L’Encéphale
(2014)
40,
426—429
Disponible
en
ligne
sur
www.sciencedirect.com
ScienceDirect
journal
homepage:
www.em-consulte.com/produit/ENCEP
NOUS
AVONS
LU
POUR
VOUS
Les
troubles
bipolaires,
M.-L.
Bourgeois,
C.
Gay,
C.
Henry,
M.
Masson,
editors.
Médecine
Sciences
Publications,
Lavoisier,
Paris
(2014).
Les
troubles
bipolaires
ont
suscité
ces
dernières
années
de
nombreux
livres
à
destination
du
grand
public,
au
point
de
créer
un
phénomène
de
«
mode
».
Mais
le
dernier
ouvrage
de
synthèse
scientifique
à
l’usage
des
professionnels
de
la
psychiatrie
franc¸aise
remonte
à
près
d’une
décennie.
Ce
nouveau
volume
de
la
collection
Lavoisier
vient
donc
à
son
heure.
Le
temps
n’est
plus
un
seul
clinicien,
tel
l’aliéniste
Antoine
Ritti
en
1883,
pouvait
publier
une
somme
sur
le
sujet.
D’innombrables
travaux
internationaux
sur
les
troubles
bipolaires
paraissent
régulièrement
et
ali-
mentent
une
énorme
bibliographie.
Les
classifications
sont
régulièrement
révisées,
une
nouvelle
édition
du
manuel
de
référence
américain
de
Goodwin
et
Jamison
est
sortie
en
2007,
les
données
de
la
psychopharmacologie
sont
en
constant
renouvellement.
C’est
pourquoi
les
quatre
coor-
donnateurs,
spécialistes
franc¸ais
des
troubles
bipolaires
de
longue
date,
se
sont
entourés
d’un
panel
d’une
centaine
d’auteurs,
universitaires
ou
chercheurs
pour
la
plupart.
L’ouvrage
est
donc
une
revue
détaillée
et
complète
de
tous
les
aspects
actuels
de
l’affection,
en
13
parties,
75
chapitres
et
620
pages.
Une
première
partie
aborde
«
l’évolution
des
idées
jusqu’aux
classifications
actuelles
».
Après
un
chapitre
histo-
rique
(M.A.
Crocq),
l’un
des
coordonnateurs,
M.L.
Bourgeois,
rappelle
les
fondements
de
la
dichotomie
unipolaire-
bipolaire
des
troubles
de
l’humeur
et
du
concept
de
«
spectre
»
bipolaire,
tandis
que
C.B.
Pull
passe
en
revue
les
remaniements
opérés
dans
les
classifications
internatio-
nales
depuis
l’avènement
des
critères
diagnostiques
(CIM
et
DSM,
jusqu’à
la
5eédition
comprise).
La
dichotomie
trouble
bipolaire/schizophrénie
est-elle
périmée
?
C’est
la
question
à
laquelle
tente
de
répondre
F.
Schürhoff,
qui
part
de
Kraepelin
pour
terminer
sur
Kraepelin,
en
passant
par
l’épidémiologie
génétique
et
la
biologie
moléculaire.
La
deuxième
partie
est
consacrée
aux
aspects
cliniques
actuels
des
troubles
bipolaires
chez
l’adulte.
M.L.
Bourgeois
traite
de
la
manie
et
de
l’hypomanie.
Lui
aussi
estime
que
«
les
formes
kraepeliniennes
classiques
sont
validées
»,
bien
que
le
rôle
des
facteurs
déclenchants
externes
dans
la
survenue
des
accès
apparaisse
maintenant
déterminant
et
que
la
symptomatologie
des
épisodes
se
révèle
plu-
ridimensionnelle.
L’hypomanie,
dont
Jules
Angst
propose
une
conception
élargie,
est
bien
une
maladie
et
pas
une
«
situation
avantageuse
»,
comme
l’avancent
certains
best-
sellers
de
professionnels
américains.
À
Kraepelin
également
se
rattache
le
concept
d’état
mixte
(J.M.
Aubry),
dont
le
DSM-5
vient
de
formaliser
les
critères,
en
distinguant
la
manie
mixte,
soit
dysphorique,
soit
dépressive,
de
la
dépres-
sion
mixte,
faite
d’irritabilité,
de
tension
intérieure,
de
sensibilité
au
rejet,
parfois
de
«
tachypsychie
subjective
».
Les
troubles
bipolaires
II
(J.
Scott
et
C.
Henry),
à
haut
risque
suicidaire,
posent
la
question
capitale
des
indices
de
bipo-
larité
devant
un
premier
épisode
dépressif
majeur
:
âge
de
début
précoce,
récurrence,
antécédents
familiaux,
tempé-
rament
prémorbide,
caractéristiques
psychotiques,
mixtes
ou
mélancoliques,
survenue
dans
le
post-partum,
réponse
au
traitement.
La
cyclothymie
(R.
Belzeaux
et
J.M.
Azorin)
est-elle
un
trouble
catégoriel,
à
mettre
sur
le
même
plan
que
les
types
I
et
II,
comme
le
veut
le
DSM,
ou
une
dimension
tempéramentale,
dans
la
lignée
de
Kretschmer
?
La
seconde
hypothèse
permettrait
peut-être
de
mieux
différencier
les
manies
mixtes
et
les
troubles
bipolaires
à
cycles
rapides,
voire
les
formes
sans
intervalles
libres,
des
formes
classiques
de
manie.
Le
diagnostic
différentiel
fait
précisément
l’objet
de
la
3epartie.
Il
se
pose
avec
les
troubles
unipolaires
dépres-
sifs
récurrents
(M.
Goudemand),
eux-mêmes
à
distinguer
des
épisodes
dépressifs
isolés,
avec
le
TDAH
(A.L.
Thoumy
et
M.P.
Bouvard),
évoquant
la
question
d’une
éventuelle
comorbidité
entre
les
deux
affections,
avec
les
schizophré-
nies
(F.
Schürhoff),
à
partir
des
symptômes
négatifs
et
des
troubles
du
cours
de
la
pensée,
en
attendant
l’arrivée
des
biomarqueurs,
avec
les
troubles
de
la
personnalité,
sur-
tout
borderline
(F.
Jost),
en
s’appuyant
essentiellement
sur
l’impulsivité
et
le
caractère
«
atypique
»
des
décompensa-
tions
dépressives.
Les
formes
cliniques
de
l’affection
(4epartie)
sont
liées
à
l’âge,
à
la
puerpéralité,
à
un
traitement
par
interféron
(S.
Gard),
à
la
«
coloration
»
culturelle
de
la
symptomatologie
(M.
Agoub)
ou
à
la
présence
de
symp-
tômes
catatoniques.
Les
troubles
bipolaires
de
l’enfant
(N.
Franc
et
D.
Purper-Ouakil),
surdiagnostiqués
ces
dernières
http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.04.009
0013-7006/
427
années
aux
États-Unis,
sont
différenciés
dans
le
DSM-5
des
états
d’irritabilité
chronique
infantile,
appelés
disruptive
mood
dysregulation
disorder.
À
l’adolescence
(J.
Brunelle),
irritabilité,
agressivité,
troubles
des
conduites,
voire
délin-
quance,
font
en
revanche
partie
du
tableau
clinique.
Les
épisodes
maniaques
et
mixtes
présentent
fréquemment
chez
les
adolescents
des
symptômes
psychotiques
et
sont
grevés
d’une
forte
comorbidité
anxieuse
et
addictive.
Les
troubles
bipolaires
du
sujet
âgé
(A.
Manetti),
moins
fré-
quents
que
chez
l’adulte,
peu
étudiés,
sont
dominés
par
les
formes
à
début
tardif
(late
onset)
et
la
fréquence
des
comor-
bidités
cardiovasculaires
et
neurologiques.
Les
troubles
bipolaires
de
la
périnatalité
(A.L.
Sutter-Dallay)
sont
dans
90
%
des
cas
des
épisodes
maniaques
ou
mixtes
avec
carac-
téristiques
psychotiques.
Le
risque
de
rechuter
dans
le
post-partum
est
de
50
à
70
%
chez
une
femme
présentant
un
trouble
bipolaire,
d’où
l’importance
de
la
prévention.
Vingt-cinq
à
37
%
des
états
maniaques
et
60
à
70
%
des
états
mixtes
présentent
des
caractéristiques
catatoniques
(P.
Thomas),
donnée
qui
bat
en
brèche
l’inclusion
de
cette
entité
par
Kraepelin
dans
la
dementia
praecox.
Toutes
ces
formes
cliniques
présentent
des
indications
thérapeutiques
relativement
spécifiques
:
antipsychotiques
atypiques
chez
l’enfant,
monothérapie
préférentielle
chez
l’adolescent,
anticonvulsivants
et
antipsychotiques
atypiques
plutôt
que
lithium
chez
le
sujet
âgé,
benzodiazépines
et
le
cas
échéant,
ECT
dans
les
formes
catatoniques.
Après
les
formes
cliniques,
les
formes
évolutives
de
cette
affection,
définie
précisément
par
son
évolution
au
long
cours,
sont
passées
en
revue
dans
la
5epartie.
Les
formes
à
début
précoce,
avant
21
ans
(F.
Bellivier),
marquées
par
une
importante
comorbidité,
notamment
addictive,
et
par
la
fréquence
des
cycles
rapides,
conduiront
peut-
être
à
un
démembrement
nosographique
de
la
maladie.
Le
retard
au
diagnostic
(B.
Etain),
de
dix
ans
en
moyenne,
concerne
plus
fréquemment
les
femmes,
les
troubles
bipo-
laires
II,
les
formes
à
début
précoce
et
à
polarité
dépressive
prédominante,
ce
que
confirme
une
étude
franc¸aise
de
2013
coordonnée
par
N.
Drancourt,
portant
sur
500
patients.
Pour
aider
au
dépistage
précoce
et
à
l’amélioration
des
stra-
tégies
thérapeutiques,
le
modèle
du
staging
ou
des
stages
évolutifs
(J.
Scott
et
C.
Henry),
cotés
de
0
à
4,
intégrant
fac-
teurs
de
risque,
antécédents
personnels
et
familiaux,
niveau
de
fonctionnement,
pourrait
être
transposé
des
pathologies
neuro-dégénératives
aux
troubles
bipolaires.
Les
facteurs
de
stress
(C.
Gindre)
multiplient
par
près
de
cinq
le
risque
d’apparition
des
épisodes,
ce
qui
devrait
conduire
à
substi-
tuer
un
modèle
d’interaction
vulnérabilité/environnement
à
la
théorie
du
kindling
de
Robert
Post.
Les
virages
de
l’humeur
(T.
Mauras
et
R.
Gaillard)
concernent
environ
20
%
des
épisodes
dépressifs
et
5
%
des
épisodes
maniaques.
Ils
peuvent
être,
soit
pharmaco-induits
(antidépresseurs,
sur-
tout
tricycliques,
corticoïdes,
interféron),
soit
déclenchés
par
des
toxiques,
la
privation
de
sommeil
ou
des
facteurs
de
stress.
La
polarité
du
premier
accès
détermine
fréquem-
ment
la
polarité
prédominante
du
trouble
(R.
Scetbon
et
B.
Étain)
et
doit
donc
orienter
la
thérapeutique.
Le
retard
au
diagnostic
et
le
risque
suicidaire
sont
plus
importants
en
cas
de
polarité
dépressive
prédominante.
La
période
intercritique
qui
sépare
les
accès
(F.
Chevrier)
est
souvent
marquée
par
une
symptomatologie
«
résiduelle
»,
facteur
de
risque
de
récidive,
d’autant
plus
fréquente
que
les
épi-
sodes
maniaques
ont
été
graves,
prolongés
et
comorbides.
Des
altérations
cognitives
et
un
certain
degré
de
handicap
fonctionnel
ont
été
retrouvés
pendant
cette
période.
Depuis
une
quarantaine
d’années
sont
décrits
les
troubles
bipo-
laires
«
à
cycles
rapides
»
(C.
Gay,
M.
Masson
et
F.
Bellivier),
particulièrement
handicapants
(4
épisodes
par
an).
Aux
fac-
teurs
classiquement
invoqués
(sexe
féminin,
âge
de
début
précoce,
rôle
des
antidépresseurs,
dysthyroïdies),
est
venu
s’ajouter
récemment
le
syndrome
d’apnées
du
sommeil
(SAS).
Outre
les
facteurs
généraux
de
vulnérabilité
sui-
cidaire,
les
facteurs
de
risque
de
suicide
des
troubles
bipolaires
(P.
Courtet)
sont
maintenant
bien
connus
:
âge
de
début
précoce,
périodes
de
virages
de
l’humeur,
épi-
sode
dépressif
mixte,
cycles
rapides,
type
II,
comorbidités,
prescription
d’antidépresseur,
facteurs
de
stress.
Le
rôle
protecteur
du
lithium
est
une
donnée
acquise.
Mais
le
taux
de
décès
par
suicide
des
patients
bipolaires
reste
très
élevé,
quoiqu’imprécis
(6
à
15
%).
Les
aspects
médico-légaux
(6epartie)
sont
dominés
par
les
textes
de
loi
récents
(C.
Jonas)
et
le
risque
cri-
minologique
(M.
Bénézech),
que
majore
la
présence
de
comorbidités.
Il
apparaît
que
les
maniaques
commettent
fréquemment
des
infractions
mineures
et
que
les
délits
per-
pétrés
durant
les
périodes
dépressives
sont
dominés
par
l’homicide
altruiste,
rare,
mais
non
exceptionnel.
Pour
ce
qui
concerne
l’évaluation
(7epartie),
la
psychopatholo-
gie
quantitative
des
troubles
bipolaires
(J.D.
Guelfi)
fait
appel
à
diverses
échelles
de
symptomatologie
dépressive
et
maniaque.
Alors
que
les
premières
sont
largement
utilisées
et
sensibles
au
changement,
les
secondes
restent
insuffi-
santes.
Ces
outils
évaluent
l’intensité
des
accès,
mais
ne
peuvent
servir
au
diagnostic.
Les
données
épidémiologiques
(S.
Sportiche)
indiquent
une
prévalence
en
vie
entière
de
la
maladie
qui
varie
de
1
à
5
%
selon
les
études,
en
fonction
de
la
zone
géographique,
du
taux
de
réponse
et
de
l’outil
d’évaluation
utilisé.
La
charge
économique
des
troubles
bipolaires
(F.
Pochard
et
P.
Cléry-Melin)
est
tributaire
à
la
fois
des
dépenses
liées
aux
soins
hospitaliers
ou
ambulatoires
et
de
coûts
indirects
en
rapport
avec
les
jours
de
travail
perdus.
Ces
derniers
représentent
entre
65
et
75
%
de
l’ensemble
des
coûts.
Suivent
deux
parties
consacrées
aux
comorbidités
psy-
chiatriques
et
somatiques.
Tous
les
types
de
troubles
anxieux
(F.
Slama)
peuvent
se
rencontrer
chez
environ
un
patient
bipolaire
sur
deux.
La
stabilisation
de
l’humeur
est
le
préalable
requis
à
leur
thérapeutique.
Les
comorbidités
addictives
(E.
Blandin
et
P.
Gorwood),
sous-diagnostiquées,
frappent
quant
à
elles
40
%
des
malades.
Elles
concernent
aussi
bien
les
boissons
alcoolisées
que
le
cannabis,
les
amphétamines
et
la
cocaïne.
Les
troubles
alimentaires
(S.
Guillaume
et
P.
Courtet),
essentiellement
la
boulimie
compulsive,
aggravent
le
pronostic
et
majorent
le
risque
suicidaire.
Le
taux
de
troubles
de
la
personnalité
chez
les
malades
bipolaires
(D.
Gourion
et
F.
Raffaitin),
surtout
bor-
derline,
est
très
variable
selon
les
études
(12
à
89
%).
Ils
sont
parfois
difficiles
à
distinguer
des
symptômes
résiduels
des
accès.
Leur
évaluation
précise
nécessiterait
sans
doute
une
approche
dimensionnelle
de
la
personnalité.
Les
comor-
bidités
somatiques
sont
beaucoup
mieux
connues
depuis
longtemps,
qu’il
s’agisse
du
syndrome
métabolique,
des
428
Nous
avons
lu
pour
vous
pathologies
cardiovasculaires
ou
thyroïdiennes
(M.
Masson).
Outre
les
classiques
manies
secondaires,
les
affections
neu-
rologiques
invoquées
étaient
jusqu’à
présent
la
migraine
et
la
sclérose
en
plaques.
Mais
Marc
Masson
signale,
à
partir
de
publications
récentes,
la
possibilité
d’un
«
lien
anatomo-
dysfonctionnel
»
entre
épilepsie
et
symptômes
bipolaires.
Un
chapitre
original
évoque
la
«
dimension
douloureuse
»
des
troubles
bipolaires
(E.
Olié
et
P.
Courtet),
en
faisant
le
lien
entre
douleur
physique
(dorsalgies,
arthralgies,
fibro-
myalgie)
et
sensibilité
à
la
douleur
dans
la
dépression
avec
caractéristiques
atypiques,
plus
fréquente
chez
les
patients
bipolaires.
Une
10epartie,
plus
spécialisée,
traite
de
l’approche
physiopathologique
de
la
maladie.
La
génétique
est
la
science
fondamentale
nourricière
en
matière
de
bipolarité
(S.
Jamain).
Ses
acquis
sont
en
plein
remaniement
depuis
le
séquenc¸age
complet
du
génome
humain.
Ils
confirment
le
caractère
polygénique
de
l’affection.
La
recherche
de
gènes
de
vulnérabilité,
qui
pourraient
être
communs
avec
ceux
de
la
schizophrénie,
est
complétée
par
l’analyse
des
remanie-
ments
chromosomiques.
Ces
facteurs
génétiques
seraient
susceptibles
de
confirmer
une
hypothèse
neurodéveloppe-
mentale
(O.
Gay
et
M.O.
Krebs),
étayée
par
la
présence
d’anomalies
cognitives
et
morphologiques
mineures.
Les
perturbations
constatées
des
taux
d’interleukines,
de
cyto-
kines
et
de
protéine
C-réactive
(CRP),
de
même
que
les
anomalies
mitochondriales
et
celles
du
système
HLA,
viennent
quant
à
elles
alimenter
la
piste
d’une
origine
immuno-inflammatoire
(R.
Doukhan),
qui
reste
cependant
hypothétique
dans
l’état
actuel
des
recherches.
La
géné-
tique
contribue
encore
à
donner
sens
aux
anomalies
des
rythmes
circadiens
constatées
chez
les
patients
bipolaires
(C.
Boudebesse),
que
traduisent
l’hypersensibilité
de
la
mélatonine
et
l’élévation
matinale
du
taux
de
cortisol.
Des
associations
semblent
en
effet
avoir
été
établies
entre
la
maladie
et
le
polymorphisme
de
plusieurs
gènes
circadiens.
Les
troubles
bipolaires
ne
sont
pas
seulement
des
troubles
de
l’humeur.
Des
perturbations
cognitives
(A.
Raust)
sont
mises
en
évidence
lors
de
la
passation
des
tests
aux
épreuves
évaluant
l’attention
soutenue,
la
mémoire
de
travail,
la
mémoire
épisodique
et
les
fonctions
exécutives.
On
rejoint
ici
la
partie
purement
clinique
de
l’ouvrage.
L’imagerie
cérébrale
fonctionnelle
(J.
Houenou
et
A.
Sarrazin)
se
centre
sur
les
modifications
de
l’activité
des
structures
limbiques
et
du
cortex
préfrontal,
qui
ont
permis
d’élaborer
le
modèle
de
dérégulation
émotionnelle
cortico-limbique.
L’imagerie
structurelle
étudie
principalement
de
nos
jours
les
hyper-
intensités
de
la
substance
blanche.
Dans
un
registre
plus
psychopathologique,
les
traumatismes
affectifs
précoces
(B.
Étain),
essentiellement
les
abus
émotionnels,
colorent
de
manière
particulièrement
sombre
le
tableau
de
la
maladie.
Ces
traumatismes
environnementaux
interagissent
proba-
blement
avec
le
développement
neural
et
avec
la
présence
de
gènes
de
vulnérabilité
pour
conduire
au
déclenchement
des
accès.
l’on
retrouve
encore
la
génétique
!
Enfin,
la
réactivité
émotionnelle
(C.
Henry
et
C.
Boudebesse),
apparemment
exacerbée
chez
les
malades
bipolaires
euthy-
miques,
pourrait
constituer
un
marqueur
de
vulnérabilité,
tandis
que
celle
relevée
durant
certains
épisodes
dépres-
sifs
serait
susceptible
de
différencier
deux
sous-types
de
dépressions
bipolaires.
Plus
d’une
centaine
de
pages
sont
consacrées
aux
trai-
tements
biologiques
des
troubles
bipolaires,
ce
qui
fait
de
cette
partie
à
elle
seule
un
manuel
autonome,
qui
peut
se
lire
séparément.
Après
deux
chapitres
de
définitions
et
de
pharmaco-épidémiologie
des
médicaments
dits
thymorégu-
lateurs,
puis
un
chapitre
de
données
générales
issues
de
l’evidence-based
medicine,
les
articles
suivants
se
déclinent
selon
les
formes
et
les
sous-types
de
la
maladie
(états
maniaques
et
mixtes,
épisodes
dépressifs),
le
stade
évolutif
(urgence,
maintenance),
les
spécialités
et
techniques
utili-
sées
(lithium,
anticonvulsivants,
antipsychotiques,
ECT).
Le
cas
des
personnes
âgées
est
abordé
dans
un
chapitre
séparé
(M.
Tournier).
Au
vu
des
données
les
plus
récentes
de
la
littérature
internationale,
il
apparaît
que
les
thymorégula-
teurs
sont,
contrairement
aux
autres
psychotropes,
toujours
notoirement
sous-prescrits
(H.
Verdoux),
qu’il
n’y
a
pas
actuellement
d’accord
sur
la
prise
en
charge
de
la
dépres-
sion
bipolaire
(P.A.
Geoffroy),
de
même
que
sur
la
durée
du
traitement
de
maintenance
(T.
Mauras)
et
qu’il
est
utile
de
compléter
les
recommandations
fondées
sur
les
preuves
par
celles
fondées
sur
les
pratiques
(L.
Samalin
et
P.M.
Llorca).
Un
relatif
consensus
existe
en
revanche
pour
recommander
la
monothérapie
en
première
intention
(P.A.
Geoffroy
et
C.
Henry),
bien
que
ce
ne
soit
généralement
pas
le
cas
dans
la
pratique
courante.
Le
lithium,
premier
thymorégulateur
(M.
Masson),
reste
le
seul
médicament
de
cette
classe
possédant
des
effets
à
la
fois
curatifs
et
préventifs
des
épisodes
tant
maniaques
que
dépressifs.
Les
anticonvulsivants
(S.
Dupont
et
M.
Masson)
doivent
toutefois
lui
être
préférés
dans
les
formes
mixtes
et
à
cycles
rapides.
Une
bithérapie
compor-
tant
un
antipsychotique
atypique
est
utile
à
envisager
pour
traiter
les
accès
maniaques
sévères
ou
avec
caractéristiques
psychotiques.
La
seule
spécialité
de
cette
classe
à
possé-
der
une
indication
de
première
intention
en
monothérapie
dans
le
traitement
et
la
prévention
de
la
dépression
bipo-
laire
est
la
quétiapine
(P.M.
Llorca
et
D.
Gourion).
L’ECT
est
efficace
aussi
bien
dans
les
épisodes
maniaques
que
dépres-
sifs
en
phase
aiguë
(P.
Fossati).
Les
nouvelles
techniques
de
stimulation
cérébrale
(rTMS
et
SCP)
pourraient
représen-
ter
des
alternatives
intéressantes
dans
certaines
dépressions
bipolaires.
Ce
véritable
guide
de
thérapeutique
pratique
se
termine
par
les
perspectives
de
personnalisation
des
stra-
tégies,
tant
pour
le
patient
que
pour
ses
proches,
selon
le
cours
évolutif
de
la
maladie
depuis
l’épisode
inaugural,
sa
polarité
prédominante
et
ses
comorbidités,
en
attendant
les
biomarqueurs,
dont
les
auteurs
prédisent
l’avènement
dans
un
proche
avenir
(M.
Masson
et
C.
Gay).
La
partie
suivante,
toute
aussi
fournie,
aborde
les
dif-
férentes
thérapies
psychosociales.
La
psychoéducation
(C.
Gay),
réservée
plus
particulièrement
aux
formes
résistantes
ou
présentant
des
symptômes
résiduels
entre
les
accès,
est
un
complément
du
traitement
médicamenteux
qui
permet
d’améliorer
l’observance.
Les
TCC
(C.
Mirabel-Sarron
et
M.
Provencher),
parfois
difficiles
à
distinguer
de
la
psychoé-
ducation,
ont
vu
récemment
leurs
indications
élargies
aux
formes
s’accompagnant
de
comorbidités
avec
les
troubles
anxieux
ou
de
la
personnalité.
L’Interpersonal
and
social
rhythm
therapy
(IPSRT)
(T.
Bottai),
qui
combine
thérapie
interpersonnelle
et
aménagement
des
rythmes
sociaux,
ren-
voie
à
la
fois
aux
dysfonctionnements
relationnels
et
à
la
chronobiologie.
La
remédiation
cognitive
(C.
Daban-Huard)
429
a
surtout
été
appliquée
jusqu’à
présent
aux
schizophrénies.
Les
altérations
cognitives
des
patients
bipolaires
devraient
conduire
à
la
développer
également
chez
ces
derniers.
De
même,
les
thérapies
fondées
sur
la
pleine
conscience
(C.
André)
vont
sans
doute
voir
leur
champ
d’application
s’étendre
des
troubles
anxieux
et
dépressifs
vers
la
prise
en
charge
du
tumulte
émotionnel
des
personnes
bipolaires.
Le
suivi
des
familles
(K.
M’Bailara
et
C.
Gay)
dépasse
le
cadre
des
classiques
thérapies
familiales
pour
s’étendre
à
l’implication
des
proches
dans
l’alliance
thérapeutique,
aux
groupes
de
psychoéducation
familiale
et
aux
thérapies
comportementales
centrées
sur
la
famille
(FFT).
La
mise
en
place
des
centres
experts
(C.
Henry)
devrait
favoriser
le
dépistage
précoce
de
la
maladie.
Les
deux
derniers
cha-
pitres
traitent
de
programmes
de
soins
personnalisés
autour
d’ateliers
en
centre
d’accueil
thérapeutique
(R.
Giachetti)
et
du
suivi
des
patients
en
psychiatrie
libérale
(H.
Cuche
et
A.
Gérard).
C’est
dans
la
dernière
partie,
celle
des
«
approches
compréhensives
»,
que
la
psychanalyse
est
abordée.
Mais
elle
aurait
pu
figurer
parmi
les
thérapies,
puisque,
pour
Marc
Bourgeois,
«
de
nombreux
patients
ont
à
repenser
leur
existence
et
leur
vie
en
fonction
de
ce
handicap.
Une
psy-
chanalyse
réconciliée
avec
la
médecine
peut
les
y
aider
».
Ce
chapitre,
de
même
que
ceux
sur
la
phénoménologie
(P.
Belzeaux
et
J.M.
Azorin)
et
la
psychopathologie
(M.C.
Lambotte),
sont
les
seuls
de
l’ouvrage
dans
lesquels
les
réfé-
rences
américaines
sont
quasiment
absentes.
Déclin,
rejet
ou
méconnaissance
de
la
part
de
nos
collègues
d’Outre-
Atlantique
?
Le
dernier
chapitre
pose
la
question,
très
étudiée
et
controversée,
de
la
créativité
des
personnes
bipo-
laires.
Selon
M.
Bourgeois,
«
la
maladie
maniaco-dépressive
n’assure
pas
le
génie
».
Le
livre
se
clôt
sur
une
conclusion
de
Henri
Lôo.
C’est
une
gageure
de
prétendre
avoir
résumé
en
quelques
paragraphes
un
travail
d’une
telle
richesse,
dans
lequel
les
représentants
de
tous
les
courants
de
la
médecine
de
l’esprit
trouveront
matière
à
réflexion.
Cet
ouvrage
est
une
magni-
fique
encyclopédie,
qui
conjugue
mises
à
jour,
recherches
de
pointe
et
informations
pratiques.
Désormais,
tout
psychiatre
franc¸ais
devra
posséder
dans
sa
bibliothèque
Les
troubles
bipolaires.
T.
Haustgen
CMP,
secteur
93G10,
77,
rue
Victor-Hugo,
93100
Montreuil,
France
Adresse
e-mail
:
Disponible
sur
Internet
le
27
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2014
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