Les médias et le système judiciaire 542
8 Imaginez, dans ce contexte, la pression s’exerçant sur
les douze hommes et femmes appelés à trancher l’affaire.
9 Un collègue me rapportait que lors d’un récent procès
en matière civile, une preuve exclue des débats par le juge
avait été l’objet de divulgations dans les médias quelques
heures plus tard. En fait, des éléments de preuve étaient
exposés au public alors qu’ils ne l’avaient pas été au juge.
10 Enfin, dans le cadre d’une demande de transfert d’un
dossier dans le district de Québec, un avocat m’a indiqué que
la tenue d’un procès en diffamation dans un district périphéri-
que, compte tenu de la publicité entourant cette affaire, risquait
de causer plus de tort à son client que l’acte diffamatoire lui-
même. Or, en matière de diffamation, à quoi sert aux justicia-
bles, dont le procès est médiatisé, de le gagner devant le juge,
s’il le perd devant le tribunal de l’opinion publique ?
1.– LA LIBERTÉ DE PRESSE ET D’EXPRESSION
11 L'article 2b) de la Charte canadienne des droits et
libertés1 et les articles 3 et 44 de la Charte québécoise des
droits et libertés de la personne2 garantissent à chacun les
libertés fondamentales suivantes : liberté de pensée, de
croyance, d'opinion et d'expression, y compris la liberté de
presse et des autres moyens de communication.
12 On constate donc que les deux chartes, dont l’une est
constitutionnalisée, ont consacré le droit du public à l’informa-
tion, en même temps que celui du justiciable à un procès juste
et équitable devant un tribunal indépendant.
13 La liberté de presse est essentielle. Justice doit être
rendue publiquement sous l'œil vigilant des journalistes. Cette
règle, depuis longtemps consacrée par la common law, assure
l'intégrité et l'impartialité du procès qui se déroule au grand
jour, sujet aux critiques de tout citoyen présent à l'audience ou
informé par la presse.
1 Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982 [Annexe B de la Loi de 1982 sur le
Canada (1982), R.-U., c. 11].
2 L.R.Q., c. C-12.