Troubles psychotiques du sujet âgé Ch. Arbus Messages clés… ➢ Délires et hallucinations peuvent accompagner de nombreuses situations pathologiques ➢ Prévalence ➢ Les élevée sujets âgés ont une propension importante à délirer ➢ Un trouble psychotique survenant tardivement est souvent le fait d’une maladie neurodégénerative ➢ Mais il faut aussi savoir rechercher un trouble de l’humeur. Messages clés… ➢ De nombreux facteurs de risques liés au vieillissement : ➢ Atrophies corticales ± focalisées (frontales, temporales) ➢ Modifications neurochimiques (neuromédiateurs, récepteurs) ➢ Maladies somatiques ➢ Isolement ➢ Déficits sensoriels ➢ Troubles cognitifs ➢ Polymédicamentation - Modifications pharmacocinétiques et pharmacodynamiques - confusion iatrogènes Les situations cliniques ➢ Confusion ➢ Troubles métaboliques ➢ Affection médicale chronique ➢ Trouble psychotique induit par ➢ Trouble de l’humeur ➢ Démence (quelque soit un médicament l’origine) ➢ Schizophrénie ➢ Trouble délirant chronique ➢ Abus de substance ➢ Maladie neurologique Les classifications nosographiques ▪ « À la française… » : États délirants fonctionnels aigus et chroniques ✓ Psychoses délirantes aiguës (BDA) ✓ Groupe des schizophrénies ✓ Délires chroniques (un mécanisme délirant prépondérant, sans évolution déficitaire) : o Délires paranoïaques (systématisés, cohérents) : ❑ ❑ ❑ o o Délires passionnels (jalousie, érotomanie, de revendication) – en secteur Délire d’interprétation (Sérieux et Capgras) – en réseau Délire de relation des sensitifs (Kretschmer) - en réseau Psychose hallucinatoire chronique (les 5 sens) Paraphrénie (imagination délirante, rare, thématique fantastique) Les classifications nosographiques ➢ DSM 5 : Schizophrénie et autres troubles psychotiques ➢ Schizophrénie o o Trouble schizophréniforme Trouble schizoaffectif ➢ Trouble psychotique bref ➢ Trouble psychotique dû à une affection médicale ou à une substance ➢ Trouble délirant o o o o o Érotomaniaque Mégalomaniaque De jalousie De persécution Somatique Troubles psychotiques vieillis ➢ Schizophrénies (début vers 20 ➢ Incidence après 65 ans de 0,1 à 0,5 % ➢ Évolution hétérogène : o o o ans) : 20% s’améliorent 60% évolution sans modification 20% s’aggravent ➢ Troubles cognitifs et détérioration fixés en 5 à 10 ans après le début des troubles ➢ Déficits cognitifs : apprentissage, mémoire de travail, attention, flexibilité mentale, fonctions exécutives sans différence d’évolution avec l’âge comparé à des sujets sains ➢ Les symptômes résiduels négatifs deviennent majoritaires et les symptômes positifs s’estompent ➢ Pondération du statut de malade mental par celui de personne âgée, moins d’hospitalisations Troubles psychotiques vieillis ➢ Délires chroniques (début vers 35 ans = paranoïa) : ➢ Peu de modification des troubles ➢ Aucune atteinte cognitive ➢ Respect d’une large partie de la vie intellectuelle et fonctionnement normal en dehors du champ délirant ➢ Fonctionnement social altéré Troubles psychotiques plus tardifs ➢ PHC, paraphrénie = schizophrénie tardive des anglosaxons (après 55 ans) ➢ Épisode psychotique aigu réactionnel ➢ Syndrome ➢ Troubles d’Ekbom, de Charles Bonnet, Folie à deux de l’humeur (syndrome de Cotard) ➢ Pathologies neurodégénératives (SCPD) PHC ➢ Éliminer les ➢ Début dans diagnostics différentiels +++ la deuxième partie de la vie, plutôt des femmes ➢ Hallucinations touchant tous les sens ➢ Automatisme mental ➢ Thèmes centrés sur la persécution, logique et pragmatique ➢ Adhésion totale, perplexe au début mais « supporte » ➢ Troubles du comportement : plainte, repli, fuite,… ➢ Aucune évolution déficitaire +++ ➢ Pas de signe de dissociation +++ Syndrome de Charles Bonnet ➢ Ophtalmopathes dans le grand âge ➢ Hallucinations visuelles complexes, persistantes ou répétées ➢ Colorées, riches en détails ➢ Personnages ou animaux de petite taille ➢ Favorisé par baisse de la lumière ou du niveau de conscience ➢ Marqueur précoce de démence ? Le Syndrome de Charles Bonnet doit son nom à un naturaliste genevois qui en donna la description en 1760 Syndrome d’Ekbom ➢ Délire d’infestation ➢ Syndrome ➢ Croyance ➢ Le non spécifique inébranlable plus souvent isolé ➢ Parfois associé à un trouble de l’humeur de type dépressif Karl Axel Ekbom (1907-1977) neurologue suédois qui a décrit ce tableau clinique en 1938 Chez le sujet âgé Épidémiologie (Ostling, Int J Geriatr Psychiatry, 2007) sujets nés en 1901-1902, suivis de l’âge de 70 à 90 ans. Exclusion des déments ➢ Incidence d’un premier épisode psychotique = 4,8% et 19,8% chez les sujets ayant atteint 85 ans. ➢ 392 Les symptômes d’allure psychotique dans la DTA La question de l’évaluation clinique des SCPD ➢ Près de 100% des patients en présenteront. On les décrit habituellement avec un regard adultomorphe, en référence à la sémiologie psychiatrique, ce qui ne correspond sans doute pas à la réalité… ➢ Ils ne surviennent que rarement isolés. Une approche syndromique ou en cluster a été proposée mais reste imparfaite (artéfacts statistiques) . ➢ Les manifestations affectives ou émotionnelles soustendent de nombreux tableaux cliniques, il faut parvenir à les comprendre. Troubles d’allure psychotique ➢ Pronostic défavorable +++ ➢ Marqueur de la gravité de la o o maladie Déclin cognitif accéléré Nombreuses études neurologiques (Murray et al., 2013) ➢ Différencier le délire des propos incohérents dus à l’altération cognitive ➢ Idées d’allure délirante : ➢ Convictions fausses et inébranlables mais fluctuantes ➢ Thématique de persécution fréquente (vol, jalousie) ➢ Hallucinations : ➢ Accompagnées d’anxiété ➢ Fluctuantes parfois fugaces ➢ Visuelles surtout Troubles d’allure psychotique ➢ Troubles de l’identification ➢ Dans les stades évolués de la maladie ➢ Perte de la reconnaissance (lieux, personnes) ➢ Troubles de la reconnaissance de sa propre image ➢ Fausses reconnaissances ➢ ➢ Délire de “Capgras” : non reconnaissance d’un proche alors que la ressemblance est soulignée, identification d’un sosie Syndrome de « Fregoli » : le sujet est persuadé qu'il est persécuté par une autre personne qu'il s'imagine déguisée et changeant régulièrement d'apparence. La question de l’évaluation clinique des SCPD ➢Une approche intégratrice est nécessaire: o L’histoire du sujet, sa personnalité antérieure o Lésions cérébrales, topographiques ou fonctionnelles o Fonctions cognitives de base comme supérieures (discernement, jugement, conscience de soi et théorie de l’esprit, cognition sociale) ➢Favoriser une approche et une analyse qualitative o L’exemple de la Grounded Theory ou Théorie Ancrée (BG Glaser et AA Strauss, 1967) o Méthode d’enracinement de l’analyse dans les données de terrain. Retour constant à la comparaison entre les produits de l’analyse et les données empiriques o Nouvelle grille de lecture qui permet une analyse plus respectueuse de la dimension cognitive dans la compréhension de la clinique psychiatrique présentée par les malades neurodégénératifs ➢The meanings of delusions in dementia: A preliminary study. Jiska Cohen-Mansfield et coll., Psychiatry Research (2011) The meanings of delusions in dementia ➢Inclusion de 74 patients résidant en EHPAD, âgés de 65 ans et plus avec un diagnostic de démence. ➢Les participants présentant des idées délirantes (46%) avaient un score ADL plus bas, plus de troubles visuels et auditifs. ➢Sur la base de l'évaluation à l'aide de la BEHAVE-AD, six catégories ou thèmes de délires ont été retenus : • 1. Sa propre maison n'est pas reconnue comme étant chez soi (7%) • 2. Le vol (22%) • 3. Être en danger (9%) • 4. Sentiment d’abandon (5%) • 5. Les troubles de l'identification (8%) • 6. Autres idées non-paranoïdes (5%). The meanings of delusions in dementia ➢Plusieurs situations ou mécanismes communs ont été relevés dans chaque catégorie : o une proximité avec la réalité, o la désorientation et les troubles de l’interprétation, o la réminiscence d'événements passés (traumatiques), o la solitude et l'insécurité, o l’ennui, o l’existence d’un facteur déclenchant identifiable (trigger). Ces résultats suggèrent que, pour la plupart des patients, ces phénomènes d’allure délirant peuvent ne pas représenter des symptômes psychotiques. En effet, ils sont parfois proches de la réalité et le caractère inébranlable de la conviction inconstant… ➢« ➢… Ainsi, en utilisant le terme de délire, on réduit le comportement de la personne démente à une symptomatologie psychiatrique grave (psychose) ce qui empêche souvent d’en comprendre la véritable signification ». Prévalence des SCPD (NPI ≥ 4) Cohorte Néerlandaise : 1322 patients en MR (Zuidema, IntJGPsy 2007) Cohorte REAL.FR : 686 patients ambulatoires