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PHARMACEUTIQUES - SEPTEMBRE 2009
Pour développer de nouveaux
médicaments, en évaluer de
façon optimale les bénéfi -
ces et les risques, les mé-
decins sont indispensables à l’in-
dustrie pharmaceutique. Dans
une maison-mère, le rôle du
médecin de recherche clinique
est de concevoir un plan de déve-
loppement, qui tient compte des
diff érents aspects d’une pathologie
chez des patients sélectionnés. L’ob-
jectif étant de générer, le plus rapide-
ment possible, la quantité suffi sante
d’informations, qui permettent de
défi nir les doses, les indications et les
conditions d’utilisation du produit.
Or, pour le développement clinique,
seul le médecin possède à la fois des
compétences médicales et méthodo-
logiques, explique le Dr. Jean-Marie
Goehrs, ex-directeur médical des la-
boratoires MSD-Chibret. Le recru-
tement des médecins de recherche
clinique est toutefois restreint en
France, car réservé aux maisons mè-
res ou aux plates-formes européennes
et la plupart d’entre elles se situent
en dehors de l’Hexagone.
Médecin pivot
Les compétences médicales sont éga-
lement nécessaires pour l’enregistre-
ment du médicament, le dialogue
avec la Commission de la transpa-
rence ou pour la xation du prix et
du remboursement (indication, po-
pulation cible, statut…). Mais aussi
pour la communication médicale et
la pharmacovigilance, sans oublier
l’indispensable dialogue avec les as-
sociations de patients, poursuit-il.
Pour les fonctions marketing pur des
produits, les médecins en revanche
ne sont pas forcément nécessaires.
D’ailleurs, la majorité des postes
dans ce domaine sont occupés par
des non decins, notamment par
des pharmaciens auxquels des
médecins apportent leur
expertise scientifique.
Finalement, le méde-
cin est le pivot cen-
tral pour l’accès des
médicaments aux
patients. Jean-Mi-
chel Joubert, prési-
dent de l’AMIPS et
directeur des a aires
gouvernementales pour
UCB, confi rme et précise
que de nombreux domaines de com-
pétence sont ouverts aux médecins
dans lindustrie pharmaceutique
« au-de des métiers historiques
du veloppement clinique et de
la pharmacologie clinique : do-
maine médico-économique, com-
munication auprès des confrères,
des autorités de santé, de la société
civile et des patients, exploitation
des données de santé pour aider le
décideur public, réfl exion stratégique
de l’entreprise et positionnement
éthique. » De son côté, Jean-Marie
Goehrs estime « qu’un médecin qui
travaille dans l’industrie pharmaceu-
tique devrait avoir une expérience
préalable de l’exercice pratique de
la decine et conserver si possible
une activité de praticien au cours de
sa carrière. La pratique permet en
eff et au médecin de l’industrie de
rester crédible dans sa spécialité et
de ne pas être coupé de la réalité du
terrain ».
Médecin, une valeur sûre
Les médecins sont devenus une den-
rée rare en raison de la baisse de la
démographie dicale, mais
aussi parce que l’indus-
trie pharmaceutique n’a
pas su leur expliquer
les possibilités de
carrière qu’elle leur
propose, qui per-
mettent dexercer
diff érentes facettes
d’un tier de santé.
Pour l’industrie phar-
maceutique, le médecin
possède des qualités irrem-
plaçables du fait de sa formation.
Profi ls
Médecin d’abord !
Ils exercent des rôles clés dans l’industrie du médicament par
des expertises liées à leur formation initiale. Quelle que soit leur
fonction dans l’entreprise, ils sont avant tout médecins.
l’industrie n’a
pas su expliquer
aux médecins
les possibilités
de carrière
DR
« LA PRATIQUE PERMET AU MÉDECIN
DE L’INDUSTRIE DE RESTER CRÉDIBLE
DANS SA SPÉCIALITÉ ET DE NE PAS
ÊTRE COUPÉ DE LA RÉALITÉ DU
TERRAIN », SOULIGNE JEAN-MARIE
GOEHRS, EX-DIRECTEUR MÉDICAL DES
LABORATOIRES MSD-CHIBRET.
Spécial Métiers
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SEPTEMBRE 2009 - PHARMACEUTIQUES
« Il sait ce qu’est un malade et ce
qu’est un médicament, il comprend
presque intuitivement ce qu’un nou-
veau médicament en développe-
ment pourrait apporter, reprend-il.
Par ailleurs, il connaît ses pairs”,
leur façon de raisonner et d’agir. Il
est ainsi le mieux placé pour inte-
ragir avec eux sur le plan scientifi -
que, médical et de la communica-
tion. » L’ensemble de ces capacités
permette au médecin de façonner sa
carrière, « s’il se rend compte de la va-
leur qu’il représente pour l’entreprise
et de comment il veut au mieux la
mobiliser », explique Robert Dahan,
pdg d’AstraZeneca France. Le méde-
cin peut choisir une voie scientifi que
et médicale, et dans ce cas très sou-
vent internationale, ou choisir d’être
l’interlocuteur médical des autres
services de l’entreprise, commercial,
marketing, communication, régle-
mentaire « pour répondre à la fois
au besoin de véri scientifi que et à
celui de la promotion des produits ».
Par confort, les decins préfèrent
souvent demeurer dans une activité
purement médicale. Lorsqu’ils choi-
sissent une autre voie, ils peuvent
avoir tendance à oublier quils sont
avant tout médecin. Or, pour Robert
Dahan, « la totalide la richesse du
médecin pour l’entreprise réside
dans son expertise première et il
devrait toujours l’avoir en te ».
Du fait de l’évolution des por-
tefeuilles produits et de l’envi-
ronnement, le rôle des médecins
va très probablement s’accroître.
L’industrie pharmaceutique aura
de plus en plus besoin de l’expertise
médicale pour comprendre les pro-
duits et en parler à leurs pairs. Fina-
lement, souligne Robert Dahan avec
force, pour qu’un médecin ussisse
dans l’industrie pharmaceutique, « il
faut être ouvert. Mais il n’y a aucun
besoin de se compromettre, tout en
sachant traduire la vérité médicale
pour le meilleur bénéfi ce de l’entre-
prise à travers la promotion des pro-
duits. »
Emmanuel Cuzin
DR
« L’INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE AURA
DE PLUS EN PLUS BESOIN DE L’EXPERTISE
MÉDICALE », ESTIME ROBERT DAHAN,
PDG D’ASTRAZENECA FRANCE.
CROs : des opportunités pour les médecins
Les CROs, sociétés prestataires de servi-
ces pour l’industrie pharmaceutique, ont
naturellement besoin de médecins. Mais
est-il nécessaire d’être médecin pour en
être le dirigeant ? A cette question, le Dr.
Régine Rouzier, pdg de Centre CAP, CRO
spécialisée en phase I et II, qui a créé son
entreprise il y a plus de 20 ans, répond par
la négative. La gestion d’une entreprise est
très éloignée des préoccupations médica-
les et les médecins n’y sont pas formés. Si
de nombreuses CROs françaises ont été
créées par des médecins il y a quelques
années, c’est principalement par nécessité
afi n de pouvoir continuer à exercer dans le
secteur de la recherche clinique, notamment
en tant qu’acteur complémentaire du circuit
hospitalier.
Aujourd’hui, un médecin investigateur peut
être salarié dans une CRO et avoir la chance de voir s’ouvrir à lui
un éventail de fonctions très large. En amont de la réalisation cli-
nique des études, les laboratoires pharmaceutiques qui sollicitent
son avis expérimenté pour collaborer à la rédaction du protocole le
considèrent à juste titre comme un partenaire-conseil. Par ailleurs,
son rôle d’expert médical le place au rang d’acteur central dans le
suivi des études réalisées.
« Malheureusement, en 20 ans, les médecins sont devenus de plus
en plus rares tant la demande est forte, explique le Dr. Régine Rou-
zier. Nous avons dû nous adapter à cette pénurie médicale sans per-
dre en qualité de services en recrutant au sein de Centre Cap plus
de professionnels, tels que des infi rmiers et techniciens de labora-
toire pour permettre au médecin de se concentrer sur la qualité des
résultats et du suivi médical de chaque étude. En outre, nous avons
su créer et développer un réseau de médecins consultants qui sont
devenus indispensables au professionnalisme de nos prestations. »
Régine Rouzier estime qu’en raison de la diffi culté de recrutement
de médecins, les biotech et les laboratoires américains – qui en sont
aussi victimes seront amenés de plus en plus souvent à avoir re-
cours aux CROs bénéfi ciant d’un réseau de praticiens spécialistes.
« Il serait aussi possible d’atténuer les conséquences de cette pénurie
en formant des infi rmiers à la spécialité de recherche clinique, par
la création d’une fi lière spécialisée au même titre que la formation
des infi rmiers à l’anesthésie. Ce type de formation existe d’ailleurs
à l’étranger », souligne le Dr. Régine Rouzier. Enfi n, pour permet-
tre d’améliorer l’attractivité de la recherche clinique en France, ne
serait-il pas aussi souhaitable d’intégrer au sein du cursus universi-
taire en médecine une spécialisation à la recherche clinique pour les
étudiants dès leur formation initiale ?
« NOUS AVONS DÛ NOUS
ADAPTER À LA PÉNURIE MÉ-
DICALE », EXPLIQUE RÉGINE
ROUZIER, PDG DE CENTRE
CAP.
DR
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