Source : challenges.fr, 30/08/2016 Pourquoi Carmat fait (encore) rêver la Bourse Avec un nouveau patient greffé, Carmat entame ses ultimes essais cliniques pour son coeur artificiel. Dernière étape avant la mise sur le marché en Europe de la célèbre prothèse du professeur Alain Carpentier? La Bourse veut y croire. Dernière ligne droite pour transformer un formidable rêve scientifique en réalité commerciale ? A la mi-journée, l’action Carmat grimpait de quelques 6%, après l’annonce hier soir par la société de la première implantation de son cœur artificiel dans le cadre des essais cliniques pouvant aboutir au feu vert à sa commercialisation. Comme à chaque nouvelle, bonne et surtout mauvaise, le cours de Bourse de cette start-up pas tout à fait comme les autres palpite : « Le cœur artificiel, c’est de la médecine… mais c’est aussi une histoire passionnelle », confiait à Challenges, en janvier 2015, son génial et fervent inventeur, le professeur Alain Carpentier A ce jour, le cœur Carmat est le seul appareil biventriculaire, bioprothétique – qui évite la formation de caillots de sang -, mimant totalement le cœur humain et susceptible, donc, d’être une alternative durable à la greffe. En cela, il suscite un énorme espoir pour les malades souffrant d’insuffisance cardiaque. Depuis son introduction en Bourse en juillet 2010, le titre est porté par l’engouement des petits porteurs – certains des patients du professeur Carpentier -, mais aussi souvent plombé par les mauvaises annonces ou les communications intempestives de l’entreprise, censée gérer l’impossible hiatus entre l’exigence court-termiste des investisseurs et le tempo toujours très long de la découverte scientifique. En tête, le décès des quatre patients implantés – des malades en phase terminale - lors de la première vague des essais cliniques, puis un reportage télévisé très critique - pointant notamment un marché surévalué pour la prothèse (100.000 malades en insuffisance cardiaque terminale en Europe et aux Etats-Unis, selon Carmat) - avaient largement contribué à miner le cours de Bourse. Cette fois, c’est la perspective d’une prochaine commercialisation qui enflamme les marchés. Alors que la première vague d’essais, entamée en 2013, sur quatre malades, tous décédés, concernait des personnes atteintes d’insuffisance cardiaque en phase terminale, cette seconde vague élargit l’échantillon à des patients, précise Carmat, « éligibles à la transplantation dont la probabilité d’obtenir un greffon est très faible ». Une subtile nuance qui assouplit de facto les critères… et surtout les taux de survie des patients. Carmat a obtenu mi-juillet l’autorisation de mener cette étude sur 20 à 25 patients suivis à 180 jours dans dix centres d’Europe. Si elle est concluante, l’entreprise pourrait alors obtenir le marquage CE de son cœur, étape préalable à sa mise sur le marché en Europe. A ce jour, selon Carmat, aucun des quatre décès n’a révélé une défaillance à proprement parler de sa prothèse. Dans une note publiée ce matin, le courtier Gilbert Dupont se voulait optimiste, qualifiant la nouvelle étude de « prometteuse ». « Nous sommes convaincus que l'essai pivot initié au second semestre 2016 confirmera la supériorité incontestée du cœur artificiel Carmat le plus physiologique du marché », écrit-il. Enthousiaste, la Bourse n’en reste pas moins prudente. Il y a cinq ans, Carmat promettait la commercialisation de son cœur artificiel pour… 2013. Depuis, le cours de Bourse a été divisé par cinq.