l’objet  de  définitions  plus  précises.  Ainsi,  le  sociologue  J.-M. Baldwin  l’envisage  telle  une 
« activité  autotélique,  s’opposant  au  travail2 »,  ajoutant  qu’il  est  une  « action  libre  sentie 
comme  fictive  et  située  en  dehors  de  la  vie  courante,  capable  d’absorber  totalement  le 
joueur3 ». Le jeu s’oppose par conséquent à l’utile, s’accomplit dans un temps et un espace 
expressément  circonscrits,  peut  volontiers  s’accompagner  de  mystère  et  révéler  une 
« étrangeté vis-à-vis du monde habituel4 », tel que le souligne Johan Huizinga. 
Nous laissons néanmoins le champ ouvert à des contributions considérant cette notion 
dans ses dimensions divergentes, voire antagonistes.  
 
Différents aspects, cependant non exhaustifs, permettent d’articuler les caractéristiques 
du jeu : 
- Objet d’étude mineur, le jeu semble pourtant s’insérer au cœur des transformations sociales 
contemporaines et comporter  un  enjeu scientifique  évident.  Quelles sont  les  distorsions qui 
peuvent exister entre sa perception par la population qui l’affectionne et sa délimitation par 
les chercheurs ? Le statut de joueur se trouve-t-il réinventé, entre des pratiques collectives et 
le développement du jeu en solitaire ? Quel est l’encadrement juridique de telles pratiques ? 
Quant au phénomène d’addiction qu’il peut engendrer, ne remet-il pas en question la notion 
de liberté, centrale dans la pratique du jeu ? 
 
-  Le  jeu  est  souvent  perçu  comme  une  activité  gratuite,  voire  futile.  Cette  activité  peut 
pourtant mobiliser des millions de spectateurs, dans les stades, ou devant la télévision. Depuis 
l’Antiquité, dans différentes civilisations, des formes de jeu ont été institutionnalisées, comme 
les Jeux Olympiques chez les Gréco-Romains, les courses de char à Byzance ou les jeux de 
balle  des  peuples  précolombiens.  Assurément,  les  compétitions  sportives  contemporaines 
montrent  une  continuité  dans  les  rivalités  géopolitiques  instrumentalisant  le  jeu  afin  de 
projeter leur puissance. Quels peuvent ainsi être les enjeux politiques et sociaux de pratiques 
qui engagent autant les différentes formes de pouvoir et les populations ?  
 
- Alors que le jeu est ordinairement réduit à une dimension abstractive dessinant un « cercle 
magique » (Johan Huizinga) entre la réalité et la fiction, il paraît nécessaire de s’interroger sur 
                                                 
2 J.  M.  Baldwin,  Mental  Development  in  the  Child  and  the  Race :  methods  and  processes,  New  York, 
Macmillan, 1895. 
3 J. Huizinga, Homo ludens. Essai sur la fonction sociale du jeu, Paris, Éditions Gallimard, 1951 [Amsterdam, 
Pantheon, 1939]. 
4 Ibidem.