linguistique fonctionnelle d’André Martinet. Diverses autres expériences
linguistiques (Afrique, Maghreb, Bretagne) ainsi que ses recherches et
leurs implications sociales l’ont, dès sa thèse sur les contacts de langues
en Provence (1986), amené à dépasser ces sources pour entrer de plus en
plus franchement dans une approche sociolinguistique. Ses travaux sur
les langues régionales, sur les variations du français et sur la didactique
des langues, ont confirmé à ses yeux la pertinence de cette option. Il a
notamment développé son parcours et ses propositions scientifiques
d’une (socio)linguistique de la complexité dans La linguistique de
terrain (Pur, 2000).
Louis-Jean Calvet, né en Tunisie, y a côtoyé le plurilinguisme
colonial. Arrivé en France à l’âge de 18 ans, il a commencé des études
scientifiques (voulant préparer l’école de géologie de Nancy) puis a
bifurqué vers les Lettres, à Nice, et s’est ensuite inscrit « par hasard » à
la Sorbonne en linguistique. Formé par André Martinet, Henriette Walter
et Denise François il a vite pris ses distances avec la linguistique
fonctionnelle et s’est dirigé entre autres vers les terrains des
colonialismes linguistiques, des argots, de la chanson française, des
villes africaines, des politiques linguistiques, en contribuant ainsi à
l’affirmation d’une approche sociolinguistique. Il en est venu à proposer,
dans Pour une écologie des langues du monde (Plon, 1999) et dans
Essais de linguistique (Plon, 2004), une approche globale des faits de
langues et des théories linguistiques, en termes d’analogique et de
digital, pour tenter de mettre fin à la division entre « linguistique » et
« sociolinguistique ».
Didier de Robillard, né à l’île Maurice, locuteur du créole, du
français et de l’anglais, a aussi connu les turbulences de la fin de la
colonisation en vivant de près la décolonisation de l’île à partir de 1968,
ce qui a posé nombre de problèmes d’ordre linguistique, politique et
socio-ethnique. Après une thèse sur les questions de politique
linguistique faite à Aix-Marseille I, dans un laboratoire fortement
imprégné de créolistique, il enseigne deux ans dans cette université puis
à la Réunion, enfin à Tours. Préoccupé par les problèmes de politique
linguistique, de créolistique et de francophonie, ses rapports avec trois
traditions linguistiques différentes (tradition française, fortement
métalinguistique, tradition anglaise faiblement métalinguistique,
tradition créole de diversité et de souplesse) lui donnent sans doute très
tôt un regard diversifié sur les différentes approches de « la »