8S56 Rev Mal Respir 2003 ; 20 : 8S55-8S59
J.-P. Laaban
épidémiologiques publiées au cours des dernières années ont
formellement démontré qu’il existe une relation directe entre
SAS et HTA permanente.
Dans un modèle expérimental d’apnées obstructives chez
le chien, la réalisation d’obstructions trachéales répétées pen-
dant huit heures par jour entraîne l’apparition d’une HTA per-
manente après un mois [2]. Cette HTA régresse en une à trois
semaines après la suppression des apnées.
Plusieurs études épidémiologiques, de type transversal et
incluant un très grand nombre de patients, ont démontré, en
utilisant une analyse par régression logistique multiple, que le
SAS est un facteur de risque d’HTA permanente, indépen-
damment de l’indice de masse corporelle, du tour de cou, du
rapport entre le tour de taille et le tour de hanches, du taba-
gisme, de l’alcoolisme, de l’âge, du sexe, de la race, du statut
ménopausique et de la prise d’un traitement hormonal substi-
tutif pour la ménopause [3-5].
Il existe une relation « dose-effet », puisque le risque
d’HTA augmente avec la sévérité du SAS. Dans l’étude de
Lavie et coll. [3], la prévalence de l’HTA augmente avec l’index
d’apnées-hypopnées (IAH) : 23 % (IAH < 10/h), 36 %
(IAH : 10-30), 46 % (IAH : 30-50) et 54 % (IAH > 50). Le
lien entre SAS et HTA est démontré chez les hommes et les
femmes, en présence d’une obésité même sévère et en l’ab-
sence d’obésité. Cependant, l’intensité de cette relation entre
SAS et HTA est relativement modérée : le risque relatif d’HTA
ajusté aux facteurs de confusion est de 1,4 (IAH > 30/h vs
<1,5) dans l’étude de Nieto et coll. [4] et de 3,1 (IAH = 30/h
vs 0) dans l’étude de Young et coll. [5]. La relation entre SAS
et HTA est plus forte chez les sujets de moins de 50 à 60 ans
et chez les sujets de poids normal. Une association entre SAS
et HTA est également démontrée dans des SAS très modérés
avec un IAH entre 0,1 et 5/heure. Une étude longitudinale a
montré que l’existence d’un SAS augmente le risque de déve-
lopper une HTA dans les 4 ans chez des patient initialement
normotendus.
Les mécanismes conduisant au développement d’une
HTA permanente dans le SAS sont mal connus : rôle proba-
blement essentiel de l’hyperactivité du système sympathique,
altérations de la fonction de l’endothélium vasculaire (dimi-
nution de la vasodilatation dépendante du monoxyde d’azote,
augmentation de la synthèse d’endothéline).
Les effets de la ventilation nasale en pression positive
continue (PPC) sur la pression artérielle sont variables : aucun
effet, diminution isolée de la PA nocturne ou diminution de
la PA nocturne et diurne. De nombreux facteurs peuvent inter-
venir dans l’évaluation des effets de la PPC sur la pression arté-
rielle : observance de la ventilation nasale, sévérité du SAS,
prise ou non de médicaments antihypertenseurs, ancienneté
du SAS et de l’HTA, variation concomitante du poids corpo-
rel, prévalence des HTA « essentielles » non liées au SAS. La
suppression des apnées nocturnes par la PPC entraîne souvent
une diminution de la PA nocturne et peut restaurer un profil
nycthéméral normal de la PA, avec réapparition d’une dimi-
nution de la PA pendant la nuit, transformant ainsi des « non-
dippers » en « dippers ».
Les effets de la PPC sur la PA diurne sont moins bien
connus. Une étude randomisée (PPC vs placebo oral) publiée par
Faccenda et coll. [6] a montré que la ventilation nasale en PPC
entraîne, après un mois d’utilisation, une diminution très
modeste de la PA diastolique des 24 heures (– 1,5 mmHg) qui
n’est significative qu’entre 2 heures et 10 heures du matin ; mais
le problème majeur de cette étude, qui a exclu les patients rece-
vant des médicaments antihypertenseurs, est qu’aucun patient n’a
d’HTA permanente. Dans une étude randomisée publiée récem-
ment, Pepperell et coll. [7] ont comparé les modifications de PA
observées après un mois de PPC efficace (8 à 12 cm H2O) ou de
PPC placebo (< 1 cm H2O) chez 118 hommes atteints de SAS
modéré ou sévère. La PPC efficace entraîne une diminution signi-
ficative de la PA moyenne des 24 heures (– 2,5 mmHg), avec un
effet plus marqué (– 5,1 mmHg) en cas de SAS sévère défini par
un index de désaturation supérieure à 33/heure. La diminution
de la PA est observée à l’état de sommeil et d’éveil, et porte sur la
PA systolique et diastolique. Cependant, la plupart des patients
inclus dans cette étude n’ont pas d’HTA. Chez 11 patients ayant
un SAS et une HTA résistante au traitement médicamenteux,
Logan et coll. [8] ont observé, après deux mois d’utilisation de la
PPC, une diminution significative de la PA systolique diurne
(– 9,3 mmHg), de la PA systolique nocturne (– 14,4 mmHg) et
de la PA diastolique nocturne (– 7,8 mmHg).
Chez un patient ayant un SAS nécessitant la PPC et une
HTA modérée et non traitée, on peut débuter la PPC sans
associer de médicaments antihypertenseurs. Si la suppression
des apnées nocturnes n’entraîne pas, après plusieurs semaines,
une normalisation de la PA, il faut recourir à un traitement
antihypertenseur. En cas d’HTA sévère et non traitée, il est plus
prudent d’associer d’emblée des médicaments antihyperten-
seurs à la PPC. Les bêta-bloquants ont une efficacité supérieure
à celle des autres antihypertenseurs dans l’HTA des patients
apnéiques, ce qui est en accord avec le rôle essentiel de l’hyper-
activité sympathique.
SAS et arythmies cardiaques
Une augmentation de la variabilité nocturne de la fré-
quence cardiaque est souvent observée dans le SAS. La courbe
de la fréquence cardiaque nocturne a un aspect cyclique tout à
fait caractéristique avec une alternance de bradycardies et de
tachycardies, la fréquence cardiaque passant souvent de moins
de 50 à plus de 100/minute. La suppression des apnées par la
PPC entraîne généralement une diminution de la variabilité
nocturne de la fréquence cardiaque.
Les troubles de la conduction cardiaque sont les aryth-
mies les plus fréquentes au cours du SAS. Becker et coll. [9]
ont montré, grâce au Holter-ECG, que la prévalence des
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