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Bien sûr qu‟on pense au patient, au malade. A celui qui si souvent est OBJET de nos soins et dont on
tente de plus en plus de mettre en avant l‟idée de SUJET.
Mais il en va de même pour nous.. Pour que nous restions des SUJETS, et des sujets responsables il
vous faut pouvoir penser, pouvoir choisir de garder ou non , secret. En la matière il n‟existe pas encore de
prêt à penser lyophilisé, de Conduite A Tenir ou de Protocoles… et je pense important après avoir
largement milité pour le droit d‟accès aux informations le concernant par le patient, de pouvoir revendiquer
que les professionnels ont besoin de communiquer, élaborer et penser dans un espace qui leur soit propre.
Pour aujourd‟hui il nous faut retenir que la Logique du secret obéit à deux prérogatives
incontournables8: celle de l‟enfouissement (jusqu‟à la forclusion dans la psychose) et celle de la
propagation (secret de polichinelle). Aussi bien me paraît-il toujours utile de trouver le moyen terme entre
le TAIRE et le DIRE.
Au centre du secret professionnel il y a un SUJET. Cette personne sujet de droit mais aussi sujet
psychique, c‟est avant tout elle qui est responsable et porteuse du Secret. P Nicoll après la révolution notait
déjà que le secret obligeait plus celui qui le recevait que celui qui le déposait
Conséquence quand le sujet se dépossède trop facilement de ses “secrets”, ou quand nous le
dépossédons d‟eux, il y a une prise de risque majeur sur l‟équilibre du sujet. Autrement dit quelque soit la
qualité du secret, quelque soit l‟information concernant le sujet, il est normal qu‟il puisse se sentir
désubjectivé, trahi, dépossédé, d‟une information transmise à son insu par autrui. Cela représente, dans
son principe plus que dans la réalité de la chose, une authentique menace. Se posent alors de multiples
questions reprises autour de la question de l‟intime , du privé et du public. Le « professionnel à vocation
thérapeutique », circule, non seulement dans ces espaces du/des patients mais dans les siens propres.
La pratique du secret est une condition de subjectivation. La subjectivation participe de la
responsabilité. Conséquence pratique nous avons tout intérêt à faire du patient celui qui détient à qui et
comment il souhaite révéler des informations concernant sa santé.
Acte 3 Qualités des informations à caractère secret : modèle d‟une société
La suspicion à l‟égard du secret a trouvé un second fondement dans un discours révolutionnaire qui a
hautement dénoncé la collusion administration secrète et abus de pouvoir, en particulier dans la gestion
hospitalière. Ainsi La Rochefoucault, président du Comité écrit-il dans un des rapports du Comité de
Mendicité : « L’habitude, dont rien ne dérange l’influence quand elle doit transmettre les abus
[…] est généralement la loi souveraine de tous les hôpitaux »9. Et Cros–Mayrevieille de préciser :
“L’autorité pénétrait difficilement à travers les ténébreux et mystérieux détails
d’administrations qui se dirigeaient et s’inspectaient elles-mêmes. Leur comptabilité ne
pouvait être qu’illusoire, n’étant pas publique; concentrée dans un bureau, elle devenait un
espèce de secret, dès que quelqu’un voulait la surveillait.» 10. Cette vision dénonce l‟absence de
transparence des services administratifs, dans les hôpitaux, comme ailleurs finalement à cette époque.
La question de l‟intérêt est donc centrale. Puisqu‟aux intérêts d‟une profession et à ceux d‟un
gouvernement politique, vont être opposés, tant que faire se peut, ceux du malade. (de la personne
vulnérable). L‟introduction dans le Code de déontologie médicale de l‟obligation au secret médical a été
vivement débattue au niveau politique : Faure relevait en 1911 « Cette disposition est nouvelle dans
nos lois ; il serait à désirer que la délicatesse la rendît inutile ».11
Mises en pratique d‟une valeur éthique et déontologique
Le droit fondamental au respect de la vie privée12, vient apporter sa touche à ce processus. Dans les
dossiers « médicaux » versus dossier du patient , quantité d‟informations, somatiques, psychiques,
8 8 GONI-CHRETIEN : Le système du secret, Observations sur la pratique généralisée du secret; Paris EPE ,Le Groupe familial,
n°19, 1996
9 La Rochefoucault-Liancourt, 7ème rapport ou Résumé sommaire du travail qu’il a fait à l’Assemblée, Paris, Imp. Nat., 1791,
Bibliothèque Nationale, 8 LE29 783Rapport sur le Comité de Mendicité,
10 G. Cros Mayrevieille. Traité de l’Assistance hospitalière de Narbonne. vol. p. 151.
11 cité par Villey, Histoire du secret médical, Paris, Seghers, 1986.
12 et plus généralement l ‘ensemble des conventions concernant les droit fondamentaux, droit d’information , droit de circulation ,
etc. qui se regroupent généralement sous l’appellation des « libertés fondamentales ».