3/5
URL: http://www.hls-dhs-dss.chF17468.php
© 1998-2017 DHS: tous les droits d'auteur de cette publication sont réservés au Dictionnaire historique de la Suisse, Berne. Les textes sur
support électronique sont soumis aux mêmes règles que les textes imprimés. Droits d'utilisation et modalités de citation (PDF)
droit naturel, préalable à toute forme d'organisation sociale. Cherchant les traces de la liberté originelle, les
partisans des Lumières crurent les trouver en Suisse; ils pensaient que dans les vallées alpestres retirées,
l'humanité devait être encore proche de l'état de nature. Leur engouement pour la Suisse était l'expression
d'une nouvelle idée de la liberté, qui liait la critique de la civilisation, l'enthousiasme pour la nature et les
aspirations à un renouvellement politique. La formule d'Albert de Haller dans son poème sur les Alpes (1729)
fut la source d'innombrables variations, durant deux siècles: "Là où règne la liberté, toute peine est
amoindrie, les rochers eux-mêmes sont fleuris et Borée est plus doux".
Au XVIIIe s., les concepts de liberté, de démocratie et de république furent de plus en plus étroitement
associés. Cette constellation dura jusque dans la seconde moitié du XIXe s. Elle se reflète dans l'apparition du
terme allemand de Freistaat (littéralement "Etat libre") pour désigner le régime républicain, qui semblait le
seul cadre institutionnel autorisant la démocratie et la liberté. Cependant, rares étaient encore les listes
précises de libertés civiles. Friedrich Münch, sans doute sous l'influence de la déclaration d'indépendance
américaine, écrivit en 1783 que les libertés de conscience, d'opinion, de commerce et d'industrie étaient le
propre des républiques. Pour lui, le pouvoir étatique n'est légitime que s'il garantit et protège ces libertés
individuelles fondamentales.
Dans la Confédération, au XVIIIe s., on se référait sans cesse à la liberté dans le discours politique, mais le mot
recouvrait des acceptions fort différentes et même contradictoires: souveraineté républicaine, privilège acquis
(c'est-à-dire, selon une conviction profondément enracinée en Suisse, statut juridique conféré en échange de
certaines prestations) ou, pour les partisans des idées nouvelles, catégorie du droit naturel à inclure parmi les
droits de l'homme.
L'acception nouvelle gagna rapidement du terrain et les liens de dépendance, tels qu'ils existaient, furent de
plus en plus ressentis comme une atteinte fondamentale à la liberté. Les visions opposées se heurtèrent lors
de certains épisodes (soulèvements de sujets, luttes à l'intérieur de la classe dirigeante), mais il n'y eut
pratiquement jamais de débat sérieux sur les revendications nouvelles. Ce fut seulement sous la pression de
la Révolution française que l'on tenta de répondre par des réformes institutionnelles au besoin moderne de
liberté, mais ces démarches allaient s'avérer trop timides et trop tardives.
Auteur(e): François de Capitani / PM
4 - De la révolution à l'Etat fédéral
En établissant le catalogue des droits imprescriptibles, les révolutions américaine et française firent de la
liberté un élément moteur, à connotation clairement masculine, de l'action politique. Dans la Déclaration des
droits de l'homme de 1789, la liberté est au premier rang des droits individuels, avec la propriété, la sûreté et
la résistance à l'oppression.
La République helvétique proclama en 1798 que la liberté naturelle de l'homme était inaliénable, servant de
fondement à l'égalité des droits et de protection contre l'arbitraire. Mais pour l'application concrète de ce
principe, il fallait une liste de droits particuliers. La liberté de conscience et la liberté de la presse furent
introduites par la Constitution du 12 avril 1798, et peu après la liberté du commerce et de l'industrie, par voie
législative. Le catalogue ainsi défini fut repris lors de la Régénération dans les constitutions cantonales, qui
garantissaient, dans des formulations variées et à des degrés divers, outre la liberté personnelle, celle de la
propriété, du commerce et de l'industrie, la liberté d'établissement, de réunion, d'association, de pétition,
celle de la presse et de l'enseignement. Quelques cantons mentionnaient la liberté de conscience et de
croyance, mais généralement elle était limitée aux confessions chrétiennes et soumise à des réserves
touchant notamment le droit matrimonial.
Après l'échec des révolutions du milieu du XIXe s. dans les pays voisins, la Suisse devint un îlot de liberté en