UE CHI363 Chimie industrielle

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Chapitre 3 : Cohésion d’un échantillon
de matière et liaisons intermoléculaires
A. Distributions de charges dans les atomes et molécules
•
Moments dipolaires permanents
•
Moments dipolaires instantanés
B. Définition de différents types de liaisons intermoléculaires
•
Forces de van der Waals : liaisons non spécifiques et non
saturables
•
Pont Hydrogène : liaison spécifique et saturable
C. Mise en évidence : manifestations expérimentales
•
Températures de changements d’états (fusion, ébullition)
•
Miscibilités de deux corps ou mise en solution d’un corps dans
un solvant
•
Réactivité chimique (influence du milieu réactionnel sur la 1
vitesse d’une réaction, sur la position d’un équilibre)
Distributions de charges et dipôles électriques
Un « dipôle électrique » est constitué de deux charges ponctuelles q et
q’ = -q situées à une distance d en deux points M et M’ ; la séparation
des charges est décrite par un vecteur m appelé « moment dipolaire
électrique » m = q.d.u, où d indique la distance, q indique la charge et u
est un vecteur unitaire de la direction M’M
Pour l’orientation du vecteur m , deux conventions existent :
• orientation du pole négatif vers le pole positif (M’ vers M : plutôt la
convention des physiciens)
• orientation du pole positif vers le pole négatif (M vers M’ : plutôt la
convention des chimistes)
Il est donc recommandé de toujours préciser les signes des charges aux
extrémités du dipôle
m
en M' , -q
d
q , en M
2
Liaisons polaires et moments dipolaires de liaison
Entre deux atomes liés d’électronégativités différentes, le nuage
électronique de liaison est réparti de façon non symétrique : il est attiré
plus fortement vers l’atome le plus électronégatif, créant une séparation
de charges
Une telle liaison est dite liaison polaire et peut être assimilée à un dipôle
électrique (une charge partielle positive du côté de l’atome le moins
électronégatif et une charge partielle négative du côté de l’atome le plus
électronégatif) ; elle est ainsi caractérisée par son moment dipolaire, de
norme m = q.d
• q et -q sont les charges partielles, localisées aux noyaux, traduisant
la dissymétrie du nuage électronique de liaison
• d est la distance internucléaire d’équilibre
• la direction du vecteur est l’axe nucléaire
Unité usuelle : le Debye, 1 D = 1/3.10-29 C.m ; le moment dipolaire d’un
dipôle constitué de deux charges -e et +e distantes de 10-10 m a pour
3
valeur 4,8 D.
Electronégativité et polarité des liaisons
•
•
•
•
•
Electronégativité d’une OA : lorsqu’une OA de valence d’un atome
A est plus stable qu’une OA de valence d’un atome B, elle est dite
plus électronégative
Electronégativité d’un atome considéré globalement : de façon
qualitative, elle caractérise l’aptitude à stabiliser les électrons ; il
existe plusieurs échelles pour la quantifier : cette année, les
valeurs utilisées sont celles de l’échelle de Pauling
Remarque : l’électronégativité d’un atome dépend de son
environnement dans un édifice
Identification de liaisons polaires : il s’agit de comparer les
électronégativités des atomes liés => double conclusion :
•
le caractère polaire d’une liaison
•
le sens de la dissymétrie de la répartition du nuage
électronique
Exemples de liaisons polaires : H-O ; H-N
4
Pourcentage d’ionicité d’une liaison
Le « pourcentage de caractère ionique » (ou pourcentage d’ionicité)
d’une liaison polaire est le rapport de la charge q portée par les pôles du
dipôle à la charge élémentaire e : c’est une description de la liaison
polaire par comparaison à une référence qui est la limite ionique
m
m expérimental
%ionicité =
m ionique
m expérimental x 100
F
e.d
-e
d
H
données expérimentales
=
+e
liaison 100% ionique: F -H+
Espèce
HF
HCl
HBr
HI
d / pm
92
127
141
161
m/D
1,83
1,08
0,82
0,44
E / kJ.mol-1
565
431
366
299
5
Liaisons polaires et édifices polaires
• Un vecteur « moment dipolaire » est attribué à une liaison polaire pour
caractériser la direction de l’axe de la liaison (direction du vecteur), le
sens de la dissymétrie (sens du vecteur) et l’ampleur de la dissymétrie
(norme du vecteur)
• Le « moment dipolaire » global d’un édifice moléculaire est identifié à la
somme vectorielle des moments dipolaires de liaison des liaisons
polaires : l’édifice est dit globalement polaire si cette somme est
différente du vecteur nul
• Ce « moment dipolaire » est dit « moment dipolaire permanent » (par
opposition aux moments dipolaires dits « induits », qui existent dans
chaque particule, même un atome tel que H, du fait des mouvements
incessants et des interactions avec particules voisines non liées)
• Exemples de molécules possédant un moment dipolaire permanent et
qui sont globalement polaires : HCl, H2O
• Certaines molécules possèdent des liaisons polaires mais, par suite de
leur symétrie, ne possèdent pas de moment dipolaire permanent
résultant : elles sont globalement non polaires ; exemples : CO2, CCl4
6
Distribution de charges dans les atomes
et les édifices moléculaires
Moment dipolaire instantané : commun à tout édifice chimique
Tout édifice chimique (atome ou molécule, même une molécule
symétrique), à cause des fluctuations des positions des électrons,
possède un moment dipolaire « instantané »
Même les édifices neutres et symétriques dont le moment dipolaire
est nul en moyenne dans le temps, possèdent un moment dipolaire
instantané
7
Polarisabilité et moment dipolaire induit
Un édifice même totalement symétrique peut acquérir un moment
dipolaire sous l’influence d’un champ électrique E : on dit qu’il est
polarisé, c’est-à-dire que la distribution des électrons est perturbée
et devient non symétrique.
Une molécule polaire provoque, dans une molécule voisine, un
déplacement de densité électronique qui se traduit par l’apparition
d’un moment dipolaire, dit « moment dipolaire induit » : a.E, où a
caractérise l’aptitude du nuage électronique à se déformer et est
appelé la « polarisabilité » de l’édifice.
Du fait de la présence d’électron(s), tout édifice chimique (atome
ou molécule) est polarisable.
8
Interaction entre dipôles permanents
Forces d’orientation ou « de Keesom »
Entre deux édifices possédant des moments dipolaires permanents p1 et
p2, la force d’attraction dépend des modules et de l’orientation relative
de ces dipôles , de la distance qui les sépare et de la température.
• Si l’orientation était complètement due au hasard, l’interaction
moyenne serait nulle.
• Le facteur de Boltzmann favorise les interactions attractives (qui
minimisent l’énergie).
• La formule suivante, formule de Keesom, donne l’énergie d’interaction
dipôle-dipôle tenant compte de l’effet d’agitation brownienne.
• L’interaction est toujours attractive et varie en 1/r6.
• Remarque : la plupart des solvants usuels possèdent un moment
dipolaire permanent (sauf les hydrocarbures, comme le n-hexane ou
le benzène, ou des composés symétriques, comme CS2 ou CCl4)
9
Interaction dipôle permanent - dipôle induit
Forces induites ou « de Debye »
Entre un édifice polaire possédant un moment dipolaire permanent
p2 et un édifice polarisable (pouvant lui-même être polaire) de
polarisabilité a1.
• La formule suivante, formule de Debye, donne l’énergie
d’interaction dipôle-dipôle induit moyennée sur toutes les
orientations du dipôle p2 .
• L’interaction est toujours attractive (le moment dipolaire
permanent et le moment dipolaire induit sont de même
orientation) et varie en 1/r6.
Wd-di =
- a1.p22
(40)2.r6
10
Interaction dipôle instantané – dipôle induit
Forces de dispersion ou « de London »
Le moment dipolaire instantané d’un édifice peut polariser les
édifices voisins. L’énergie d’interaction entre dipôle instantané et
dipôle induit, nommée « énergie de dispersion », est donnée par la
formule de London (a1 et a2 désignent les polarisabilités et I1 et I2
désignent les énergies d’ionisation des deux édifices en interaction).
• L’interaction est toujours attractive et varie en 1/r6.
• L’interaction est d’autant plus grande que les molécules sont plus
polarisables.
• Cette interaction est universelle : elle est présente dans toutes les
collections d’édifices chimiques, quelle que soit leur nature
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Energie globale d’interaction entre deux édifices
Interactions de van der Waals
On regroupe les interactions décrites par les formules de Keesom, Debye et
London sous le nom de forces de van der Waals ; Johannes Diderik van der
Waals (1837-1923, Hollande), lauréat du prix Nobel de physique en 1910, a
mis en évidence le rôle de ces interactions dans le comportement des gaz
réels, lorsqu’ils s’éloignent du modèle du gaz parfait
• Ce sont des forces non spécifiques et non saturables (comme les forces
d’attraction coulombienne entre deux ions de signes opposés)
• Les trois types d’interactions se manifestent à des distances relativement
grandes et sont attractives : elles se mettent sous la forme -C/r6 (r est la
distance entre les centres de deux édifices en interaction).
• L’interaction de dispersion (London) est présente pour tous les édifices,
même non polaires . Mises à part les molécules petites et fortement
polaires, ce terme est dominant et augmente avec le nombre d’électrons.
Remarque : les expressions des énergies ne sont pas exigibles dans les
épreuves d’évaluation.
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Contributions relatives (unités non SI) des trois termes Wd-d,
Wd-di et Wdisp pour quelques édifices (25°C) :
Edifice
m/D
a / A3
I / eV
Wd-d
Wd-di
Wdisp
Ar
0
1,63
15,8
0
0
50
N2
0
1,76
15,6
0
0
58
C6H6
0
9,89
9,2
0
0
1086
HCl
1,08
2,63
12,7
22
6
106
H2O
1,85
1,59
12,6
190
11
38
HCN
2,98
2,59
13,8
1277
46
111
m : moment dipolaire permanent ; a : polarisabilité ; I : énergie
d’ionisation (intervient dans l’interaction de dispersion)
Contributions mesurées pour la butan-2-one :
Wd-d = 8% ; Wd-di = 14% ; Wdisp = 78%
13
Potentiel de Lennard-Jones
Il existe une autre interaction omniprésente, entre nuages
électroniques, de type répulsif, qui se manifeste à courte distance :
• énergie d’interaction positive et en K/(rn), n grand par rapport à 6
(valeurs communes : 8 à 18)
• responsable du caractère relativement incompressible des liquides
et des solides
Finalement, on peut modéliser l’interaction entre deux édifices comme
la résultante de la superposition de deux types d’effets, l’un attractif à
longue distance (vdW) et l’autre répulsif à courte distance : une
expression de l’énergie d’interaction usuelle est le potentiel de
« Lennard-Jones » (6-12) :
 existence d’un minimum pour une distance intermoléculaire s
 bien adapté aux édifices sphériques non polaires
14
Potentiel de Lennard-Jones (6-12)
Edifice
Ar
Xe
CH4
s/A
3,50
4,10
3,78
15
Rayons de van der Waals
Le « rayon de van der Waals » d’un élément est la moitié de la plus
courte distance à laquelle peuvent s’approcher les noyaux de deux
atomes de cet élément appartenant à des molécules différentes.
Exemple, pour l’argon : req = 4 A => rvdW = req/2 = 2 A : rvdW décrit
l’encombrement réel d’un atome d’argon.
Il représente le volume du nuage électronique. On calcule ainsi à partir
de distances intermoléculaires mesurées dans des cristaux
moléculaires :
Elément
H
He
N
O
F
Ne
P
S
Cl
rvdW / A
1,2
0,9
1,5
1,4
1,35
1,3
1,9
1,85
1,8
16
La liaison hydrogène ou « par pont hydrogène »
Plusieurs conditions d’existence : une liaison polaire A-H (A assez
électronégatif ; Hd+) et un atome B porteur d’une paire non liante : un site
donneur d’hydrogène et un site donneur de doublet
Efficacité maximale s’il y a possibilité d’arrangement A-H---B linéaire ou
proche de la linéarité (sauf dans les cas de liaisons intramoléculaires).
Remarque : une liaison C-H n’est pas assez polaire pour donner lieu à des
liaisons hydrogène (CH3 ne peut être « donneur de H »).
Représentation sur un schéma :
• une liaison covalente est représentée par un tiret,
• une liaison hydrogène est représentée par un trait plus long en pointillés.
17
Force des liaisons intermoléculaires
• Une liaison hydrogène est en général moins forte qu’une liaison
covalente et plus forte qu’une interaction de type vdW
• Cela se manifeste sur l’énergie de liaison et la longueur de liaison
• Donneurs de doublet les plus importants : atomes O dans alcools,
éthers, composés carbonylés ; atomes N dans amines tertiaires,
hétérocycles azotés
• Donneurs d’hydrogène les plus fréquents : groupements hydroxy
(OH), amino (NH2), carboxyle (CO2H), amide (CO-NH-).
(longueurs moyennes de liaison covalente OH : 0,96 ; NH : 1,01 A)
Interaction
H2O-H2O
NH3-NH3
H2O-NH3
HF-HF
Energie / kJ.mol-1
20 à 30
25
30
30
Interaction
OH O
OH N
NH O
FH F
Longueur / A
2,7-2,8
2,8-2,9
2,8-2,9
2,6-2,7
18
Formation d’agrégats
Les interactions par liaisons hydrogène peuvent conduire à la
formation d’agrégats, on interprète ainsi l’association des acides
carboxyliques en « dimères ».
Liaisons hydrogène intramoléculaires
Des interactions par liaisons hydrogène peuvent exister entre deux
fragments d’un même édifice moléculaire : on les dit alors
« intramoléculaires ».
Exemples entre le OH du groupe CO2H et le O lié au noyau
benzénique dans l’acide acétylsalicylique (aspirine)
19
Manifestations expérimentales des interactions
de van der Waals et des liaisons hydrogène
20
Cohésion d’une collection de particules
Interprétation de la cohésion de collections d’atomes ou de
molécules par l’existence d’interactions de vdW :
• Cohésion de l’hélium liquide : la force des interactions de van
der Waals entre atomes He est assez grande pour que le corps
simple liquide puisse exister
• Cohésion de l’iode cristallisé (cristal moléculaire) : la force des
interactions de van der Waals entre molécules symétriques I2
est assez grande pour que le corps simple soit solide à
température ambiante sous pression atmosphérique
21
Influence du nombre d’électrons sur les
températures d’ébullition
Les interactions de vdW augmentent avec le nombre d’électrons =>
Comparaison au sein de la famille des gaz rares (monoatomiques)
ou des halogènes (diatomiques)
Gaz rare / Z
Te / °C sous Patm
He / Z=2 Ne / Z=10 Ar / Z=18 Kr / Z=36 Xe / Z=54
-269
-246
-186
-152
-108
Edifice
H2
N2
O2
F2
Cl2
Br2
Te / °C sous Patm
-253
-196
-183
-188
-35
58
22
Influence de la constitution (structure des
chaînes) sur les températures d’ébullition
Les chaînes linéaires permettent de plus grandes interactions que
les chaînes ramifiées
 Comparaison des températures d’ébullition de deux isomères
de constitution : butane et isobutane (ou 2-méthylpropane)
Edifice
butane
isobutane
Te / °C sous Patm
-0,5
-10
23
Influence de l’existence de liaisons Hydrogène
Les liaisons H augmentent la cohésion du liquide (effet dominant des
liaisons H sur les interactions de vdW) : l’effet est très net sur une
série de liquides homologues pour une famille d’éléments : le premier
terme de la série (H3N, H2O, HF) est celui dont la température
d’ébullition est la plus forte.
Les liaisons Hydrogène ont un rôle essentiel dans la structuration de
l’eau, protéines et de l’ADN
H3N
H3P
H3As
H3Sb
H2O
H2S
H2Se
H2Te
HF
HCl
HBr
HI
-33
-87,5
-55
-18
100
-61
-42
-2
19,5
-85
-66
-35
Le méthane CH4 (C pas assez
électronégatif) ne peut pas
s’organiser par liaisons H
Edifice
CH4
SiH4
NH3
HF
Te / °C
-163
-112
-33
20
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Forces intermoléculaires et solubilité / miscibilité
La solubilité d’une espèce dans un solvant et la miscibilité de deux
espèces peuvent être interprétées par l’existence de forces
intermoléculaires :
• Interactions de vdW (diiode I2 dans CCl4)
• liaisons H : l’éthanol et l’acide éthanoïque sont miscibles avec l’eau
malgré le fragment hydrocarboné à caractère hydrophobe ; dans la
molécule d’acide éthanoïque, l’effet attracteur de C=O rend la liaison
O-H fortement polaire (=> CH3CO2H = acide faible dans l’eau)
Edifice
CH3CH2Cl
CH3COCH3
CH3CO2H
Etat physique du corps pur
Te = 12,3°C
Te = 56°C
Te = 118°C
donneur de
donneur de
donneur de doublets
doublet
doublet
et donneur de H
Dans des liaisons H avec l’eau
Solubilité dans l’eau
6 g par L à 20°C miscible à 20°C
miscible à 20°C
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Solvants apolaires, solvants polaires,
solvants polaires protiques
Pour les réactions réalisées en solution, la nature du solvant et les
concentrations des réactifs sont parmi les éléments importants qui
gèrent la façon dont les molécules réagissent, la vitesse des réactions
et les proportions de produits dans le mélange final
• Exemples de solvants apolaires (m = 0) :
n-hexane C6H14 ; cyclohexane C6H12 ; benzène C6H6 ; sulfure de
carbone CS2 ; tétrachlorure de carbone CCl4
• Exemples de solvants polaires (m ≠ 0) :
éther de diéthyle CH3-CH2-O-CH2-CH3 (m = 1,2 D) ; dichlorométhane
CH2Cl2 (m = 1,5 D) ; propanone CH3-CO-CH3 (m = 2,7 D) ;
diméthylsulfoxyde (CH3)2S=O (m = 3,9 D) ; hexaméthylphosphoramide
[(CH3)2N]P=O (m = 5,5 D)
• Exemples de solvants polaires protiques (m ≠ 0 et donneurs de H) :
éthanol CH3-CH2-OH (m = 1,7 D) ; eau H2O (m = 1,8 D)
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