Les troubles bipolaires : Définition, diagnostic, conséquences, prise en charge. Les troubles bipolaires ont connu différentes appellation au cours des siècles. Pourtant, leur description clinique est restée relativement homogène depuis l’apparition du concept de psychose maniaco-dépressive. « Actuellement, et tout comme dans ses descriptions cliniques plus anciennes, la sémiologie des troubles bipolaires repose sur la description d’une symptomatologie dépressive majeure caractérisée et sur la présence soit d’épisodes maniaques, soit d’épisodes d’hypomanie, soit d’épisodes mixtes, chacun ayant une sémiologie propre. » (Etain, 2009). Il existe trois types de classifications différentes (Type I, Type II et Type mixte). Le diagnostic est posé en fonction de l’association des différents épisodes appartenant à différents types de polarité. Le diagnostique de bipolarité est souvent porté relativement tardivement. Il peut s’écouler 8 ans (en moyenne) entre la survenue des premiers symptômes et l’annonce du diagnostic. Souvent, les patients ont rencontré plusieurs professionnels (en moyenne 4) et ont reçu 3 diagnostiques différents. On estime actuellement que 2/3 des patients ne sont pas diagnostiqués (Etain, 2009). Les conséquences de cette pathologie peuvent pourtant être lourdes. Que ce soit pour le patient, sa famille, son entourage ou son univers professionnel. Par ailleurs, la bipolarité entraine des coûts directs et indirects élevés. La bipolarité a des conséquences majeures sur la vie des patients et de leur entourage. Leur mortalité est 2 fois supérieure à celle de la population générale et leur risque suicidaire est 15 fois plus important. Le risque cardio-vasculaire est accru (2 fois plus important qu’en population générale) (Legay, 2006). De plus, les comorbidités sont fréquentes. Celles-ci regroupent les troubles anxieux, les addictions… Les patients bipolaires passent en moyenne 20% de leur vie dans des épisodes thymiques (Angst & Preisig, 1995). Par conséquent, leur pathologie altère considérablement leur qualité de vie et leur estime de soi, même durant les périodes euthymiques. Cela peut donner lieu à une désinsertion professionnelle, des dysfonctionnements sociaux et familiaux. En effet, leur progression socioprofessionnelle est bien souvent dégradée. Dans près de la moitié des cas, la capacité à travailler est amoindrie, avec un surcroît de chômage, un sous emploi et une perte de productivité, entraînant une perte de revenus (Dardennes, Thuile, Even, Friedman, Guelfi, 2006). Les conséquences socio-affectives sont également importantes. Par rapport à la population générale, ils sont 2 fois plus nombreux à être célibataires et 4 fois plus nombreux à être divorcés (Coryell, Scheftner, Keller, 1993). Aux Etats-Unis, plus de la moitié des proches s’occupant des problèmes de santé d’un patient bipolaire rapportent une détresse sévère sur un des aspects de leur vie (Perlick, Clarkin, Sirey, 1999). La parution de l’étude Global Burden of Diesease a sans aucun doute marqué un tournant des politiques de santé publique. En effet, cette étude a comparé l’ampleur du handicap créé par 200 maladies et causes de handicap. Les maladies mentales se sont alors révélées parmi les principales causes de handicap dans la population mondiale. En particulier, le trouble bipolaire s’est révélé être la sixième cause mondiale de handicap pour la population âgée de 15 à 44 ans. Si le trouble bipolaire est devancé dans cette classe d’âge par la dépression et l’alcoolisme, le handicap estimé est du même ordre que celui de la schizophrénie, classée 9e (Dardennes, Thuile, Even, Friedman, Guelfi, 2006). De plus, les coûts engendrés par les troubles bipolaires sont très importants. Ils sont de l’ordre d’un coût moyen par patient sur la vie de 252 212 $ avec des extrêmes allant de 12 000 $ à 600 000 $ (Kessler, Mc Gonagle, Zhao, 1994). Le diagnostic de psychose maniaco-dépressive s’est transformé en diagnostic de bipolarité. Dans le même temps, c’est toute la problématique du diagnostic précoce et de prise en charge qui a été questionné. La prise en charge de ces troubles associe médicaments et travail psychothérapeutique et/ou éducation thérapeutique. Actuellement, les traitements thymorégulateurs constituent la réponse médicamenteuse la plus fréquemment associée à ce trouble. Pour le traitement pharmacologique des dépressions bipolaires, la prescription d’antidépresseurs en monothérapie aggraverait le pronostic du trouble bipolaire en induisant des virages maniaques, des épisodes mixtes, des cycles rapides, et en favorisant la résistance au traitement. Un tiers des patients bipolaires présentent des virages maniaques ou hypomaniaques sous antidépresseurs. L'objectif du traitement antidépresseur est la rémission de l'épisode dépressif, mais présente toujours ce risque d'induire un virage maniaque. Ce risque est plus faible si le patient est déjà sous thymorégulateur. L'option idéale en première intention pour la dépression bipolaire serait de prescrire ou d'adapter la posologie d'un stabilisateur d'humeur, mais en pratique lorsqu'ils sont utilisés seuls, les thymorégulateurs n'ont pas toujours une efficacité suffisante (Mirabel-Sarron, Leygnac-Solignac, 2009). Parallèlement aux traitements psychotropes, il peut être proposé de nouvelles approches de traitements psychothérapiques comme les thérapies interpersonnelles basées sur les rythmes sociaux (IPSRT), les thérapies cognitivo-comportementales ou encore les thérapies centrées sur la famille. Les mesures psycho-éducatives permettent elles aussi de prendre en charge les personnes bipolaires et leur entourage, rendant le patient co-auteur de sa thérapie (et peut être également ainsi co-responsable de l’évolution de sa maladie…). « L’éducation thérapeutique s’entend comme un processus de renforcement des capacités du malade et/ou de son entourage à prendre en charge l’affection qui le touche, sur la base d’actions intégrées au projet de soins. Elle vise à rendre le malade plus autonome par l’appropriation de savoirs et de compétences afin qu’il devienne l’acteur de son changement de comportement, à l’occasion d’évènements majeurs de la prise en charge (initiation du traitement, modification du traitement, événement intercurrents,…) mais aussi plus généralement tout au long du projet de soins, avec l’objectif de disposer d’une qualité de vie acceptable par lui. Ainsi, l'éducation thérapeutique « stricto sensu » se distingue de l’accompagnement du malade, défini comme un processus externe veillant à soutenir le patient et son entourage, y compris dans le cas d’un accompagnement pour une bonne observance des traitements. Par ailleurs, l’éducation thérapeutique partage avec l’éducation pour la santé des objectifs et des outils qui, loin de les opposer, concourent, sur des temps et des champs différents, au développement des politiques de promotion de la santé. » (Pour une politique nationale d’éducation thérapeutique du patient, Rapport du ministère de la Santé, 2008). Ces diverses formes de prise en charge permettent de limiter l’impact fonctionnel de la maladie, car même si la maladie peut être bien contrôlée par les traitements médicamenteux, il est difficile de supprimer l’ensemble de ses effets tant les bouleversements dans la sphère sociale, familiale, professionnelle et psychologique sont importants. Sur le plan local : Un GTP (Groupe de Travail Pluri professionnel, s’est constitué autour de cette thématique et ce, à la demande de plusieurs intervenants en santé mentale : Médecins généralistes, Psychiatres libéraux et publics, exerçant en cabinet ou en hôpitaux, psychologues, pharmaciens, associations de familles et patients. Les questionnements et les réflexions de chacun ont abordés plusieurs thématiques importantes : La question du diagnostic : Le diagnostic positif et l’aide au diagnostic, le diagnostic différentiel et les pathologies intercurrentes (dépressions, schizophrénies, états-limites…). Le diagnostic évolutif et le pronostic, le diagnostic précoce, l’annonce du diagnostic et enfin, le partage interprofessionnel de l’information. La question de traitement : La place des anti-dépresseurs, leur pertinence, les différents thymorégulateurs, la continuité du traitement. La question des comorbidités : En particulier en lien avec les comportements addictifs (Alcool, Tabac, autres addictions…) La question de l’information sur les maladies, l’observance thérapeutique des patients, de la famille. La question du retentissement de la maladie (personnel, familial, professionnel, juridique…) et l’impact de la maladie sur la qualité de vie. Une présentation des actions locales d’éducation thérapeutique a suscité des échanges fructueux et la naissance de projets. A émergé la demande de mise en place d’un groupe d’échange de pratique pluri professionnel. Echanges élargis au-delà du cadre de la bipolarité. Ce groupe pourrait voir le jour fin 2010. Enfin, s’est exprimé nettement un besoin de formation et d’information en lien avec les diverses préoccupations du groupe. Des actions sont nées des réflexions du groupe. Pour plus d’information, n’hésitez pas à nous contacter ! Sur le site du RSMY : Vous pouvez avoir accès à divers textes et publications abordant différents aspects de la problématique des troubles bipolaires. Vous pourrez également trouver des liens vers d’autres sites. Enfin, nous vous proposons une liste des associations œuvrant dans les champs de la bipolarité. Enfin, un annuaire local référençant les intervenants dans chacun de leurs domaines est accessible sur notre site. Nous vous invitons à nous faire part de vos réflexions et suggestions par le biais de notre site Internet ou en nous contactant par téléphone. Si vous êtes un professionnel et que vous avez un identifiant, vous pourrez accéder aux travaux, Compte-rendu, et actions du groupe. Si vous n’avez pas d’identifiant et que vous désirez vous inscrire, cliquez ici.