NUTRITION 29 Lithiases urinaires La place des facteurs nutritionnels L es processus de formation des calculs impliquent l’hypercalciurie, l’hyperoxalurie, l’hyperuricurie et mais aussi l’hypocitraturie et les anomalies de pH urinaire. Ces facteurs sont influencés par les apports hydriques et la nutrition ainsi que par le métabolisme propre des sujets. Modifications biochimiques Le risque de lithiase est lié à des modifications biochimiques urinaires qui peuvent être induites par des comportements nutritionnels inadaptés aux besoins de l’organisme chez les sujets qui sont probablement génétiquement prédisposés. L’hyperabsorption digestive de nutriments ou l’excès d’excrétion urinaire des substances cristallisables comme le calcium, l’oxalate ou l’acide urique, ou encore un défaut en citrate, concourent à la sursaturation des urines : la formation de cristaux s’accrochant à l’épithélium urinaire constitue un point de départ de calcul. À noter que les sujets lithiasiques ont tendance à présenter un index de masse corporelle plus élevé que la population générale, ce qui va dans le sens du rôle de la consommation trop abondante en graisses et en sucres raffinés dans cette pathologie. Par ailleurs, les patients lithiasiques ont souvent une diurèse insuffisante, d’où une augmentation des solutés urinaires. Les calculs les plus fréquents sont composés d’oxalate de calcium soit oxalodépendants soit dépendants du calcium, viennent ensuite les calculs de phosphates calciques et les calculs d’acide urique (plus souvent identifiés chez l’homme). Le rôle de la nutrition Que faut-il savoir sur les facteurs de risque nutritionnels directs et indirects ? Les apports excessifs de calcium peuvent entraîner l’hypercalciurie, retrouvée chez 35 à 65 % des patients lithiasiques (dans la moitié des cas elle est d’origine diététique). Il y a un problème aussi en cas d’apports calciques faibles car l’oxalate alimentaire n’est pas suffisamment fixé par le calcium dans l’intestin et il est donc absorbé en plus grande quantité, ce qui favorise une hyperoxalurie. L’objectif nutritionnel est donc de normaliser les apports de calcium entre 800 et 1 000 mg/jour, sans oublier le statut vitaminique D. L’oxalate est apporté par de nombreux aliments (cacao, oseille, épinards, persil etc.) mais il est aussi synthétisé dans l’organisme à partir des précurseurs tels que la vitamine C, les sucres et les aminoacides (cette synthèse serait augmentée en cas de carence en vitamine B6). L’absorption digestive de l’oxalate dépend du contenu alimentaire en calcium, en magnésium, en fibres et en lipides. À propos de la vitamine C, une étude épidémiologique a suggéré que les sujets en consommant plus de 1 g par jour ont un risque accru de lithiase. En tous cas, les apports excessifs d’acide ascorbique sous forme de comprimés sont déconseillés ; en revanche la restriction ne concerne pas les fruits qui apportent simultanément du citrate. On sait que le citrate joue un rôle essentiel dans le métabolisme énergétique et dans l’équilibre acidobasique, et qu’il a des propriétés inhibitrices de l’agrégation cristalline de l’oxalate de calcium. C’est dire que l’hypocitraturie peut avoir des effets lithogènes. Alors que les apports excessifs de protéines animales augmentent une charge acide et entraînent une hypocitraturie, les fruits riches en citrate (agrumes, fruits rouges) sont, par contre, considérés comme des nutriments utiles dans la prévention des lithiases calciques et uriques. Quant aux calculs d’acide urique, ils sont liés à l’hyperuricurie, surtout lorsque le pH des urines est acide et responsable d’une sursaturation de purines ou de phosphates. En présence d’un excès de sodium, l’acide urique peut également cristalliser sous forme d’urate de sodium. Par ailleurs le régime riche en sel majore la calciurie et réduit la citraturie, tandis que les légumes et fruits apportant le potassium diminuent le risque de lithiase rénale. Enfin, les sucres d’absorption rapide augmentent la calciurie par diminution de la réabsorption tubulaire du calcium sous l’effet de l’insuline. Ainsi la prévention du risque de lithiase repose sur des règles suivantes : veiller à avoir les apports hydriques suffisants tous en les répartissant correctement sur le nycthémère (le risque de cristallisation augmente avec la densité des urines laquelle est plus élevée au réveil), avec un objectif de diurèse de 2 et 2,5 litres par jour. De plus, il faut lutter contre l’excès de poids, éviter les boissons sucrés et limiter le chocolat, normaliser les apports de protéines animales (environ 1 g/kg/j) et de calcium (800-1 000 mg/j), augmenter la consommation de légumes et de fruits. LC >> DOSSIER La prévalence de la lithiase urinaire ne cesse d’augmenter dans les pays industrialisés. Elle est estimée entre 8 à 15 % de la population générale, et selon les données de l’étude SUVIMAX, 10 % des adultes de 45 à 60 ans ont eu au moins un épisode lithiasique. Environ 5 % des patients ont une forme multirécidivante de lithiase susceptible d’entraîner une altération de la fonction rénale. Journées de nutrition pratique Dietecom 2005 Professions Santé Infirmier Infirmière N° 63 • mai 2005