Introduction à la 4ème journée clinique et scientifique vaudoise au sujet du handicap mental « Kirikou et la méchante sorcière » J. Baudat, 16 novembre 2011 Mesdames, Messieurs, chers collègues, chers parents, chers amis, Au nom du comité d’organisation, je vous souhaite la bienvenue à l’EESP pour cette 4ème journée clinique et scientifique au sujet du handicap mental. Je m’appelle Jacques Baudat et je suis le nouveau médecin responsable de la Section de psychiatrie du développement mental dans laquelle est intégrée le DCPHM que vous connaissez déjà. Merci d’être venus si nombreux à cette journée où vous seront présentés les liens entre la douleur (la douleur physique s’entend) et les troubles du comportement. Vaste programme en 4 parties puisqu’il s’agira de parler : 1. de la sensibilisation au phénomène de la douleur et à son importance dans la compréhension des troubles du comportement, 2. de l’étude des outils de mesure et d’évaluation de la douleur, 3. de sa prise en charge en partenariat et 4. de la recherche des moyens de prévention. Mais avant d’aller plus loin sur ce sujet, je voudrais vous raconter une petite histoire africaine, que vous connaissez peut-être, celle du petit Kirikou et de la méchante sorcière. Kirikou est un minuscule garçon qui parle dans le ventre de sa mère, décide d’en sortir par ses propres moyens et vient au monde dans un petit village africain sur lequel une sorcière, la méchante Karaba, a jeté un sort. A peine sorti du ventre de sa mère, Kirikou veut délivrer le village de l’emprise maléfique de Karaba et il part à cette fin découvrir le secret de la méchanceté de la sorcière. Le seul homme cependant capable de savoir pourquoi Karaba est si méchante est un vieux sage qui vit au loin dans la montagne interdite. Au terme de multiples aventures, Kirikou finit par rencontrer ce vieux sage qui lui apprend que Karaba doit sa méchanceté et ses pouvoirs maléfiques à une épine que des hommes lui ont enfoncée dans le dos et qui la fait atrocement souffrir. Kirikou va alors tromper les défenseurs de la sorcière et parvenir au moyen d’une ruse à enlever l'épine du dos de Karaba, ce qui va libérer cette dernière de la douleur et du maléfice. Redevenue normale, en guise de remerciements et pour clore cette histoire, Karaba accepte d’épouser Kirikou qui, entretemps, a grandi et est devenu adulte. Derrière la métaphore de ce joli conte africain, on retrouve de manière intéressante beaucoup d’ingrédients présents dans la thématique abordée aujourd’hui : Qui ne verrait en effet : Que l’épine plantée dans le dos de Karaba (et donc inaccessible pour elle-même) symbolise une source de douleur dont le sujet est victime ou qu’il est impuissant à maîtriser ? Que la méchanceté de la sorcière représente le trouble du comportement dans son aspect le plus manifeste, agressif, mais aussi incompris et dérangeant ? Que les défenseurs de la sorcière symbolisent tous les mécanismes biologiques, psychologiques ou sociaux, plus ou moins inconscients, qu’il faut surmonter pour rechercher les sources de douleur chez une personne handicapée mentale, parfois privée de toute possibilité d’expression verbale ? Que le vieux sage symbolise l’intuition profonde et les qualités morales nécessaires dans tout travail avec une personne privée de ses facultés mentales ? Et finalement que le minuscule et rusé Kirikou, toujours plein de questions, correspond à la nécessaire curiosité clinique et scientifique, à la modestie qu’il faut posséder quand on veut soigner ou prendre en charge une personne handicapée, mais aussi au courage et à l’intelligence qu’il faut parfois mettre en oeuvre pour renverser les routines et les pratiques désuètes ? Le message que j’essaie donc de faire passer aujourd’hui par ce conte africain est qu’il faut toujours penser à rechercher activement une origine somatique, physique, aux troubles du comportement, même si bien entendu il faut toujours penser également aux autres causes possibles. Cela semble aller de soi, mais l’expérience montre que ce n’est pas le cas, loin de là. On peut donc s’interroger sur les mécanismes (de défense ?, inconscients ?) qui oeuvrent pour faire oublier cette attitude apparemment de simple bon sens. Mais je laisse là ce questionnement qui nous mènerait trop loin et avant de passer la parole à la modératrice qui va vous présenter les conférenciers suivants, je vous souhaite encore une fois une bonne et fructueuse journée et je termine cette introduction par ces paroles de la chanson de Kirikou : Kirikou est petit, mais c’est mon ami Kirikou n’est pas grand, mais il est vaillant