L’estuaire Estuaire du Léguer à Lannion. Site du Yaudet Qu’est ce qu’un estuaire ? Un estuaire est la portion de l’embouchure d’un fleuve où l’effet de la mer ou de l’océan dans lequel il se jette est perceptible. Chaque estuaire est un système physique et écologique dynamique et unique, incluant des zones humides, des méandres sans cesse remodelés au gré des courants, des charges de matières en suspension apportées par le fleuve, et selon la nature du contexte géologique et du bassin- versant, le climat, les vents et les interventions humaines historiques et contemporaines. L’estuaire est aussi le lieu où la force du fleuve est ralentie. Certains polluants s’y sédimentent préférentiellement et peuvent s’y concentrer. Les milieux intertidaux sont des écotones (zone de transition entre 2 écosystèmes) particuliers, dont slikke et schorre sont les deux principales composantes en zone continentale. La slikke est l’étage le plus bas : exposée à la mer, zone vaseuse immergée à chaque marée, elle abrite une vie intense. Le schorre n’est submergé qu’aux grandes marées et lors des tempêtes, mais il est exposé aux embruns. Il abrite des graminées constituant les prés -salés et une végétation d’autant plus variée que l’eau douce est présente. Schéma représentant les limites slikke et schorre 1 Quelles sont les limites biogéographiques et administratives de l’estuaire ? Selon les critères retenus (géomorphologiques, biologiques, paysagers ou de navigabilité…) et leur mise à jour, les limites des estuaires diffèrent. Ceci pose des problèmes juridiques complexes, par exemple pour la réglementation de la pêche ou la définition des zones concernées par la loi littoral ou Natura 2000. Longitudinalement, l’estuaire peut s’étendre jusqu’à la zone d’influence des marées (maxima ou marée moyenne). Transversalement, l’estuaire en tant qu’entité écologique et paysagère intègre les milieux adjacents, dont généralement des zones humides, et, selon les contextes, une part plus ou moins importante des lits majeurs et lits mineurs historiques et géologiques, voire l’ensemble du bassin -versant quand il est petit. Le plus souvent, les principales limites administratives sont des limites transversales, avec par exemple en France : • limite transversale de la mer (LTM, cf. décret n°2004-309 du 29 mars 2004 en droit français) • limite de salure des eaux (LSE), souvent utilisée pour réglementer la pêche et la chasse maritimes et en France (loi littoral de 1986) pour la délimitation des communes estuariennes et le champ d’intervention du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres. • limite de l’inscription maritime : elle correspond (en France) au premier obstacle physique à la navigation maritime sur le fleuve. À son amont, la navigation est fluviale. Elle est maritime en aval. • limite du front de salinité : définie par la zone où la salinité moyenne en surface est supérieure ou égale à 1‰. • limites des masses d’eau : ces limites sont définies par la Directive cadre sur l’eau (DCE), qui définit une typologie des masses d’eaux « continentales », « côtières », « de transition », « fortement modifiées » et « artificielles ». Les estuaires en Bretagne : Notre région compte 28 estuaires dont voici la carte : (extraite du site http://www.bretagne.ecologie.gouv.fr) 2 La vie dans l’estuaire Les poissons : D’après un inventaire réalisé en 2007 par l’agence de l’eau Loire -Bretagne sur six estuaires bretons, il a été dénombré plus de 50 espèces de poissons vivant en estuaire ou étant juste de passage dans cette zone. Voici les principales espèces. Le crénilabre, c’est un proche cousin de la vieille. Grande migratrice l’anguille parcourt plus de 10.000 km dans sa vie. Redoutable prédateur, le bar est apprécié des pêcheurs. La plie, drôle de poisson plat qui aime se cacher sous le sable. Gobie tacheté. La sole est également appelée serpillière en raison de sa forme. Le saumon passe une première fois par l’estuaire au stade de tacon. Après avoir vécu quelques années en mer il repasse par l’estuaire pour retrouver la source qui l’a vu naître pour se reproduire. 3 Vous pouvez observer des mulets sous les coques des bateaux dans les ports Le flet est un proche cousin de la plie. L’épinoche, petit poisson qui possède une série d’épines sur son dos. Pour vivre en estuaire ces espèces doivent tolérer des différences de salinité (euryhalines) et des différences de température (eurythermes) assez importantes. Invertébrés marins : Sur le sédiment estuarien, une multitude d’invertébrés vivent en s’accommodant des conditions si particulières de cette zone. Voici les principaux que vous pouvez rencontrer lors de vos balades. Les mollusques : La patelle, qui supporte très bien l’exondation (fait d’être émergé à marée basse), est assez fréquente dans la zone estuarienne La coque vit enfouie sous quelques centimètres de sable. Les crustacés. Le crabe vert le plus commun en estuaire. Il vit caché sous les roches. La crevette aime se cacher dans les algues et notamment dans les sargasses. Les vers. Au moindre signe de danger les vers spirographes rentrent leur panache à l’intérieur d’un tube de protection. 4 Moules fixées sur un rocher. 1 moule peut filtrer jusqu’à 3 litres d’eau par heure. Les oiseaux Paul Dubois Lors de vos prochaines balades le long des estuaires prenez le temps d’observer aussi les différentes espèces d’oiseaux présentes. En voici quelques- unes assez facilement identifiables (pour plus d’informations sur ces oiseaux, reportez-vous aux autres fiches pédagogiques présentes sur ce site). Jeune goéland. Qui est un proche cousin de la mouette. Paul Dubois La mouette rieuse. Son nom vient du son de son cri. Paul Dubois Héron cendré. Peut atteindre une hauteur de 1m pour une envergure de 1,9m. Cormoran. Il peut faire des apnées de 2 minutes et aller jusqu’à 40 mètres de profondeur. Paul Dubois Une aigrette garzette. Tadorne de Belon. D’un point de vue de la filiation, il se situe entre l’oie et le canard. Pies huitrières. Elles font partie de la grande famille des limicoles. 5 Autres : L’estuaire peut également être le territoire de la loutre. Elle peut faire sa catiche de la source à l’estuaire. Ce mammifère est difficile à observer mais pourtant bien présent en Bretagne. Pour savoir où et comment déceler sa présence reportez- vous à la fiche pédagogique de cette espèce. La loutre. Flore de l’estuaire : Les algues Les algues tapissent le bord (à marée basse) et le fond de l’estuaire. On peut regrouper ces végétaux en trois grandes familles. 6 Les algues vertes (Chlorophycées) Les algues brunes (Fucophycées) L’ulve est la plus connue. C’est elle qui est à l’origine des tristes « Marées vertes ». Palmaria palmata. Cette algue comestible est commercialisée sous le nom de Dulse. Les algues rouges (Rhodophycées) Fucus serratus. Algue qui supporte très bien l’exondation. Contrairement à une idée reçue, les algues, sont des végétaux mais ne sont pas considérées comme des plantes. En effet elles n’ont pas de racines pour puiser les éléments minéraux dans le sédiment. Les algues ont juste une base de fixation et elles transforment leur matière organique par photosynthèse (ce qui en fait des végétaux). Sur les berges certaines espèces de plantes sont assez caractéristiques. L’obione. Elle est présente au niveau de la schorre. Salicorne. Dont l’étymologie signifie corne salée. Ce condiment est également appelé cornichon de mer. La spartine maritime. Cette graminée vivace affectionne les zones calmes de l’estuaire. On la trouve sur la haute slikke. 7 Pollutions des estuaires : De nombreux estuaires sont traversés par des eaux contaminées par divers polluants ou abritent des ports. Comme le courant y ralentit et que l’effet des marées s’y fait sentir, certains polluants plus lourds ou s’adsorbant sur les sédiments peuvent s’y déposer et s’y accumuler puis être concentrés par les organismes vivants. D’autres s’adsorberont sur les particules en suspension du « bouchon vaseux » En France et dans quelques pays, il existe une tradition de chasse aux oiseaux d’eau dans les estuaires, qui est responsable depuis au moins deux siècles d’un apport considérable de plomb sous forme de billes de plomb de chasse (30 à 40 grammes par cartouche). Ce plomb est notamment responsable du saturnisme aviaire. Outre les eutrophisants d’origine agricole ou urbaine (nitrates, phosphates) et une eau rendue plus turbide par l’agriculture, de nouveaux polluants sont apparus au milieu du XXème siècle ; pesticides, perturbateurs endocriniens chimiques, dioxines, métaux lourds essentiellement apportés par les fleuves, et tout particulièrement lors des inondations. Données du site www.bretagne-environnement.org Pour aller plus loin - «Explorons l’estuaire» de René Mettler aux éditions Gallimard Jeunesse. - «Inventaire des poissons dans 6 estuaires Bretons», agence de l’eau Loire Bretagne. - «Inventaire de l’ichtyofaune dans sept estuaires de la côte sud Bretagne», Muséum national d’histoire naturelle. - «Marais et estuaires du littoral français», Fernand Verger, éditions Belin 8