courbes intensité

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COURBES INTENSITÉ-POTENTIEL
I-Courbes intensité-potentiel
1) Notion de cinétique des réactions rédox en solution
a) introduction
Les diagrammes E-pH étudiés précédemment permettent une étude thermodynamique des phénomènes rédox en solution. Ils permettent donc de prévoir le sens d’évolution d’un système réactionnel.
Mais les phénomènes rédox impliquant un mécanisme souvent complexe lié à l’échange d’électron,
le contrôle cinétique est souvent fréquent.
De même que, dans l’étude thermodynamique, la f.e.m. E d’une pile est apparue comme la traduction électrique de la grandeur chimique ∆rG décrivant le système réactionnel mis en jeu dans
la pile, de même on cherche ici la grandeur électrique qui traduit la vitesse d’évolution du
système.
b) vitesse de réaction
α) réaction électrochimique
La demi-équation électronique associée à un couple rédox ne correspond pas à un processus réel
dans la solution car les électrons n’existent pas à l’état libre en solution aqueuse.
Cependant, cet échange d’électron peut être réalisé à la surface d’un conducteur solide qui permet la
circulation des électrons. On parle dans ce cas de réaction électrochimique.
REDUCTION

→
β Red décrit alors ce processus et l’on peut définir les vitesL’équation α Ox + n e– – OXYDATION
←

ses de la réaction dans le sens direct ou dans le sens inverse:
vRED = −
FG
H
1 dn(Ox)
α
dt
IJ
K
=
RED
FG
H
1 dn( Red )
β
dt
IJ
K
et
vOX =
RED
FG
H
1 dn( Ox)
α
dt
IJ
K
=−
OX
FG
H
1 dn( Red )
β
dt
IJ
K
.
OX
Pour le bilan global, on peut définir un avancement de réaction ξ(t) caractérisant chaque état du
système au cours du temps. La vitesse de réaction correspondante est
v=
dξ(t )
= vRED − vOX .
dt
Si le bilan global est une réduction, la vitesse v est positive; elle sera négative pour une oxydation
globale.
β) intensité du courant
Ox
e–
La quantité d’électrons mise en jeu pendant la durée dt
au cours de laquelle l’avancement varie de dξ est dn = n.dξ; il lui correspond
la charge électrique dq = n.dξ.NA (–e). En introduisant la constante de FaraRed
day F = NA e, il vient
dξ(t )
dq = – n.F.dξ = – n.F.
dt = – n.F.v dt
dt
Le bilan est écrit dans le sens de la réduction donc cette charge traverse algébriquement l’interface
dans le sens métal–solution.
Convention: l’intensité du courant électrique qui traverse l’interface métal–solution est orientée
algébriquement dans le sens métal → solution.
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Courbes intensité-potentiel
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Avec la convention précédente, on peut écrire dq = I dt d’où I = − nF v ou encore
b
g
I = nF vOX − vRED .
Conclusion:
L’intensité qui traverse l’interface métal-solution d’une électrode est proportionnelle à la vitesse
du processus électrochimique qui s’y déroule.
Ÿ si I est positive, l’électrode est globalement le siège d’une réaction d’oxydation: elle fonctionne
en anode.
Ÿ si I est négative, l’électrode est globalement le siège d’une réaction de réduction: elle fonctionne
en cathode.
La mesure de l’intensité du courant qui circule dans une électrode permet donc d’étudier la cinétique d’un processus rédox.
c) mécanisme
Dans une électrode, le processus rédox est localisé au voisinage de l’interface métal–solution où
s’effectue le transfert d’électrons.
Il se produit différentes étapes:
Ÿ approche des réactifs vers le métal;
Ÿ transformations chimiques au voisinage du métal: transferts de protons ou de ligands, réactions de surface (adsorption, cristallisation, désorption), transfert d’électrons;
Ÿ éloignement des produits (mobiles) de la réaction.
La vitesse globale de la réaction électrochimique dépend de l’ensemble de ces étapes; les étapes qui
sont limitantes du point de vue cinétique sont en général l’approche par les réactifs et le transfert d’électrons.
3) Courbes intensité-potentiel
a) définition
Les facteurs cinétiques qui interviennent sont les mêmes que pour une réaction hétérogène non rédox: concentration des espèces dissoutes ci, température T, aire S de l’interface métal–solution, état de l’interface, nature du métal. Il existe un facteur supplémentaire qui est la d.d.p. V
entre le métal et la solution.
L’intensité I du courant dépend de tous les facteurs précédents. En particulier, les courbes représentant les variations de I en fonction de V, en maintenant T, S et ci aux mêmes valeurs, sont appelées courbes intensité–potentiel du couple Ox /Red de l’électrode considérée.
b) montage expérimental
Un courant ne peut traverser une électrode de manière permanente que si celle-ci appartient à un
circuit permettant la circulation des électrons.
On ne peut mesurer que les différence de potentiel (et non les poE
tentiels seuls).
UMES
Le montage utilisé pour relever les courbes intensité-potentiel tient
compte de ces deux contraintes: c’est un montage à trois
mV
mA
électrodes.
I
Ÿ l’électrode étudiée est appelée électrode de travail (E.T.);
Ÿ une électrode en métal inerte permet la circulation du courant. On ne s’intéresse pas aux réactions qui s’y déroulent.
On l’appelle contre-électrode (C.E.);
Ÿ une électrode de référence (E.Réf) permet de déterminer
E.Réf
C.E.
E.T.
une d.d.p. Elle doit être traversée par un courant d’intensité
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Courbes intensité-potentiel
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négligeable.
La source de tension est continue et le montage potentiométrique permet d’imposer une d.d.p.
(VE.T. - VC.E.) de valeur et de signe variable entre les électrodes C.E. et E.T.
Ÿ Si (VE.T. – VC.E.) > 0, le courant entre dans la solution par E.T. et en sort par C.E. Avec
l’orientation conventionnelle indiquée, il est donc positif et E.T. joue le rôle d’anode
Ÿ Si (VE.T. – VC.E.) < 0, le courant entre dans la solution par C.E. et en sort par E.T. Avec
l’orientation conventionnelle indiquée, il est donc négatif: E.T. joue le rôle de cathode.
On mesure l’intensité parcourant l’électrode de travail à l’aide du milliampèremètre. La tension
mesurée n’est pas (VE.T. – VC.E.) mais UMES = (VE.T. – VREF). Comme l’intensité du courant qui
traverse l’électrode de référence est très faible du fait de la très forte impédance interne du
voltmètre, le potentiel VREF par rapport à l’électrode standard à hydrogène est, par définition,
le potentiel rédox EREF de l’électrode de référence, c’est-à-dire le potentiel d’équilibre de
cette électrode. Il est calculable par la formule de Nernst. Le plus souvent, il est donné par le
constructeur.
Dans la suite, on choisit comme origine des potentiels électriques, le potentiel de l’électrode standard à hydrogène. On notera donc V = VE.T. = UMES + EREF.
Si la tension imposée (VE.T. – VC.E.) est nulle, l’intensité du courant qui traverse l’électrode de travail est nulle. Le potentiel qu’elle prend est alors caractéristique de son état d’équilibre et l’on
peut dire qu’il est égal au potentiel rédox du couple mis en jeu dans l’électrode, soit EOX/RED.
Il est calculable à partir de la formule de Nernst, connaissant les concentrations des espèces.
On a dans ce cas:
EOX/RED = (UMES)I = 0 + EREF.
c) systèmes rapides et systèmes lents
Un système électrochimique est l’ensemble constitué par un couple rédox et le métal au contact
duquel s’effectue la réaction électrochimique associée à ce couple.
On remarquera que la nature du métal joue un rôle aussi déterminant que le couple rédox étudié.
Selon l’allure des courbes intensité-potentiel, on distingue deux types de système:
u systèmes rapides:
L’intensité qui traverse E.T. est mesurable dès que la d.d.p. V – EOX/RED est non nulle. Si
V > EOX/RED, l’intensité est positive et il se produit une oxydation; c’est une réduction dans le
cas contraire. La valeur élevée de I pour V ≠ EOX/RED traduit la rapidité des échanges électroniques du couple sur le métal considéré. L’intersection de la courbe expérimentale avec l’axe
I = 0 permet de déterminer EOX/RED.
u systèmes lents
Les échanges électroniques du couple sur le métal sont lents. Lorsque V – EOX/RED est faible,
l’intensité dans E.T. reste indécelable. On n’obtient un courant mesurable que pour une valeur de V – EOX/RED suffisamment élevée. Il existe donc une plage de valeurs de V – EOX/RED
pour laquelle l’intensité dans E.T. est nulle ou quasi nulle: il en résulte qu’il est impossible
de déterminer EOX/RED à partir de la détermination expérimentale de la courbe I(V). Autrement dit, le potentiel d’équilibre (à courant nul) n’est pas bien défini pour un tel système: les
électrodes de référence sont, pour cette raison, constituée avec des systèmes rapides.
Un même couple rédox peut être rapide avec un métal et lent avec un autre. Par exemple, les
échanges électroniques pour le couple H+/H2 sont 2 millions de fois plus rapides sur une
électrode de platine que sur une électrode de mercure.
Lorsque la réaction électrochimique entraîne une importante modification de la structure des espèces, le couple rédox sera lent quel que soit le métal utilisé. Par exemple, le couple O2/H2O est
lent quelle que soit l’électrode.
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d) surtensions
Déf: On appelle surtension pour le système considéré la quantité (V – EOX/RED).
La surtension dépend donc de l’intensité qui traverse l’électrode.
Si E.T. joue le rôle d’anode, alors (V – EOX/RED) est positive et s’appelle surtension anodique ηA.
Si E.T. joue le rôle de cathode, alors (V – EOX/RED) est négative et s’appelle surtension cathodique ηC.
Pour un système rapide, η s’annule quand I s’annule
En revanche, pour un système lent, ηA et ηC sont non nulles même si I s’annule. On appelle surtensions à vide (ηA0 et ηC0) les valeurs minimales de |V – EOX/RED| permettant de détecter un
courant.
Les valeurs des surtensions à vide dépendent de la nature du couple rédox et de la nature du métal
(et du choix de l’appareil de mesure choisi pour détecter le courant).
Exemples:
Ÿ surtension cathodique du dihydrogène:
Il s’agit du processus rédox suivant 2 H+ + 2e– → H2(G)
métal
ηC0 (en V)
Pt platiné
–0,01
Pt poli
–0,09
Fe
–0,40
Zn
–0,75
Hg
–1,04
(Le platine platiné est du platine sur lequel a été déposé un dépôt électrolytique de platine pulvérulent.)
On constate que ηC0(H2) prend des valeurs très différentes suivant le métal utilisé. Elle peut être
négligeable ou atteindre des valeurs importantes (dans le cas du mercure).
Ÿ surtension anodique du dioxygène:
Il s’agit du processus suivant:
H2O → ½ O2(G) + 2H+ + 2e–
La surtension varie beaucoup moins que dans le cas de H2. On peut considérer qu’une valeur
moyenne pour l’ensemble des métaux est ηA0 = 0,5 V (c’est la valeur par exemple pour une
électrode de platine poli).
e) influence de la diffusion
Lorsque V devient très différent de EOX/RED, la vitesse d’oxydation (ou de réduction) est de plus en
plus grande, ce qui entraîne la disparition des espèces au voisinage du métal.
Elles sont remplacées par d’autres venues du reste de la soI
lution. C’est alors le processus de transfert de matière
(en général dû à la diffusion) qui devient cinétiqueFe2+ → Fe3+
ment limitant.
V
La vitesse de ce processus est pratiquement indépendante du
Fe2+ ← Fe3+
potentiel de l’électrode; il en est donc de même du
courant qui traverse cette électrode. La courbe intensicouple Fe3+/Fe2+ sur électrode de
té-potentiel présente alors un palier dont l’ordonnée
platine
est proportionnelle à la concentration des espèces
considérées.
I
H2O → O2
Si le réactif considéré est le solvant, la concentration est si élevée
partout que le phénomène de transport n’est jamais limitant: la
V
courbe ne présente pas de palier dans ce cas.
On remarque par ailleurs que dans le cas de l’eau, les couples
H ← H2O
rédox mis en jeu ne sont pas les mêmes selon que l’électrode 2
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de travail fonctionne en anode ou en cathode.
De la même façon, lorsque le métal qui constitue
l’électrode intervient dans le couple rédox, il n’existe
pas de palier. Dans l’exemple ci-contre, il apparaît un
palier pour la réduction (dû à la diffusion des Ag+)
mais pas pour l’oxydation (Ag constitue le métal de
l’électrode). Par contre, si l’on augmente la surtension
cathodique, le courant augmente de nouveau à cause
de la réduction de l’eau (il n’y a pas de palier dans ce
cas).
I
Ag → Ag+
Ag ← Ag+
V
H2 ← H2O
couple Ag+/Ag sur
électrode d’argent
f) exemples
α) domaine d’électroactivité d’un électrolyte
L’eau est électroactive, c’est-à-dire qu’elle participe à une réaction d’oxydation si
V > 1,23 + 0,5 ≈ 1,7 V ou une réduction si V < η0(H2)
Une espèce mise en solution ne pourra donc être électroactive que si l’on impose un potentiel V à
l’électrode tel que η0(H2) < V < 1,7 V.
β) réaction rédox mettant en jeu deux métaux
Une réaction rédox met en jeu deux couples rédox, il faut
I
donc prendre en compte les courbes intensité-potentiel
Red1 → Ox1
des deux systèmes électrochimiques pour étudier une situation où l’action sur un métal réducteur forme un autre
IA
métal réducteur.
V
IC
Les électrons qui circulent dans un métal circulent en même
Red2 ← Ox2
quantité dans l’autre car ils ne peuvent pas le faire
dans la solution. On a donc nécessairement IA = – IC. Il n’y a qu’une seule valeur du potentiel qui vérifie cette condition.
Il ne faut pas oublier que les courbes dépendent des concentrations des différentes espèces du système; elles se modifient donc au fur et à mesure que le système évolue.
L’utilisation des courbes intensité-potentiel permet d’interpréter des situations pour lesquelles les
prévisions thermodynamiques des diagrammes potentiel-pH sont mises en défaut.
I
I
Red1 → Ox1
IA
IA
V
IC
Red2 ← Ox2
réaction spontanée et rapide
IC
I
Red1 → Ox1
Red2 ← Ox2
Red1 → Ox1
V
réaction spontanée et lente
V
Red2 ← Ox2
réaction non spontanée
γ) cémentation
Déf: En hydrométallurgie, la réduction d’un cation métallique par un métal est appelée cémentation.
Cette méthode est utilisée pour la récupération des métaux précieux dans les solutions de lessivage ou encore pour la purification des solutions avant électrolyse. Le schéma cicontre illustre la cémentation des ions Ag+ en présence de
cuivre.
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I
Cu(S) → Cu2+
IA
0,80V
IC
V
0,34V
Ag(S) ← Ag
sur cuivre
+
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δ) action des acides à anions non oxydant sur les métaux
Les acides qui n’ont pas d’anion oxydant (comme HCl, H2SO4 dilué, etc…) agissent par l’oxydant
H3O+. Par exemple, l’action sur le zinc se traduit par le bilan:
Zn(S) + 2 H3O+ = Zn2+ + H2(G) + 2 H2O
Vu la valeur de E°(Zn2+/Zn), on trouve une valeur de la constante élevée, de l’ordre de 1025 à 298 K.
Cependant, le dégagement de dihydrogène dépend de la préparation du métal. Il est abondant
avec un métal impur, très faible avec du zinc pur et pratiquement nul avec du zinc amalgamé
(alliage zinc-mercure).
Les courbes suivantes permettent d’interpréter ces résultats.
Zn → Zn2+
I
V
H 2 ← H3O+
H 2 ← H3O+
sur Zn amalgamé sur Zn très pur
H2 ← H3O+
sur Zn impur
ε) fonctionnement d’une pile
On étudie par exemple une pile Daniell mettant en jeu les couples
I
Zn2+/Zn(S) (E°1 = –0,76 V) et Cu2+/Cu(S). (E°2 = 0,34 V).
Zn(S) → Zn2+
I
Considérons le cas où
2+
2+
–1
E
[Cu ] = [Zn ] = 1 mol.L .
E0 — I
En circuit ouvert, I = 0 et on aura la f.e.m. à vide
U = E0 = 0,34 –(–0,76) = 1,10V.
Cu(S) ← Cu2+
C’est égale à la f.e.m. standard (car les concentrations sont égales à
1 mol.L-1.
Si la pile débite un courant I, les courbes permettent de déterminer la valeur de la f.e.m E < E0.
V
II-Exemple: étude d’une électrolyse
1) Observation expérimentale
Un électrolyseur est un système constitué par deux électrodes plongeant dans une même solution
conductrice ou dans deux solutions en contact grâce à une paroi poreuse.
I
Un générateur électrique permet d’imposer le sens du passage du
+
–
courant et de fixer, soit la tension entre les électrodes, soit
UAC
l’intensité du courant traversant le système. On impose donc
une évolution non spontanée du système réactionnel.
Le pôle + du générateur est relié à l’électrode par laquelle le courant entre dans la solution. Les électrons partent donc du métal
vers le générateur et par conséquent, il s’y produit une oxyda- ANODE
tion: c’est l’anode.
Le pôle – du générateur est relié à la cathode.
Aux interfaces électrodes-solution se produisent des processus électrochiI
miques.
La neutralité électrique de la solution n'est maintenue que si, à tout instant,
les quantités d'électrons échangées à l'anode et à la cathode sont égales.
On obtient expérimentalement la caractéristique ci-contre :
U0
ε’
Il existe une tension de seuil U0 au-dessous de laquelle l'électrolyse n'a pas
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CATHODE
UAC
lieu.
Lorsque l'électrolyse se déroule, UAC est pratiquement une fonction affine de I, soit
UAC = r.I + ε'
où r et ε' sont deux constantes positives caractérisant le fonctionnement de l'électrolyseur (r est la
résistance interne de l'électrolyseur et ε', sa force contre-électromotrice (f.c.é.m.)).
La puissance consommée par l’électrolyseur se compose de deux termes: l’un correspond à la puissance que nécessite la transformation chimique (ε’I); l’autre correspond à la puissance thermique dissipée pendant la transformation (rI 2).
2) Interprétation thermodynamique
L’électrolyse est une réaction non spontanée car elle ne satisfait pas au critère d’évolution d’un
système chimique A dξ ≥ 0 ou dG ≤ 0 mais à la relation dG ≤ δWELE où δWELE est le travail
électrocinétique qu’échange le milieu réactionnel avec l’extérieur.
Considérons une électrolyse mettant en jeu les processus suivants:
Ÿ à la cathode α Ox1 + n1 e– → β Red1
Ÿ à l’anode
δ Red2 → γ Ox2 + n2 e–
soit le bilan α n2Ox1 + δ n1 Red2 = β n2 Red1 + γ n1 Ox2
On peut écrire dG = ∆rG(T, p, ξ).dξ à T et p fixées. En utilisant les réactions électrochimiques, on
~
~
peut écrire ∆rG = n2 ∆ r G 1 – n1 ∆ r G 2 soit, d’après la relation fondamentale de l’électrochimie
~
∆ r G i = – niF Ei, ∆rG(T, p, ξ) = n2(–n1 F E1) – n1(–n2F E2) = n1 n2 F(E2 – E1).
On obtient donc dG = nF(E2 – E1)dξ (en notant n = n1 n2).
Pendant la durée dt, le travail électrique reçu par l’électrolyseur est δWELE = UAC.Idt = UAC.dq.
La charge dq qui traverse l’électrolyseur pendant dt a provoqué une variation dξ de l’avancement de
réaction telle que dq = n F dξ d’où δWELE = UAC n F dξ.
Le critère d’évolution du système se met donc sous la forme n F (E2 – E1) dξ ≤ UAC n F dξ.
L’électrolyse ne peut donc se dérouler que si UAC ≥ E2 – E1
Conclusion: Pour qu’un phénomène d’électrolyse se produise, il faut que la d.d.p. appliquée entre
les électrodes soit supérieure ou égale à une tension de seuil.
Quand UAC croît à partir de zéro, l’électrolyse peut commencer lorsque la valeur de UAC est suffisante pour que se produise simultanément:
Ÿ l’oxydation la plus facile à l’anode (VA doit être supérieur au potentiel d’équilibre du couple de plus bas potentiel);
Ÿ la réduction la plus facile à la cathode (VC doit être inférieur au potentiel d’équilibre du
couple de plus haut potentiel).
Ces prévisions thermodynamiques peuvent ne pas être observées expérimentalement à cause de
considérations cinétiques: c’est en particulier le cas lorsque plusieurs couples sont en jeu dont
certains peuvent provoquer des dégagement gazeux.
3) Interprétation cinétique
Les courbes intensité-potentiel permettent de visualiser les facteurs cinétiques et thermodynamiques
qui interviennent lors d'une électrolyse. Ces facteurs interviennent dans la relation entre la tension UAC et l'intensité I d'une part, et dans le choix des réactions se produisant aux électrodes
d'autre part.
a) relation entre la tension UAC et l'intensité I
On reprend l'exemple du paragraphe précédent, c'est-à-dire l'électrolyse de bilan :
Ÿ à la cathode α Ox1 + n1 e– → β Red1
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Ÿ à l’anode
δ Red2 → γ Ox2 + n2 e–
Ÿ bilan α n2Ox1 + δ n1 Red2 = β n2 Red1 + γ n1 Ox2
Supposons connues, dans les conditions initiales de l'expérience, les courbes intensité-potentiel des
deux couples Ox1/Red1 et Ox2/Red2 sur les électrodes
I
utilisées.
Red2 → Ox2
(Seules sont représentées les portions des courbes qui corresI
=
I
A
pondent aux réactions électrochimiques qui se produiUAC – R.I
sent effectivement.)
VC
VA
V
E1 E2
On note, sur le schéma, que la tension de seuil d'électrolyse I = –IC
est effectivement supérieure à E2 – E1 en raison des
ηA
ηC
surtensions à vide
Red1 ← Ox1
(UAC)I = 0 = (E2 + ηA0) – (E1 + ηC0)
ηA0 et ηC0 désignant les surtensions nécessaires pour que commence l'électrolyse ; elles sont d'autant
plus importantes que les couples considérés sont lents.
Lors de l'électrolyse, quelle que soit la d.d.p. UAC appliquée entre les électrodes, l'intensité traversant les deux électrodes est la même en valeur absolue, soit en valeur algébrique, avec IA > 0
et IC < 0
IA = –IC.
La relation précédente permet donc la détermination graphique de la d.d.p. à appliquer pour obtenir
un courant d'intensité I = IA.
En réalité, on détermine ainsi non pas la tension d'électrolyse UAC, mais la partie chimique, c'est-àdire thermodynamique (E2 – E1) et cinétique (ηA – ηC) de cette tension. En effet, le volume
de la solution électrolytique située entre les électrodes présente une résistance électrique R et,
en présence du courant d'intensité I, il existe au sein de la solution, une chute ohmique de potentiel R.I qui s'ajoute à la valeur lue sur le diagramme. La résistance interne de l’électrolyseur
est la somme de R et de toutes les résistances de contact (fil-électrode) par exemple ou de
jonction métal-solution) ; en pratique, on cherche à la minimiser.
Finalement, il reste:
U AC ( I ) = ( E2 − E1 ) + ( ηA − ηC ) + R. I
1424
3 1424
3 OHMIQUE
2
THERMO .
CINÉ TIQUE
Remarque: Il s'agit bien ici de courbes intensité-potentiel et non pas de courbes densité
de courant-potentiel. En effet, l'égalité des densités de courant n'équivaut à celle des intensités
que si les aires des deux électrodes sont égales, ce qui n'est pas le cas en général.
b) choix des réactions électrochimiques
Le rôle des surtensions peut être déterminant. Non seulement les surtensions peuvent fausser les
prévisions quantitatives portant sur la tension minimale nécessaire à la réalisation d’une électrolyse mais elles peuvent également fausser les prévisions portant sur la nature des réactions
aux électrodes.
Les réactions anodiques et cathodiques sont sous contrôle cinétique: les réactions observées ne
sont pas les plus faciles thermodynamiquement mais les plus rapides.
III-Application à la préparation éléctrochimique du zinc
1) Cémentation
Après les deux premières étapes vues dans le cours précédent, la préparation hydrométallurgique du
zinc se poursuit après l’élimination des ions Fe3+ de la solution.
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Il reste des ions Cu2+ et d’autres ions (Cd2+, Ni2+, Mn2+,…). La composition moyenne est la suivante:
métal M
[M2+] (en mol.L–1)
E°M2+/M (en V)
Mn
0,09
–1,17
Zn
2,3
–0,76
Cd
0,005
–0,40
Co
1.10
–4
–0,29
Ni
1.10
–4
–0,25
Cu
0,008
+0,34
Les potentiels standard des différentes espèces montrent que Zn est beauI
coup plus réducteur que Cu et que les autres impuretés métalliques
Zn(S) → Zn2+
2+
(sauf Mn ).
IA
0,34
On traite cette solution par de la poudre de zinc. Il se produit la réaction
–0,76
de bilan:
IC
Cu(S) ← Cu2+
Cu2+ + Zn(S) = Cu(S) + Zn2+
sur zinc
De même, les autres cations sont réduits à l’état de métal par le zinc.
Cette opération de cémentation dure plusieurs heures et une filtration sur toile fine permet de récupérer les différents métaux. Le solide obtenu (appelé cément) est traité pour séparer les différents métaux obtenus.
Le filtrat est une solution contenant des ions Zn2+, H3O+ et SO42–. C’est une solution de sulfate de
zinc en milieu sulfurique.
2) Électrolyse du sulfate de zinc
a) prévision thermodynamique des réactions aux électrodes
u A l’anode, il peut se produire deux oxydations:
Ÿ eau en dioxygène selon
3 H2O → 2 H3O+ + 2 e– + ½ O2(G)
Ÿ les ions hydrogénosulfate en ions peroxodisulfate selon
E° = 1,23 V
2 HSO4– + 2 H2O → S2O82– + 2 H3O+ + 2 e– E° = 2,08 V
Du point de vue thermodynamique, l’oxydation la plus facile à réaliser est celle de l’eau en dioxygène
u A la cathode, trois réductions peuvent avoir lieu:
Ÿ les ions hydronium en dihydrogène selon
2 H3O+ + 2 e– → H2(G) + 2 H2O E° = 0,0 V;
Ÿ les ions zinc en métal zinc selon
Zn2+ + 2 e– → Zn(S)
E° = – 0,76 V;
Ÿ les ions hydrogénosulfates en dioxyde de soufre selon
HSO4– + 3 H3O+ + 2 e– → SO2(G) + 5 H2O E° =0,17 V
Du point de vue thermodynamique, la réduction la plus facile à réaliser est celle des ions hydrogénosulfates en dioxyde de soufre.
b) courbes intensité-potentiel
Il est nécessaire d’avoir une électrode présentant une grande surtension de H 2 et SO2 de façon à ce que
la courbe de réduction de Zn 2+ passe à droite des autres courbes de réduction.
C’est ce qui se produit avec une cathode en zinc très pur. L’électrode est faite en un métal inattaquable
comme le platine.
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V
(en V)
On note que la courbe correspondant à la réHSO4— → S2O82—
I
–
duction de HSO4 en SO2 n’y figure pas:
quel que soit le pH de la solution et
H2O → O2(G)
l’électrode utilisée, cette réduction n’est
0,76
V
0,90
jamais observée car elle est ralentie par
2,1
1,23
une très forte surtension.
Zn(S) ← Zn2+
u A l’anode, le système O2/H2O est toujours
H2(G) ← H3O+
lent mais la surtension ne compense pas
l’écart entre les potentiels des couples
O2/H2O et S2O82–/HSO4–.
u A la cathode, le système Zn 2+/Zn est rapide sur une électrode de zinc alors que le système H 3O+/H2
est très lent. La réaction est sous contrôle cinétique.
L’intensité cathodique ne doit pas être trop élevée pour ne pas atteindre le palier de diffusion de Zn 2+
qui risque de conduire à la formation de H 2.
Conclusion: Par électrolyse d’une solution sulfurique de sulfate de zinc (à courant pas trop fort) avec
une anode en zinc, on obtient:
Ÿ du dioxygène à l’anode;
Ÿ du zinc métal à la cathode.
On constate que la réaction anodique produit des H 3O+: la solution devient acide au cours de
l’électrolyse.
c) mise en œuvre industrielle
Après cémentation, la concentration de chacun des ions Cu 2+, Cd2+, Ni2+ et Co2+ dans la solution est
inférieure à 1.10–5 mol.L–1. La solution de Zn2+ est ainsi purifiée des ions susceptibles de se déposer par électrolyse en même temps que le métal zinc.
L’électrolyse est réalisée dans des cuves en ciment revêtues de polychlorure de vinyle vers 30 à 40 °C.
Les anodes sont en plomb argentifère, inattaquable en milieu sulfate; les cathodes sont en alum inium (dès que l’électrolyse a commencé, celles-ci se recouvrent de zinc et se transforment de fait
en cathode de zinc pur.
Les électrodes sont planes et distantes de 20 mm.
Le bilan de l’électrolyse se réduit à
Zn2+ + 3 H2O = Zn(S) + 2 H3O+ + ½ O2(G)
La solution contient initialement environ 2,5 mol.L –1 d’ions Zn2+ et 2 mol.L–1 d’acide sulfurique.
La tension appliquée est comprise entre 3,2 et 3,7 V alors que la densité de courant est de l’ordre de
400 à 700 A.m–2.
Le rendement en courant est voisin de 0,9 et la consommation d’énergie de 3,0 à 3,5 MWh par tonne de
zinc produit.
Le dépôt de métal zinc sur la cathode est décollé (en général toutes les quarante-huit heures) par pelage
(ou stripping). Il s’agit d’une opération purement mécanique.
La production, par cellule, peut atteindre 3 t.j –1 avec, par cellule, jusqu’à 86 cathode de 1,6 m 2 (simple
face).
Le zinc obtenu est très pur (99,995 %) et contient moins de 50 ppm d’impuretés (la principale est le
plomb provenant des anodes). Il n’a pas besoin de subir un raffinage ultérieur et il est conduit
dans des fours de fusion pour y être coulé en lingots.
Cette excellent taux de pureté explique la prépondérance de l’hydrométallurgie devant la pyrométallurgie.
Remarque:
Ÿ Les ions Mn2+ s’oxydent en MnO2 sur l’anode en plomb.
Ÿ Après épuisement partiel (au 2/3) des ions Zn 2+, la solution est recyclée en amont des lixiviations neutres et acides.
Chimie des matériaux
Courbes intensité-potentiel
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