© 2005 – Presses de l’Université du Québec
Édifice Le Delta I, 2875, boul. Laurier, bureau 450, Sainte-Foy, Québec G1V 2M2 • Tél.: (418) 657-4399 – www.puq.ca
Tiré de: Économie et Solidarités, vol. 35, nos 1-2, M. J. Bouchard, J. L. Boucher, R. Chaves
et R. Schediwy, responsables • EES3501N
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
102 Économie et Solidarités, volume 35, numéros 1-2, 2004
Toutefois, on observe des avancées significatives dans la compréhension
de la dynamique des coopératives, des mutuelles et des associations du tiers
secteur grâce aux travaux de chercheurs qui se sont intéressés à la spécifi-
cité de ces organisations sous divers angles : conditions de développement
(Lévesque, 1980), stratégie et structure (Desforges, 1980), gestion et prise
de décision (Tremblay, 1980), gestion de l’association (Malo, 1990 ; Vézina,
Côté et Carré, 1993), changement institutionnel (Giroux, 1993), management
stratégique et technologie (Lejeune, 1994), conditions d’offre et de demande
d ’ organisations du tiers secteur (Anheier et Ben-Ner, 1997), ancienne et nou-
velle économie sociale (Lévesque, Malo et Girard, 1999), holdings coopératifs
(Côté, 2001) et plus particulièrement en termes de théorie du cycle de vie
(Schediwy, 2001), dynamiques et trajectoires (Chaves et Monzón, 2001), globa-
lisation et stratégie (Spear, 2001) et gouvernance et gestion des organisations
(Malo et Lejeune, 1998 ; Andion et Malo, 1998 ; Cornforth, 2002 ; Malo, 2003).
La présente étude, loin de proposer une synthèse de ces travaux, se veut
une simple contribution aux efforts de modélisation de l’évolution de l’entre-
prise collective. Sous forme d’essai rédigé à partir de nos connaissances empi-
riques des organisations de l’économie sociale ou tiers secteur, nous tentons
de modéliser les patterns ou cheminements types de l’entreprise collective
d’usagers, en combinant l’approche stratégique et celle des configurations
organisationnelles.
L’entreprise collective d’usagers se développe davantage autour d’une
préoccupation de satisfaction de ses membres-usagers que d’une recherche
d’une position dans le marché (Vézina et Legrand, 2003). Sous cet angle,
elle s’inscrit naturellement dans le paradigme émergent des ressources. Les
tenants de cette nouvelle approche en stratégie (Prahalad et Hamel, 1990 ;
Grant, 1991 ; Arrègle, 1996 ; Tywoniak, 1998) soutiennent que la croissance de
l’entreprise doit suivre une logique d’exploitation des ressources et compé-
tences uniques développées par celle-ci au cours de son évolution, plutôt
que d’abord chercher à exploiter des occasions d’affaires. Ce faisant, cette
a p proche se distingue de celle du positionnement (Porter, 1982). De plus, elle
amène à comprendre l’organisation dans sa dimension historique en révélant
son sentier de dépendance (path dependancy).
Ainsi, l’évolution de l’entreprise collective peut être conceptualisée en
trois phases (figure 1). La première, la création d’une entreprise collective,
se déroule sur le mode de l’expérience innovante. La deuxième, la diffusion
de l’innovation par essaimage, correspond à la fédéralisation et à un début
de standardisation. La troisième phase est critique. En effet, la tension entre
innovation et standardisation commence à jouer dès la phase d’essaimage
mais devient plus critique par la suite. La stratégie exclusivement centrée
sur la standardisation est risquée, car elle ouvre la voie à la sortie du champ
de l’économie sociale ; elle ouvre même la voie à la sortie du système, à la