Infarctus du myocarde péri-opératoire 101
ischémiques de SCP (traumatisme cardiaque par exemple) mais aussi des causes
ischémiques sans rapport avec une atteinte artérielle coronaire sous-jacente.
1.3. PLACE DES TROPONINES ULTRA SENSIBLES
L’amélioration des techniques de mesure a permis d’obtenir des troponines
d’une nouvelle génération appelée «troponines ultra sensibles». Ces troponines
ultra sensibles présentent une positivité plus précoce (dès la première heure)
et d’une fréquence supérieure, car des événements non détectés par les tests
standards sont maintenant révélés par ces tests plus sensibles. Les progrès
en termes de sensibilité apportés par cette nouvelle génération de tests sont
équivalents à l’amélioration observée sur les tests standards entre 1995 et 2010.
L’identication de ces événements coronaires mineurs soulève cependant
de nombreuses interrogations sur l’attitude thérapeutique à adopter. En effet,
les SCP dénis par une élévation des troponines ultrasensibles ne semblent
pas imposer une intervention thérapeutique urgente (angioplastie par exemple),
bien que toute élévation de ces biomarqueurs soit associée à une réduction de
l’espérance de vie à long terme des opérés. Des études multicentriques inter-
nationales sont actuellement en cours pour mieux comprendre les mécanismes
impliqués dans cette surmortalité à long terme et pour tester des stratégies
thérapeutiques de prévention secondaire après SCP.
2. FRÉQUENCE ET CHRONOLOGIE DES ÉVÉNEMENTS CORONA-
RIENS POSTOPÉRATOIRES
Les nouveaux critères diagnostiques de la nécrose myocardique aiguë pos-
topératoire qui permettent son diagnostic avec une grande abilité, conduisent
à reconsidérer l’incidence de cette complication. L’analyse des études publiées
ces cinq dernières années retrouve en chirurgie non cardiaque, un taux de
décès postopératoire d’origine cardiaque compris entre 0,5 et 1,5%, et une
incidence des complications cardiaques postopératoires majeures entre 2 et
3,5%. L’incidence des SCP était évaluée entre 2 et 15%, et la fréquence des
troponines supérieure à 1,5mg.ml-1 variait entre 5 et 10%. L’étude POISE[5],
qui représente la plus grande étude randomisée réalisée à ce jour sur le sujet,
retrouve sur 8351patients opérés de chirurgie non cardiaque, un taux de mortalité
postopératoire d’origine cardiaque de 1,6%, et un taux d’infarctus du myocarde
postopératoire non létal de 4,4%.
L’utilisation de troponines ultra sensibles permet d’identier un grand
nombre d’événements supplémentaires. Ainsi, en chirurgie vasculaire majeure,
la fréquence des élévations de troponine est classiquement de 10à12%, celle
des troponines ultra sensibles était de 47%. Ceci permet de dénir une nouvelle
sous-population avec une élévation «isolée» de troponine ultra sensible. En
2012, nous savons que cet état est associé à une surmortalité[6-8]. Néanmoins,
l’attitude thérapeutique à adopter face à ces événements n’est pas connue, tout
comme la fréquence des faux positifs liés à la présence dans le plasma d’auto-
anticorps dirigés contre la troponine.
L’utilisation d’un diagnostic biologique a permis de préciser la chronologie
des SCP. A la douzième heure postopératoire, plus de 30 % des opérés qui
développent un SCP sont déjà entrés dans une phase d’instabilité de la maladie
coronaire, caractérisée par l’élévation modérée du taux de troponine (Figure 1).