PHY 3813, Hiver 2004 M´ecanique Quantique Avanc´ee
16 juillet, 2004 Introduction `a la Diffusion – Page 1
Introduction `a la Diffusion
1 Introduction
La diffusion est une technique exp´erimentale tr`es puissante dans une gamme de domaines
de la physique. `
A ma connaissance, Ernest Rutherford est le premier qui a utilis´e cette
technique pour ´etudier un syst`eme microscopique; il a compar´e la pr´ediction de son mod`ele
de l’atome dans le cas de la diffusion d’une particule charg´ee (une particule α, c’est-`a-dire,
un noyau d’He) sur une feuille d’atomes d’or. Les r´esultats de l’exp´erience concordaient avec
ses pr´edictions, une ´etape de grande importance, ´evidemment, dans la compr´ehension de la
Nature. En physique des particules, l’acc´el´erateur/collisionneur peut ˆetre vu comme une
incarnation moderne de la technique invent´ee par Rutherford. Typiquement, une exp´erience
est d’un de deux types: un faisceau sur une cible fixe, ou un faisceau sur un autre. Le premier
type est dit dans le r´ef´erentiel du laboratoire; le deuxi`eme est souvent dans le r´ef´erentiel du
centre de masse. Peu importe le type de situation exp´erimentale, l’analyse d’une collision
se fait premi`erement en d´ecrivant le probl`eme en termes des coordonn´ees relatives et du
centre de masse. La dynamique du centre de masse est triviale, et on se concentre sur le
mouvement relatif, qui est d´ecrit par un hamiltonien d’une particule de la masse r´eduite, en
interaction avec un potentiel ancr´e `a l’origine. Nous allons supposer que cela a ´et´e fait, et
on se concentre sur le probl`eme relatif, ainsi formul´e. Je vais utiliser mpour la masse; en
principe, c’est la masse r´eduite.
La mesure qu’on fait dans une exp´erience de collision (et donc la grandeur qu’on veut cal-
culer) est la section efficace diff´erentielle, ce qui correspond intuitivement `a la probabilit´e
de diffusion par un angle donn´e. Plus pr´ecisement, on d´efinit la section efficace de la fa¸con
suivante. Le nombre de particules dn diffus´ees dans une petite r´egion angulaire dΩ en direc-
tion (θ, φ)Ω dans un intervalle de temps dt est proportionnel `a dΩ, dt, et au courant de
particules incidentes, jinc. On ´ecrit:
dn =
d·jinc ·dt ·d.(1)
/d (parfois ´ecrite σ(Ω)) est la section efficace diff´erentielle. En principe, /dΩ peut
d´ependre de θ, φ, mais si le faisceau est en direction zet que le potentiel est sym´etrique sous
rotation, /dΩ ne d´epend pas de φ.
La section efficace totale est l’int´egrale de /dΩ sur tous les angles:
σ=Zd
d.(2)
La dimension de σ(et de /dΩ) est longueur2; l’unit´e standard est le barn: 1 bn = 1024
cm2.
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2 Ondes partielles
On consid`ere une particule de masse men interaction avec un potentiel V(r). On suppose
que le potentiel d´epend de rseulement, et que V(r)0 lorsque r suffisamment
rapidement (plus rapidement que 1/r). On commence avec l’´etude d’une onde plane de
vecteur d’onde ket d’´energie E= ¯h2k2/2m. Cette onde et sa densit´e de courant sont:
ψ(r) = eik·r,j(r) = ¯h
2mi(ψψ− ∇ψ)ψ) = ¯hk
m.(3)
Pour simplifier la discussion, on suppose que kˆ
z. Il est tr`es utile de faire un d´eveloppement
de l’onde plane en termes d’ondes sph´eriques (ou ondes partielles):
eikz =
X
l=0
il(2l+ 1)Pl(cos θ)jl(kr),(4)
o`u les Plsont les polynˆomes de Legendre (Pl(cos θ) = q4π/(2l+ 1)Yl0(θ, φ)), et jl(kr) est
une fonction de Bessel sph´erique (voir la fin de ce texte pour quelques propri´et´es des jl).
Dans la limite r→ ∞,jl(kr)(kr)1sin(kr lπ/2); donc
eikz
X
l=0
il(2l+ 1)Pl(cos θ)1
kr sin(kr lπ/2)
=
X
l=0
(2l+ 1)Pl(cos θ)1
2ikr ³()l+1eikr +eikr´(5)
Dans le dernier facteur, on voit que le premier terme repr´esente la composante de l’onde
plane se propageant vers l’origine (onde entrante), tandis que l’autre terme se propage vers
l’infini (onde sortante). (Remarque: il est important de ne pas interpr´eter l’onde sortante
comme une onde diffus´ee: il n’y a pas de diffusion, car on n’a pas encore ajout´e de potentiel.)
Si on envoie une onde plane vers un potentiel, la pr´esence du potentiel va diffuser l’onde,
ce qui aura un effet sur l’onde sortante seulement. Donc on peut dire qu’en pr´esence d’un
potentiel,
ψ
X
l=0
(2l+ 1)Pl(cos θ)1
2ikr ³()l+1eikr +Sl(k)eikr´,(6)
o`u Sl(k) est une phase; on va ´ecrire Sl(k) = exp 2l(k), o`u δl(k) est le ephasage de l’onde.1
´
Equivalemment, on peut ´ecrire
ψeikz +
X
l=0
(2l+ 1)Pl(cos θ)1
2ikr (Sl(k)1)eikr eikz +f(θ)eikr
r,(8)
1Pourquoi “d´ephasage”? On peut ´ecrire (6) de la fa¸con suivante, ce qui est `a comparer avec la premi`ere
ligne de (5):
ψ
X
l=0
elil(2l+ 1)Pl(cos θ)1
kr sin(kr /2 + δl).(7)
La phase du sin change par δl.
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o`u l’amplitude de diffusion f(θ) est
f(θ) = 1
2ik
X
l=0
(2l+ 1)Pl(cos θ)(Sl(k)1)
=1
k
X
l=0
(2l+ 1)Pl(cos θ)elsin δl.(9)
Parfois, on ´ecrit f(θ) = Plfl(θ), o`u fl(θ) = k1(2l+ 1)Pl(cos θ)elsin δl.
L’´eq. (8) est tr`es intuitive: la solution de l’´equation se s´epare en une partie qui est ce qu’on
aurait eu en l’absence du potentiel (l’onde plane) et une deuxi`eme partie, l’onde diffus´ee.
Ayant d´ecrit la forme asymptotique de la solution et d´efini les grandeurs principales de la
diffusion (section efficace, amplitude de diffusion, ephasages), il reste deux choses `a faire.
Il faut trouver la relation entre f(θ) et la section efficace, et il faut apprendre `a calculer f(θ)
pour un potentiel et kdonn´es.
2.1 Relation entre f(θ)et la section efficace
Calculons le courant de la fonction d’onde (8):
j(r) = ¯h
2mi(ψψ(ψ)ψ) (10)
La fonction d’onde comprend deux parties, l’onde plane incidente et l’onde diffus´ee. Le
courant comprend donc trois termes: un terme quadratique en l’onde plane, un terme mixte,
et un terme quadratique en l’onde diffus´ee. Le premier terme ne donne rien d’autre que le
courant (3).
Le terme mixte contient des termes proportionnels `a exp ±ikr(1 cos θ). Ces termes varient
extrˆemement rapidement en fonction de θ(on note que kr est grand dans la r´egion asympto-
tique, donc un petit changement de cos θimplique un tr`es grand changement de la phase de
l’exponentielle) et dans une r´egion angulaire arbitrairement petite, on aura une annulation
entre diff´erentes contributions au courant.
Finalement, le troisi`eme terme est le courant de particules diffus´ees. On peut n´egliger le
gradient agissant sur f(θ)/r: ces termes donnent une contribution r3, qui est n´egligeable
pour rgrand. Un peu d’alg`ebre donne le r´esultat final:
j=¯hk
mˆ
z+¯hk
m|f(θ)|2
r2ˆ
r.(11)
Selon la d´efinition donn´ee plus haut de la section efficace diff´erentielle, on trouve
d=|f(θ)|2.(12)
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La section efficace totale est donn´ee par l’int´egrale de (12):
σ= 2πZπ/2
0sin θ|f(θ)|2.(13)
On peut montrer que σs’´ecrit comme une contribution de chaque onde partielle (c’est-`a-dire,
chaque valeur de l):
σ=4π
k2X
l
(2l+ 1) sin2δlX
l
σl.(14)
2.2 Calcul de f(θ)
Cette partie du travail est un peu plus difficile. On a l’´
Equation de Schr¨odinger (´
ES):
¯h2
2m2ψ+V(r)ψ=Eψ. (15)
Dans le cours M´ecanique Quantique I, on a ´etudi´e l’´
ES pour nombreux potentiels; on s’est
int´eress´e principalement aux ´etats li´es (d’´energie n´egative si le potentiel est nul `a r=). Ici,
on veut trouver des solutions d’´energie positive. Le type de solution qu’on cherche correspond
`a l’envoi d’une onde plane vers le potentiel, plus une onde diffus´ee. Ceci nous donne une
condition sur la fonction d’onde `a l’infini, comme on va voir bienot. Or, le potentiel ´etant
invariant sous rotation, on peut chercher une solution form´ee d’une fonction d’onde radiale
et d’une harmonique sph´erique. En fait, on peut aller plus loin: si l’onde plane se propage
en direction z, la solution sera invariante sous rotation autour de cet axe: c’est-`a-dire, la
solution sera ind´ependante de φ, et donc la partie angulaire de la solution sera un Yl0, ou,
´equivalemment (`a une constante pr`es), un Pl(cos θ).
On cherche donc une solution de (15) de la forme
ψ(r, θ) = Pl(cos θ)Rl(r).(16)
La fonction d’onde radiale ob´eit `a:
R00
l(r) + 2
rR0
l(r) + Ãk22mV (r)
¯h2l(l+ 1)
r2!Rl(r) = 0,(17)
o`u k2= 2mE/¯h2est le vecteur d’onde. L’´eq. (17) est une ´equation diff´erentielle du deuxi`eme
ordre; il y a donc deux solutions ind´ependantes, et la solution la plus g´en´erale est une
combinaison lin´eaire des deux. Cependant, le comportement lorsque r0 ´elimine l’une de
ces solutions: il y a une et seulement une solution qui est acceptable physiquement.2
2“Comportement lorsque r0” est un peu trop restrictif, en fait. Par exemple, pour la sph`ere dure
(V(r) = pour r < a), c’est le comportement `a r=aqui est important: il faut que Rl(a) = 0. Mais la
conclusion est la mˆeme: il y a une seule solution physiquement acceptable.
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Dans la limite r→ ∞, on suppose que V0, auquel cas (17) tend vers l’´equation de Bessel
sph´erique. La solution acceptable sera donc une certaine combinaison lin´eaire des fonctions
de Bessel sph´eriques, jl(kr) et nl(kr), asymptotiquement. Si on imagine pour le moment
qu’on a d´etermin´e la solution, on connaˆ
it les coefficients des deux fonctions de Bessel:
Rl(r)jl(kr) + Clnl(kr),(18)
o`u on a choisi la normalisation de Rlde sorte que le coefficient de jlsoit 1, et o`u le coefficient
Cl(r´eel) est d´etermin´e.
Connaissant le comportement asymptotique des fonctions de Bessel sph´eriques, on peut ´ecrire
celui de Rl:
Rl(r) 1
2ikr ³ei(krlπ/2) ei(kr/2)´Cl
2kr ³ei(krlπ/2) +ei(kr/2)´
=1
2ikr ³(1 + iCl)ei(krlπ/2) (1 iCl)ei(kr/2)´
=(1 + iCl)(i)l
2ikr µ()l+1eikr +1iCl
1 + iCl
eikr.(19)
Ceci multipli´e par Pl(cos θ) est la solution physiquement acceptable de (15) de moment
angulaire l. La solution g´en´erale de cette ´equation est une combinaison lin´eaire de ces
solutions:
ψ=X
l
alPl(cos θ)Rl(r).(20)
Les coefficients alsont d´etermin´es par le fait que la fonction d’onde consiste en l’onde plane
et l’onde diffus´ee. Dans la r´egion asymptotique, donc, la solution doit se comporter comme
(6), r´ep´et´e ici:
ψ
X
l=0
(2l+ 1)Pl(cos θ)1
2ikr ³()l+1eikr +Sl(k)eikr´,
En comparant cette ´equation et (19) dans (20), on voit que les coefficients sont
al=(i)l+1(2l+ 1)
1 + iCl
.
Plus int´eressant (difficile `a croire, mais vrai. . . ) est le fait que les phases Sl, et donc les
d´ephasages, sont d´etermin´ees en comparant (19) et (6):
Sl(k) = e2l=1iCl
1 + iCl
,(21)
ou, ´equivalemment,
tan δl=Cl.(22)
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