Abstract 
Ce  travail  est  consacré  aux  incidences,  en  particulier  sur  la  mémoire,  d’un  traumatisme  très 
particulier : les viols par inceste, qui se déroulent sur de nombreuses années. Nous pensons que ce 
cas de figure est fréquent, malgré le défaut d’études officielles, mais un travail militant fourni. 
Nous  avons  maintenant  une  trentaine  d’années  de  recul  sur  les  premières  études  des 
conséquences des viols par inceste et l’apport des énormes progrès de l’imagerie du cerveau. 
La mémoire qui permettrait une insertion réussie dans le « monde » est atteinte et que de ce fait, 
la personne agressée est doublement victime. Une personne ayant subi des viols pendant plus de 
dix ans, n’a pas besoin de se remémorer. L’effraction au plus profond du psychisme humain a 
eu lieu, l’image ne s’efface pas. La personne sait que ça a existé, et la remémoration ne servirait 
à rien. Elle s’est entrainée à oublier afin de survivre. Mais qu’est-ce qui est effacé ? Le temps 
est aboli, rien n’est oublié, mais pour pouvoir vivre il a fallu mettre en place des mécanismes 
psychiques couteux : dissociation, hypervigilance qui ne permettent pas à l’attention normale de 
se fixer et  qui sont donc  des atteintes de la mémoire ; celle qui permet d’enregistrer et de se 
souvenir  pour  pouvoir  ensuite  redonner.  Le  traumatisme  reste  actuel  (il  n’est  pas  sous  le 
contrôle de la volonté) et de ce fait demeure pathogène (cela sera développé dans la partie sur la 
description de l’agression comme trauma de type III).  
Tous les inceste-é-s – une dénomination adelphique – qui ont vécu les viols longtemps ont une 
force de lutte et de conceptualisation intéressante parce qu’ils ne sont pas embarrassé-e-s par les 
oublis et la vérité à établir. Ils luttent contre l’imposition du non dit par la société et l’entourage 
qui force au déni. Comme ils ont l’air d’aller bien, puisqu’ils sont dissociés, la société reste dans 
le déni de soin et de reconnaissance à leur égard. Je pense que cette pression est de l’emprise 
qui constitue un élément du trauma et qui lui-même conduit à la dissociation pour permettre la 
survie psychique. Emprise et dissociation attaquent la mémoire. Un moyen de survie pour ne pas 
se rappeler qu’on n’a pas le droit de se souvenir. 
Les viols par inceste répétés, et sur une longue durée, altèrent le fonctionnement de la mémoire. 
Je me propose, après avoir défini l’inceste, de montrer à l’aide de travaux récents, l’incidence 
d’un traumatisme de type III sur la mémoire de la victime (que je vais aussi définir). J’utiliserai 
au cours de ce travail une biographie de Rita Hayworth par Barbara Leaming, en 2008 – violée 
et  manipulée  par  son  père avec  une  comorbidité  alcoolique  qui  finit  avec  la  maladie 
d'Alzheimer – et le témoignage d’une Auteure obligatoirement anonyme –1993 – violée par son 
père. Elles  sont  représentatives  pour  le  vécu  de  viols  durant  plus  de  dix  ans  dans  un  milieu 
social aisé.