ASSOCIATIONNISME En philosophie et en psychologie, l'associationnisme désigne toute doctrine visant à réduire le fonctionnement général de l'esprit au mécanisme des associations d'idées On appelle association d'idées l'acte par lequel, dans notre esprit, une image ou une idée en appelle spontanément une autre. En vertu de quelles causes, suivant quels rapports les idées et les images s'appellent-elles ainsi dans la conscience? L'Antiquité Aristote a, le premier, abordé la question. Il distingue trois modes de rapports d'associations provoquant le rappel: la ressemblance, qui est un état de conscience rappelant tout état qui, par quelque côté, lui est semblable sous le rapport de la quantité, de la qualité, de la nuance d'émotion (le souvenir est rappelé par un objet ou un acte identiques au passé); la contiguïté, elle, expliquerait le rappel de faits qui, pour une raison quelconque, se sont trouvés une fois ensemble dans la conscience (un moment du passé et ses acteurs resurgissent); le contraste procède comme la ressemblance, mais avec des éléments dont le rapport est inverse: blanc et noir, riche et pauvre. Le XVIIIe siècle Pour les philosophes associationnistes, l'association des idées est l'unique faculté intellectuelle; la perception est une association de sensations, la personnalité une association de souvenirs, et l'idée générale une série de représentations particulières que leur ressemblance a rapprochées. Cette théorie psychologique ramène donc l'activité mentale à une association d'états de conscience élémentaires donnant naissance à la pensée, selon des lois déterminées. Le philosophe anglais David Hume ôte à la liaison entre la cause et l'effet toute nécessité intellectuelle en en faisant une simple association par contiguïté, fortifiée par l'habitude. Dire que le froid est la cause du gel ne serait selon lui rien de plus qu'affirmer une liaison constante entre nos deux idées de gel et de froid, telle que si la première se présente à notre esprit la seconde la suit aussitôt. Cette doctrine a également été illustrée par les travaux de James Mill, Stuart Mill, Bain, Spencer et Wundt. Fortement frappé par cette critique, Kant montrera au contraire que l'affirmation «tout effet a une cause», par son caractère de nécessité et d'universalité, est irréductible à une simple association, qu'elle est une exigence absolue de l'entendement. Le XIXe siècle L'associationnisme refleurira à la fin du XIXe siècle sur le terrain de la psychologie. On ira jusqu'à penser que l'association des idées est l'équivalent, dans le domaine de l'esprit, de l'attraction universelle dans le domaine physique ou de l'interaction cellulaire dans le domaine biologique. Taine écrit en 1871: «De même que le corps vivant est un polypier de cellules mutuellement dépendantes, de même l'esprit agissant est un polypier d'images mutuellement dépendantes et l'unité, dans l'un comme dans l'autre, n'est qu'une harmonie et un effet.» (De l'intelligence.) Le XXe siècle La psychologie contemporaine, tout en reconnaissant l'apport décisif de l'associationnisme, lui reproche sa vision réductrice. Le psychiatre autrichien Sigmund Freud se servira de l'associationnisme régnant en le corrigeant par une hypothèse hardie: les chaînes associatives de notre esprit se composent en partie d'éléments affleurant la conscience, mais sont liées à d'autres éléments refoulés dans l'inconscient, si bien qu'en partant des premiers on pourra remonter par l'analyse jusqu'aux seconds. C'est la célèbre méthode des «associations libres». Mais Freud conçoit ces chaînes comme complexes, souples, se formant et se déformant au gré de la stratégie défensive du sujet, c'est-à-dire d'une manière on ne peut plus opposée à celle de Taine. Depuis le début du XX e siècle, la théorie allemande du gestaltisme (théorie ou psychologie de la forme) affirme que le tout est autre chose que la somme de ses parties, réformant en cela la psychologie traditionnelle; la forme est posée comme une structure organique. L'association, phénomène psychique incontestable, ne saurait rendre compte de toute la vie mentale (du jugement et du raisonnement en particulier). Elle constitue plutôt comme un premier étage élémentaire du comportement, à partir duquel se sont élaborées des structures de plus en plus libérées de lui. Que l'on compare, par exemple, la démarche d'un esprit rêveur qui se laisse aller au fil de sa pensée à celle d'un esprit tendu vers la solution d'un problème difficile: à la simple association se substitue la raison.