Maladie de Parkinson à début tardif : particularités Pr Marc Verny Centre de Gériatrie, pav. M. Bottard Hôpital de la Salpêtrière Age-specific incidence rates of idiopathic Parkinson's disease, by 5-year age interval, per 100, 000 person-years of pre-illness follow-up in an all-male cohort, Honolulu Heart Study, O'ahu, Hawai'i, 1965-1994 Age group N umber of cases Personyears Incidence rate per 100,000 person-years Standard error 45 to 49 0 2,783.8 <0.0 0.0 50 to 54 1 16,4,33.7 6.1 6.1 55 to 59 9 26,655.1 33.8 11.3 60 to 64 9 32,660.0 27.6 9.2 65 to 69 16 35,213.4 45.4 11,4 70 to 74 21 31,343.2 67.0 14-,6 75 to 79 25 17,975.3 139.1 27.8 80 to 84 9 7 ,701.8 116.9 38.9 85 to 94 2 2,374.1 84,2 59.5 90 to 94 0 197.2 0.0 0.0 92 173 337.6 Total --- Prévalence chez le sujet âgé 1.8 % chez les plus de 65 ans Augmentation croissante avec l’âge : 2.4 % de 65 à 69 ans 2.6 % de 85 à 89 ans De Rijk. Méta-analyse. Neurology, 2000 Problématique particulière chez le patient âgé? La démarche diagnostique est-elle différente ? Le diagnostic de MDPI est-il plus difficile ? Les diagnostics différentiels sont-ils différents ? Quelles règles d’utilisation des traitements ? La démarche diagnostique estelle différente ? Le syndrome parkinsonien Tremblement de repos Rigidité Akinésie Bradykinésie Défaut d'initiation Hypokinésie Troubles posturaux La démarche diagnostique est-elle différente ? Non ! 1) Amélioration franche sous L-dopa (> 30%) 2) Début asymétrique 3) Tremblement de repos 4) Akinésie 5) Rigidité Diagnostic probable : 1 et 2 + (3 ou 4 ou 5) Diagnostic possible: 2 + (3 ou 4 ou 5) La démarche diagnostique Critères d'exclusion: 1) ophtalmoplégie 2) instabilité posturale sévère précoce 3) syndrome cérébelleux 4) syndrome pyramidal 5) incontinence précoce 6) apraxie 7) Atcd neurolept (- 6 mois), AVC, encéphalite, intoxication (CO, Mn). Diag. de MDPI plus difficile ? MDP débutant vers 70 ans assez souvent bilatérale d'emblée altération de la marche fréquemment inaugurale tremblement de repos parfois très tardif, restant léger déséquilibre à la marche : rétropulsion Diag. de MDPI plus difficile ? Profil encore modifié après 80 ans ? Large prédominance de l'akinésie Réduction de l'activité attribuée à une dépression ou au vieillissement !?? Troubles de la marche, instabilité posturale et rétropulsion +++ Troubles cognitifs et hallucinations Parkinson disease with old-age onset: a comparative study Diederich NJ et al. Arch Neurol 2003 Pour une même durée d’évolution, début tardif = troubles moteurs plus importants. Différence due à maladie plus rapidement progressive, traitement moins agressif ou efficace, rôle des comorbidités ? Rôle du vieillissement ? Difficulté : établir le diagnostic positif Chercher des éléments caractéristiques de la maladie de Parkinson Diagnostic de certitude : clinicopathologique Dopa-sensibilité : bonne indicateur ; établir formellement amélioration sous L Dopa Pour objectiver cela et suivre l'évolutivité : score moteur (sous score de l’UPDRS) Echelle UPDRS (Fahn et Elton, 1987) NOM : Date : Dernière prise de traitement et doses III) examen moteur parole expression faciale se lever d’une chaise posture stabilité posturale démarche bradykinésie 01234 01234 01234 01234 01234 01234 01234 Echelle UPDRS (Fahn et Elton, 1987) D = droit ; G = gauche tremblement de repos 01234 tremblement d’action 01234 rigidité 01234 tapotement des doigts 01234 mouvements des mains 0 1 2 3 4 « marionnettes » 01234 agilité du pied 01234 Diagnostic neuropathologique Corps de Lewy : Première description, 1912 : F.H. Lewy dans des noyaux (S Inom., NBM...) de patients atteints d’une maladie de Parkinson Inclusion intraneuronale éosinophile considérée longtemps pathognomonique de la MDPI (localisation préférentielle aux noyaux pigmentés du TC) Historique : Corps de Lewy 1919 Tretiakoff : dénomination des CL et importance des lésions de la SN 1960 : CL constitués de protéines 1988 : CL fortement Ubiquitine + 1997 cas familiaux de MDP : mutation de l ’alpha synucléine Alpha synucléine: composant principal CL Alpha synucléine - Alpha synucléine = NACP, synelfin, phosphoneuroprotein… - Synthèse cytoplasmique et transport dans les terminaisons axonales présynaptiques, destruction par le système du protéasome - Anticorps anti-ubiquitine et anti-synucléine : marqueurs très sensibles des lésions de type Lewy - Mise en évidence des Lewy neurites (cf DCL) Maladie de Parkinson Sites lésionnels : noyaux pigmentés du TC (SN, LC…) NBM : très cholinergiq.; hallucinations ? Amygdale : nb neurites et CL; rôle ? CA2 : nb neurites (cf DCL) cortex : lésions constantes ? Rôle ? Photos Duyckaerts et Verny; Labo Escourolle Neuropath Salpêtrière Photos Duyckaerts et Verny; Labo Escourolle Neuropath Salpêtrière Éviter les pièges Installation très insidieuse des troubles Fatalisme déplacé: « Que voulez vous, à son âge!… » Baisse de l'activité ou du « tonus » : normal ? Asthénie physique et tristesse rapportées à une dépression Éviter les pièges Ne pas confondre tremblement d’attitude essentiel et tremblement de repos : dans le maintien des attitudes ou dans le mouvement, l’écriture… touchant aussi le menton et la voix 50% d’ATCD familiaux souvent de début précoce Tremblement essentiel ou Parkinson ? Me PEL., 75 ans Tremblement postural depuis 8 ans mais : Bras gauche >> bras droit Associé à un tremblement de repos Discrète akinésie et rigidité du bras gauche Améliorée par levodopa Tremblement essentiel ou Parkinson ? Me PEL., 75 ans Pas de perte dopaminergique => Diagnostic de TE Les diagnostics différentiels sont-ils différents ? Non Étiqueter étiologiquement le syndrome parkinsonien Aucun examen complémentaire ne permet d’affirmer le diagnostic de MDPI 2 axes différentiel principaux; syndromes parkinsoniens iatrogènes autres maladies neurodégénératives (20%) Autres diagnostics différentiels Scanner cérébral important chez le SA Hématome sous-dural surtout bilatéral Hydrocéphalie à pression normale Etat multi-lacunaires ??? Nécrose bipallidale (intoxication au CO et anoxies cérébrales) Sd parkinsonien iatrogène Bilatéral et symétrique d'emblée et affecte plus sévèrement la marche Preuve = régression Délai de 1 à 2 mois en général jusqu’à 6 mois Traitements : neuroleptiques y compris Primpéran et Noctran Mais aussi : inhibiteurs calciques (Sibelium) Plus rarement : Sureptil ou Tildiem Syndrome post-neuroleptiques ? Mr NOI… 68 ans Souffre de psychose, diagnostiquée à l’âge de 26 ans, traitée par neuroleptiques Se plaint d’une lenteur généralisée, et des difficultés avec le MS droit depuis 3 ans Haloperidol remplacé par olanzapine, sans amélioration Akinésie et rigidité symétrique des 4 membres à l’examen Pas de trouble de déglutition, pas de chutes, pas de « freezing », pas de trouble sphinctérien Syndrome post-neuroleptiques ? Examen clinique Marche à petits pas Diminution du ballant des 2 bras à la marche Faciès figé Akinésie et hypertonie des 4 membres, symétrique, avec roue dentée Réflexe cutané plantaire en flexion Pas de syndrome cérébelleux, pas de signes oculomoteurs Tests neuropsychologiques Efficience globale diminuée (Mattis) Trouble mémoire résultant d’un trouble attentionnel Syndrome dysexécutif avec inertie comportementale Syndrome post-neuroleptiques ? IRM Normale Conclusion du staff après hospitalisation Pas de tremblement, syndrome extrapyramidal très symétrique Suggère un syndrome parkinsonien induit par les neuroleptiques Mais… Syndrome post-neuroleptiques ? perte dopaminergique sévère bilatérale, en faveur d’un syndrome parkinsonien dégénératif Autres maladies neurodégénératives Suspecter sur la constation d’un syndrome parkinsonien : symétrique à prédominance axial non dopa réactif avec troubles cognitifs précoces Associé à des signes neuro faisant discuter : PSP : chutes, tbles oculomot., dysarthrie AMS : dysautonomie, sd pyram, sd cérébell DCL : sd démentiel avec halluc précoces… Chez le SA : une maladie dopaminergique « plus » Dégénérescence progressive nigrostriatale : traduction clinique = efficacité dopaminergique Début SA : lésions non dopaminergiques précoces voire présentes d’emblée (noyaux sous-corticaux cholinergiq, noradrénergiq, sérotoninergiq ; cortex) Hétérogénéité lésions non dopaminergiq = variété clinique et différentes réponses thérapeutiques Réponse dopaminergique svt partielle Moindre fréq. complications motrices par Ttt dopaminergique Caractère moins « pur » dopaminergiques +/d’autres facteurs liés au vieillissement cérébral et systémique pourraient expliquer ? Formes évoluées de maladie ou formes à début tardif : fluctuations d’efficacité thérapeutique peu marquées et dyskinésies inexistantes ou peu sévères Kumar et al Mov Disord 2005 Grandas et al. J Neurol 1999 Tolérance moindre périphériq et psychiq. Ttt dopaminergique Altération métabolisme médicaments : baisse élimination rénale augmentation perméabilité BHE… Actions sur R. aminergiques périphériq : développement EI digestifs, et vasculaires = hypotension surtout orthostatique (chutes?) Mauvaise tolérance psychique : hallucinations et psychoses ; tbles de vigilance surtout si lésions cortex Rascol et al NEJM 2003 Règles thérapeutiques Savoir déterminer quand le traitement devient nécessaire Préférer la dopathérapie seule Jamais d’anticholinergique a priori Utilisation des agonistes en fonction du profil du patient Utilisation L-DOPA L-DOPA : outil diagnostique Posologie progressive, sans hésiter à atteindre des doses conséquentes (1g/j) à administrer de façon prolongée (au moins 3 mois) Chez certains patients, aucune réponse claire : à l’arrêt de la L-DOPA apparaît a posteriori bénéfice Prise en charge EI périphériq du Ttt dopaminergique Nausées voire vomissements : dompéridone hTAO : ajuster éventuel traitement anti-HTA et de rechercher autres traitements à effet hypotenseur (psychotropes en particulier). Sinon, dompéridone et port de bas de contention; voire Fluoro cortisone ou Gutron Prise en charge EI psychiq du Ttt dopaminergique Hallucinations peu sévères (rareté, critique relative par le patient, abs conséq comportementales) : respectées ? pas augmentation Ttt dopaminergiq et évaluer fonctions cog. Hallucinations +++, psychose ou synd. confusionnel = prise en charge hiérarchisée codifiée (Wolters et al Curr Opin Neurol 2001) 1) recherche pb médical systémique (infection, urgence chirurgicale, déshydratation…) 2) modification thérapeutique récente Ttt antipark ou psychotropes ? Retour Ttt antérieur Prise en charge EI psychiq du Ttt dopaminergique Si insuff. Ttt antipark progressivement allégé : suppression d’anticholinergiques, de sélégiline ou d’agonistes dopaminergiques voire réduction LDOPA. Soit disparition complications psychiques sans aggravation motrice Soit majoration invalidante des troubles moteurs : si détérioration cog. : IAchE (parfois reprise L-DOPA possible) sinon faibles doses de clozapine (12,5 à 50 mg) Fluctuations d’effets et dyskinésies Akinésie nuit ou matin : formes LP L-DOPA au coucher (100 à 200 mg) +/- dispersible la nuit ou le matin Fluctuations diurnes : fractionnement du traitement, formes à libération contrôlée, inhibiteur d’enzymes de dégradation L-DOPA (COMT, IMAO-B), introduction d’un agoniste dopaminergique? Pompe à apomorphine sous cut ou L-DOPA duodénale ?? Troubles axiaux Dysarthrie : traitement dopaminergiq faible effet Troubles de déglutition : idem; injection souscutanée d’apomorphine 1/2 h avant le repas ? Troubles de la marche : variés (difficultés à l’initiation du pas, freezing, festination) de pathogénie complexes (certains améliorés par Ttt dopaminergique, d’autres incomplètement ou pas du tout) ; chez SA, multiplicité d’autres facteurs potentiels (altération visuelle, tbles sensitifs proprioceptifs, dysfonction souscortico-frontal dégénératif ou vasculaire, troubles orthopédiques, etc.). Prise en charge Au delà des médicaments : Importance de la rééducation : kinésithérapie et orthophonie Traiter efficacement la dépression (IRS) Attention aux pathologies intercurrentes Évaluation cognitive +++ et Ttt IAchE Conclusions Difficultés de savoir ce qui est du au simple vieillissement (peu de choses !) aux comorbidités (modifications de l’expression de la MDPI) aux autres maladies neurodégénératives Construction du traitement au cours de la maladie Prise en charge globale et pragmatisme ! Surveiller cognition +++