Chapitre 3 : Résidus quadratiques
Dans ce chapitre on va essayer d’extraire des racines carrés dans Z=nZ. Dans le corps des nombres réels tous les
nombres positifs sont des carrés et les nombres négatifs ne le sont pas, dans le corps des nombres complexes
tous les nombres sont des carrés, mais dans Z=nZ, comme on va le voir ici, c’est déjà assez compliqué de
déterminer si un élément est le carré d’un autre. On va donner une méthode permettant de le savoir, puis le
cas échéant on va présenter un moyen de déterminer le nombre de racines carrés distinctes d’un élément de
Z=nZ. On verra ensuite comment caluler ces racines carrées dans des cas particuliers.
I nition - Exemples
Dé…nition I.1 Soit x2Z=nZ,on dit que xest un carré (ou un résidu quadratique) si il existe y2Z=nZ
tel que x=y2, dans ce cas on dit que yest une racine carrée de x.
Exemple I.1 Dans Z=10Zles carrés sont 0;1;4;5;6;9.
Dans Z=11Zles carrés sont 0;1;3;4;5;9.
Dans Z=12Zles carrés sont 0;1;4;9.
Dans Z=13Zles carrés sont 0;1;3;4;9;10;12.
On voit que même pour les nombres premiers la situation n’est pas claire, néanmoins c’est le cas le plus
simple et donc on va l’étudier en premier.
II sidus quadratiques dans Z=pZ
Attention : dans cette partie pdésignera un nombre premier impair, donc p6= 2. Donnons tout d’abord le
nombre de carrés dans Z=pZ.
Proposition II.1 Le nombre de carrés dans Z=pZest p+1
2
Démonstration. Comme 0est carré, il su¢ t de montrer que le nombre de carrés non nuls qu’on va noter N
vaut p1
2. Soit a6= 0 2Z=pZ, comme pest impair on a a6=aet a2= (a)2donc Np1
2. D’autre part
l’équation x2=badmet au plus deux solutions donc Np1
2ce qui permet de conclure N=p1
2.
Nous allons maintenant voir une caractérisation des carrés de (Z=pZ).
Proposition II.2 Soit x2(Z=pZ), on a xp1
2=1et
xest un carré () xp1
2= 1
Démonstration. On a xp1
22
=xp1= 1, donc d’après le corollaire III.1 du chapitre 1 on a xp1
2=1.
Si xest un carré, soit ytel que y2=xon a xp1
2=yp1= 1.
Réciproquement, supposons que xp1
2= 1. Comme (Z=pZ)est cyclique on peut en choisir un générateur
g. Donc gl= 1 ,lest multiple de p1, et il existe un entier ktel que gk=xdonc xp1
2=gkp1
2= 1 donc
kp1
2est multiple de p1donc kest pair donc k= 2met x=g2m= (gm)2donc xest un carré.
Corollaire II.1 1est un carré dans Z=pZsi et seulement si p1 [4].
Démonstration. D’après la proposition précédente on a 1est un carré dans Z=pZsi et seulement (1) p1
2=
1et cela est vrai si et seulement si p1
2est pair ce qui équivaut à p1 [4].
Maintenant que l’on sait déterminer les carrés de Z=pZ, le problême naturel est de chercher leurs (deux)
racines carrées. C’est un problême très di¢ cile en général, mais en se restreignant à un cas particulier on peut
y parvenir :
1
Proposition II.3 Si pest congru à 3modulo 4et si aest un carré de Z=pZalors les solutions de x2=a
sont ap+1
4et ap+1
4.
Démonstration. Soit aun carré de Z=pZ, on a
ap+1
42
=ap+1
2=aap1
2=a
D’autre part, on sait que x2=aadmet au plus deux solutions dans le corps Z=pZ(proposition III.1 du
chapitre 1), donc on les a toutes.
Dé…nition II.1 Si aest un carré de Z=pZalors ap+1
4est elle même un carré, cette racine s’appelle la
racine principale de a; et on note cette racine : pa.
Exemple II.1 On pose p= 19. Dans Z=19Z, on a p16 = 165= (3)5= (9)2(3) = 15 = 4 et
p6 = 65= (2)26 = 5.
On a 25= 32 = 6mais (6)2=2, cela montre que 2nest pas un carré sans Z=19Z.
Remarque II.1 Si pest congru à 1modulo 4alors on a p1=2esavec simpair et e2, si aest un
carré de Z=pZ, il y a un algorithme pour trouver les racines carrées de a: Il s’appelle lalgorithme de Tonelli
et Shanks et nest pas simple à mettre en oeuvre, anmoins on peut facilement présenter la première étape
qui su¢ t parfois !
On calcule as, et si on trouve 1alors les racines carrées de asont as+1
2en e¤et as+1
22
=as+1 =
asa=a.
Exemple II.2 Si p= 29; s = 7. Cherchons les racines carrés de 23 dans Z=29Z, on 237mod 29 = 1 donc ce
sont 234=9.
III Symbole de Legendre
pest toujours un nombre premier impair.
Dé…nition III.1 Soit a2ZOn dé…nit le symbole de Legendre noté a
ppar
a
p=8
<
:
0si aest un multiple de p
1si aest un carré modulo p
1si anest pas un carré modulo p
A priori, il s’agit d’une notation permettant de re-écrire les résultats du paragraphe précédent. Mais comme
on va le voir, ce symbole de Legendre possède des propriétés qui permettent de le calculer très facilement et
donc de savoir aisément si un nombre est un carré modulo pou pas.
Tout d’abord reformulons avec ce symbole ce que l’on sait :
Proposition III.1 Soit x2(Z=pZ), on a x
p=xp1
2
Exemple III.1 On prend p= 101, si on calcule 5650 dans Z=101Zon trouve 1et donc 56 est un carré dans
Z=101Z.
On va en déduire le résultat suivant:
2
Corollaire III.1 Soit aet bdeux entiers non divisibles par p, on a
a
p=b
psi ab[p]
a
pb
p=ab
p
Démonstration. Le premier point est immédiat. Le suivant découle de la formule précédente car a
pb
p=
ap1
2bp1
2= (ab)p1
2.
Exemple III.2 56
101=7
1012
1013
On va maintenant énoncer un théorème célèbre qui va nous permettre de calculer facilement tout symbole
de Legendre :
Théorème III.1 Réciprocité quadratique. Soient pet qdeux nombres premiers impairs, on a
p
qq
p= (1)p1
2
q1
2
Démonstration. Admise.
Remarque III.1 On peut énoncer le théorème de réciprocité quadratique de la façon suivante :
Soient pet qdeux nombres premiers impairs, on a
p
q=(q
psi p3 [4] et q3 [4]
q
psinon
Exemple III.3 7
101=101
7=3
7=7
3=1
3=1
et donc 56
101=2
1013
Pour tout nombre premier p,5est un carré dans Z=pZsi et seulement si pest un carré dans Z=5Zc’est
à dire si et seulement si p 1 [5].
Pour pouvoir calculer tout symbole de Legendre il nous manque encore le résultat suivant :
Théorème III.2 Lois complémentaires. Pour ppremier impair on a
1
p=1si p1 [4]
1si p3 [4] et 2
p=1si p 1 [8]
1sinon
Démonstration. le premier point découle de la proposition précédente, le deuxième point est admis.
Exemple III.4 101 5 [8] donc 2
101=1donc 56
101=2
1013= 1 et donc 56 est un carré dans Z=101Z.
3
Exemple III.5 On va de nouveau utiliser les règles énoncées ci-dessus pour calculer 541
2011:
541
2011=541
2011: réciprocité, 541 1 [4]
=388
541car 2011 388 [541]
=2
541297
541car 388 = 2297
=97
541
=541
97 : réciprocité, 541 1 [4]
=56
97car 541 56 [97]
=7
972
973
car 56 = 237
=97
72
973
: réciprocité, 97 1 [4]
=1
72
973
car 97  1 [7]
= (1) 13: lois complémentaires
=1
IV Carrés modulo un entier quelconque
On va étendre la dé…nition du symbole de Legendre aux "dénominateurs" non nécéssairement premiers, mais
impairs.
Dé…nition IV.1 Soit aet mdeux entiers avec m > 1impair et soit m=Qk
i=1 pi
ila décomposition de men
facteurs premiers. On dé…nit le symbole de Jacobi, noté a
mpar
a
m=8
>
<
>
:
k
Y
i=1 a
piisi a^m= 1
0si a^m6= 1
Bien sûr les di¤érentes propriétés du symbole de Legendre s’étendent au symbole de Jacobi, c’est à dire
que l’on a :
Proposition IV.1 Soient m; n; a; b quatre entiers avec m; n > 1impairs. On a
a2
m= 1 si a^m= 1
a
m=b
msi ab[m]
a
mb
m=ab
m
a
ma
n=a
mn
4
Démonstration. Si a^m= 1 comme pour tout nombre premier pon a a2
p= 1;la formule de dé…nition
montre que a2
m= 1:
Si ab[m]alors on a a^m=b^m.
Premier cas : a^m6= 1 alors a
m=b
m= 0.
Deuxième cas : a^m= 1. Comme ab[m], pour tout facteur premier pde mon a ab[p]donc
a
p=b
pet donc les produits sont égaux.
Le troisième point est une conséquence immédiate de la formule a
pb
p=ab
p.
Montrons le quatrième point. Si a^mn 6= 1 l’égalité devient 0=0. Sinon on a a^m6= 1 et a^n6= 1 il
su¢ t alors de voir que la décomposition en facteurs premiers de mn est égale au produit des décompositions
de met de net la formule en découle.
Théorème IV.1 Réciprocité quadratique (bis). Soient met ndeux nombres impairs et premiers entre eux,
on a m
nn
m= (1)m1
2
m1
2
Démonstration. Admise. Peut se déduire du cas précédent.
Pour avoir l’analogie complête avec le cas des nombres premiers, il nous manque encore le résultat suivant
Théorème IV.2 Lois complémentaires (bis). Pour mimpair on a
1
m=1si m1 [4]
1si m3 [4] et 2
m=1si m 1 [8]
1sinon
Remarque IV.1 On a étendu les propriétés calculatoires du symbole de Legendre, ce qui va nous permettre
de calculer le symbole de Jacobi mais celui-ci ne porte pas autant d’information que le symbole de Legendre
a
m= 1 ;aest un carré dans Z=mZ
par exemple 2
9=2
32= (1)2= 1 mais 2nest pas un carré dans Z=9Z.
V Nombre de racines carrées modulo n.
Le but de ce paragraphe est de déterminer le nombre de solutions de x2=adans Z=nZ:Dans Z=pZ, où pest
premier impair, si un nombre non nul est un carré alors il a deux racines carrées, si ce n’est pas un carré il
n’en a pas, donc dans les deux cas son nombre de racines carrées est 1 + a
p. On va voir qu’en fait ce n’est
pas plus compliqué dans le cas où n=pr.
Théorème V.1 Soit pun nombre premier impair, r2Net a2Ztel que p-a. Le nombre de solutions de
l’équation x2=adans Z=prZest 1 + a
p.
Démonstration. Il y a deux choses à montrer : tout d’abord qu’un carré de (Z=prZ)admet exactement
deux racines carrées et ensuite qu’un nombre est un carré dans (Z=prZ)si et seulement si sa réduction modulo
pest un carré dans Z=pZ.
Montrons le premier point. Soit aun carré de (Z=prZ), soient xet ydeux racines carrées de a, on a donc
x2=a=y2donc x2y2= 0 dans Z=prZet donc il existe un entier ktel que on ait dans Z: (xy) (x+y) =
kpr. Si xyet x+ysont tous deux multiples de palors leur somme également et donc 2xest multiple de
pet donc xest multiple de p(car pimpair) ce qui est impossible car a=x2ne l’est pas ! Donc on a soit
xymultiple de pret alors x=ydans Z=prZ, soit x+ymultiple de pret alors x=ydans Z=prZ. Donc
an’admet que deux racines carrées qui sont opposées l’une de l’autre, il y en a bien deux car seul 0est son
propre opposé dans Z=prZ, en e¤et si x=xalors 2x= 0 et donc x= 0 car 2est inversible.
Montrons maintenant le second point. Il y a une implication simple, si a=x2dans Z=prZalors il existe
un entier ktel que a=x2+kpret donc dans Z=pZcela donne a=x2:-)
5
1 / 8 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !