de Lisette et commence par enchaîner des gestes de pantin : les cercles du
plateau se mettent à tourner et permettent au spectateur de voir la maison de Mr
Orgon et ses hôtes sous différentes facettes. Un fauteuil, Orgon est occupé à lire
son journal, un miroir, Lisette est à sa toilette, des coupes de champagne et une
bouteille, on trinque pour fêter l’ heureux événement à venir, une tablette, Mr
Orgon (habillé d’un pantalon à damier) joue aux échecs avec son fils et fait
avancer les « pions » d’un échiquier de plus en plus cruel…
Arlequin (électrique Julien BARRET) enfile le vêtement du maitre avec
une aisance désopilante, s’accomode très vite de la pseudo Silvia, engage sa
partenaire, décidément très farce, à cracher par terre pour sceller leur union de
fortune. Il apparaît sous les traits d’une espèce de golden boy électrisé par le
téléphone portable qui lui permet de s’entretenir avec un « client » en Chine au
moment où il arrive sur scène après avoir traversé la salle. Puis il aligne une
série de selfies aux côtés de « sa future femme » ou de son « beau-père »,
heureux d’occuper l’espace qui lui manquait quand il était domestique. Il ne
cessera tout au long de la pièce de virevolter, de gambader, de sauter en l’air,
véritable cabri excité par les lumières de la rampe et de la promotion.
Si le travestissement excite les convoitises des domestiques, il perturbe les
maitres. Sous les regards réjouis d’Orgon et Mario qui risquent souvent un œil
indiscret sur la scène, les spectateurs s’amusent comme « à la comédie » au
détriment des victimes paralysées sous l’aiguille comme des papillons en plein
vol. Le jeu devient cuisant, insupportable pour les protagonistes. Silvia
s’inquiète, se lamente en aparté : « j’étouffe », Dorante ne supporte plus le
chapeau de « Bourguignon », s’énerve, gifle son ex-domestique qui ne se laisse
déjà plus faire et qui réplique du tac au tac. Les coups partent facilement dans
cette mise en scène.
A bout de nerf, face à une Silvia pamée et rampant jusqu’au seuil de la
scène, il n’a plus d’autre recours que de se démasquer. Aussitôt, la fausse
Lisette, très glamour, poupée Barbie toute de rose vêtue, se redresse, remet ses
hauts-talons et imagine une ultime épreuve : garder l’habit affriolant de la
soubrette, continuer de faire tourner la tête à Dorante, le forcer à demander le
mariage et à accepter, de fait, la mésalliance. Totalement sous le charme de sa
partenaire et affolé de jalousie contre Mario qui en rajoute à la demande de
Silvia, Dorante apparaît comme un maître sans pouvoir, humilié, torturé, capable
de tout renier pour pouvoir enfin aimer au grand jour l’adorable soubrette.
Et Silvia jubile ! Elle reprend le jeu en main avec un soulagement
immense : « j’avais bien besoin que ce fût là Dorante ! ». Alors le tourniquet et