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La destruction délibérée du secteur bancaire chypriote qui était en fait la principale « industrie » et source de
richesse de l'économie insulaire, conduisit à la désorganisation pure et simple des flux financiers, laquelle affec-
ta en fin de compte l'économie chypriote dans son ensemble.
Des dizaines de milliers de personnes perdirent ainsi leur emploi alors que la situation de dizaines de milliers de
ménages s'aggravait de jour en jour au cours de ces dernières années. Des centaines d'entreprises pourtant saines
durent faire face à un manque crucial soudain de liquidités, puis se retrouvèrent rapidement en situation de fail-
lite du fait qu'elles n'étaient plus en mesure de payer les salaires des employés et de régler leurs factures.
En raison de la crise de 2013, le taux de chômage insulaire augmenta de façon spectaculaire, affectant plus
particulièrement les jeunes. Parallèlement, le nombre de ménages se trouvant en dessous du seuil de pauvreté
augmenta drastiquement. Les organismes de bienfaisance chypriotes ont enregistré une croissance exponen-
tielle de leurs activités au profit des nombreuses personnes désormais incapables d'acheter de la nourri-
ture et donc de pourvoir à leurs besoins les plus élémentaires.
Selon les experts, la crise de 2013 a produit un effet durable sur l'économie insulaire, affectant à long terme
dramatiquement la vie des gens ordinaires et la situation de toute la société à tous les niveaux, d'où la comparai-
son souvent faite avec la catastrophe de 1974.
Coresponsabilité des autorités chypriotes et européennes
La crise a révélé de multiples failles qui existaient au sein des institutions chypriotes et européennes, les-
quelles ont toutes deux été responsables d'un échec lamentable et de la catastrophe socio-économique dé-
crite en détails dans le présent rapport. Cette mauvaise gouvernance a causé des souffrances innombrables à
la population chypriote qui en souffre encore et en souffrira encore pendant des années.
-1/ Premièrement, le gouvernement communiste chypriote alors au pouvoir au début de la crise financière a
préféré retarder la solution de règlement de la crise au lieu de réagir proactivement et de façon respon-
sable. Il semble que la raison principale interne ait résidé dans la volonté de ce gouvernement de préserver
les intérêts particuliers de ses électeurs et partisans de gauche en évitant la mise en œuvre de réformes
exigées par les institutions européennes et bancaires internationales. En même temps, ce gouvernement a
été incapable de gérer une crise d'une telle envergure, en plus d'être lui-même bien trop proche des
banques pour pouvoir prendre des décisions rationnelles basées sur des choix stratégiques judicieux.
-Deuxièmement, les institutions européennes n'ont pas joué leur rôle de régulateurs de l'activité écono-
mique et plus particulièrement du secteur bancaire. La crise a révélé l'incapacité de Bruxelles à réagir rapi-
dement et efficacement à l'évolution de la situation à Chypre.
Une volonté européenne et allemande de détruire le modèle économique chypriote fondé sur la finance
La gravité de la solution imposée en mars 2013 aux Chypriotes s'explique par la volonté de l'Union euro-
péenne de réduire considérablement la taille du secteur bancaire chypriote considéré à tort ou à raison
comme l'une des principales causes de la crise.
Cette décision a été prise sous la forte pression de l'Allemagne et de ses alliés qui soutenaient fortement
l'application des politiques d'austérité au sein de la zone euro et voulaient faire « payer » Chypre et les
pays du Sud pour lesquels ils ne voulaient pas dépenser l’argent de leurs contribuables.
Les Etats membres plus puissants continuèrent de jouer la carte de la «Realpolitik», en utilisant la force et le
pouvoir pour imposer leur volonté aux pays membres le moins puissants ou/et les plus vulnérables, situés princi-
palement dans le Sud ou dans la périphérie de l'Europe (Irlande, Portugal, Espagne, Grèce et Chypre). Contrai-
rement à l'Allemagne, ces économies vulnérables ont besoin d'investissements massifs et continus de la part des
pouvoirs publics afin de créer une configuration favorable et de créer des conditions équitables.
Comme l'a remarqué un expert mentionné dans le présent rapport, l'Allemagne entière a utilisé l'ensemble de
la machine politique de l'UE pour détruire le reste de l'Europe et mettre en œuvre un modèle néo-impérial
de politiciens allemands qui ont mis en marche un plan visant à subjuguer économiquement d'autres
Etats-Membres moins puissants et les soumettre à des intérêts allemands spécifiques.