les comportements perturbateurs chez la personne âgée en chsld... ou

Les comportemens perturbateurs Numéro 10 2000
Sonia Labrecque est membre
de l’Ordre des psychologues
du Québec. Elle détient une
maîtrise en psychologie de
l’Université de Montréal.
Au début de sa pratique, elle
a complété un stage à la
clinique externe de psychiatrie
de l’Hôpital Douglas. Peu à
peu, son intérêt s’orienta vers
le groupe plus spécifique des
personnes âgées.
Depuis 1993, Sonia intervient
à titre de psychologue dans
différents CHSLD du groupe
Vigi Santé. Au cours de ces
dernières années, elle a donné
des conférences au sein de
Vigi Santé ainsi que pour
des organismes externes
particulièrement sur le thème
de la manifestation des déficits
cognitifs au cours d’une
démence évolutive. Elle
s’intéresse principalement
aux sentiments de la personne
atteinte de démence et à ce
que vivent les proches qui
accompagnent leur parent
hébergé.
À propos
de l’auteure...
tions viennent aussi à son esprit:
comment les voisins de chambre
du résident peuvent-ils passer
une joure agable lorsque les
cris perdurent ? Comment peu-
vent-ils dormir ?...
Il s’agit ici d’une situation fic-
tive, mais plusieurs CHSLD font
l’expérience dune réali qui
s’y rapproche. En fait, en milieu
dhébergement se retrouvent
souvent plusieurs résidents qui
manifestent ce qui est désig
comme des «comportements per-
turbateurs».
DÉFINITION DES COMPORTE-
MENTS PERTURBATEURS
Il est question de comportements
perturbateurs lorsque la personne
présente des actions, des gestes ou
des réactions qui sont dérangeants
pour l’entourage ou pour le rési-
dent lui-même.
Ce peut être des cris répétitifs,
des appels fquents à len-
tourage, à certaines périodes de
la journée ou de la nuit. C’est
LES COMPORTEMENTS PERTURBATEURS
CHEZ LA PERSONNE
ÂGÉE EN CHSLD...
OU «L’AUTRE LANGAGE»
Pour le visiteur qui entre au cen-
tre d’bergement et de soins
longue due, plusieurs impres-
sions et perceptions sur le climat
des lieux peuvent lui venir à
l’esprit... Arpentant un corridor
se retrouvent les chambres
qu’occupe chaque résident, il
sera le témoin de leur vie au
quotidien. passant l’une des
portes, il entend une musique
rythmée. Plus loin, ps d’un
salon, deux sidentes font la
conversation en jetant un coup
d’oeil par la fenêtre, dans une
ambiance agable et sereine...
Tout à coup, le visiteur sursaute
en entendant un cri fort, qui se
prolonge. Le cri, lappel cesse,
puis reprend encore et encore.
Les cris occupent tout l’espace,
il nest pas possible de les
ignorer.
Le visiteur s’interroge: mais de
quoi peut bien souffrir ce rési-
dent pour se comporter ainsi ?
A-t-il mal ? Est-il dans une posi-
tion fâcheuse ? Appelle-t-il à
l’aide ? Mais, d’autres considéra-
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également lerrance (cest-à-dire des
placements, dans un espace, pouvant
devenir inapproprs par leur nature et
leur intensité), les réactions d’agressivité,
la fouille dans la chambre d’autrui, l’agi-
tation physique «la bougeotte », la sis-
tance aux interventions de soins, parler
sur un ton trop fort, etc... Il ne s’agit ici
que d’une liste sommaire, car nous pou-
vons dénombrer près d’une trentaine de
différents comportements perturbateurs
dans les milieux de soins et services aux
personnes âgées.
De par leur nature ces comportements
peuvent déranger le résident lui-même:
par exemple, l’errance, sur de longues
périodes, peut entraîner une condition
dépuisement. Dautre part, certains
comportements perturberont les person-
nes de lentourage: tel que le comporte-
ment de fouille d’un résident dans les
effets personnels et les tiroirs de la
chambre d’autrui. Le résident habitant
cette chambre voit son intimité pertur-
bée; il peut ressentir de limpuissance,
de la colère ou de l’anxiété face à cette
situation.
Dans les milieux de soins de longue
durée, ces comportements sont parfois
nommés en dautres termes: comporte-
ment problématique ou déviant, trouble
du comportement, agitation physique ou
verbale, comportement dérangeant, etc.
Quelle que soit l’appellation utilisée, la
nature de ces comportements réfère à la
même caracristique essentielle: ils ne
nous laissent pas indifférents et font
réagir.
Face à ces manifestations du comporte-
ment qui «dérangent», il y a des solu-
tions à envisager. Il faut procéder par
étapes... d’abord, comprendre...
LES CAUSES DES COMPORTEMENTS
PERTURBATEURS
Les comportements qui ont é décrits
pcédemment se manifestent dans des
conditions particulières:
les maladies évolutives que sont les
démences (entre autres, démence
alzheimer; démence vasculaire, ...)
anent chez les personnes âgées qui
en sont atteintes une détérioration des
fonctions mentales soit: une perte de
la mémoire des événements récents
ou lointains, une difficulté à sorien-
ter dans le lieu et le temps (date,
saison, etc.), une difficul à commu-
niquer, des troubles dans lexécution
d’une action qui a plusieurs étapes
(ex.: se vêtir) et une difficulté à
reconnaître des objets malgré de
bonnes capacités sensorielles.
ces incapacités des fonctions men-
tales sont dues à une détérioration de
la structure des cellules du cerveau et
de leur fonctionnement, en lien avec
la démence. Lensemble de ces
déficits amène la personne à présenter
des comportements dysfonctionnels,
cest-dire des difficultés dans le
fonctionnement personnel, social et
les diverses occupations, même dans
le cas des gestes simples du quoti-
dien. Par exemple, un résident qui est
désorienté dans le temps peut deman-
der plusieurs fois le moment du repas,
alors qu’il vient davoir lieu.
Ces comportements dysfonctionnels
désorganisent la personne âgée, qui
ressent de lanxié lorsqu’elle fait lex-
périence d’échecs répétés pour effectuer
ses activités de la journée. Cela savère
un aspect pouvant déclencher un com-
portement perturbateur.
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LES COMPORTEMENTS PERTURBATEURS
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LES SOLUTIONS À ENVISAGER...
Il faut que le résident atteint de démence
et les résidents de l’entourage bénéficient
de conditions de vie les plus favorables
pour leur mieux-être. La prévention et
l’intervention touchant les comportements
perturbateurs s’avèrent des aspects pri-
mordiaux pour contribuer à perpétuer une
qualité de vie dans nos milieux d’berge-
ment, mais que peut-on faire?
Comprendre: d’abord, il
faut déterminer la nature
du comportement qui
perturbe et en faire une
analyse (sa fréquence,
ses moments d’appari-
tion, sa durée, etc.). Il
faut vérifier si la pré-
sence ou l’absence de
certains facteurs modifie
le niveau d’apparition du
comportement. Mais, il
faut aussi bien connaître
qui est le résident (ses habitudes passées, ses
goûts, ses peurs, sa personnalité). À cet
effet, la famille du résident représente une
source précieuse d’informations. Avec ces
données, le psychologue peut mettre en
place un plan d’intervention pour modifier
le comportement, en collaboration avec le
personnel de soins et l’équipe interdisci-
plinaire. L’objectif est identifié au départ et
doit être réaliste. Nous viserons parfois à
atténuer la fréquence du comportement et à
offrir un contexte où le résident vivra moins
d’anxiété, plutôt que de vouloir faire totale-
ment disparaître le comportement.
Favoriser le confort: de façon générale, le
confort est un élément important dans la
prévention et l’intervention des comporte-
ments perturbateurs. Nous parlons de con-
fort physique et psychologique. Il faut veil-
ler à soulager les douleurs (ex.: l’arthrite);
3
Il faut s’attarder à comprendre le résident.
Ces comportements qui dérangent repré-
sentent un mode d’expression, une mani-
festation de ce que la personne ne peut
plus exprimer par les modes habituels en
raison de ses ficits. Comme observateur
ou visiteur d’un parent en centre d’hé-
bergement, nous interprétons parfois ces
comportements comme le résultat d’une
«mauvaise volon», alors qu’il s’agit
plutôt d’un langage à comprendre... d’un
autre langage.
Aussi, différents éléments vont influencer
l’apparition et l’intensité des comporte-
ments perturbateurs. Ils auront pour effet
d’augmenter, de maintenir ou de diminuer
les manifestations du comportement. Voici
les principaux à considérer:
LES COMPORTEMENTS PERTURBATEURS
MANIFESTATION DUN COMPORTEMENT PERTURBATEUR
déficits
cognitifs
(démence)
ex.: apraxie
ou difficulté
à effectuer les
gestes d’une
tâche, tel que
se vêtir.
comportement
dysfonctionnel
ex.: incapacité
à mettre ses
vêtements
dans l’ordre,
à boutonner.
fait vivre
de l’anx,
de la tristesse,
de la
frustration...
difficulté
d’expression
comportement
perturbateur
ex.: réactions
agressives lors
des soins.
L’évolution de la démence (déficits
cognitifs...)
La condition de santé (constipation,
fatigue, insomnie, diabète, etc.)
L’environnement (atmosphère, bruit,
luminosité, etc.)
Les activités (excès d’interventions en
peu de temps, manque d’activité...)
Les modes de communication avec la
personne (ton de voix et attitude de l’en-
tourage, rythme adéquat)
La personnalité du résident (au cours de
sa vie, qui a-t-il été?)
FACTEURS À CONSIDÉRER DANS LE CAS
DE COMPORTEMENTS PERTURBATEURS
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diminuer les inconforts (ex.: constipation);
favoriser le bien-être au fauteuil, au lit;
répondre au besoin de bouger, de se dis-
traire, etc. L’équipe interdisciplinaire et le
personnel de soins constituent des inter-
venants clés pour ces aspects.
Offrir un environnement et une approche
adaptés: la personne atteinte de démence
nécessite un milieu et des interventions qui
vont compenser pour ses limites dues aux
déficits cognitifs. Entre autre, comme élé-
ment de solution, il existe l’unité prothé-
tique: le terme provient de «prothèse»,
c’est-à-dire qui vient compenser à une inca-
pacité. Dans les stades plus avancés de la
mence, pour certains résidents, une
admission en unité prothétique peut être
requise et aidante. En effet, le milieu adap-
(ex.: repères pour orienter les résidents)
et sécuritaire (ex.: porte avec code, objets
sécuritaires) de ces unités, ainsi que l’ap-
proche du personnel formé à intervenir
auprès de cette clientèle peut permettre une
réduction notable des comportements per-
turbateurs, dans certains cas.
Le contrôle du niveau de bruit et d’activités
favorise une ambiance propice à réduire
l’anxiété à la source de certains troubles du
comportement. Il y demeure toutefois «une
vie» et des activités adaptées au besoin de
la clientèle.
Entrevoir la médication comme solution:
oui, dans le cas ou les autres interventions
ne se sont pas avérées suffisamment effi-
caces, la médication est une option à con-
sidérer. Cependant, des études précisent que
la médication (neuroleptique, benzodia-
zépine) sera efficace à résoudre les troubles
du comportement que dans 30% des cas. À
Vigi, le médecin et le pharmacien travaillent
avec l’équipe interdisciplinaire pour offrir
une médication adéquate, au besoin.
Pour ce qui est des troubles du comporte-
ment, chaque cas est toutefois unique. Le
travail d’équipe des différentes disci-
plines et les informations provenant des
proches au sujet du résident, permettent
une évaluation et des choix d’interven-
tion qui considèrent le résident comme
une personne unique, mais aussi globale
(aspect physique, social, psychologique).
Avant tout plan d’intervention
concernant un trouble du
comportement chez un rési-
dent, il faut voir à la base
qu’une approche douce,
une attitude chaleureuse
et conciliante ainsi que
la présence de la famille
demeurent un véritable
baume pour la personne
atteinte de démence.
La Collection Entre Vous et Moi est réalisée par un groupe de Comités de résidents (Comité des usagers au sens
de la Loi) intervenant dans des Centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD).
Information : Marc Turgeon, Conseiller en milieu de vie
Vigi Santé Ltée
197, Thornhill, Dollard-des-Ormeaux (Québec) H9B 3H8
téléphone : (514) 684-0930 télécopieur : (514) 684-0179
Ce fascicule est publié par le Comité des résidents du CHSLD Ste-Germaine Cousin (établissement privé con-
ventionné, une division de Vigi Santé). Des traductions anglaise et italienne sont également disponibles.
© Tous droits réservés
Dépôt légal - Bibliothèque nationale du Québec, 2000
Dépôt légal - Bibliothèque nationale du Canada, 2000
ISSN 1481-2924
LES COMPORTEMENTS PERTURBATEURS
Le générique masculin est utilisé dans ce fascicule sans aucune discrimination et uniquement dans le but d’alléger le texte.
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