Borghi L, NEJM, 2002 CURE DE DIURESE :QUELLE QUANTITE? DILUER LES URINES !! Diurèse (quantité d’urines émises) = au moins 2 litres/jour 3 litres/jour dans certains cas (cystinurie, hyperoxalurie Iaire, malformations voies urinaires) A répartir sur les 24 heures (1/4 des apports dans la soirée) Diurèse = apports de boissons (à température ambiante) Augmenter les apports en fruits et légumes Objectif = diluer les urines (densité urinaire que l’on peut mesurer avec une bandelette urinaire) mois • • • • • • 40 35 30 25 20 15 10 5 0 ≥ 2 litres/jour (n = 99) 1 litre/jour (n = 100) 27 12 intervalle entre 2 épisodes lithiasiques Borghi L, J Urol, 1996 % récidives lithiasiques CURE DE DIURESE : QUELLES BOISSONS? Marque Nom de la source - eaux minérales & eaux de source 200 à 300 x plus chères que l’eau du robinet (emballage, traitement, transport, pub …) - eau du robinet : composition disponible à la mairie Eau potable : peut être bue toute une vie sans risque / santé Caractéristiques bactériologiques : toutes les eaux Caractéristiques physico-chimiques : eaux de sources et du robinet, pas obligatoirement les eaux minérales fluorose osseuse (douleurs, dé déformations et fragilisation osseuses) : > 8 mg/j Exemples d’eaux minérales riches en fluor ( > 1,5 mg/l ) - eaux plates : Sail les Bains (6,5 mg/l) Orée du Bois (2,8 mg/l), Wattwiller (2,4 mg/l) - eaux pétillantes : St Yorre (8,9 mg/l), Célestins (6 mg/l), Quezac (2 mg/l) Badoit (1,8mg/l) CURE DE DIURESE : QUELLES BOISSONS? • Boissons autres que l’eau? - Thé, café, bière, alcool: plutôt effet protecteur - Jus de fruits : effet protecteur (mais risque ↑ avec le jus de pamplemousse?) - Sodas: risque ↑ avec sodas contenant de l’acide phosphorique (coca-cola) 1) Curhan G, Am J Epidemiol,1996 2) Curhan G, Ann Intern Med, 1998 3) Shuster J, J Clin Epidemiol, 1992 4) Goldfarb, J Urol, 2001 • Indication à l’alcalinisation des urines? - Lithiase urique Objectif : pH = 6,5 - 7 - Cystinurie : pH = 7-7,5 (sans dépasser 8) !! Alcalinisation excessive : risque de lithiase phosphocalcique Eaux riches en HCO3- ( > 1000 mg/l ) - eaux pétillantes : St Yorre (4450), Célestins (3100), Arvie (2300), Quezac (1780), Badoit (1300), Salvetat (780) ... - eaux plates : Contrex (403), Hépar (403), Vittel (402),Thonon (350) … Eaux riches en Na+ ( > 150 mg/l ) - eaux pétillantes : St Yorre (1708), Célestins (1172), Arvie (650), Quezac (256) , Salvetat (7 mg/l) HARMONISER LES APPORTS EAUX/ALIMENTS contenu en calcium des aliments (en mg/100 g) Eaux riches en Ca++ ( > 150 mg/l ) • eaux plates : Contrex (486 mg/l), Hépar (555 mg/l) , Vittel (202 mg/l), Wattwiller (247 mg/l) , Taillefine (250 mg/l) • eaux pétillantes : Salvetat (253 mg/l), Quezac (241 mg/l), San Pelegrino (208 mg/l), Arvie (170 mg/l), Perrier (147 mg/l) ... amateur de produits laitiers peu de produits laitiers ➠ ➠ eau pauvre en Ca++ eau riche en Ca++ www.urofrance.org Règles diététiques et calculs urinaires Base Urofrance CLAFU (comité Lithiase de l'AFU) ≥ 2 l/j 1 g/kg/j 6 g/j 1 g/j Privilégier la consommation Lithiase oxalo-calcique Réduire la consommation Citrate de potassium = Alcalinisation des urines, sans apports de sel et hypocitraturie 6 à 8 g/jour à diluer dans 2 à 3 L d’eau de boisson Thiazidiques (Esidrex®, Moduretic®) = Réduction de la calciurie ↓ calciurie de 20 à 40%, efficace si restriction sodée associée Dipyridamole (Persantine®) = fuite rénale primitive de phosphate 80 % de répondeurs Traitements médicamenteux - Associés aux mesures diététiques -Peu nombreux -Prise prolongée (Prié D, JASN, 1998) Allopurinol (Zyloric®) : lithiase urique commune si hyperuraturie (+ alcalinisation) 2,8 Dihydroxyadénine (alcalinisation inutile) Sulfhydrylés = Médicaments chélateurs de cystine Disulfure mixte cystéine-sulfhydrylé, 50x plus solubles - Dpénicillamine (Trolovol®) - Tiopronine (Acadione®) Vitamine B6 (5 à 10 mg/kg/jour) = hyperoxalurie Iaire ↓ production endogène d’oxalate 25% de répondeurs (Milliner D,NEJM 1993) Recolonisation colique par des bactéries capables de dégrader l’oxalate (Oxalobacter Formigenes) = Hyperoxalurie Iaire et entérique (Siva S, BJU, 2009)