jouissance. Consommer des biens matériels, de l’information, des contacts, des connaissances,
jusqu’à l’indigestion, jusqu’à la négation de soi-même comme individu. Individu en effet
réduit à son utilité sociale de consommateur boulimique, travaillant plus pour gagner plus, et
dépenser plus.
Le sens de la vie c’est alors le sens du marché, celui de la frustration.
Rappelez-vous en février 2009 Jacques Séguela s’exprimant sur France 2 « Comment peut-on
reprocher à un président d'avoir une Rolex. Enfin... tout le monde a une Rolex. Si à cinquante ans, on
n'a pas une Rolex, on a quand même raté sa vie !"
Quel talent ! Quel talent d’avoir ce sens de la répartie et de l’analyse. Pas étonnant que Pierre
Desproges ait pu, bien des années plus tôt, s’interroger à propos de ce talentueux
communiquant … "Jacques Séguéla est-il un con ? De deux choses l'une : ou bien Jacques
Séguéla est un con, et ça m'étonnerait quand même un peu ; ou bien Jacques Séguéla n'est
pas un con, et ça m'étonnerait quand même beaucoup !"
Il y a l’amour aussi. Mais on se heurte là à un manque de précision de la langue, qui affecte au
verbe le pouvoir d’exprimer tout à la fois la passion, l’affection, l’amitié, la tendresse, et la
sympathie, mais aussi d’avoir du goût pour quelque chose, de trouver agréable voire de
préférer.
S’en remettre ainsi au sentiment, livré autant qu’attendu en retour, expose l’individu à un
risque permanent d’échec, de rupture, de séparation. Ainsi par exemple, l’hypothèse,
courante, d’une mère ou d’un père plaçant l’amour de ses enfants comme donnant du sens à sa
vie. C’est risqué. Les enfants ne doivent jamais être les créatures de leurs géniteurs et n’ont
pas à porter le poids des ambitions et rancœurs des générations ainées.
Une dernière voie serait celle du développement personnel, celle de la réflexion intime et de
son partage avec l’autre, au sein d’un couple, de la famille, de l’entreprise, du groupe…
Les bouddhistes reconnaissent en cette démarche un moyen de se préparer au pire, à la crise,
qui, du coup, ne surprend pas. On accepte mieux les choses dont on a pris conscience en
amont et qu’on est capable de s’expliquer.
Chercher du sens à l’existence passe alors par la philosophie, en travaillant sur la conscience
des choses, voire par la psychanalyse, en travaillant aussi sur l’inconscient. Encore une fois,
cette démarche personnelle d’apprentissage, d’enrichissement, de réflexion doit permettre de
trouver, sinon des réponses, en tout cas les éléments constitutifs d’une sagesse personnelle,
source d’apaisement
Le lecteur sceptique, rationaliste et matérialiste, laissant peu de place au sentiment, gardant la
foi pour plus tard et réservant les approches introspectives aux intellectuels urbains
dispendieux de leur temps et de leur argent, trouvera-t-il dans les lignes de cette chronique,
atypique un motif de satisfaction ?
Même si tel n’est pas le cas, votre lecture, menée jusqu’à ce point, prouve que vous pouvez
probablement vous passer de GPS.