
Médecine Nucléaire - Imagerie fonctionnelle et métabolique - 2002 - vol.26 - n°1 47
P.J. Lamy
l’efficacité d’une thérapeutique origi-
nale, le trastuzumab. Le rôle exact de
HER2 se doit d’être encore précisé
pour améliorer la prise en charge du
cancer du sein. Un vaste champ de
travail s’ouvre aussi aux biologistes
pour standardiser le dosage de ce
marqueur. Un dosage qui se devra
d’être simple, rapide, reproductible et
fournissant une information précise
en relation avec les traitements asso-
ciés, une condition sine qua non de
son utilisation optimisée comme fac-
teur pronostic et prédictif de la ré-
ponse au traitement. HER2 et anticorps
anti HER2 se présentent ainsi comme
un nouveau modèle en oncologie,
comme le furent en leur temps les
récepteurs hormonaux et le tamoxifè-
ne : un marqueur spécifique et une
thérapeutique ciblée sur un type pré-
cis de tumeur. L’accès aux mécanis-
mes moléculaires de l’action de HER2
devrait permettre de comprendre son
rôle dans la tumorigenèse et d’affiner
la réponse thérapeutique à mettre en
place. Deux décennies après sa dé-
couverte, HER2 est en train de modi-
fier le concept même de chimiothé-
rapie et confirme l’importance des
informations qu’apportent les mar-
queurs de sensibilité aux traitements.
HER2 :
un facteur de croissance cellulaire
ðHER2 est le récepteur d’un facteur
de croissance de la famille des récep-
teurs erbb tyrosine kinase[1]. Cette
famille comporte 4 types de récep-
teurs : le récepteur de l’epidermal
growth factor (erbb1 ou EGFr), erbb2
(HER2),erbb3 (HER3) et erbb4 (HER4).
Ces récepteurs transmembranaires
possèdent tous une activité tyrosine
kinase dans leur partie intracytoplas-
mique. Le domaine extracellulaire
forme la partie récepteur de liaison
aux ligands, l’EGF et les neurégulines.
Leur action intervient dans la crois-
sance cellulaire normale aux diffé-
rents stades du développement de la
glande[2,3]. Le gène qui code pour la
protéine HER2 est un proto-oncogène
appelé c-erbb2 ou HER2/neu. Il est
situé sur le chromosome 17q21. Il
code pour la protéine HER2 de 185
kDa. Il existe 2 copies du gène par
cellule mais son expression est va-
riable d’un tissu à l’autre.
Aucun ligand n’a encore été identi-
fié pour HER2. HER2 existe sous forme
d’hétérodimères avec un autre mem-
bre de la famille des récepteurs erbb
tyrosine kinase[4]. Cette dimérisation
nécessite l’action d’un ligand spéci-
fique. Ainsi l’action de l’EGF conduira
à la formation d’un hétérodimère
HER1/HER2. La liaison des neuréguli-
nes spécifiques de HER3 et 4 formera
des dimères HER3/HER2 ou HER4/
HER2. Ces dimères présentent une
grande affinité au ligand dont le mo-
nomère autre que HER2 est spéci-
fique. Cette liaison entraîne une émis-
sion très forte de signaux dans la cel-
lule. HER2 se comporte comme un
amplificateur des signaux de crois-
sance cellulaire des récepteurs erbb.
On comprend ainsi mieux son rôle
dans la cancérogenèse par un méca-
nisme d’amplification de la crois-
sance cellulaire [5].
CANCERS ET SUREXPRESSION
DE HER2
ðDes études in vitro et in vivo ont
démontré le rôle de HER2 dans la pro-
lifération cellulaire, la transformation
maligne de lignées en culture et la
mobilité cellulaire intervenant dans
le potentiel métastatique [6]. L’ampli-
fication et l’hyperexpression du gène
sont en cause dans le processus de
transformation cancéreuse. On parle
d’amplification avec un nombre de
copie du gène supérieur à 5 ou 10.
Cette amplification entraîne une aug-
mentation de la production d’ARNm
et une synthèse accrue de HER2 pro-
téine. A la surface des cellules, le nom-
bre de HER2 est alors multiplié par
100 et la forme homodimérique HER2-
HER2 prédomine. Celle-ci induit une
dérégulation du cycle cellulaire pou-
vant amener à la cancérisation de la
cellule [7].
L’amplification et la surexpression de
HER2 ont été retrouvées dans de nom-
breux cancers chez l’homme. Les lo-
calisations retrouvées sont le sein, les
ovaires, l’endomètre, le col de l’uté-
rus, les poumons, le colon, les tissus
mous, l’œsophage, la vessie, le rein,
le pancréas, les glandes salivaires, et
la thyroïde. Il a été montré une am-
plification ou une surexpression dans
les lésions précancéreuses au niveau
du sein (carcinomes in situ peu dif-
férenciés) ou du colon. L’amplifica-
tion génique est toujours moins fré-
quente que l’hyperexpression et se
situe entre 15 et 30% en fonction des
cancers. Amplification et surexpres-
sion ne sont pas synonymes, bien
que dans le cancer du sein les 2 phé-
nomènes soient le plus souvent
corrélés. 25 à 30 % des cancers du
sein présentent une amplification et/
ou surexpression de HER2.
Une élévation isolée de la protéine
HER2 a des significations encore non
élucidées et résulterait d’une dérégu-
lation transcriptionnelle ou post trans-
criptionnelle. Il est à noter que quelle
que soit la cause de l’hyper-expres-
sion, la protéine des cellules cancé-
reuses est analogue à la protéine des
cellules normales, aucune mutation
de HER2 n’ayant été encore décrite.
MÉTHODES DE DÉTECTION
ET DE DOSAGE
ðIl existe un grand nombre de mé-
thodes de détection et de dosage de
HER2. L’immunohistochimie sur
coupe de tissu frais ou congelé ou
inclus en paraffine et la technique
ELISA dans le sérum ou le cytosol des
tumeurs, permettent de détecter une
surexpression de la protéine. Les tech-
niques d’hybridation par fluores-
cence in situ (FISH) et le Southern blot
ciblent l’amplification du gène.
D’autres techniques comme la RT
PCR permettent d’accéder à l’ARNm.
Une positivité à l’un ou l’autre de ces
tests ne recouvre pas forcément la
même réalité clinique. Il y a un be-
soin de standardisation de la méthode
de détermination du statut HER2.
L’immunohistochimie couple la fixa-
tion d’anticorps spécifiques à une
coloration pour distinguer les cellu-
les carcinomateuses avec hyperex-
pression de HER2 des cellules sans
hyperexpression (ces cellules pré-
sentent un taux faible de HER2 dé-