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essentiellement à réparer les forces des travailleurs et non à des achats inconsidérés et excessifs, en
particulier d'alcool.
Dans l'entre-deux-guerres se répandirent des biens de consommation durables tels que l'automobile, la radio,
les appareils ménagers (aspirateurs, réfrigérateurs), tous pouvant être considérés, à des degrés divers
cependant, comme des symboles de statut social. Mais la pénurie des temps de guerre contribua fortement à
ce que la consommation reste marquée jusqu'au milieu du XXe s. par des principes d'économie, par la notion
de manque, selon l'expérience bien ancrée dans les sociétés préindustrielles.
Auteur(e): Ruedi Brassel-Moser / ME
2 - Vers la société de consommation
La consommation est entrée dans une nouvelle phase dans les années 1950, lorsque les salaires
augmentèrent beaucoup plus vite que le coût de la vie et la productivité du travail encore plus que les
salaires. Cette croissance de longue durée donna l'illusion d'une prospérité perpétuelle et fut à l'origine d'un
développement de la consommation inconnu jusqu'alors. L'échelle des valeurs de la société en fut
bouleversée: les loisirs passèrent avant le travail, la consommation avant la production. Cette société
présente plusieurs traits caractéristiques.
La structure des dépenses des ménages changea rapidement. La part des dépenses de base et surtout de
l'alimentation diminua massivement, en revanche celle des transports, de la formation et des loisirs
augmenta. Parallèlement, les modèles de consommation des classes sociales et leurs niveaux de vie
matériels se rapprochèrent. La part des dépenses des salariés ayant le plus bas pouvoir d'achat pour les
produits alimentaires, boissons et tabac passa de 50 à 27% entre 1921 et 1972, et de 36 à 19% dans la classe
au pouvoir d'achat le plus élevé. En 1998, les dépenses mensuelles des revenus modestes (revenu moyen
1677 fr.) pour ces produits étaient de 235 fr. par personne; celles des revenus supérieurs (14 796 fr. de
dépenses en moyenne mensuelle) de 346 fr. Le type de consommation dépendit désormais moins de
l'appartenance à une classe sociale ou économique que du genre de vie, lequel varie suivant l'âge, le cycle de
vie et le milieu. En 1998, par exemple, les agriculteurs dépensaient 16% pour la nourriture, soit le double de
la moyenne, alors que les chômeurs affectaient 23% de leurs revenus au logement, soit beaucoup plus que la
moyenne.
L'assortiment de marchandises s'est diversifié et les magasins présentent une offre abondante et variée.
L'assortiment de légumes inclus dans l'indice des prix à la consommation a triplé entre 1950 et 1977. Les
appareils ménagers tels que réfrigérateurs, aspirateurs et machines à laver, où la Suisse était à la pointe de
l'Europe, se sont très largement répandus. Au même titre que les voitures et l'électronique de divertissement,
ils se sont "démocratisés" et ne contribuent plus à la position sociale. Mais ils faisaient partie de l'American
way of life qui se manifesta alors en Suisse et s'est exprimée non seulement dans les biens de consommation
durables, mais aussi dans les aliments préparés (plats cuisinés, conserves, surgelés) et la restauration rapide
(Alimentation).
De nouvelles formes de vente et de commercialisation sont apparues à cette époque. En 1948, Migros ouvrit
le premier magasin en libre-service de Suisse, aussitôt imité par Coop. L'achat échappa alors au contrôle
social des vendeurs et voisins pour devenir un acte anonyme et souverain, enfin une activité récréative dans
un monde de centres commerciaux multifonctionnels. Après 1945, on observe aussi une nette augmentation
des petits crédits, qui servirent désormais plus à acheter un véhicule à moteur qu'un appareil ménager. Ces
changements s'accompagnèrent d'une croissance très rapide de la branche publicitaire dans les années
1950. La consommation, dans la tension entre le rationnel et l'irrationnel, la satisfaction des besoins et la
manipulation, l'autonomie et la nécessité d'une protection, devint l'objet d'études de marché (fondation en
1941 de la Société suisse d'étude de marché) et l'on se soucia de protéger les consommateurs. Cela se
traduisit par la création de plusieurs organisations telles que la Fondation pour la protection des