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Les modes de gestion des résidences de services en LMNP
Par Antoine BIDET, Avocat
Du choix du mode de gestion d’une résidence de services dépendront souvent
le devenir et la rentabilité effective de l’investissement immobilier réalisé en
LMNP. Plusieurs modes de gestion peuvent être envisagés, offrant des solutions
qu’il faudra dans tous les cas adapter aux différentes situations.
L’achat de lots de résidences de services bénéficiant d’une rentabilité élevée et
d’avantages fiscaux comme une réduction d’impôt sur le revenu (article 261 D du Code
général des impôts) ou la possibilité de récupérer la TVA sur le prix d’achat et les
travaux (articles 199 decies E et 199 sexvicies du Code général des impôts) présente
des risques importants, comme le montre la multiplication des situations parfois
contentieuses dans lesquelles des propriétaires se trouvent confrontés aux exigences
abusives de l’exploitant, à la menace de son départ ou encore, à sa défaillance.
Le choix du mode de gestion de la résidence est donc une question dont dépendra en
grande partie la sécurité de l’investissement. Plusieurs modes de gestion sont
envisageables.
La gestion classique par un exploitant locataire
Il s’agit du mode de gestion des résidences de services de très loin le plus répandu.
L’exploitant qui prend la qualité de locataire en vertu d’un bail commercial
généralement d’une durée de neuf ans, gère la résidence et verse des loyers aux
propriétaires de lots.
Ce mode de gestion est communément prévu dès la conception du programme de
réalisation de la résidence et la signature d’un bail commercial ou d’une promesse de
bail est soumise à l’acquéreur des lots lors de la vente de l’immeuble.
Cette solution présente pour le propriétaire, apparemment du moins, l’avantage de la
simplicité. Il percevra des loyers qui lui permettront de rembourser l’emprunt contracté
pour l’acquisition du bien, sans avoir à se soucier de son exploitation.
Dans ce dispositif, les loyers peuvent également faire l’objet d’une garantie souscrite
par l’une des parties auprès d’une compagnie d’assurance.
Si tentant qu’il soit, ce mode de gestion est en réalité assez peu adapté à la
problématique particulière des résidences de services, en raison du cadre légal très
protecteur du locataire, résultant du statut des baux commerciaux.
Les mécanismes légaux prévus aux articles L 145-1 et suivants du Code de commerce
traitant du bail commercial, garantissent au locataire la disposition des lieux dans
lesquels il exerce son activité.
Mais surtout, cette protection légale de ses intérêts, résultant pour l’exploitant locataire
de l’application du régime des baux commerciaux, intervient dans un contexte de
déséquilibre entre le poids économique de l’exploitant (souvent un acteur de taille
nationale) et celui des propriétaires, simples particuliers pour la plupart, ayant investi
dans l’acquisition d’un ou de plusieurs lots et dont le nombre accroit mécaniquement
les difficultés pour se concerter et s’adresser d’une même voix à l’exploitant.
En échange de la tranquillité de n’avoir pas à s’occuper de l’exploitation, le propriétaire
perd la maîtrise économique de son bien au profit de l’exploitant qui bénéficie du cadre
favorable des baux commerciaux.
Dans ce contexte, les dérives résultant de conditions juridiques ou économiques
défavorables imposées par l’exploitant au propriétaire sont nombreuses (renégociation
du loyer à la baisse, mutualisation des risques d’exploitation des résidences par
l’exploitant, fonds de concours dissimulés au propriétaire…).
A cela, il faut ajouter qu’en cas de succès de l’activité de la résidence, si elle constate
un taux d’occupation supérieur à celui prévu, les propriétaires ne pourront prétendre à
aucune rémunération complémentaire sous forme de loyer.
Enfin, si à la fin du bail le propriétaire entend reprendre la possession de son bien, il
devra s’acquitter auprès de l’exploitant d’une l’indemnité d’éviction prévue à l’article L
145-14 du Code de commerce qui est d’ordre public, l’indemnité d’éviction fixée par le
juge pouvant représenter une ou deux années de recettes par lot.
La société d’autogestion
Apparue pour la première fois en 2010, la société d’autogestion est un mode de gestion
alternatif au mode de gestion classique, reposant sur la constitution par les
copropriétaires d’une société de gestion à laquelle ils louent leurs lots en vertu d’un
bail commercial.
Quelles que précisions sur ce mode de gestion qui résulte de la seule pratique, la
société d’autogestion ne faisant l’objet d’aucune définition, ni d’aucun statut juridique
particulier :
Les propriétaires louant leurs lots à la société de gestion, la condition d’un engagement
locatif de l’article 199 sexvicies du Code général des impôts prévoyant une réduction
d’impôt sur le revenu au titre des investissements locatifs en LMNP est remplie.
La société de gestion est le plus souvent constituée sous la forme d’une SAS dont les
propriétaires sont actionnaires.
Deux modalités de gestion sont envisageables :

Gestion interne : La société de gestion gère elle-même la résidence de service,
ce qui est assez rare en pratique,

Gestion externe : La société de gestion délègue dans le cadre d’un mandat
l’exploitation de la résidence à un opérateur extérieur, personne physique ou
morale.
Cette seconde solution est de loin la plus observée en pratique.
Dans ce second cas, le schéma adopté a pour résultat de substituer au contrat de bail
entre le propriétaire et l’exploitant, un contrat de mandat qui est beaucoup plus
favorable au propriétaire.
Les propriétaires, au travers de la société de gestion, choisiront eux-mêmes le
mandataire, auquel ils confieront l’exploitation de la résidence et fixeront les conditions
de son mandat ainsi que le montant de sa rémunération qui sera le plus souvent
proportionnelle au chiffre d’affaires.
Ils détermineront la durée du mandat et les conditions de son renouvellement ou de
sa résiliation.
Ils pourront mettre fin à tout moment à la délégation de l’exploitation par la
dénonciation du mandat, sous réserve cependant de devoir verser au mandataire, sauf
faute grave de sa part, une indemnité égale, à défaut de conditions plus favorables
prévues par les parties, au montant des commissions acquises au cours des six mois
précédant la résiliation (article L 146-4 du Code de commerce).
Aucune indemnité d’éviction, aucun droit au renouvellement ne sont dus au
mandataire, contrairement à ce qui résulterait de la mise en œuvre d’un bail
commercial.
Plus de souplesse contractuelle, une transparence de la gestion et une maîtrise des
coûts assurées rendent ce mode de gestion particulièrement attractif.
Il faut toutefois signaler un inconvénient pouvant éventuellement se révéler lourd de
conséquences : en application de l’article L 146-1 du Code de commerce, le
mandataire-gérant gère le fonds de commerce au nom et pour le compte du
propriétaire, lequel supporte les risques liés à l’exploitation et est engagé par les actes
accomplis par le gérant dans le cadre de son mandat.
En toutes circonstances, il faudra donc pour les propriétaires faire preuve de
circonspection et de prudence avant de s’engager avec un mandataire-gérant.
Mais là n’est pas le seul obstacle à la mise en œuvre d’une « autogestion » du bien.
La difficulté la plus importante réside dans le fait que les propriétaires ne sont souvent
ni prêts ni disposés à s’occuper de la gestion de la résidence, fut-elle déléguée à un
mandataire.
Ce mode de gestion, quelles qu’en soient ses modalités, nécessite des compétences,
du temps et des moyens.
Il faudra nécessairement recourir à la création d’une société – une SAS le plus souvent
– au capital de laquelle souscriront les propriétaires à proportion du nombre de leurs
lots (dans le cas d’une SAS, le capital social peut selon la loi, n’être que de un Euro).
Il leur appartiendra de déterminer son mode de direction, son fonctionnement, de la
doter du fonds de roulement nécessaire, de désigner ses dirigeants, de participer aux
assemblées générales, ce qui suppose de leur part un engagement substantiel.
Initialement, la société d’autogestion a été imaginée pour répondre à des situations
dans lesquelles les propriétaires, confrontés au départ ou à la défaillance de
l’exploitant, décidaient de prendre en mains la gestion de leur résidence.
La société de gestion comme solution de sauvetage après le départ de l’exploitant
n’est cependant pas toujours aisée à mettre en œuvre.
Outre le fait que certains propriétaires pourront ne pas être enclins à relever le défi, il
sera souvent difficile de succéder dans l’urgence à l’exploitant si celui-ci ne leur a pas
communiqué ou n’a simplement pas tenu, les informations qui leur seront nécessaires.
Par contre, intégré par le promoteur dès la conception du programme, avant même la
mise en service de la résidence, ce mode de gestion peut alors offrir un cadre
contractuel équilibré assurant au propriétaire la maîtrise économique de son bien.
La location-gérance
La location-gérance est un contrat par lequel le fonds de commerce est concédé à un
locataire-gérant qui l’exploite à ses risques et périls, le propriétaire étant dégagé de
toute responsabilité de gestion.
Cette solution comporte des avantages certains (revenus de location maîtrisés, taxes
foncières et coût des travaux pouvant être mis à la charge du locataire, contrat prenant
fin à son terme…) et un inconvénient majeur : en application de l’article L144-3 du
Code de commerce, le propriétaire du fonds doit l’avoir exploité pendant au moins
deux ans avant de pouvoir le mettre en location-gérance.
Ceci explique que ce mode de gestion soit rarement mis en œuvre et réservé à des
situations particulières dans lesquelles le fonds a déjà été exploité par le propriétaire
pendant au moins deux ans.
Le gérant salarié
Il est admis que la gérance d’un fonds de commerce soit confiée à un gérant salarié
et il est donc théoriquement possible d’appliquer ce mode de gestion aux résidences
de services.
Dans le cas de la gérance salariée, le propriétaire du fonds conserve la qualité de
commerçant et supporte les risques de l’exploitation.
Ce mode de gestion est en pratique rarement utilisé en raison de son coût et surtout,
de l’inadéquation entre la règlementation du temps de travail applicable au gérant
salarié et les contraintes de présence imposées par la gestion à temps plein d’une
résidence de services.
En conclusion, la gestion classique par un exploitant titulaire d’un bail commercial,
mode de gestion des résidences avec services le plus utilisé, est porteur de nombreux
risques en raison de la perte de la maîtrise économique du propriétaire sur son bien.
La gestion par une société réunissant les propriétaires et ses différents avatars
(gestion directe, gestion déléguée dans le cadre d’un mandat) est un mode alternatif
présentant des avantages indéniables, mais qui n’est pas adapté à toutes les
situations. Sa mise en œuvre nécessitera dans tous les cas réflexion et il sera prudent
de prendre préalablement conseil auprès d’un spécialiste.
Le 19 Juin 2015
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